Cour de révision, 8 avril 2021, c. C. c/ k. R. épouse C.

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Abstract🔗

Divorce - Pension alimentaire - Défaut de paiement - Infraction - Capacité du débiteur - Appréciation souveraine

Résumé🔗

Sous couvert de dénaturation et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation que, sans contradiction ni insuffisance, la Cour d'appel a souverainement portée sur la situation financière de M. C. et sa capacité à faire face à ses obligations, qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli. Il relève de l'office du juge, d'une part d'apprécier la force probatoire des éléments susceptibles de caractériser une infraction qui ont été soumis à son examen et d'autre part de décider d'écarter ou non une pièce communiquée lors des débats et soumise au contradictoire des parties présentes ou représentées ; qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli.

C'est sans commettre la violation allégée que la Cour d'appel a pu retenir que l'expression employée par le Ministère public était sans emport sur la décision, il s'ensuit que le moyen ne peut accueilli.


Motifs🔗

Pourvoi N° 2021-11

Hors Session pénale

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 8 AVRIL 2021

En la cause de :

- c. C., de nationalité italienne, traducteur, demeurant X1- 11361 ATHENES (Grèce) ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Pierre-Anne NOGHES-DU MONCEAU, avocat-défenseur, près la Cour d'appel de Monaco et ayant pour avocat plaidant Maître Alice PASTOR, avocat-défenseur, près la même Cour ;

DEMANDEUR EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- Le Ministère public ;

En présence de :

- k. R. épouse C., née le 27 octobre 1967 à MEZÖTUR (Hongrie), de nationalités hongroise et italienne, demeurant X2 à MONACO (98000), constituée partie civile,

Bénéficiaire de l'assistance judiciaire par décisions n° 177 BAJ 19 et 187 BAJ 19 du 17 janvier 2019

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur, près la Cour d'appel de Monaco ;

DÉFENDERESSE EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

- l'arrêt de la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, en date du 23 novembre 2020 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 27 novembre 2020, par Maître Alice PASTOR, avocat, au nom de c. C. ;

- Vu l'ordonnance de Madame le Premier Président ayant désigné d'office Maître Pierre-Anne NOGHES-du MONCEAU aux fins de signature de la requête à déposer, suite au courrier de Maître Alice PASTOR en date du 27 novembre 2020 ;

- la requête en révision déposée le 14 décembre 2020 au greffe général, par Maître Pierre-Anne NOGHES-DU MONCEAU, avocat-défenseur, au nom de c. C. accompagnée de 5 pièces ;

- Vu la notification du dépôt de la requête faite à Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur au nom de k. R. épouse C. partie-civile, par lettre recommandée avec avis de réception en date de 17 décembre 2020 ;

- la contre-requête en révision déposée le 23 décembre 2020 au greffe général, par Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur, au nom de c. C. signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 29 décembre 2020 ;

- le certificat de clôture établi le 13 janvier 2021 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 11 mars 2021, sur le rapport de Madame Martine VALDES-BOULOUQUE, Conseiller ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu que M. c. C. et Mme k. R. se sont mariés le 11 avril 1998, que deux enfants sont nés de cette union, en 2002 et 2005 ; qu'en 2012, Mme k. R. a déposé une requête en divorce, qu'aux termes d'une ordonnance de non conciliation en date du 4 décembre 2013 et d'un jugement du Tribunal de première instance en date du 1er juin 2017, confirmé sur ce point par un arrêt de la Cour d'appel en date du 22 mai 2018, M. c. C. a été condamné à payer une pension alimentaire de 500 € mensuelle à son épouse et une part contributive mensuelle à l'entretien et à l'éducation de ses enfants de 1.200 € par mois, avec effet rétroactif à compter du 6 juillet 2016 ; qu'à la suite de plusieurs plaintes pour non-paiement des pensions alimentaires, il a été déclaré coupable des faits d'abandons de famille et condamné à la peine d'un mois d'emprisonnement avec sursis, par jugement du tribunal correctionnel en date du 26 novembre 2019 ; qu'il a interjeté appel ; qu'aux termes d'un arrêt en date du 23 novembre 2020, la Cour d'appel a confirmé ce jugement ; qu'il s'est pourvu en révision ;

