Tribunal correctionnel, 7 mai 2019, Le Ministère public c/ r. B.
Abstract🔗
Abus de confiance - Éléments constitutifs - Sous-location d'un appartement - Contrat de bail susceptible de faire l'objet du délit (non) - Relaxe
Résumé🔗
Le prévenu doit être relaxé du chef d'abus de confiance. Le contrat de bail qu'il lui est reproché d'avoir détourné en sous louant l'appartement à l'insu du propriétaire ne peut être considéré comme un fond, un meuble, un effet, un denier, une marchandise, un billet, une promesse, une quittance ou encore un écrit contenant ou opérant une obligation ou une décharge tel que cela est limitativement prévu par les dispositions de l'article 337 du Code pénal prévoyant le délit d'abus de confiance. De plus, le détournement ou la dissipation, pour être constitutifs d'un abus de confiance, n'auraient pu davantage porter sur l'appartement que le prévenu aurait sous-loué qui est un immeuble et donc un bien exclu de ladite liste. Enfin, l'enquête n'a pu déterminer avec certitude que la sous location du studio avait été faite avec l'accord du prévenu et avec une contrepartie financière prévue en sa faveur.
Motifs🔗
TRIBUNAL CORRECTIONNEL
2017/002167
JUGEMENT DU 7 MAI 2019
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En la cause du MINISTÈRE PUBLIC ;
Contre les nommés :
1- h. O., né le 9 février 1961 à SAINT-LOUIS (Sénégal), de t. et de s. J. de nationalité kittitienne-névicienne, administrateur de sociétés, demeurant 2 X1- 98000 MONACO (Principauté de Monaco) ;
Prévenu de :
ABUS DE CONFIANCE
- PRÉSENT aux débats, assisté de Maître Dominique SALVIA, avocat au barreau de Nice, plaidant par ledit avocat ;
2- r. B., née le 19 juillet 1973 à AOSTE (Italie), de g-l. et de a. G. de nationalité italienne, gérante de société, demeurant « X2» - X2- 98000 MONACO (Principauté de Monaco) ;
Prévenue de :
COMPLICITÉ D'ABUS DE CONFIANCE
PRÉSENTE aux débats, assistée de Maître Bernard GINEZ, avocat au barreau de Nice, plaidant par ledit avocat ;
LE TRIBUNAL, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience du 23 avril 2019 ;
Vu la procédure enregistrée au Parquet Général sous le numéro 2017/002167 ;
Vu les citations signifiées, suivant exploits, enregistrés, de Maître Claire NOTARI, huissier, en date des 4 et 5 octobre 2018 ;
Vu le renvoi contradictoire de l'affaire prononcé à l'audience du 22 janvier 2019 ;
Vu la note valant conclusions de Maître Dominique SALVIA, avocat pour h. O. prévenu, déposée à l'audience du 23 avril 2019 ;
Ouï les prévenus en leurs réponses ;
Ouï a. P. en ses déclarations qui affirme ne pas vouloir se constituer partie civile ;
Ouï le Ministère Public en ses réquisitions qui sollicite la relaxe pour h. O. et demande la requalification du délit de complicité d'abus de confiance en celui d'escroquerie pour r. B. ;
Ouï Maître Dominique SALVIA, avocat au barreau de Nice, régulièrement autorisé par Monsieur le Président à assister h. O., en ses moyens de défense et plaidoiries par lesquels il sollicite la relaxe de son client ;
Ouï Maître Bernard GINEZ, avocat au barreau de Nice, régulièrement autorisé par Monsieur le Président à assister r. B., en ses moyens de défense et plaidoiries par lesquels il sollicite la relaxe de sa cliente ;
Ouï les prévenus, en dernier, en leurs moyens de défense ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que h. O. et r. B. sont poursuivis correctionnellement sous les préventions :
h. O. :
« D'avoir, à MONACO, courant 2018, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, détourné ou dissipé, au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail, salarié ou non, à charge de les rendre ou représenter, ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, en l'espèce en détournant le contrat de bail en sous louant l'appartement propriété de Monsieur a. P.
DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26 et 337 du Code pénal » ;
r. B. :
« Pour avoir, à MONACO, courant 2018, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, au préjudice de Monsieur a. P. été complice du délit d'abus de confiance, commis par h. O. en aidant ou assistant, avec connaissance, l'auteur de l'action dans les faits qui l'auront préparée ou facilitée ou dans ceux qui l'auront consommée, en l'espèce notamment en trouvant des personnes pour sous-louer le bien, en s'occupant de l'entrée dans les lieux, en percevant le prix,
DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26, 41, 42 et 337 du Code pénal » ;
Attendu qu'il y a lieu avant tout de relever que la période des faits reprochés aux prévenus s'établit en réalité courant 2017 et non courant 2018 comme indiqué par erreur dans la prévention ;
Attendu que les prévenus acceptent de comparaître volontairement sur les faits indiqués dans les citations du 4 et 5 octobre 2018 malgré l'erreur portant sur la période de commission ; que le Tribunal se trouve ainsi valablement saisi par application de l'article 368 du Code de procédure pénale ;
SUR CE,
I) Sur les faits d'abus de confiance reprochés à h. O.
Attendu qu'il convient de relever que le contrat de bail qui est reproché à h. O. de l'avoir détourné en sous louant l'appartement appartenant à a. P. et à l'insu de ce dernier ne peut être considéré comme un fond, un meuble, un effet, un denier, une marchandise, un billet, une promesse, une quittance ou encore un écrit contenant ou opérant une obligation ou une décharge tel que cela est limitativement prévu par les dispositions de l'article 337 du Code pénal prévoyant et réprimant le délit d'abus de confiance ;
Attendu de surcroît qu'il résulte de cette liste exhaustive que le détournement ou la dissipation, pour être constitutifs d'un abus de confiance, n'auraient pu davantage porter sur l'appartement que le prévenu aurait sous-loué qui est un immeuble et donc un bien exclu de ladite liste ;
Attendu enfin que l'enquête n'a pu déterminer avec certitude que la sous location du studio à l. S. durant les mois de novembre et décembre 2017 avait été faite avec l'accord de h. O. et avec une contrepartie financière prévue en faveur de ce dernier ;
Attendu qu'il découle de l'ensemble de ces considérations que h. O. devra être relaxé du délit d'abus de confiance qui lui est reproché ;
II) Sur les faits de complicité d'abus de confiance reprochés à r. B.
Attendu que la relaxe prononcée ci-dessus interdit de reconnaître cette prévenue complice de faits qui n'ont pu être imputés à celui qui était considéré comme étant leur auteur principal ;
Attendu, par ailleurs, que la requalification des faits dont le Tribunal correctionnel a été saisi en escroquerie suggérée par le représentant du Ministère Public à l'audience ne peut, en tout état de cause, être opérée tant la peine maximale encourue pour ce délit prévu par l'article 330 du code pénal est de 5 ans alors que celle prévue pour de la complicité d'abus de confiance initialement reprochée à r. B. est de 3 ans ;
Attendu qu'il convient, en conséquence de prononcer la relaxe de r. B. ;
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL, statuant contradictoirement,
Prend acte de l'acceptation de h. O. et r. B. de comparaître volontairement sur les faits pour lesquels ils ont été poursuivis et qui auraient été commis courant 2017 et non courant 2018 ;
Relaxe h. O. et r. B. des faits qui leur sont ainsi respectivement reprochés ;
Et laisse les frais à la charge du Trésor ;
Composition🔗
Ainsi jugé après débats du vingt-trois avril deux mille dix-neuf en audience publique tenus devant le Tribunal Correctionnel, composé de Monsieur Jérôme FOUGERAS LAVERGNOLLE, Vice-Président, Madame Séverine LASCH, Juge, Madame Virginie HOFLACK, Juge, le Ministère Public dûment représenté, et prononcé à l'audience publique du sept mai deux mille dix-neuf par Monsieur Jérôme FOUGERAS LAVERGNOLLE, en présence de Mademoiselle Cyrielle COLLE, Premier Substitut du Procureur Général, assistés de Madame Marina MILLIAND, Greffier.