Tribunal criminel, 8 février 2017, Le Ministère Public c/ m. RI.

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Abstract🔗

Viol - Viol sur mineur - Eléments constitutifs - Condamnation - Circonstances atténuantes

Résumé🔗

L'accusé est poursuivi pour des infractions d'attentats à la pudeur sans violence sur des mineures âgées de moins de 16 ans, les faits ayant consisté en des baisers sur la bouche, des caresses sur la poitrine, les cuisses et les fesses, et à les obliger les victimes à faire toucher son sexe. Celles-ci décrivent un mode opératoire semblable combinant des actes de contrainte morale pratiqués par une personne perçue comme proche et un processus de réitération d'atteintes sexuelles se produisant dans un contexte identique. Les dénonciations des victimes sont confortées par les déclarations de témoins et d'amis ayant reçu leurs confidences. Les examens psychologiques des deux mineures concluent à l'authenticité et à la plausibilité des faits rapportés et font état d'un retentissement traumatique en lien avec les faits subis. En outre, l'accusé a admis avoir commis l'essentiel des faits dénoncés. Il existe des circonstances atténuantes tenant essentiellement à la personnalité de l'accusé qui est condamné à la peine d'une année d'emprisonnement.


Motifs🔗

TRIBUNAL CRIMINEL

ARRÊT DU 8 FÉVRIER 2017

Dossier PG n° 2015/001268

Dossier JI n° CABI-2015/000021

  • En la cause du MINISTÈRE PUBLIC,

CONTRE :

  • m. RI., né le 23 février 1984 à Monaco, de r. et de c. BO., de nationalité monégasque, Y, demeurant X1 à Monaco,

LIBRE (sous contrôle judiciaire)

(Mandat d'arrêt du 08/09/15 - Mise en liberté du 23/02/16)

présent aux débats, assisté de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et de Maître Arnaud CHEYNUT, avocat en cette même Cour ;

accusé de:

  • - ATTENTATS À LA PUDEUR SANS VIOLENCE SUR MINEURES DE MOINS DE 16 ANS

En présence de :

  • - p. RO., demeurant X2, ès-qualités d'administrateur ad hoc de r. BO. et c. BO., nées respectivement les 28 juin 2002 et 20 juin 2004, demeurant X3 à Menton (06500), partie civile, représenté par Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur, bénéficiaire de l'assistance judiciaire par décision n°XX du 12 janvier 2017 ;

LE TRIBUNAL CRIMINEL, composé de Madame Virginie ZAND, Président, Monsieur Paul CHAUMONT, Monsieur Edouard LEVRAULT, juges assesseurs, Madame Catherine NOTARI, Madame Sylviane CURAU, Monsieur Guy MAGARA, jurés titulaires ;

Vu l'arrêt de mise en accusation de la Chambre du conseil de la Cour d'appel en date du 12 octobre 2016, signifié le 19 octobre 2016 ;

Vu l'ordonnance de Madame le Premier Président de la Cour d'appel en date du 28 octobre 2016 désignant les magistrats composant le Tribunal Criminel ;

Vu le mandat de comparution en date du 8 novembre 2016, délivré à m. RI. le 23 novembre 2016 ;

Vu le procès-verbal d'interrogatoire de l'accusé en date du 14 décembre 2016 ;

Vu le procès-verbal de tirage au sort des jurés en date du 14 décembre 2016 ;

Vu l'ordonnance du Président du Tribunal criminel en date du 14 décembre 2016, notifiée, désignant les jurés ;

Vu l'ordonnance du Président du Tribunal criminel en date du 14 décembre 2016 fixant la date d'audience ;

Vu la citation à accusé, suivant exploit enregistré du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier de justice à Monaco, en date du 28 décembre 2016 ;

Vu la citation de témoins, suivant exploit enregistré du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier de justice à Monaco, en date du 28 décembre 2016 ;

Vu la dénonciation de témoins à accusé, suivant exploit enregistré du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier de justice à Monaco, en date du 28 décembre 2016 ;

Vu les ordonnances du Président du Tribunal criminel en date des 3 et 5 janvier 2017, remplaçant l'un des jurés ;

Vu les citations à témoins et dénonciation à la requête de m. RI., suivant exploits enregistrés du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier de justice à Monaco, en date du 31 janvier 2017 ;

Vu la prestation de serment des jurés à l'ouverture des débats le 6 février 2017 ;

Ouï l'accusé en ses réponses ;

Ouï aux formes de droit, serment préalablement prêté, les témoins cités ;

Ouï Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur pour Paul ROUANET, ès-qualités d'administrateur ad hoc de r. BO. et c. BO., partie civile, en ses demandes et plaidoiries ;

Ouï le Substitut du Procureur général en ses réquisitions ;

Ouï Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur au nom de l'accusé, en ses moyens de défense ;

Ouï Maître Arnaud CHEYNUT, avocat au nom de l'accusé, en ses moyens de défense ;

Ouï l'accusé qui a eu la parole en dernier ;

Le Tribunal Criminel composé de Madame Virginie ZAND, Président, Monsieur Paul CHAUMONT, Monsieur Edouard LEVRAULT, juges assesseurs, Madame Catherine NOTARI, Madame Sylviane CURAU, Monsieur Guy MAGARA, jurés titulaires, après en avoir délibéré, conformément à la loi, en la Chambre du conseil ;

Considérant qu'il ressort des débats à l'audience, et de l'instruction les faits suivants :

Le 2 février 2015, le service de la protection de l'enfant du conseil général des Alpes-Maritimes signalait au Procureur de la République de Nice la situation de danger encourue par r. BO., née le 28 juin 2002, qui venait de confier à l'assistante sociale scolaire avoir subi « des attouchements sexuels de la part d'un cousin de son père, un certain m., âgé d'une trentaine d'années », ce dernier l'ayant caressée puis ayant pris sa main pour la poser sur son sexe après s'être déshabillé et ce lors d'un week-end chez son père au cours du mois de décembre.

