Tribunal de première instance, 19 décembre 1985, T. c/ S.

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Abstract🔗

Promesse de mariage

Rupture. - Absence de preuves.

Résumé🔗

Le fait pour la demanderesse d'avoir vécu en concubinage et d'avoir été enceinte des œuvres de son concubin ne saurait suffire, à défaut d'autres éléments de preuve, à justifier sa demande en dommages-intérêts pour rupture d'une promesse de mariage, alors que la responsabilité de la rupture des relations entre les parties ne peut être imputée à l'une ou à l'autre.


Motifs🔗

LE TRIBUNAL,

Attendu que W. T., née le 25 octobre 1952 à Bacoor (Philippines), qui expose avoir vécu maritalement pendant quatre années à Monaco avec S. S., né le 17 août 1948 aux Philippines également, et que ce concubinage fut assorti à plusieurs reprises d'une promesse de mariage, a fait assigner, par l'exploit susvisé, S. à l'effet d'obtenir paiement de la somme de 300 000 francs à titre de dommages-intérêts devant réparer les conséquences résultant de la faute grave commise par celui-ci et qui serait caractérisée :

  • par le fait qu'il lui a caché être déjà engagé aux Philippines dans les liens du mariage,

  • par la venue en Principauté de l'épouse légitime de S., l'ayant contrainte à quitter le domicile occupé jusque là en commun avec le défendeur,

  • par la rupture de la promesse de mariage, intervenue alors qu'elle lui annonçait être enceinte de ses œuvres, ou, à tout le moins, par la rupture abusive de leurs relations de concubinage ;

Qu'à l'appui de ses prétentions, W. T. produit un document signé de S. sous la date du 25 juin 1985 par lequel il se serait borné à prendre à sa charge les frais d'interruption de grossesse un temps envisagée, ce qui équivaudrait à une reconnaissance de paternité de sa part et constituerait preuve d'une promesse de mariage non respectée ;

Attendu qu'en réponse, S., qui admet avoir eu des relations extra-conjugales avec W. T., soutient cependant ne pas lui avoir laissé croire qu'il était célibataire mais bien séparé, de fait, de sa femme, le divorce n'étant pas connu du droit philippin ; qu'il affirme qu'au retour de celle-ci en Principauté, W. T. a choisi de rompre leurs relations et a obtenu de lui, sous la contrainte, aidée en cela par un couple d'amis, qu'il appose sa signature à quatre reprises sur le document précité dont il prétend n'avoir pas alors compris le sens ou la portée, tout en relevant sa contrariété avec l'ordre public monégasque devant conduire à en déclarer la nullité ;

Qu'il conclut en conséquence au rejet de la demande formée à son encontre ;

Sur quoi,

Attendu que s'il est constant que les parties ont vécu en concubinage pendant quelques années, et admis par S. que W. T. s'est trouvée enceinte de ses œuvres, ces seules circonstances ne permettent pas pour autant de reconnaître à la demanderesse un droit à réparation, étant observé qu'elle apparaît avoir elle-même contribué aux agissements fautifs dont elle se plaint ;

Attendu par ailleurs qu'il n'est nullement établi que S. ait promis le mariage à sa compagne en lui laissant faussement croire qu'il était célibataire ; qu'à cet égard, l'unique pièce versée aux débats, relative aux « aspects financiers » de l'avortement envisagé par les parties, n'administre pas la preuve d'une telle promesse, à supposer qu'il puisse être conféré quelque portée à ce document dans la présente instance eu égard à sa contrariété évidente à l'ordre public de la Principauté ;

Attendu enfin, sur la rupture des relations des parties, que les éléments du dossier ne permettent pas d'en imputer la responsabilité à l'une ou l'autre d'entre elles ;

Attendu, en conséquence, que W. T. doit être déboutée de sa demande fondée sur les principes généraux de la responsabilité civile dont la mise en œuvre n'apparaît pas devoir être admise en l'espèce ;

Attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant contradictoirement,

Déboute W. T. des fins de sa demande ;

Composition🔗

MM. Huertas, prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Marquet, Blot, av. déf.

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