Tribunal de première instance, 15 juillet 1976, F. c/ O.

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Abstract🔗

Contrat de travail

Fonds de commerce - Gérance libre - Changement de gérant - Contrats en cours - Maintien (oui)

Résumé🔗

L'article 15 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, en raison de ses termes généraux, doit s'appliquer aux cas de mise en gérance libre d'un fonds de commerce et impose, dès lors, au nouvel entrepreneur qu'est le gérant de maintenir les contrats de travail en cours.


Motifs🔗

Le Tribunal

Statuant sur l'appel régulièrement interjeté parte in qua par le sieur F. d'un jugement du Tribunal du Travail en date du 6 février 1975, non signifié, lequel, sur une demande en paiement de diverses sommes, détaillées audit jugement, qu'il avait introduite contre le sieur O., pris en sa qualité de gérant de la boulangerie-pâtisserie « . », consécutivement à la rupture, jugée par lui abusive, de son contrat de travail, a condamné O. à lui payer les sommes de :

1° - 900 francs, à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

2° - 425 francs, à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

3° - 2 820 francs, à titre d'indemnité de licenciement,

avec intérêts de droit du jour de la demande, ordonné la remise à F. d'un certificat de travail ainsi que de bulletins de paye réguliers et débouté O. de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts et F. du surplus de ses prétentions ; statuant également sur l'appel incident d'O. ;

Attendu que F. a été engagé le 1er octobre 1970, en qualité de chauffeur-livreur, suivant contrat de travail à durée indéterminée, par le sieur T., propriétaire du fonds de commerce susvisé sis . ; que ce fonds ayant été donné en gérance libre au sieur J. O. suivant contrat notarié du 25 avril 1972, avec effet à compter du 1er mai 1972, il est demeuré en la même qualité au service de ce dernier ; qu'il a été licencié par O. par lettre du 12 juillet 1974 et a continué son travail, et perçu ses salaires, jusqu'au 4 août 1974 inclus ;

Attendu que F. limite son appel à ses demandes tendant au paiement de 10 800 francs, montant de 180 jours de repos hebdomadaire non pris et non rémunérés, et de 20 000 francs, à titre de dommages-intérêts, pour rupture abusive de son contrat de travail, dont il a été débouté par le jugement attaqué et dont il sollicite l'adjudication, sauf à recourir préalablement à une enquête ;

Attendu qu'O. conclut au débouté de cet appel et reprenant, par voie d'appel incident, l'exception d'irrecevabilité de l'action engagée contre lui par F., en soutenant qu'il ne devait pas supporter personnellement les conséquences d'un licenciement ordonné par le propriétaire du fonds et qu'en tout état de cause il ne pouvait être tenu au paiement d'une indemnité de licenciement calculée sur une ancienneté remontant à une période antérieure au début de la gérance, il demande à être déchargé du paiement de toute indemnité et la condamnation de l'appelant à lui verser la somme de 5 000 francs montant de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par des procédures de saisie abusives et vexatoires ; qu'il sollicite, subsidiairement, la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté F. de ses demandes en dommages-intérêts et en indemnisation de journées de repos hebdomadaire ;

Attendu, sur la recevabilité de l'action de F. contre O., que les premiers juges ont fait une exacte application, en l'espèce, des dispositions de l'article 15 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, lequel, à raison de ses termes généraux, doit s'appliquer au cas de mise en gérance libre d'un fonds de commerce et impose, dès lors, au nouvel entrepreneur qu'est le gérant de maintenir les contrats de travail en cours ;

Attendu qu'il en est déduit, légitimement, et sans contradiction dans leurs motifs, que si O. ne pouvait être recherché, en ce qui concerne les salaires ou indemnités assimilées, qu'à compter du 1er mai 1972, l'ancienneté de F. devait remonter au 1er octobre 1970 pour le calcul de l'indemnité de licenciement, et, indirectement, de l'indemnité de préavis, à raison de la poursuite du même contrat de travail ;

Attendu en effet que l'indemnité de licenciement n'étant acquise au salarié qu'au moment et par le fait du licenciement, c'est au nouvel employeur qui a rompu le contrat que cette indemnité incombe ;

Attendu, enfin, que c'est à bon droit que le jugement entrepris a retenu qu'O. n'établissait pas qu'il avait licencié F. sur les instructions de T., alors qu'en sa qualité de gérant libre il avait la responsabilité exclusive de l'exploitation jusqu'à la fin de la gérance, aucun élément ne venant étayer les dires d'O. sur ce point en dehors de ses propres déclarations à F. même si elles ont été faites en présence de certains membres de son personnel ;

Attendu en conséquence que le jugement du Tribunal du Travail doit être confirmé en ce qu'il a déclaré que la rupture du contrat de travail était imputable à O. ;

Attendu, pour le surplus, qu'en l'état des contestations de fait opposant les parties, le Tribunal ne dispose pas des éléments d'appréciation qui lui sont indispensables et qu'il y a lieu, avant de statuer au fond, de faire droit à l'offre de preuve testimoniale formulée par F. en étendant l'enquête qui doit être ordonnée, à la vérification des autres points litigieux ;

Qu'il y a également lieu d'ordonner la production aux débats, aux diligences d'O., du livre de paye et du registre du personnel de l'entreprise couvrant la période du 1er mai 1972 au mois de novembre 1974 ;

Que les dépens doivent être réservés ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant comme juridiction d'appel du Tribunal du Travail, en conformité des dispositions des articles 61 et suivants de la loi n° 446 modifiée du 16 mai 1946,

Reçoit les appels principal et incident comme réguliers en la forme,

Au fond, confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré que la rupture du contrat de travail liant les parties était imputable à O.,

Et avant de statuer plus avant,

Ordonne la production du livre de paye et du registre du personnel de l'entreprise,

Autorise F. à établir par témoins, en la forme ordinaire des enquêtes, la preuve que :

1° - du 1er mai 1972 à la date du licenciement, il a travaillé sans prendre un seul jour de repos hebdomadaire - le four de la boulangerie fonctionnant en continu - étant l'unique livreur et aucun remplaçant ne pouvant le suppléer,

2° - le véritable motif du licenciement doit être recherché dans sa prétention justifiée à percevoir les rémunérations du travail qu'il a effectué durant ces journées de repos non prises,

3° - son salaire s'élevait à 1 500 francs par mois, circonstances et dépendances de ces faits ;

Preuve contraire réservée au sieur O. et, en outre :

1° - des griefs articulés contre F.,

2° - du fait qu'il lui avait offert de poursuivre son travail au-delà du 4 août 1974 et jusqu'au terme reconduit de la gérance et que c'est F. qui a volontairement cessé son service à cette date ;

Composition🔗

M. François pr., Mme Margossian subst. gén., MMe Marquet, Boéri av. déf. et Léandri (du barreau de Nice) av.

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