Le Parquet de Nice saisissait immédiatement le service de la brigade des mineurs de Nice. Le mis en cause était identifié comme étant m. RI., de nationalité monégasque, et demeurant à Monaco. La procédure était dès lors clôturée par les services de police français et le 24 juillet 2015, le parquet de Nice dénonçait les faits pour compétence au Procureur Général de Monaco, Monsieur le Directeur de la Sûreté Publique était immédiatement saisi pour suite d'enquête.

r. BO. était entendue dès le 12 février 2015. Elle relatait qu'une nuit, fin novembre ou début décembre 2014, dans la maison de campagne de son père en Italie, alors qu'elle n'arrivait pas à dormir, le cousin de son père, prénommé m., lui avait proposé de venir à côté de lui, sur un matelas situé au sol dans la chambre qu'elle occupait avec sa sœur, puis l'avait caressée avant de se déshabiller et de lui prendre la main pour la poser sur son sexe. Décrivant la scène de manière plus précise, elle indiquait que lorsqu'au milieu de la nuit, elle revenait de la salle de bain, il lui demandait ce qui n'allait pas et lui proposait de venir à côté de lui. Elle s'allongeait alors sur sa gauche, en toute confiance. Alors qu'elle commençait à se rendormir, il se mettait à la caresser, d'abord le dos, puis le bas, les fesses puis l'arrière des cuisses. Il remontait ensuite devant jusqu'à l'aine. Elle précisait qu'il ne lui avait touché ni le sexe ni la poitrine. Puis il enlevait son slip sans se lever. Il prenait alors sa main et la posait sur son sexe, qui se dressait vers le haut et était «dur». Elle expliquait qu'elle avait eu peur ne pouvant ni crier ni bouger. Elle était ensuite parvenue à reprendre ses esprits et enlevait sa main. Il lui disait alors d'aller se recoucher. Elle précisait que sa main était restée posée sur son sexe une à deux minutes et que m. ne lui avait pas fait faire de mouvement de va et vient.

r. BO. relatait que le lendemain elle l'avait évité et qu'au moment de partir il lui avait demandé de ne rien dire. Elle indiquait qu'elle avait parlé de ces faits à son meilleur ami, q. NE., suite à un cauchemar qu'elle avait fait à ce sujet, et qu'il l'avait poussée à se confier au personnel éducatif de son collège. Elle précisait qu'auparavant m. RI. l'avait déjà, à plusieurs reprises, caressée, ainsi que sa petite sœur, mais qu'il s'agissait de caresses sur les bras et sur le bas du dos. Elle ajoutait avoir interrogé sa petite sœur c. qui lui avait confié avoir été caressée par m. RI. lequel lui avait également pris la main pour la poser sur son sexe tout en restant habillé.

c. BO., née le 20 juin 2004, était entendue à son tour le 12 février 2015. Elle expliquait que plusieurs fois m. RI. lui avait caressait les bras, le ventre, le torse et les jambes, lui demandant de venir faire un câlin. Elle estimait que ces faits s'étaient produits quatre fois dans la chambre en Italie. Elle racontait que m. RI. lui demandait de lui faire des caresses et qu'elle lui touchait les bras. Il prenait alors sa main pour la poser sur son sexe mais elle enlevait immédiatement sa main. Elle précisait que son sexe était « dur » mais qu'il gardait son slip. Il avait agi de la sorte à quatre ou cinq reprises, fixant la dernière fois avant Noël 2014 et la première fois en 2013. Il lui proposait à une occasion de lui montrer son sexe, ce qu'elle refusait, alors il lui demandait de l'embrasser. Lorsqu'elle s'approchait pour l'embrasser sur la joue, il l'embrassait sur la bouche. Il répétait cela à trois ou quatre reprises. Elle indiquait que m. RI. lui avait demandé de ne pas en parler et que lorsqu'il lui avait proposé de lui montrer son sexe, il avait indiqué que ce serait leur secret. Elle déclarait trouver anormal qu'il fasse cela à un enfant et ajoutait se douter qu'il faisait la même chose à sa grande sœur.

cl. BR., mère de r. et c. BO., déposait plainte contre m. RI. pour les faits dont étaient victimes ses filles et relatait les circonstances dans lesquelles elle en avait été informée. Ainsi, le 2 février 2015, en rentrant de l'école, elle avait constaté le mal être de r. qui lui avait finalement raconté ce que m. RI. lui avait fait subir. Elle précisait que sa fille r. s'était effondrée en pleurs au moment de cette révélation. Elle avait alors interrogé son autre fille c. qui lui avouait, en pleurant également, qu'elle avait elle aussi subi des faits de même nature.

Elle précisait que ses deux filles s'étaient toujours bien entendues avec m. RI.. Elle indiquait que désormais c. semblait aller bien et estimait qu'elle n'avait pas été trop perturbée par les faits, même si elle paraissait désormais beaucoup plus méfiante. En revanche, elle notait une véritable modification du comportement de r. qui était plus renfermée et avait cessé son activité de modélisme.

Elle ajoutait que le psychologue avait attiré son attention sur le fait que sa fille continuait à souffrir d'insomnies et de cauchemars. Elle précisait que cette dernière lui avait confié se sentir depuis les faits attirée par les personnes du même sexe, ce que sa mère imputait à la période de puberté mais reliait également aux faits dont elle avait été victime.

w. BO., père des enfants, expliquait qu'il n'avait jamais rien remarqué. Il se déclarait abasourdi par ces révélations, son cousin étant selon lui « très gentil et doux », mais il déclarait qu'il croyait ses filles.

q. NE., ami de r. BO., expliquait qu'un peu avant les fêtes de Noël 2014, son amie lui avait fait part d'insomnies récurrentes. Elle avait changé de comportement et était plus distante. Au fur et à mesure de ses questionnements inquiets, r. finissait par lui expliquer qu'un membre de sa famille prénommé m. l'avait « touchée ». Il lui suggérait de se confier au professeur principal, celle-ci ne voulant pas en parler à un membre de sa famille. Interrogé sur l'attitude de la jeune adolescente depuis les faits, il expliquait qu'ils ne parlaient plus de ce sujet et qu'elle avait l'air d'aller mieux. Il soulignait toutefois qu'elle ne faisait plus de modélisme, activité à laquelle son cousin m. l'avait initiée.

