Tribunal de première instance, 17 janvier 1991, M. c/ Entreprise Lovetrans et SAM L.
Abstract🔗
Obligations
Clause pénale contenue dans une facture - Facture unique produite - Preuve de son acceptation (Non) ni expresse, ni implicite
Résumé🔗
Les agios et dommages-intérêts que prescrit une facture à défaut de non règlement, passé le délai des 30 jours de sa date d'émission, ne sauraient fonder une demande en paiement de ceux-ci, étant donné que s'agissant de mentions unilatéralement apposées par le demandeur, lesquelles s'analysent comme des clauses pénales, celles-ci ne peuvent être opposables au défendeur, dès lors que la preuve n'est point rapportée qu'il les ait acceptées soit expressément, soit implicitement, en l'absence de la justification de relations commerciales suffisamment suivies entre les parties, caractérisées par l'existence d'une seule facture.
Motifs🔗
Le Tribunal,
Attendu que suivant exploit du 22 novembre 1989, J.-C. M., exerçant le commerce en nom personnel à Monaco, sous l'enseigne « MI », autorisé par Ordonnance du 9 Novembre 1989 à faire pratiquer une saisie-arrêt entre les mains de la société anonyme monégasque J. L. à concurrence de la somme de 40 000 F, montant auquel la créance de J.-C. M. a été provisoirement évaluée, a assigné d'une part la société J. L., tiers-saisie, aux fins de déclaration conformément à la loi et d'autre part la société à responsabilité de droit français dénommée « Lovetrans » aux fins de s'entendre celle-ci déclarer régulière la saisie-arrêt pratiquée et condamner au paiement du montant des causes de ladite saisie-arrêt ;
Attendu que la société J. L. a déclaré, par une lettre datée du 10 janvier 1990, valant conclusions, détenir pour le compte de la société Lovetrans la somme de 40 000 F ;
Attendu que J.-C. M. expose, au soutien de sa demande, que dans le courant du mois de juillet 1988, l'entreprise Lovetrans a fait appel à ses services pour l'exécution de certains travaux de sous-traitance pour lesquels il a émis à l'ordre de cette entreprise, le 31 juillet 1988, une facture n. 1659 d'un montant de 24 246,26 F, laquelle est demeurée impayée à ce jour, malgré l'envoi de deux lettres recommandées suivies d'un exploit de sommation en date du 17 juin 1989 ;
Il fait valoir qu'outre le principal de 24 246,26 F correspondant au montant de ses prestations, la société Lovetrans s'avère redevable envers lui, en application des conditions particulières figurant dans ses factures, d'agios au taux de 2 % par mois, la facture n'ayant pas été réglée dans les 30 jours de sa date d'émission, ainsi que d'une indemnité égale à 15 % de la somme impayée, qu'ainsi la société Lovetrans doit être condamnée au paiement de la somme totale de 39 238,16 F ;
La société Lovetrans entend qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle ne conteste pas devoir la somme en principal de 24 246,26 F réclamée par J.-C. M. mais soutient qu'elle ne saurait être tenue au paiement des agios et des dommages-intérêts prévus aux conditions particulières de l'entreprise « MI » dès lors qu'elle n'a jamais signé aucun document contractuel permettant de lui imposer l'application de telles clauses pénales ;
Sur ce,
Attendu que la société Lovetrans ayant reconnu, aux termes de ses écritures judiciaires devoir à J.-C. M., la somme de 24 246,26 F, montant en principal de la facture émise par ce dernier le 31 juillet 1988, seule demeure désormais litigieuse l'obligation de ladite société au paiement des agios et des dommages-intérêts qui lui sont réclamés, à titre conventionnel ;
Attendu à ce sujet, qu'il est constant comme résultant de la facture produite, que parmi les conditions particulières figurant au verso de ce document, il était notamment précisé, d'une part au paragraphe E : « ...Passé le délai de 30 jours de la date d'émission de la facture, nous sommes dans l'obligation de compter des agios au taux de 2 % par mois et par fractions de mois », d'autre part, au paragraphe F : « ...Le défaut de paiement de nos prestations à l'échéance fixée, entraînera, quel que soit le mode de règlement prévu, l'application, à titre de dommages et intérêts, d'une indemnité égale à 15 % de la somme impayée... » ;
Que, s'agissant de mentions unilatéralement apposées par le demandeur sur ses factures, celles-ci qui s'analysent comme des clauses pénales, ne pouvaient être opposables à la société défenderesse dès lors que la preuve n'est pas rapportée, en l'espèce, qu'elle les ait acceptées expressément ;
Qu'elle ne saurait non plus être considérée comme les ayants acceptées implicitement, en l'absence de la justification de relations commerciales suffisamment suivies, ayant pu exister entre les parties, dès lors que les clauses dont s'agit ne résultent que d'une seule facture ;
Qu'il s'ensuit que la créance de J.-C. M. n'apparaît justifiée, en la cause, qu'à concurrence de la somme principale de 24 246,26 F, montant des prestations qu'il a effectuées pour le compte de la société Lovetrans ;
Qu'il convient en conséquence de condamner ladite société au paiement de cette somme ;
Attendu par ailleurs, que les prescriptions des articles 487 et suivants du Code de procédure civile apparaissant avoir été respectées, il échet de déclarer régulière en la forme et de valider à concurrence de la somme de 24 246,26 F, outre les frais comprenant les dépens de la présente instance, la saisie-arrêt pratiquée entre les mains de la société J. L. suivant exploit du 22 novembre 1989, étant observé que ladite société a déclaré détenir le 10 janvier 1989, pour le compte de la Société Lovetrans, la somme de 40 000 F et qu'elle sera libérée valablement par le versement qu'elle opérera de la somme précitée de 24 246,26 F outre les frais entre les mains de J.-C. M., mainlevée étant donnée pour le surplus de la saisie-arrêt pratiquée ;
Attendu qu'enfin les dépens suivront la succombance ;
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal,
Statuant contradictoirement ;
Condamne la société à responsabilité limitée de droit français dénommée « Lovetrans » à payer à J.-C. M., exerçant le commerce sous l'enseigne « MI », la somme de vingt-quatre mille deux cent quarante-six francs vingt-six centimes (24 246,26 F), montant des causes sus-énoncées ;
Déboute J.-C. M. du surplus de ses demandes ;
Déclare régulière et valide pour ladite somme, outre les frais, la saisie-arrêt pratiquée à la requête de J.-C. M., suivant exploit du 22 novembre 1989 et dit que la société anonyme de droit monégasque dénommée « J. L. » se libérera valablement par le versement qu'elle opérera à concurrence de la somme de vingt-quatre mille deux cent quarante-six francs vingt-six centimes (24 246,26 F), entre les mains de J.-C. M.
Ordonne pour le surplus mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée ;
Composition🔗
MM. Landwerlin prés. ; Serdet prem. subst. proc. Gén. - Mes Sbarrato et Lorenzi av. déf. ; Pasquier av. Stag.