Cour de révision, 12 octobre 2020, Monsieur j. m. s. R. c/ Monsieur m. h. K-V. et la Société Anonyme ALLIANZ SUISSE SOCIÉTÉ D'ASSURANCES SA

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Contrat - Obligations - Interprétation souveraine - Crédit-bail - Dénaturation - Indemnisation -Faute non

Résumé🔗

M. R. fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande d'indemnisation de la perte de valeur du navire à défaut de mandat général pour défendre les intérêts du crédit- bailleur et en conséquence de le débouter de ce chef en raison de sa qualité de crédit-preneur sans mandat général au moment de l'introduction de l'instance.

Mais la cour d'appel a exactement retenu, qu'au moment de l'incendie du « Shake'n Bake II », pas plus qu'à la date d'introduction de l'instance, M. R. crédit-preneur, n'avait pas la qualité de propriétaire du bateau, lequel appartenait à la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR et que le fait qu'il en ait acquis ultérieurement, le 6 mai 2016, la propriété et ait procédé au rachat de la valeur résiduelle du contrat de crédit-bail, ne lui conférait pas pour autant la qualité pour agir en l'absence de toute cession à son bénéfice du droit à indemnisation dont était titulaire la banque ; que, répondant aux conclusions invoquées, elle a relevé, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que les termes de l'article 9 des conditions générales du contrat de crédit-bail qui prévoyait que le crédit-preneur devait « informer immédiatement la Banque par LRAR ou par télégramme, de tout acte ou tout fait qui pourraient de quelque manière que ce soit porter préjudice au droit de propriété du bateau, assumant à ses propre frais et dans l'intérêt de la Banque toute initiative opportune dans le cadre d'une procédure judiciaire » mettaient uniquement une obligation contractuelle à la charge du locataire d'informer le propriétaire de tout évènement susceptible de porter préjudice au droit de propriété du bailleur, l'action en indemnisation de la perte de valeur du bateau appartenant exclusivement au propriétaire ;elle a ainsi légalement justifié sa décision.

La Cour d'appel a constaté que le capitaine du « Mamimo II » n'était pas en service au moment de l'incendie, que si le contrôle d'alcoolémie effectué 2h30 après le sinistre avait révélé un taux de 0,54 mg par litre d'air expiré, il résultait de l'analyse tant des divers témoignages, que du déroulement des faits, qu'il avait agi avec sang-froid et détermination en prenant toutes les mesures de sécurité nécessaires, que la multiplication de ses tentatives et l'enchainement des interventions menées ne révélaient pas une réaction inadéquate mais au contraire un comportement diligent et totalement maitrisé ; elle a ainsi pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, qu'aucune faute tant du propriétaire du bateau que de son préposé n'était caractérisée, quel qu'en soit le fondement invoqué.


Motifs🔗

Pourvoi N° 2020-38

en session civile

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2020

En la cause de :

- j. m. s. R., né le 29 août 1979 à New York ( États-Unis d'Amérique), de nationalité hellénique, Directeur Général de la SAM C TRANSPORT MARITIME, demeurant et domicilié 27 avenue Princesse Grace à MONACO (98000) ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Clyde BILLAUD, avocat près la même Cour ;

DEMANDEUR EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- m. h. K-V., né le 26 août 1957 à Zürich (Suisse), de nationalité allemande, demeurant X2 (Allemagne) ;

- La Société Anonyme ALLIANZ SUISSE SOCIETE D'ASSURANCES SA, dont le siège social est situé à Richtiplatz 1, 8304 WALLISELLEN (Suisse), agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur, Maître Gerd ZIEGENFEUTER, avocat au Barreau de Nice et Maître Victor STEINBERG, avocat au Barreau de Paris ;

- L'ÉTAT DE MONACO, représenté au sens de l'article 139 du Code de procédure civile par Son Excellence Monsieur le Ministre d'État, demeurant en cette qualité au Palais du Gouvernement, sis Place de la Visitation à MONACO (98000) ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

- La société anonyme de droit français AXA FRANCE IARD, dont le siège social est sis 33 Terrasses de l'Arche - NANTERRE CEDEX (97727), agissant poursuites et diligences de son Directeur Général, Président du conseil d'administration, Administrateur en exercice, demeurant en cette qualité audit siège

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Sophie LAVAGNA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, plaidant par ledit avocat-défenseur et ayant pour avocat plaidant Maître Bertrand PERIER, avocat aux Conseils ;

DÉFENDEURS EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

VU :

- l'arrêt rendu le 28 janvier 2020 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 25 février 2020 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 25 mars 2020, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de j. m. s. R.;

- la requête déposée le 20 mai 2020 au Greffe général, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de j. m. s. R. accompagnée de 36 pièces, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 17 juin 2020 au Greffe général, par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de m. h. K-V. et de la société anonyme ALLIANZ SUISSE SOCIETE D'ASSURANCES SA, accompagnée de 54 pièces, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 19 juin 2020 au Greffe général par Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur, au nom de L'ÉTAT DE MONACO, accompagnée de 12 pièces, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 19 juin 2020 au Greffe général par Maître Sophie LAVAGNA, avocat-défenseur, au nom de la Société anonyme de droit français AXA FRANCE IARD, accompagnée de 2 pièces, signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère public en date du 30 juin 2020 ;