f. CI., professeur principal de r. BO. au cours de l'année 2014/2015, indiquait que q. NE. était venu le voir, accompagné de r. BO., pour lui parler d'un problème personnel. Il expliquait que c'était le jeune homme qui parlait au début, r. étant très mal à l'aise. Lorsque q. évoquait un problème avec un homme qui dormait chez le père de la jeune fille, f. CI. comprenait qu'il devait s'agir d'une question d'abus sexuel, et, après l'avoir rassurée, orientait r. BO. vers l'assistante sociale du collège.

b. DI., assistante sociale, expliquait que la semaine précédant les révélations de r. BO., elle était intervenue dans sa classe au sujet du harcèlement scolaire, notamment sexuel. Elle relatait que lorsque celle-ci s'était présentée dans son bureau le 2 février 2015, elle lui avait spontanément déclaré qu'à l'occasion d'un week-end dans la maison de campagne de son père, le cousin de ce dernier, âgé d'une trentaine d'années, l'avait invitée à se coucher avec lui, puis l'avait caressée et avait pris sa main pour la poser sur son sexe après s'être dévêtu. Elle évoquait les cauchemars qu'elle faisait depuis les faits et se déclarait inquiète de la réaction de ses parents et de l'impact qu'aurait la connaissance des faits sur la famille.

s. PA., psychologue clinicienne, ayant assisté aux auditions des deux jeunes filles, relevait chez r., une attitude calme, dénuée d'agressivité et une démarche de dénonciation faite dans la contrainte, ne voulant pas créer de disputes. Elle soulignait que le récit était chronologique et cohérent et que la jeune fille ne présentait aucune pathologie ou déficience, et mentionnait un état de stress post-traumatique caractérisé par une modification de son rapport aux autres, un rejet des conversations relatives à la sexualité et des symptômes d'hyper-réveil liés à un sentiment d'insécurité, recommandant un suivi psychologique.

S'agissant de c., elle relevait également une attitude calme et non agressive avec un discours spontané. Elle soulignait que l'enfant restituait ses émotions et ses pensées, tenant un discours chronologique et cohérent émaillé de détails pertinents. Elle ne constatait ni pathologie ni déficience. Elle décelait un état de stress post-traumatique léger accompagné d'un sentiment de culpabilité et recommandait également un suivi psychologique.

Le 7 septembre 2015, m. RI. était interpellé à son domicile et immédiatement placé en garde à vue du chef de crime d'attentats à la pudeur sur mineures de moins de 16 ans.

Entendu à quatre reprises par les services de police, il décrivait une sexualité épanouie, notamment avec son épouse, mais reconnaissait avoir régulièrement recours aux services de prostituées à Nice. Il niait toute attirance sexuelle envers les enfants. Par ailleurs, il confirmait dormir sur un matelas au pied du lit superposé utilisé par r. et c. BO., lors de ses séjours dans la maison familiale située à PIGNES en Italie, et admettait avoir fait des câlins à ses petites cousines. Il relatait notamment deux épisodes, le premier lorsque r. lui m. hait dessus en retournant se coucher et, pour se faire pardonner, venait lui faire un câlin allongée sur son matelas, lui-même lui frottant le ventre et les bras avec sa main gauche et le second où elle était venue dormir avec lui pour se réchauffer. Concernant c., il relatait également des épisodes de câlins, mais toujours sur les vêtements. Confronté aux accusations, il les contestait et ne pouvait pas les expliquer. Puis lors de sa troisième audition, il admettait finalement que les filles avaient dit la vérité et reconnaissait ainsi la quasi-totalité de leurs déclarations.

S'agissant de r., il indiquait qu'un soir, à la fin de l'année 2014, alors qu'elle faisait plusieurs allers-retours aux toilettes, il s'inquiétait de ce qui n'allait pas et l'invitait alors à le rejoindre sur le matelas afin de la réconforter. Puis il lui frottait le dos, le ventre, les bras, l'intérieur des cuisses en passant par les fesses, alternant des contacts sur et sous les vêtements, r. procédant à des caresses sur le torse et le ventre. Il lui prenait alors la main et la dirigeait vers son pénis, en érection, précisant qu'il s'était alors totalement déshabillé.

Comme r. ôtait sa main après un moment qu'il évaluait à une trentaine de secondes, il l'invitait à retourner dans son lit. Il précisait avoir alors mesuré qu'il était allé trop loin. Puis il s'endormait au bout de quelques instants. Enfin, il reconnaissait lui avoir demandé le lendemain de ne rien dire.

Concernant c., il indiquait qu'elle était venue dans son lit pour lui faire un câlin et datait l'évènement au cours de la période de novembre à décembre 2014, soit postérieurement aux faits commis sur r.. Il avait alors procédé à des chatouilles et des pincements sur l'ensemble du corps, hormis les parties génitales, sur et sous les vêtements, tandis qu'elle lui frottait le haut du torse. Il lui avait alors pris la main pour la poser sur son sexe en érection, que c. avait immédiatement retirée. Prenant conscience de ce qu'il venait de faire, il quittait la chambre. Il précisait avoir gardé son sous-vêtement, et reconnaissait également avoir embrassé l'enfant sur la bouche, en tournant la tête, à trois ou quatre reprises, lorsqu'elle s'approchait pour lui faire un bisou sur la joue, mais il affirmait n'avoir agi de la sorte qu'à une seule reprise, considérant que c. devait s'être méprise lorsqu'il lui avait pris ses mains pour les bloquer entre ses cuisses à l'occasion de jeux.

À l'occasion de sa quatrième audition, il admettait avoir proposé à c. de lui montrer son sexe.

Une information judiciaire était ouverte le 8 septembre 2015 et m. RI. était inculpé du chef d'attentats à la pudeur sur mineures de moins de 16 ans commis en Italie courant 2013 et 2014. Il était placé en détention provisoire jusqu'au 23 février 2016, date à laquelle il était placé sous contrôle judiciaire.

