Tribunal correctionnel, 9 octobre 2018, Le Ministère Public c/ j-m. GO.
Abstract🔗
Procédure pénale - Saisine du tribunal - Nullité de la citation (non) - Défaut de signature de l'huissier - Formalité substantielle (non) - Absence de grief - Infractions contre les biens - Vol - relaxe (oui) - Soustraction d'un fauteuil roulant électrique - Vol entre époux - Immunité familiale (non) - Objet indispensable à la vie quotidienne de la victime - Intention frauduleuse - Preuve rapportée (non)
Résumé🔗
Le prévenu, poursuivi pour vol, invoque vainement la nullité de la citation. En effet, si cette dernière méconnaît les dispositions de l'article 369-7° du Code de procédure pénale en ce qu'elle ne comporte par la signature de l'huissier instrumentaire, il reste que cette omission, qui ne porte aucun grief à l'encontre du prévenu, ne constitue pas une formalité substantielle. Il y a donc lieu de rejeter l'exception de nullité soulevée.
Le prévenu, poursuivi pour avoir volé le fauteuil roulant électrique de son épouse, invoque l'immunité familiale prévu par l'article 310 du Code pénal. Cependant, si les soustractions commises par le mari au préjudice de sa femme ne peuvent donner lieu qu'à des réparations civiles, cette immunité est écartée lorsque la soustraction porte sur les objets indispensables à la vie quotidienne de la victime. Or, en l'espèce, le fauteuil roulant électrique avec lequel se déplace l'épouse du prévenu, souffrant d'une sclérose en plaque, est un objet indispensable à sa vie quotidienne. L'immunité familiale sera dont écartée. En revanche, alors que les parties sont en instance de divorce, les éléments du dossier laissent apparaître un doute quant à l'intention frauduleuse du prévenu dans cette appropriation. Il convient donc de prononcer sa relaxe.
Motifs🔗
TRIBUNAL CORRECTIONNEL
2018/000493
JUGEMENT DU 9 OCTOBRE 2018
En la cause du MINISTÈRE PUBLIC ;
Contre le nommé :
- j-m. GO., né le 28 décembre 1958 à NICE (06), de Maurice et de Olga VA. de nationalité française, gérant de société, demeurant X1à VALBONNE (06650) ;
Prévenu de :
- VOL
- PRÉSENT aux débats, assisté de Maître Sébastien ZARAGOCI, avocat au barreau de NICE, plaidant par ledit avocat ;
En présence de :
- j. LO. AM. épouse GO., née le 18 janvier 1967 à BENAMAUREL (Espagne), de nationalité espagnole, gérante de société, demeurant X2à MONACO (98000), constituée partie civile, comparaissant en personne, assistée de Maître Raphaëlle SVARA, avocat-stagiaire, plaidant par ledit avocat-stagiaire ;
LE TRIBUNAL, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience de ce jour ;
Vu la procédure enregistrée au Parquet Général sous le numéro 2018/000493 ;
Vu la citation signifiée, suivant exploit, enregistré, de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 09 avril 2018 ;
Vu les conclusions de Maître Sébastien ZARAGOCI, avocat pour le prévenu déposées à l'audience de ce jour et aux termes desquelles il demande, à titre principal et in limine litis, de constater que l'acte de citation n'est pas signé par l'Huissier de Justice et en conséquence de prononcer la nullité dudit acte de citation, à titre subsidiaire, de dire et juger que le scooter dont s'agit n'est pas un objet indispensable à la vie quotidienne de Madame LO. GO. et qu'il n'existe pas de délit de vol entre époux, ces derniers bénéficiant d'une immunité pénale, en conséquence de prononcer la relaxe de j-m. GO. à titre infiniment subsidiaire, de dire et juger que la soustraction frauduleuse du scooter électrique appartenant à Madame LO. GO. n'est pas démontrée, que le délit de vol n'est ainsi pas constitué et prononcer la relaxe pénale de Monsieur GO.;
Ouï Maître Sébastien ZARAGOCI, avocat au Barreau de Nice, régulièrement autorisé par Monsieur le Vice-Président à assister le prévenu, lequel soulève, in limine litis une exception de nullité de procédure sur l'exploit d'huissier sans toutefois demander la nullité de la procédure dans la mesure où son client accepte de comparaitre volontairement ;
Ouï le Ministère Public en ses observations sur l'exception de nullité de la citation à laquelle il s'oppose ;
Monsieur le Vice-Président, après avoir pris l'avis de ses assesseurs, décide de retenir l'affaire et de joindre l'incident au fond ;
Ouï le prévenu en ses réponses ;
Ouï la partie civile, en ses demandes et déclarations ;
Ouï Maître Raphaëlle SVARA, avocat-stagiaire pour la partie civile, en ses demandes et fins ;
Ouï le Ministère Public en ses réquisitions ;
Ouï Maître Sébastien ZARAGOCI, avocat au barreau de NICE, en ses moyens de défense et plaidoiries par lesquels il sollicite la relaxe de son client ;
Ouï le prévenu, en dernier, en ses moyens de défense ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que j-m. GO. est poursuivi correctionnellement sous la prévention :
« D'avoir, à MONACO, le 20 décembre 2017, et en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, frauduleusement soustrait la propriété mobilière d'autrui, en l'espèce un fauteuil roulant électrique, objet indispensable à la vie quotidienne de la victime, au préjudice de j. LO. épouse GO.
DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26 chiffre 4, 27, 309 et 325 du Code pénal » ;
Attendu qu'à l'audience, j. LO. AM. épouse GO. s'est constituée partie civile et a demandé au Tribunal, par l'intermédiaire de son conseil, la condamnation du prévenu à lui payer la somme de 2.100 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel subi et celle de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi ;
Sur l'action publique,
Sur l'exception de nullité de la citation :
Attendu que s'il est établi que l'exploit de citation qui a été adressé à j-m. GO. ne contient pas la signature de l'huissier et contrevient ainsi aux dispositions prévues à l'article 369-7° du Code de Procédure Pénale, il n'en demeure pas moins que cette omission ne constitue pas une formalité substantielle en ce qu'elle ne porte aucun grief à l'encontre du prévenu ;
Attendu qu'il y a donc lieu de rejeter l'exception de nullité de la citation soulevée par j-m. GO. ;
Sur l'immunité familiale entre époux :
Attendu que selon les dispositions de l'article 310 du Code pénal, les soustractions commises par le mari au préjudice de sa femme ne peuvent donner lieu qu'à des réparations civiles sauf lorsque la soustraction porte sur les objets indispensables à la vie quotidienne de la victime ;
Attendu, en l'espèce, qu'il est permis de considérer que tout fauteuil roulant électrique avec lequel j. LO. AM. épouse GO. qui souffre d'une sclérose en plaque se déplace est pour cette dernière un objet indispensable à sa vie quotidienne ;
Attendu qu'il en découle que j-m. GO. ne peut se prévaloir de l'immunité familiale entre époux prévue à l'article suscité ;
Sur les faits :
Attendu que s'il est établi que j-m. GO. a pris possession du fauteuil roulant appartenant à j. LO. AM.épouse GO. les éléments figurant dans la présente procédure, et principalement les échanges de SMS entre les parties qui sont en instance de divorce ou encore avec Monsieur SA. AI. laissent apparaitre un doute quant à l'intention frauduleuse du prévenu dans cette appropriation et ne peut donc caractériser à suffisance le délit de vol poursuivi ;
Attendu qu'il y a donc lieu de relaxer j-m. GO. des faits qui lui sont reprochés ;
Sur l'action civile,
Attendu qu'il convient de recevoir j. LO. AM.épouse GO. en sa constitution de partie civile mais de l'en débouter au fond compte tenu de la relaxe prononcée ci-dessus.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL, statuant contradictoirement,
Rejette l'exception de nullité de la citation soulevée par j-m. GO. .
Dit n'y avoir lieu à immunité familiale relativement au délit de vol entre époux reproché à j-m. GO. .
Relaxe j-m. GO. des fins de la poursuite sans peine ni dépens.
Reçoit j. LO. AM.épouse GO. en sa constitution de partie civile.
Déboute j. LO. AM.épouse GO. de ses demandes en l'état de la relaxe prononcée ci-dessus.
Et laisse les frais à la charge du Trésor.
Composition🔗
Ainsi jugé et prononcé en audience publique du Tribunal de Première Instance, au Palais de Justice, à Monaco, le neuf octobre deux mille dix-huit, par Monsieur Jérôme FOUGERAS LAVERGNOLLE, Vice-Président, Madame Séverine LASCH, Juge, Monsieur Adrian CANDAU, Juge, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Premier Substitut du Procureur Général, assistés de Madame Isabel DELLERBA, Greffier.