Sur les premier, deuxième, troisième et quatrième moyens réunis :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de déclarer M. c. C. coupable des délits d'abandon de famille, alors, selon le moyen, de première part, 1) « qu' en confirmant le jugement du Tribunal correctionnel sans répondre au moyen tiré de l'absence de résidence de Monsieur C. à Monaco tandis que les premiers juges retenaient qu'il s'y était maintenu et que le paiement du loyer est le seul motif sur lequel sa condamnation est fondée, les juges d'appel ont violé la loi » ; 2) « qu'alors que le requérant a démontré s'être trouvé sans revenu durant la période de prévention et dans l'impossibilité absolue de payer, la Cour n'a pas tiré les conséquences de ces faits rappelés aux conclusions », alors, de deuxième part, 1) « que la Cour d'appel n'a pas censuré le Tribunal correctionnel en considérant que si Monsieur C. disposait de suffisamment de moyens pour acquitter un loyer, il disposait de facto de moyens suffisants pour acquitter les montants de la pension alimentaire et de la part contributive mise à sa charge ; que ce faisant, la Cour a privé sa décision de base légale, en fondant son raisonnement sur une simple déduction et en écartant de son raisonnement les pièces produites démontrant l'impécuniosité du Requérant, qui ne parvenait pas à régler son loyer et qui a bénéficié de l'aide sociale de la Direction de l'action sanitaire et sociale et notamment de la Croix Rouge monégasque qui a partiellement pris en charge le règlement du loyer de M. C. ; qu'elle a encore privé sa décision de base légale en omettant que M. C. avait en réalité quitté son logement faute de pouvoir en acquitter le loyer » ; 2) « que la Cour d'appel a privé sa décision de base légale aux motifs que Monsieur C. échouerait à rapporter la preuve de »l'impossibilité absolue« de satisfaire aux paiements des contributions alimentaires, alors que Monsieur C. a fourni la preuve et les justificatifs de son impécuniosité et donc de son impossibilité à acquitter les contributions financières mises à sa charge, ces dernières étant disproportionnées eu égard à son revenu et de ses charges incompressibles » ; alors, de troisième part, 1) « qu'il est reproché à la Cour d'appel d'avoir adopté un raisonnement contradictoire s'agissant de la portée d'une attestation produite par le Requérant, délivrée par l'Institut national de Sécurité Sociale italienne le 12 novembre 2018 (INPS), par laquelle il est indiqué que celui-ci ne percevait ni pension, ni allocation chômage et qu'il ne remplissait pas les conditions pour en bénéficier » ; 2) « qu'il est reproché à la Cour d'avoir opéré une confusion sur la date de cessation d'activité de Monsieur C. qui correspond au jour de la résiliation de son bail et de son départ de Monaco, et retenu une date antérieure, et de s'être contredite en indiquant qu'il ne se serait pas expliqué sur les raisons de son arrêt d'activité » ; et alors enfin, 1) « que l'Arrêt entrepris mentionne que le divorce des époux C R. a été prononcé aux torts de l'époux, alors que l'arrêt de la Cour d'appel du 28 septembre 2018 a prononcé le divorce aux torts et griefs partagés et supprimé la prestation compensatoire de 50.000 euros mis à la charge du Requérant (p.13 conclusions du 14/12/20 » ; 2) « qu'il est reproché à la Cour d'appel d'avoir dénaturé les faits, en modifiant le sens clair et précis des pièces soumises à son examen ; que la Cour d'appel n'a pas examiné les pièces produites mais s'est au contraire fondée exclusivement sur un jugement du Tribunal de Première Instance en date du 1er juin 2017 et un arrêt de la Cour d'appel en date du 28 septembre 2018 statuant sur les mesures provisoires et dont le contexte, dans chacune de ces décisions, a été dénaturé ; qu'ainsi donc, non seulement M. C. n'est pas à l'origine de »l'opacité sur sa situation« mais il a subi et continue de subir les conséquences d'une décision qui a porté atteinte au principe du contradictoire et de l'égalité des armes, d'autant plus que la procédure est seulement sur pièces » ; 3) « que la Cour d'appel a confirmé le jugement du Tribunal correctionnel »faute pour le prévenu de soumettre à la Cour les éléments pertinents de nature à renverser la présomption simple de responsabilité«, alors que non seulement les justificatifs qu'il fournit n'ont pas été considérés »pertinents« et qu'il lui est reproché de ne pas avoir produit »aucune nouvelle pièce« alors qu'en réalité cela ne lui a pas été permis » ; 4) « qu'il est reproché à la Cour, ayant effectué une analyse approfondie des relevés bancaires du requérant, d'avoir opéré une confusion entre les faits et la chronologie, et de s'être manifestement heurtée à une mécompréhension sur la portée de ces éléments, de sorte qu'elle a abouti à une appréciation erronée des faits » ; 5) « qu'il est reproché à la Cour d'appel d'avoir confirmé le jugement du Tribunal correctionnel en s'étant appuyée sur des faits inexistants et hypothétiques ou bien sur des faits dont la chronologie est erronée ; que la Cour d'appel fait manifestement grief à Monsieur C. dans la rédaction de son arrêt de n'avoir pas explicité les raisons pour lesquelles il se serait trouvé sans activité professionnelle durant une période importante, mais que cette motivation est sans lien avec la nature du litige, Monsieur C. n'ayant pas été invité à s'expliquer sur les raisons de son absence d'emploi, soit dix ans avant le début de la période de prévention » ;