Lors de son interrogatoire par le magistrat instructeur, m. RI. modifiait ses explications et reconnaissait six faits d'attouchements commis entre mi 2014 et fin 2014, quatre faits concernant c., puis ultérieurement et à deux reprises des faits commis au préjudice de r.. Il relatait précisément le déroulement des faits :

Concernant c. BO.,

  • - la première fois avec c. : après s'être souri mutuellement, elle venait dans son lit et se blottissait contre lui en lui frottant le torse et le dos. Il lui frottait tout le corps, à l'exception du sexe. Il était « excité » et il prenait sa main pour la descendre par-dessus le caleçon sur son pénis en érection. Elle retirait « dans les trois secondes » sa main sans rien dire.

  • - la deuxième fois avec c. : les faits se déroulaient dans les mêmes conditions, quelques semaines plus tard, mais il s'était « un peu plus attardé » sur les fesses et la poitrine de l'enfant. Il prenait à nouveau sa main pour la poser sur son sexe en érection, elle la retirait encore « très rapidement ».

  • - les troisièmes et quatrièmes fois avaient lieu entre novembre et décembre 2014. Il adoptait les mêmes gestes. La dernière fois, il lui avait proposé de lui montrer son sexe.

Il précisait que c. l'avait rejoint, à sa demande, sur le matelas qu'il occupait et confirmait qu'il l'avait embrassée sur la bouche, déclarant toutefois qu'il s'agissait d'un jeu sans connotation sexuelle. Il expliquait avoir d'abord agi avec c. car celle-ci dormait à côté de lui et qu'elle était moins renfermée et introvertie que sa grande sœur, et ajoutait que systématiquement le retrait rapide de la main de la jeune fille le conduisait à une prise de conscience. Enfin, il contestait avoir demandé à c. de garder le silence sur les faits.

Concernant r. BO.,

  • - la première fois, lorsque r. revenait de la salle de bain, il l'avait invitée sur son matelas pour la réconforter, c. dormant alors dans le salon avec son frère. Il la caressait sur le dos, les fesses et le derrière des cuisses, sous le tee-shirt mais par-dessus sa culotte. Il était « excité » et enlevait alors son caleçon. Il prenait sa main posée sur sa hanche, et la plaçait sur son sexe en érection en continuant de lui caresser les fesses. Il estimait qu'elle avait enlevé sa main au bout de « trente secondes ».

  • - la seconde fois, « quelques temps plus tard », il la taquinait lorsqu'elle revenait des toilettes parce qu'elle lui avait m. hé dessus et elle venait dans les draps avec lui. Il avait eu les mêmes gestes envers elle. Il ne pouvait dire s'il portait un caleçon ou non, mais indiquait avoir réitéré ses précédents agissements en plaçant à nouveau la main de la jeune fille sur son sexe en érection, laquelle la retirait au bout de trente secondes. Il reconnaissait avoir demandé à r. de ne rien dire, expliquant qu'étant plus âgée, elle était susceptible d'en parler. Il la décrivait comme ayant été avenante et active à l'occasion des faits, mentionnant une ambiguïté.

Par ailleurs, il relatait avoir lui-même été victime d'attouchements de la part de son oncle g. dans cette même maison de Pignes alors qu'il était âgé de 7 à 10 ans. Son oncle le touchait et lui demandait de le masturber. II expliquait qu'il avait parlé de ces faits pour la première fois à sa mère lors d'un parloir et qu'elle lui relatait alors avoir été violée par son père quand elle était enfant puis par ses deux frères à l'âge de 16 ans. Lors d'un second interrogatoire, il maintenait ses accusations à l'encontre de son oncle et affirmait s'être trouvé plusieurs fois seul à Pignes avec lui, ce que ses parents ne confirmaient pas. Il expliquait qu'il avait considéré son oncle g. comme un père, à l'instar de son cousin w.. Enfin, il indiquait avoir entrepris des soins en détention, tant avec le psychologue qu'avec le psychiatre.

L'expertise du matériel informatique saisi au domicile de m. RI. révélait de nombreuses données pornographiques, ne mettant en scène que des personnes majeures.

cé. AB. épouse RI. décrivait un père joueur mais peu tactile. Elle qualifiait de traditionnelle leur vie sexuelle, au rythme d'un rapport par semaine et d'une à deux fellations par semaine et indiquait qu'il était demandeur, n'étant pas étonnée qu'il puisse fréquenter des prostituées. Elle rapportait les relations de proximités entretenues par son époux avec ses oncles et cousins et notamment w. BO., père des victimes.

é. RI., sœur de l'inculpé, déclarait être très surprise des faits reprochés à son frère, lequel n'avait jamais évoqué ou fait allusion à une quelconque attirance envers les mineurs.

s. ZE., ami de l'inculpé, indiquait que m. RI. adorait le sexe et qu'il n'était pas satisfait des performances de son épouse, raison pour laquelle il rencontrait des prostituées, mais n'avait jamais constaté aucun comportement déplacé à l'égard des enfants, même s'il considérait que l'ensemble de la famille, à l'exception du père, s'exprimait librement en matière de sexualité.

c. RI., mère de l'inculpé, déclarait que son fils avait reconnu les caresses sur les deux jeunes filles, mais indiquait n'avoir pas souhaité obtenir de détails. Elle confirmait la relation de proximité existant entre son fils et son cousin w. BO., lesquels se rencontraient régulièrement notamment à Pignes, et avoir reçu lors d'un parloir les confidences de son fils relatives aux faits d'agression sexuelle dont il aurait été victime étant enfant de la part de son oncle g., rappelant avoir elle-même été violée par son père et deux de ses quatre frères.

r. RI., père de l'inculpé, indiquait avoir eu connaissance des faits reprochés à son fils par l'avocat de celui-ci. S'agissant des faits dont ce dernier aurait été victime ainsi que des viols subis pas son épouse, il indiquait ne pas en avoir eu connaissance jusqu'alors, et être choqué, mais ne mettant nullement en cause la parole de son fils.

g. BO., l'oncle de l'inculpé, contestait formellement l'intégralité des déclarations de son neveu.

Il était procédé à une expertise psychologique des deux victimes, confiée à M. j-b. SA. Cet expert psychologue après avoir examiné r. et c. BO. estimait qu'une confrontation des jeunes victimes avec l'inculpé pouvait être traumatique.

