Tribunal correctionnel, 7 août 2018, Le Ministère Public c/ r BI.

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Abstract🔗

Conduite sous l'empire d'un état alcoolique - Irrégularité du prélèvement sanguin - Volume de sang prélevé insuffisant - Requalification des faits - Conduite en état d'ivresse manifeste

Résumé🔗

Il est reproché au prévenu l'infraction de conduite sous l'empire d'un état alcoolique. Cependant, s'agissant des modalités de réalisation des vérifications médicales, chimiques et biologiques, il résulte de l'article 16 de l'arrêté ministériel n° 94-531 du 12 décembre 1994 portant application des dispositions de l'ordonnance n° 11.321 du 1er août 1944 que le praticien chargé d'effectuer la prise de sang doit prélever, par ponctions veineuses, un volume de sang qui devrait être au moins de 12 cm3 à répartir entre les deux flacons. Or, en l'espèce, le volume recueilli sur le prévenu a été de deux flacons de 5 centilitres chacun. Ainsi, le taux de 1,43 gramme pour mille qui est issu de ce prélèvement ne peut être retenu à son encontre. En revanche, il a reconnu avoir consommé plusieurs verres d'alcool le soir des faits. Il avait donc conscience de son état d'ivresse. Il convient de requalifier les faits en ce sens et de retenir la culpabilité du prévenu du chef de conduite en état d'ivresse manifeste.


Motifs🔗

TRIBUNAL CORRECTIONNEL

JUGEMENT DU 7 AOÛT 2018

  • En la cause du MINISTÈRE PUBLIC ;

Contre le nommé :

  • - r BI., né le 19 août 1986 à AVIGNON (84), de r. et de j. RU. de nationalité française, chef d'entreprise, demeurant X1 à AVIGNON (84000) ;

Prévenu de :

  • - CONDUITE SOUS L'EMPIRE D'UN ÉTAT ALCOOLIQUE - DESTRUCTION OU DÉGRADATIONS VOLONTAIRES DE LA PROPRIÉTÉ MOBILIÈRE D'AUTRUI - DÉFAUT DE PERMIS DE CONDUIRE (contraventions connexes)

- PRÉSENT aux débats, DÉTENU (mandat d'arrêt du 6 août 2018), assisté de Maître Thomas BREZZO, avocat-stagiaire, commis d'office, plaidant par ledit avocat-stagiaire ;

En présence de :

  • - L'ÉTAT DE MONACO, représenté au sens de l'article 153 du Code de Procédure Civile, par Monsieur le Ministre d'État pris en son Service des Parking Publics, X2 à MONACO CEDEX (98013), prise en la personne d'Eric SCIAMANNA, chef de service, demeurant en cette qualité audit siège constitué partie civile, REPRÉSENTÉ à l'audience par Pascal HAMAÏDE, contrôleur au sein dudit service ;

LE TRIBUNAL,

jugeant correctionnellement, après débats à l'audience de ce jour ;

Vu la procédure enregistrée au Parquet Général sous le numéro 2018/001203 ;

Vu le procès-verbal de flagrant délit dressé le 6 août 2018 ;

Ouï le prévenu qui, en l'absence de Maître Gaston CARRASCO, avocat au Barreau de Nice, choisi par ses soins en lieu et place de Maître Thomas BREZZO, avocat-stagiaire, initialement désigné, sur sa demande, au titre de la commission d'office, sollicite que ce dernier, présent à l'audience, soit à nouveau chargé de la défense de ses intérêts ;

Ouï Maître Thomas BREZZO, lequel accepte la défense du prévenu, au titre de la commission d'office, et sollicite de prendre connaissance de la procédure le temps du délibéré de la précédente affaire ;

Ouï le prévenu en ses réponses, lequel déclare accepter d'être jugé immédiatement et renoncer à la faculté conférée par l'article 400 du Code de procédure pénale ;

Ouï Maître Thomas BREZZO, avocat-stagiaire, lequel soulève in limine litis une exception de nullité fondée sur l'application de l'Arrêté Ministériel n° 94-531 du 12 décembre 1994 ;

Ouï le Ministère Public en ses observations sur l'exception de nullité ; Ouï Monsieur le Vice-Président, qui après avoir pris l'avis de ses assesseurs, décide de joindre l'incident au fond ;

Ouï r BI. en ses réponses ;

Ouï Pascal HAMAÏDE, contrôleur au sein du SERVICE DES PARKINGS PUBLICS, pour l'État de Monaco, en ses demandes et déclarations ;

Ouï le Ministère Public en ses réquisitions ;

Ouï Maître Thomas BREZZO, avocat-stagiaire pour le prévenu, en ses moyens de défense et plaidoiries ;

Ouï le prévenu, en dernier, en ses moyens de défense ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que r BI. comparaît devant le Tribunal correctionnel, selon la procédure de flagrant délit, sous les préventions :

  • « D'avoir, à MONACO, le 6 août 2018, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, conduit un véhicule automobile, immatriculé DE-***-EY, alors qu'il se trouvait même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste, sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par la présence dans le sang d'un taux d'alcool pur, égal ou supérieur à 0,80 gramme pour mille, en l'espèce de 1,43 gramme pour mille,

  • DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26 et 391-13-2 ° du Code pénal,

Dans les mêmes circonstances de temps et de lieu :

  • conduit un véhicule automobile ou un ensemble de véhicule, un cyclomoteur, une motocyclette, un tricycle ou un quadricycle à moteur, sans être porteur d'un permis de conduire en état de validité correspondant à la catégorie du véhicule utilisé,

  • CONTRAVENTION CONNEXE prévue et réprimée par les articles 116, 117, 153, 172 et 207 du Code de la route,

  • volontairement causé un dommage à la propriété mobilière au préjudice de la société C, en l'espèce une barrière,

  • CONTRAVENTION CONNEXE prévue et réprimée par les articles 29 et 419-1 ° du Code Pénal » ;

Attendu qu'à l'audience, l'État de Monaco s'est constitué partie civile et a sollicité, par l'intermédiaire de son agent, la condamnation du prévenu au paiement de la somme de 210 euros en réparation du préjudice subi selon devis établi par la SAM A en date du 6 août 2018 ;

  • Sur l'action publique :

Attendu, selon les dispositions de l'article 16 de l'Arrêté Ministériel n° 94-531 du 12 décembre 1994 portant application des dispositions de l'ordonnance 11.321 du 1er août 1944 concernant les délits de conduite d'un véhicule en état d'ivresse et sous l'empire d'un état alcoolique et plus précisément les modalités de réalisation des vérifications médicales, chimiques et biologiques, que le praticien chargé d'effectuer la prise de sang doit prélever, par ponctions veineuses, un volume de sang qui devrait être au moins de 12 cm3 à répartir entre les deux flacons ;

Attendu qu'il ressort en l'espèce des fiches « B » et « C » que le volume recueilli sur la personne de r BI. a été de deux flacons de 5 centilitres chacun ;

Attendu qu'il en découle que les modalités de prélèvement telles qu'imposées par les textes rappelés ci-dessus n'ont pas été respectées de sorte que le taux de 1,43 gramme pour mille qui est issu de ce prélèvement ne peut être retenu à l'encontre de r BI. ;

Attendu cependant que r BI. a reconnu au cours de la procédure avoir consommé plusieurs verres d'alcool le soir des faits et tenté vainement d'appeler un taxi pour retourner à son domicile de BEAUSOLEIL ;

Attendu que ce prévenu avait donc conscience de son état d'ivresse, caractérisé par ailleurs par les constatations faites par les policiers interpellateurs ;

Attendu qu'il convient donc de requalifier les faits dont le Tribunal correctionnel a été saisi en délit de conduite en état d'ivresse manifeste et de déclarer r BI. coupable de cette infraction mais aussi des deux contraventions connexes qui sont parfaitement établies et d'ailleurs reconnues par le prévenu ;

Qu'il y a lieu de lui faire application de la loi pénale en tenant compte, cependant, de sa qualité de délinquant primaire en Principauté de MONACO qui lui permet de bénéficier du sursis simple mais quant à la peine d'emprisonnement seulement ;

  • Sur l'action civile :

Attendu qu'il y a lieu de recevoir l'État de Monaco en sa constitution de partie civile à laquelle r BI. ne s'est pas opposé ;

Qu'il convient de faire droit à sa demande en condamnant r BI. à lui payer la somme de 210 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice matériel subi ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL,

statuant contradictoirement,

  • Sur l'action publique :

Fait droit à l'exception de nullité relative au prélèvement sanguin soulevée par r BI. ;

Requalifie le délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique en délit de conduite en état d'ivresse manifeste ;

Déclare r BI. coupable dudit délit ainsi que des deux contraventions connexes qui lui sont reprochés ;

En répression, faisant application des articles 26, 29, 391-13-1°, 393 et 419-1° du Code Pénal et des articles 116, 117, 153, 172 et 207 du Code de la route, le condamne aux peines de :

  • - DEUX MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, l'avertissement prescrit par l'article 395 du Code pénal ayant été adressé au condamné, et de MILLE CINQ CENTS EUROS D'AMENDE pour le délit,

  • - TROIS CENTS EUROS D'AMENDE pour la contravention connexe de défaut de permis de conduire,

  • - DEUX CENTS EUROS D'AMENDE pour celle de destruction ou dégradations volontaires de la propriété mobilière d'autrui ;

  • Sur l'action civile :

Reçoit l'État de Monaco en sa constitution de partie civile ;

Le déclarant fondé en sa demande, condamne r BI. à lui payer la somme de 210 euros chacun à titre de dommages-intérêts ;

Condamne enfin r BI. aux frais ;

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé en audience publique du Tribunal de Première Instance, au Palais de Justice, à Monaco, le sept août deux mille dix - huit, par Monsieur Jérôme FOUGERAS LAVERGNOLLE, Vice-Président, Monsieur Adrian CANDAU, Juge, Madame Virginie HOFLACK, Juge, en présence de Monsieur Hervé POINOT, Procureur Général Adjoint, assistés de Madame Isabel DELLERBA, Greffier.

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