Mais attendu que, sous couvert de dénaturation et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation que, sans contradiction ni insuffisance, la Cour d'appel a souverainement portée sur la situation financière de M. C. et sa capacité à faire face à ses obligations, qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le cinquième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de déclarer M. c. C. coupable des délits d'abandon de famille, alors, selon le moyen, de première part, « qu'il est reproché à la Cour d'appel d'avoir violé le principe de la présomption d'innocence du requérant en avalisant le raisonnement de l'autorité poursuivante l'ayant préjugé coupable au cours de l'enquête, aux motifs que » la critique de la motivation des premiers juges au motif de l'usage des termes précités est sans emport, s'agissant de l'office même de ce dernier (le Ministère public) que de caractériser les éléments de l'infraction ; Qu'il en va de même de l'utilisation dans la motivation du terme de « victime », terme générique sans incidence démontrée sur l'appréciation des éléments de la cause par le tribunal ; que pour le surplus, l'analyse sémantique des termes du jugement rendu à laquelle se livre le prévenu et les critiques qui en découlent ne caractérisent aucune forme de préjugé ou de parti pris et ne peuvent davantage illustrer un défaut de motivation ou une motivation contradictoire ; alors que le paragraphe 2 de l'article 6 de la CEDH consacre le principe de la présomption d'innocence en exigeant qu'en remplissant leurs fonctions les membres du tribunal ne partent pas de l'idée préconçue que le prévenu a commis l'acte incriminé « ; et alors, de seconde part, » qu'il est reproché à la Cour d'appel de n'avoir pas prononcé le rejet d'une pièce communiquée par la partie civile à l'audience, alors qu'en l'absence du Requérant, ce dernier était dans l'incapacité d'en prendre connaissance et de faire part à la Cour de ses observations ; que ce faisant, la Cour a violé le principe du contradictoire et l'égalité des armes « ;

Mais attendu qu'il relève de l'office du juge, d'une part d'apprécier la force probatoire des éléments susceptibles de caractériser une infraction qui ont été soumis à son examen et d'autre part de décider d'écarter ou non une pièce communiquée lors des débats et soumise au contradictoire des parties présentes ou représentées ; qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le sixième moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de déclarer M. c. C. coupable des délits d'abandon de famille, alors, selon le moyen, » qu'il est reproché à la Cour d'appel d'avoir violé le principe d'interprétation stricte de la loi pénale qui trouve sa source dans le principe de la légalité des peines, consacré à l'article 4 du Code pénal et à l'article 7 de la CEDH, aux motifs qu'elle aurait dû censurer l'expression «évaluer l'ampleur de la mauvaise foi du débiteur» employé par le Ministère Public dans un courrier adressé au conseil de Mme R. et qu'elle a au contraire estimé que cette expression était «sans emport » " ;

Mais attendu que c'est sans commettre la violation allégée que la Cour d'appel a pu retenir que l'expression employée par le Ministère public était sans emport sur la décision, qu'il s'ensuit que le moyen ne peut accueilli ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

- Rejette le pourvoi,

- Condamne M. c. C. aux frais.

Composition🔗

Ainsi jugé et rendu le huit avril deux mille vingt et un, par la Cour de révision de la Principauté de Monaco, composée de Madame Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Laurent LE MESLE, Conseiller et Madame Martine VALDES-BOULOUQUE, Conseiller, rapporteur.

Et Madame Madame Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, a signé avec Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, Le Premier Président,

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