Lors de l'examen de r. réalisé les 3 et 10 septembre 2015, celle-ci relatait un seul épisode d'attouchement dans des circonstances identiques à celles décrites devant les services de police mais faisait également état d'attouchement de son sexe par l'inculpé, lequel lui avait par ailleurs imposé une masturbation lorsqu'il avait dirigeait sa main sur son sexe, expliquant son silence lors de l'enquête, par la gêne et la honte.

L'expert concluait que :

  • - elle ne présentait pas de troubles pathologiques au niveau de l'affectivité, ni de troubles psychiques ou de pathologie mentale,

  • - elle faisait la distinction entre le réel et l'imaginaire, ce qui excluait un fonctionnement d'allure mythomaniaque, et l'entretien ne mettait pas en évidence de contamination dans le discours,

  • - elle évoquait des sentiments de honte, gêne, culpabilité, étant pleinement consciente de la nature sexualisée des actes commis sur sa personne,

  • - elle relatait un vécu psychique de désorganisation, de rupture, qui est celui rencontré habituellement lors d'abus sexuels avérés,

  • - les faits subis par r. impliquaient, au moment de l'examen en octobre 2015, une réalité traumatique toujours présente, le suivi thérapeutique engagé par cette adolescente devant se poursuivre.

Lors de l'examen de c. réalisé les 3 et 10 septembre 2015, l'expert relevait que :

  • - elle ne présentait pas de pathologie mentale ou de trouble de la personnalité, ni de signes de vulnérabilité,

  • - aucun signe d'affabulation, de mythomanie ou d'éléments de contamination n'étaient retrouvés dans son discours,

  • - elle présentait les éléments apparaissant lors d'abus sexuels avérés : culpabilité, angoisses, réminiscences, gêne, honte ; les faits l'ayant par ailleurs plongée dans une ambivalence vis-à-vis de l'inculpé, perçut par elle « comme » un membre de la famille,

  • - elle subissait un traumatisme psychique léger et il était nécessaire, malgré sa réticence, qu'elle poursuive un accompagnement psychologique.

  • Renseignements et personnalité :

m. RI. est de nationalité monégasque, âgé de 32 ans et employé au service des parkings publics de Monaco depuis 2003 où il a été promu chef de parc le 1er septembre 2015. Il est marié depuis 2008 avec cé. AB., femme au foyer, alors qu'ils s'étaient rencontrés à l'âge de 19 ans. Ils ont trois enfants mineurs : ma., g. et el..

Il a été placé sous mandat d'arrêt le 8 septembre 2015. Il a été remis en liberté par le magistrat instructeur par ordonnance du 23 février 2016 et placé sous contrôle judiciaire avec interdiction d'entrer en relation avec r. et c. BO. ainsi que leurs représentants légaux et interdiction de se rendre sur le lieu de commission des faits.

Son casier judiciaire monégasque porte mention d'une condamnation par le Tribunal correctionnel de Monaco le 30 janvier 2006 à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et placement sous le régime de la liberté d'épreuve pendant trois ans, avec obligation particulière de se soumettre à des traitements, soins et tests, pour des faits d'infractions à la législation sur les stupéfiants (détention et usage) commis le 25 janvier 2006. Le rapport de suivi en date du 3 juillet 2008 à l'attention du juge d'application des peines concluait qu'il avait radicalement changé de mode de vie depuis sa condamnation et qu'il évoluait favorablement sur le plan personnel et professionnel. Son casier judiciaire français ne porte mention d'aucune condamnation.

Une expertise psychiatrique de l'inculpé était ordonnée et confiée au Docteur m-j. L-M. qui déposait son rapport le 30 octobre 2015. Après avoir noté que l'inculpé se présentait comme quelqu'un d'égocentré, peu enclin à l'autocritique et dont le sentiment d'empathie est peu développé, l'expert excluait toute anomalie mentale ou psychique ainsi que tout trouble du comportement. Il indiquait qu'il n'était pas dans un état de démence ou de contrainte et concluait à l'absence de dangerosité psychiatrique compte tenu de l'inexistence de pathologie, estimant qu'il était accessible à une sanction pénale et à un suivi socio-éducatif, considérant qu'il était souhaitable qu'il bénéficie d'une prise en charge de type cognito-comportementale.

Une expertise psychologique de l'inculpé était confiée à M. j-b. SA., psychologue clinicien, lequel déposait son rapport le 5 janvier 2016 aux termes duquel il concluait notamment que :

  • - le sujet ne présente pas de désorganisation majeure de la personnalité. Néanmoins, concernant l'agression sexuelle subie enfant qu'il mentionne, si elle était avérée, elle aurait pu avoir des conséquences sur son développement psychologique, l'amenant à être dans un scénario de répétition des agressions subies ;

  • - il n'a pas de déficit d'intelligence et possède de bonnes capacités d'analyse, de synthèse et de logique ;

  • - il ne présente pas de troubles de l'affectivité de nature pathologique, ni de pathologie mentale que ce soit sur le versant psychotique ou névrotique, mais considère qu' « il existe des éléments en faveur d'un trouble du développement de la personnalité lié ici à un dysfonctionnement de la famille élargie du sujet (manque de limite concernant l'intimité et la sexualité entre les adultes et le sujet enfant à ce moment-là), mais aussi en rapport avec des événements de vie traumatiques (agressions sexuelles vécues dans la petite enfance) ».

Il considérait que les faits commis par m. RI. étaient isolés et ne relevaient pas d'un fonctionnement pédophile avéré et en déduisait qu'a priori les risques de récidives seraient peu probables. Il estimait enfin que l'inculpé était accessible à une sanction pénale et considérait qu'un travail de thérapie était « nécessaire, judicieux et obligatoire ».

Le 13 juin 2016, le magistrat instructeur rendait une ordonnance de transmission des pièces de la procédure d'information au Premier Président de la Cour d'appel.

