Tribunal de première instance, 14 novembre 1985, SARL Imprimerie L. c/ SAM Transco Centre d'Aromathérapie esthétique.

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Abstract🔗

Exequatur

Demande limitée à l'un des défendeurs - Article 700 du Code de procédure civile française.

Résumé🔗

La demande d'exequatur concernant une décision judiciaire française condamnant solidairement deux débiteurs, peut être limitée à l'un des défendeurs.

Le fait que la condamnation vise l'article 700 du Code de procédure civile français, disposition qui n'existe pas à Monaco, n'apparaît pas de nature à heurter la conception monégasque de l'ordre public international, étant donné que par son effet atténué propre aux droits régulièrement acquis à l'étranger, celui-ci ne s'oppose nullement à ce que de tels droits s'exercent à Monaco, alors que la condamnation fondée en France sur la notion de frais irrépétibles n'apparaît pas éloignée de celle monégasque de dommages-intérêts pour abus de procédure.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Attendu que, par un jugement n° 1446/82 contradictoirement rendu le 14 avril 1983 en premier ressort, mais avec exécution provisoire nonobstant appel et sans caution, le Tribunal de commerce de Cannes (Alpes-Maritimes - France) a condamné conjointement et solidairement A. M. M., la société de Droit Helvétique « S.A. Larac » et la société anonyme monégasque dénommée Transco Centre d'Aromathérapie Esthétique à payer à la société française à responsabilité limitée dénommée Imprimerie L. Père et Fils, la somme de 15 000 francs avec intérêts légaux depuis le 6 avril 1982 outre celle de 2 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code français de procédure civile ;

Attendu que, par l'exploit susvisé, la société Imprimerie L. Père et Fils, a fait assigner la société monégasque précitée en exequatur du jugement français ainsi rendu qu'elle a dûment fait enregistrer à Monaco et qu'elle estime répondre aux conditions prescrites par les articles 473 du Code de procédure civile et 18 de la Convention franco-monégasque d'aide mutuelle judiciaire rendue exécutoire dans la Principauté par l'ordonnance souveraine n° 106 du 2 décembre 1949 ;

Attendu que précisant liminairement que par une assignation d'appel en intervention forcée et garantie, datée du 1er février 1985, sur laquelle il est statué par ailleurs, elle avait entendu attraire aux débats A. M. au motif que celui-ci était son codébiteur solidaire, la société Transco Centre d'Aromathérapie Esthétique a conclu le 17 octobre 1985 quant à l'exception sollicitée principalement, que la demande de la société Imprimerie L. Père et Fils devait être rejetée pour la raison que M. serait en fait, le seul débiteur réel des 15 000 francs demandés - ce que le Tribunal ne saurait, toutefois, apprécier dans la présente instance exclusive de toute faculté de révision - et, subsidiairement, que, s'il devait être accordé, l'exequatur envisagé ne saurait s'appliquer à l'allocation, sur le fondement d'un texte inconnu du droit monégasque (l'article 700 du nouveau Code français de procédure civile) de la somme susvisée de 2 000 francs, laquelle, dès lors, ne devrait pas pouvoir être présentement réclamée ;

Sur quoi,

Quant à la recevabilité ;

Attendu que la société demanderesse apparaît justifier d'un intérêt suffisant pour agir dans la présente instance en raison de ce que la décision dont elle poursuit l'exécution frappe notamment la société défenderesse qui a son siège à Monaco ;

Que par ailleurs rien n'interdit à cette même demanderesse de limiter comme elle l'a fait le nombre des défendeurs dans la présente instance en exequatur, en restreignant ainsi à son gré, quant à la seule partie attraite à ladite instance, la relativité de la chose jugée ;

Que sa demande d'exequatur du jugement susvisé doit être, dès lors, déclarée recevable ;

Quant au fond,

Attendu que ledit jugement - dont une signification régulière de la grosse en forme exécutoire a été versée aux débats, qui apparaît authentique - émane d'une juridiction compétente en France et se trouve présentement passée en force de chose jugée ainsi que l'a d'ailleurs admis la défenderesse dans ses écritures et qu'en fait foi un certificat délivré le 10 octobre 1984 par le greffier en chef de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence attestant, à cette date, de l'absence d'appel interjeté contre ledit jugement ; qu'il est par ailleurs constant que la procédure française qu'il a clôturée, contradictoirement suivie à l'égard de la société défenderesse, s'avère régulière à tous égards ;

Attendu, d'autre part, que visa, par ce même jugement, de l'article 700 du nouveau Code français de procédure civile n'est pas de nature à heurter la conception monégasque de l'ordre public international, puisque par son effet atténué propre aux droits régulièrement acquis à l'étranger, celui-ci ne s'oppose nullement à ce que de tels droits s'exercent à Monaco encore bien qu'ils n'eussent pu y prendre naissance, ce qui doit sans conteste conduire en l'espèce à admettre qu'une condamnation fondée en France sur la notion de frais irrépétibles, non éloignée au surplus, de celle monégasque de dommages-intérêts pour abus de procédure, puisse recevoir exécution à Monaco ;

Que l'exequatur sollicité doit être en définitive octroyé sur le fondement de l'article 18 de la Convention franco-monégasque susvisée ;

Et attendu que la société défenderesse qui succombe dans la présente instance doit supporter les dépens lesquels devront notamment comprendre les frais d'enregistrement du jugement français dont s'agit ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Reçoit la S.A.R.L. Imprimerie L. Père et Fils en sa demande d'exequatur du jugement susvisé rendu le 14 avril 1983 par le Tribunal de commerce de Cannes ;

L'y disant fondée, déclare ledit jugement exécutoire à Monaco dans toutes ses dispositions ;

Composition🔗

MM. Huertas, prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Sbarrato, Karczag-Mencarelli, av. déf.

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