Tribunal de première instance, 26 novembre 1987, S.C.I. Bimini, L.-D. c/ F.

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Abstract🔗

Locaux d'habitation

Dualité de propriétaires - Indivisibilité du bail - Irrégularité d'un congé - Effet quant au 2e congé

Résumé🔗

Dès lors que des locaux distincts appartenant à deux propriétaires différents ont été donnés en location indivisément à un même locataire, en raison de `indivisibilité du bail, l'irrégularité d'un des congés signifié par l'un des propriétaires rend inopérant l'autre congé - fût-il régulier - signifié par le second propriétaire.


Motifs🔗

LE TRIBUNAL,

Attendu que par jugement du 19 mars 1987, le Tribunal saisi par deux assignations en validité de congé et expulsion à l'encontre de C. F., l'une à la requête de la Société Bimini, propriétaire de deux pièces portant les n° 220 et 221 dépendant du ., l'autre à la requête de E. L.-D., propriétaire des pièces portant les n° 218 et 219, ces quatre pièces étant occupées par C. F. bénéficiaire des droits locatifs que la Société Prochim tenait de M. L.-D., s'est déclaré compétent, a ordonné d'office la jonction de ces deux instances et a renvoyé la cause et les parties à une audience ultérieure pour que les demandes soient jugées au fond ;

Que C. F. n'a pas conclu postérieurement au jugement précité ; qu'antérieurement, il avait conclu le 4 décembre 1986 à l'encontre de la Société Bimini à l'indivisibilité du contrat de location et à la nullité du refus de renouvellement du bail, motif pris de ce que la Société Bimini n'était propriétaire que d'une partie des locaux loués ; que formant une demande reconventionnelle, C. F. avait sollicité la condamnation de la société au paiement d'une somme de 10 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Qu'ayant conclu à nouveau le 5 mars 1987, C. F. invoque la nullité du congé pour non-respect du délai de préavis de trois mois prévu au bail ; qu'il estime en conséquence que ce bail s'est trouvé reconduit pour une nouvelle période de trois ans à compter du 15 juillet 1986 ;

Qu'en réponse, la Société Bimini, qui souligne que le propriétaire des deux autres pièces louées au défendeur lui a donné congé pour la même échéance, sollicite la validation du congé qu'elle lui a donné pour la date du 15 juillet 1986 et la condamnation de C. F. au paiement d'une indemnité d'occupation de 2 500 F par mois jusqu'à son départ et de dommages-intérêts qu'elle chiffre, en dernière analyse, à la somme de 20 000 F en réparation du préjudice que lui occasionne la résistance injustifiée du défendeur ;

Qu'à l'encontre de la demande en validation de congé formée par E. L.-D., C. F. a conclu le 5 mars 1987 à la nullité de ce congé motif pris de l'absence dans ce congé des mentions substantielles concernant la qualité du bailleur et la portée de sa décision ; qu'il sollicite en outre la condamnation du demandeur au paiement d'une somme de 10 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Qu'en réponse E. L.-D. souligne qu'en l'état des deux congés donnés par les propriétaires respectifs des locaux occupés par le défendeur, ce dernier qui n'établit pas l'existence d'un préjudice à l'appui de sa demande en nullité doit être débouté ;

Sur ce,

Attendu que le bail écrit du 7 juin 1973 par lequel M. L.-D. a renouvelé au profit de C. F. le bail originaire du 7 janvier 1966, pour une durée de trois-six-neuf années commençant à courir le 15 juillet 1974 est venu à expiration le 15 juillet 1983 ; qu'à compter de cette date, C. F. ayant été laissé en possession des locaux, il s'est opéré, conformément à l'article 1578 du Code civil un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions législatives relatives aux locations faites sans écrit, c'est-à-dire par application de l'article 1576 du Code civil, que le bail est ainsi conclu à l'année puisqu'en l'espèce le loyer avait été fixé à 7 500 F par an révisable, et qu'il peut y être mis fin par un congé donné trois mois avant l'expiration du bail (article 1579 du Code civil) ;

Attendu qu'E. L.-D. a, par un exploit extrajudiciaire du 9 avril 1986 notifié le jour même à son locataire, donné congé « des locaux qu'il occupe dans l'immeuble . » pour le 15 juillet 1986 ;

Attendu que la Société Bimini, propriétaire des pièces portant les n° 220 et 221 pour les avoir acquises le 29 juillet 1985 de B. L.-D., a, par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 14 avril 1986, donné congé à C. F. de ces deux pièces pour le 15 juillet 1986 ;

Attendu que cette lettre a été reçue par C. F. le 15 avril 1986 ainsi qu'il ressort du récépissé versé aux débats, c'est-à-dire moins de trois mois avant l'expiration du bail ;

Attendu que, dès lors, ce congé qui n'a pas respecté le délai légal ne peut produire d'effet juridique ;

Attendu qu'en raison de l'indivisibilité du bail consenti à C. F., l'irrégularité du congé donné par la Société Bimini a pour conséquence de rendre inopérant le congé - fût-il même régulier - donné par E. L.-D. pour les pièces n° 218 et 219 ;

Attendu qu'il y a lieu de débouter E. L.-D. et la Société Bimini de leurs demandes, cette dernière devant être également déboutée en l'état de sa succombance de sa demande en paiement de dommages-intérêts formée à l'encontre de C. F. ;

Attendu que le bail consenti à ce dernier pour l'appartement formé par les pièces n° 218, 219, 220 et 221 se trouve renouvelé depuis le 15 juillet 1986 par période annuelle et qu'il ne pourra y être mis fin, en raison de son indivisibilité que par un congé unique, donné par les propriétaires respectifs des locaux occupés par C. F., trois mois avant l'expiration annuelle ;

Attendu que C. F. qui n'établit pas l'existence d'un préjudice tant à l'encontre de E. L.-D. qu'à l'encontre de la Société Bimini doit être débouté de ses demandes en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Déclare sans effet le congé donné par la S.C.I. Bimini pour les pièces n° 220 et 221 dépendant de l'appartement loué par C. F. dans l'immeuble . ;

Dit que l'indivisibilité du bail consenti à ce dernier, rend également sans effet le congé qui lui a été donné par E. L.-D., propriétaire des pièces n° 218 et 219 ;

Dit que le bail dont bénéficie C. F. pour l'appartement constitué par les pièces n° 218, 219, 220 et 221 se renouvelle par périodes annuelles depuis le 15 juillet 1986 et qu'il ne pourra y être mis fin que par un congé unique donné par les propriétaires respectifs des pièces formant l'appartement loué à C. F., trois mois avant l'expiration d'une période annuelle ;

Déboute E. L.-D. et la S.C.I. Bimini de l'ensemble de leurs demandes ;

Déboute C. F. de ses demandes en paiement de dommages-intérêts ;

Composition🔗

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, subst. ; MMe Lorenzi, Karczag-Mencarelli et Sbarrato, av. déf. ; Brugnetti, av. ; Escaut, av. (Barreau de Nice).

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