Par arrêt de mise en accusation du 12 octobre 2016, la Chambre du conseil de la Cour d'appel a :

  • - dit qu'il résulte de l'information charges suffisantes contre m. RI. « d'avoir en Italie, courant 2013 et 2014 et depuis temps non couvert par la prescription, commis des attentats à la pudeur sans violence sur les personnes de r. BO., née le 28 juin 2002 et c. BO., née le 20 juin 2004, mineures au-dessous de l'âge de 16 ans accomplis, en l'espèce notamment en faisant des bisous sur la bouche de c., en leur caressant la poitrine, les cuisses et les fesses, en leur faisant toucher son sexe en érection avec leur main, sur le caleçon concernant c. et à même la peau concernant r., et ce à quatre reprises concernant c. et à deux reprises concernant r. »

CRIME PRÉVU ET REPRIMÉ par les articles 261 du Code pénal et 5 du Code de procédure pénale ;

  • - mis en accusation m. RI. et ordonné son renvoi devant le Tribunal criminel pour y être jugé conformément à la loi ;

  • - décerné contre m. RI. ordre de prise de corps.

À l'audience du Tribunal criminel qui s'est tenue du 6 février 2017 au 8 février 2017, le conseil de la partie civile a sollicité du Tribunal qu'il retienne m. RI. dans les liens de la prévention et qu'il le condamne à payer à chacune des deux mineures victimes la somme 20.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le Parquet général a demandé au Tribunal qu'il déclare coupable m. RI. des faits, objet de la prévention et qu'il le condamne à la peine de deux ans d'emprisonnement et ordonne une mesure d'injonction de soins, en fixant à deux ans la durée de l'emprisonnement encouru en cas d'inobservation de l'injonction.

Maître Frank MICHEL et Maître Arnaud CHEYNUT, avocats de m. RI. ont sollicité la clémence du Tribunal, lui demandant de tenir compte des circonstances de la commission des faits et de la personnalité de l'accusé.

m. RI. qui a eu la parole en dernier a réitéré ses regrets.

SUR QUOI,

  • 1°- Sur l'action pénale :

Attendu que m. RI. est poursuivi pour des infractions d'attentats à la pudeur sans violence sur les personnes de r. et c. BO., mineures de moins de 16 ans, les faits ayant consisté en des baisers sur la bouche de c., des caresses sur leur poitrine, leurs cuisses et fesses, et à les obliger à leur faire toucher son sexe en érection avec leur main, sur le caleçon concernant c. et ce à quatre reprises et à même la peau concernant r. à deux reprises ;

Que ces faits sont prévus et réprimés par l'article 261 du Code pénal ;

Attendu que le Tribunal criminel s'est convaincu de la culpabilité de m. RI. au regard des éléments suivants mis en évidence par l'instruction de la procédure et qui ont été débattus contradictoirement à l'audience ;

Attendu qu'il convient en premier lieu de retenir les circonstances de la révélation des faits par les mineures qui ne se sont pas présentées spontanément auprès de la Sûreté publique ou de toute autre institution judiciaire pour dénoncer m. RI. au titre des faits qui le mettent en cause ;

Qu'en effet, les agressions commises à l'encontre de r. et c. BO. n'ont pas été portées directement à la connaissance des autorités judiciaires par les victimes elles-mêmes, mais l'ont été suite au signalement réalisé par des tiers, professionnels de l'éducation, lequel faisait suite aux confidences de r. auprès d'un ami de son âge, intervenues dans le cadre d'une intervention scolaire relative au harcèlement ;

Que ce n'est que parce que la sœur ainée est parvenue à se confier que sa sœur cadette a révélé les agissements de l'inculpé dont elle avait été également victime antérieurement ;

Qu'en dépit du jeune âge des plaignantes à l'époque des faits, la relation des actes d'abus sexuels reprochés à m. RI. apparaît circonstanciée et conforme tant à la réalité temporelle des situations décrites qu'à la localisation matérielle des scènes de crime dans la maison de famille de leur père située à Pignes en Italie ;

Que les victimes décrivent aussi dans leurs déclarations qui n'ont pas varié, un mode opératoire semblable combinant des actes de contrainte morale pratiqués par une personne perçue comme proche et un processus de réitération d'atteintes sexuelles se produisant dans un contexte identique ;

Attendu qu'en second lieu, les éléments de l'information ci-dessus mentionnés permettent de constater que les dénonciations des deux jeunes sœurs victimes se sont trouvées confortées par les déclarations de témoins et d'ami ayant reçu leurs confidences ;

Que par ailleurs, les examens psychologiques des deux mineures concluent à l'authenticité et à la plausibilité des faits qu'elles ont rapportés et font état d'un retentissement traumatique en lien avec les faits subis ;

Attendu qu'en outre, les déclarations détaillées de m. RI. apparaissent pour l'essentiel conformes à celles des victimes ;

Que ce dernier a en effet admis au cours de l'enquête, tout au long de l'information et à l'audience du Tribunal criminel, avoir commis l'essentiel des faits dénoncés ;

Qu'ainsi il a reconnu avoir, toujours dans le même contexte, pratiqué des attouchements sur plusieurs parties du corps de chaque mineure, d'abord à l'encontre de c. à quatre reprises et ensuite à l'égard de r. à deux reprises et les avoir contraintes, chacune, à placer leur main sur son sexe en érection alors pourtant que le retrait rapide de leur main effectué à chaque fois par les jeunes filles lui faisait prendre conscience de l'anormalité de ses agissements ;

Que s'il conteste avoir commis les agissements dénoncés par r. BO. dans ses dernières déclarations, laquelle évoque des caresses sur son sexe et une masturbation, ces dénégations sont sans conséquence sur la réalité et la nature des agissements qu'il reconnait avoir commis ;

Qu'il admet d'ailleurs avoir ensuite demandé à r. de garder le silence sur son comportement transgressif à son égard ;

Que c. BO. a fait également état d'une demande similaire de m. RI. à son endroit ;

Attendu qu'il convient enfin de tenir compte des éléments recueillis sur la personnalité de m. RI., qui a grandi et évolué dans un milieu familial manquant de limite en matière d'intimité et de comportement sexuel, semblant marqué par une dimension incestueuse, l'accusé déclarant avoir lui-même été victime d'actes de cette nature durant son enfance ;

Que par ailleurs, il qualifie d'envahissante sa propre sexualité et l'expert psychiatre considère qu'il s'agit d'une personne égocentrée et peu disposée à l'empathie ;

Attendu que c. BO. a situé les premiers agissements de l'accusé en 2013 et la dernière fois avant Noël 2014 alors que ce dernier, tout en admettant qu'ils se sont produits à quatre reprises, les a situés dans la deuxième moitié de l'année 2014 ;

Qu'il est constant que l'accusé s'est rendu en fin de semaine au cours de l'année 2013 dans la maison de famille lorsque son cousin exerçait son droit visite et d'hébergement à l'égard de ses deux filles, en sorte que rien ne vient contredire la jeune c. BO. qui situe les premiers agissements dès l'année 2013 ;

Attendu qu'à l'époque des faits, les victimes étaient toutes deux mineures de moins de 16 ans, r. BO. pour être née le 28 juin 2002, et c. BO. comme étant née le 20 juin 2004 ;

Attendu qu'en conséquence, les faits reprochés à m. RI. constituent le crime d'attentats à la pudeur sans violence sur les personnes de r. BO., née le 28 juin 2002 et c. BO., née le 20 juin 2004, mineures au-dessous de l'âge de 16 ans accomplis ;

Attendu qu'il existe en la cause des circonstances atténuantes tenant essentiellement à la personnalité de l'accusé dont les experts ont souligné les éléments en faveur d'un trouble du développement lié à un dysfonctionnement de la famille élargie en lien notamment avec les abus sexuels dont ce dernier a pu être victime au cours de son enfance, écartant une structure perverse de la personnalité et tout fonctionnement pédophilique avéré et manifeste ;

Qu'il convient également de tenir compte de la reconnaissance par l'accusé d'avoir commis des actes sexuels transgressifs, des sentiments de honte et de culpabilité qu'il éprouve, de son attachement à son milieu socio-professionnel et familial, et de la démarche thérapeutique qu'il a entreprise dès son incarcération et qu'il poursuit depuis lors ;

Qu'il convient en conséquence compte tenu de la gravité des faits, des circonstances de leur commission et de la personnalité de l'auteur de condamner :

  • - m. RI. à la peine d'une année d'emprisonnement ;

Attendu qu'il y a lieu de dire que l'ordre de prise de corps poursuit ses effets ;

Attendu qu'il y a lieu à confiscation des scellés ;

  • 2°- Sur l'action civile :

Attendu qu'en application de l'article 2 du Code de procédure pénale, l'action pour la réparation du préjudice directement causé par un fait constituant une infraction appartient à tous ceux qui en ont personnellement souffert ;

Que dans ces conditions, doit être déclarée recevable en sa constitution de partie civile, p. RA., ès-qualités d'administrateur ad hoc de r. BO. et c. BO. ;

Attendu que la gravité des faits subis par les deux victimes est à l'origine d'un préjudice d'affection certain que l'expert psychologue a mis en évidence et qu'il convient de réparer par l'allocation d'une somme de 10.000 euros à chacune d'elles ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL CRIMINEL, statuant contradictoirement, et publiquement,

Après en avoir délibéré conformément aux articles 340 à 343 du Code de procédure pénale ;

À la majorité des voix ;

Déclare m. RI., coupable des faits reprochés et justement qualifiés par l'arrêt de mise en accusation :

  • « d'avoir en Italie, courant 2013 et 2014 et depuis temps non couvert par la prescription, commis des attentats à la pudeur sans violence sur les personnes de r. BO., née le 28 juin 2002 et c. BO., née le 20 juin 2004, mineures au-dessous de l'âge de 16 ans accomplis, en l'espèce notamment en faisant des bisous sur la bouche de c., en leur caressant la poitrine, les cuisses et les fesses, en leur faisant toucher son sexe en érection avec leur main, sur le caleçon concernant c. et à même la peau concernant r., et ce à quatre reprises concernant c. et à deux reprises concernant r. », crime prévu et réprimé par les articles 261 du Code pénal et 5 du Code de procédure pénale ;

Vu les articles 245 alinéa 2 et 348 du Code de procédure pénale ;

Accorde à m. RI. le bénéfice des circonstances atténuantes par application de l'article 392 du Code pénal ;

Condamne m. RI. à la peine d'une année d'emprisonnement ;

Vu les articles 12 et 32 du Code pénal, 359 du Code de procédure pénale ;

Dit que l'ordonnance de prise de corps poursuit ses effets ;

Ordonne la confiscation des scellés ;

Dit toutefois que cette confiscation ne sera effective que lorsque ces objets ne seront plus utiles pour d'autres procédures concernant l'accusé ;

Reçoit p. RO., ès-qualités d'administrateur ad hoc de r. et c. BO. en sa constitution de partie civile ;

Condamne m. RI. à payer à titre de dommages et intérêts, la somme de 10.000 euros à r. BO. et la somme de 10.000 euros à c. BO., représentées par p. RO., ès-qualités d'administrateur ad hoc ;

Vu l'article 357 du Code de procédure pénale ;

Condamne m. RI. aux frais ;

Vu l'article 360 du Code de procédure pénale ;

Fixe la durée de la contrainte par corps au minimum ;

Donne au condamné l'avertissement prévu par l'article 362 du Code de procédure pénale qui lui accorde la faculté de se pourvoir en révision pendant un délai de cinq jours francs et dit qu'après ce délai ils n'y sera plus recevable ;

En application des articles 361 et 363 alinéa 1 du Code de procédure pénale, les dispositions des textes de lois appliqués sont ci-après reproduits :

  • article 12 du Code pénal :

« La confiscation, soit du corps du délit quand la propriété en appartient au condamné, soit des choses produites ou procurées par l'infraction, soit de celles qui ont servi ou qui ont été destinées à la commettre, est une peine commune aux matières criminelle, correctionnelle et de simple police. »

  • article 15 du Code pénal :

« La durée de la peine de réclusion à temps sera, selon les cas spécifiés par la loi, soit de dix à vingt ans, soit de cinq à dix ans. »

  • article 32 du Code pénal :

« La confiscation spéciale, les restitutions, les indemnités, les dommages-intérêts envers les parties lésées, si elles les requièrent, sont communs aux matières criminelle, correctionnelle et de simple police ; lorsque la loi ne les a pas réglés, la détermination en est laissée à l'appréciation des tribunaux. »

  • article 261 du Code pénal :

« Tout attentat à la pudeur, consommé ou tenté sans violence sur la personne d'un mineur de l'un ou de l'autre sexe, au-dessous de l'âge de seize ans accomplis, sera puni de la réclusion de cinq à dix ans.

Sera puni de la même peine l'attentat à la pudeur commis par tout ascendant sur la personne d'un mineur, même âgé de plus de seize ans, mais non émancipé par le mariage. »

  • article 392 alinéa 1-4° du Code pénal :

« Les peines prévues par la loi contre l'accusé reconnu coupable, en faveur de qui les circonstances atténuantes auront été déclarées, pourront être réduites :

  • 4° jusqu'à un an d'emprisonnement, si la peine est celle de la réclusion de cinq à dix ans ; »

  • Article 2 du Code de procédure pénale :

« L'action pour la réparation du préjudice directement causé par un fait constituant une infraction appartient à tous ceux qui en ont personnellement souffert, sous réserve des dispositions particulières prévues à l'article suivant.

Cette action sera recevable, indistinctement, pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux ».

  • Article 5 du Code de procédure pénale :

« Tout monégasque qui, hors du territoire de la Principauté, se sera rendu coupable d'un fait qualifié crime par la loi monégasque, pourra être poursuivi et jugé dans la Principauté. »

  • Article 25 du Code de procédure pénale :

« Le tribunal criminel connaît des infractions qualifiées crimes ».

  • Article 245 du Code de procédure pénale :

« L'arrêt de mise en accusation contient les noms, prénoms, date et lieu de naissance, domicile et profession de l'accusé, ainsi que l'exposé sommaire du fait, objet de l'accusation, sa qualification légale et les articles de loi qui le répriment.

Il contient, en outre, un ordre de prise de corps contre l'accusé. Cet ordre sera ramené à exécution conformément aux dispositions de l'article 202. L'accusé sera maintenu en détention, s'il y est déjà. »

  • Articles 340 à 343 du Code de procédure pénale :

  • Article 340 :

« Le Tribunal criminel délibère d'abord sur le fait principal retenu par l'arrêt de renvoi, puis, s'il y a lieu, sur chacune des circonstances aggravantes, sur chacun des faits d'excuse légale, sur la question des circonstances atténuantes que le président sera tenu de poser toutes les fois que la culpabilité de l'accusé aura été retenue, enfin sur l'application de la peine.

Si l'accusé a moins de 18 ans, la délibération porte, à défaut de condamnation, sur les mesures applicables au mineur. »

  • Article 341 :

« Sur chacun des points, le président, après discussion, recueille successivement les voix. Les juges opinent chacun à leur tour, en commençant par les juges supplémentaires suivant l'ordre inverse de leur inscription sur la liste prévue à l'article 269. Le président donne son avis le dernier.

Tous les juges doivent voter sur l'application de la peine, quel qu'ait été leur avis sur les autres questions. »

  • Article 342 :

« L'arrêt est rendu à la majorité des voix. En cas de partage, l'avis favorable de l'accusé prévaut. »

  • Article 343 :

« Si, après deux votes, aucune peine ne réunit la majorité absolue, il sera procédé à des votes successifs, en écartant chaque fois la peine la plus forte, précédemment proposée, jusqu'à ce qu'une peine soit adoptée à la majorité absolue. »

  • Article 348 du Code de procédure pénale :

« Si le tribunal estime qu'il existe des circonstances atténuantes, il le déclare dans l'arrêt et statue conformément aux prescriptions du Code pénal

  • Article 353 du Code de procédure pénale :

« Le tribunal criminel statue par le même arrêt sur les demandes en dommages-intérêts, après avoir entendu les parties et le ministère public.

Dans le cas de renvoi, la partie-civile pourra, à raison des mêmes faits, demander réparation d'un dommage qui a sa charge dans une faute de l'accusé, distincte de celle relevée par l'accusation, ou dans une disposition du droit civil ;

Toutefois, s'il juge que, de ce chef l'affaire n'est pas en état, le tribunal criminel renvoie les parties devant le tribunal civil. »

  • Article 357 alinéa 1 du Code de procédure pénale :

« L'accusé contre lequel une peine est prononcée est condamné aux frais. »

  • Article 359 du Code de procédure pénale :

« Le tribunal ordonne par le même arrêt que les effets placés sous main de justice seront restitués aux propriétaires. Néanmoins, la restitution n'est effectuée qu'une fois l'arrêt devenu définitif.

Lorsque le tribunal criminel est dessaisi, la chambre du conseil de la Cour d'appel est compétente pour ordonner cette restitution sur requête des intéressés ou du ministère public. »

  • Article 360 du Code de procédure pénale :

« L'arrêt fixe la durée de la contrainte par corps pour le recouvrement des condamnations pécuniaires. »

  • Article 361 du Code de procédure pénale :

« L'arrêt est prononcé par le président, en présence du public et de l'accusé.

Il est motivé. En cas de condamnation, il énonce les faits dont l'accusé est reconnu coupable, la peine, les condamnations accessoires et les textes de lois appliqués. »

  • Article 362 du Code de procédure pénale :

« Après avoir prononcé l'arrêt, si l'accusé est condamné, le président l'avertit que la loi lui accorde la faculté de se pourvoir en révision, pendant un délai de cinq jours francs et qu'après ce délai, il n'y sera plus recevable. »

  • Article 363 alinéa 1 du Code de procédure pénale :

« La minute de l'arrêt est établie par le greffier. Elle contient l'indication des textes de loi appliqués. Elle est signée dans les trois jours de la prononciation de l'arrêt par les juges qui l'ont rendu et par le greffier.»

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé en audience publique au Palais de Justice à Monaco, le huit février deux mille dix-sept, par le Tribunal Criminel, composé de Madame Virginie ZAND, Président, Monsieur Paul CHAUMONT, Monsieur Edouard LEVRAULT, juges assesseurs, Madame Catherine NOTARI, Madame Sylviane CURAU, Monsieur Guy MAGARA, jurés titulaires, en présence de Mademoiselle Cyrielle COLLE, Substitut du Procureur général, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier.

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