- le certificat de clôture établi le 3 août 2020 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 8 octobre 2020 sur le rapport de Madame Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï Madame le Procureur général ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt critiqué, que M. j. m. s. R. a souscrit le 7 juillet 2010 un contrat de crédit-bail avec la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR pour le financement de l'achat d'un navire de plaisance « Shake'n Bake II » dont le prix s'élevait à 7.553.724 euros ; que dans la nuit du 7 août 2012, un incendie s'est déclaré sur le navire dénommé « Manimo II », dont le capitaine était M. a N. et le propriétaire M. K-V. et qui était amarré à côté du « Shake'nBake II » dans le port Hercule à Monaco ; que l'incendie s'est propagé au « Shake'n Bake II » qui n'a pu être éloigné qu'une fois le feu circonscrit par les sapeurs-pompiers ; que la société GENERALI FRANCE, assureur corps du navire, ayant refusé sa garantie pour non-respect de certaines dispositions de la police d'assurance, M. R. a fait assigner M. K-V. et son assureur la société ALLIANZ SUISSE SA devant le Tribunal de première instance pour voir ce dernier déclaré responsable des dommages subis par le bateau et condamné in solidum avec son assureur à lui payer la somme de 6.132.820,28 euros ; que M K-V. et son assureur ont fait assigner l'État de Monaco et son assureur, la SA AXA France IARD, à l'effet d'obtenir sa condamnation à le relever et garantir de toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre ; que le tribunal, après avoir ordonné la jonction des procédures, a, notamment, déclaré irrecevables les demandes de M. R. tendant au paiement du coût des travaux de réparation du navire et recevable sa demande d'indemnisation de la perte de jouissance subie et de remboursement des dépenses accessoires, le déboutant de l'intégralité de ses demandes ; que par arrêt du 28 janvier 2020, la Cour d'appel a confirmé en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. R. fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande d'indemnisation de la perte de valeur du navire à défaut de mandat général pour défendre les intérêts du crédit- bailleur et en conséquence de le débouter de ce chef en raison de sa qualité de crédit-preneur sans mandat général au moment de l'introduction de l'instance, alors, selon le moyen, de première part, qu' « il est constant et non contesté que M. R. a financé l'achat de son navire par crédit-bail, c'est-à-dire un contrat où les loyers payés par le crédit-preneur représentent aussi bien la rémunération pour l'utilisation du bien, que l'anticipation d'une partie du prix du bien et dont l'élément essentiel est l'option d'achat du bien donné en location» ; que selon les termes de l'article 4 des conditions particulières du contrat de bail précité : «À la fin de la période de location, l'Utilisateur aura la faculté d'acquérir le bateau moyennant le prix correspondant au montant net de l'option d'achat susmentionné, dûment majoré des taxes applicables à la date de la vente et montant de la TVA en sus» ; qu'en effet, M R. le 6 mai 2016, a exercé l'option d'achat du Navire ; qu'en raison même de sa nature, le contrat de crédit-bail, dans ces conditions générales, stipule ce qui suit : clause 1 et 12 du préambule : «la Banque [...] ayant pour objet [...] l'achat de biens [...] aux seules fins de les mettre à disposition de sa clientèle qui les a choisis et indiqués et qui en assume tous les risques correspondants[...], intervient dans l'opération [...] uniquement en tant que simple intermédiaire financier afin de permettre à l'Utilisateur de disposer du bateau» ; - clause 9 : «l'utilisateur s'engage à informer immédiatement la Banque par LRAR ou par télégramme de tout acte ou tout fait qui pourrait de quelque manière que ce soit porter préjudice aux droits de propriété du bateau, assumant à ses propres frais dans l'intérêt de la Banque, toute initiative opportune y compris dans le cadre d'une procédure judiciaire» ; clause 20. I et II : «À compter du trentième jour suivant l'échéance du crédit-bail, l'Utilisateur devra restituer le bateau [...] avec tous ses équipements, accessoires, transformations, aménagements (conformément à la description faite dans le Procès-Verbal de livraison et dans la facture d'achat) [...] la Banque accorde à l'Utilisateur à la condition suspensive du respect préliminaire et intégrale de tous les engagements pris par l'Utilisateur [...] un droit d'option d'achat du bateau [...] » - qu'il résulte ainsi en termes non équivoques de la lecture combinée des clauses qui précèdent que la banque bailleresse n'intervient qu'en qualité d'organisme de financement et tous les risques liés aux biens sont assumés par le locataire/utilisateur qui, par contrat, (i) agit comme mandataire du crédit-bailleur pour exercer, même en justice («y compris dans le cadre d'une procédure judiciaire»), les initiatives opportunes pour défendre les droits du propriétaire (ii) à la fin du contrat, a l'obligation de résultat de restituer un navire conforme au procès-verbal de livraison, sauf en cas d'exercice de l'option d'achat ; que pour autant, il en découle nécessairement qu'en affirmant que la clause 9 des conditions générales du contrat de crédit-bail «prévoit uniquement une obligation contractuelle d'informer le propriétaire de tout événement susceptible de porter préjudice au droit de propriété du bateau et de toute initiative de locataire pour préserver les intérêts du propriétaire» pour statuer, ainsi qu'elle l'a fait, que j. R. ne pouvait exercer les droits ouverts au locataire du «SHAKE'N BAKE II» et non ceux revenant au propriétaire, la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR « pour confirmer le jugement du Tribunal de Première Instance sur le point de l'irrecevabilité, la Cour d'appel a dénaturé le contrat de crédit-bail et le contenu des clauses sus-indiquées et violé par la même les articles 989 et 1823 du Code civil » ; et, alors, de seconde part, qu'aux termes de la clause 1 des Conditions Générales du contrat de crédit-bail : «la Banque [...] ayant pour objet l'achat de biens [...] aux seules fins de les mettre à disposition de sa clientèle qui les a choisis et indiqués et qui en assume tous les risques correspondants» ; qu'aux termes de la clause 20 des Conditions Générales du contrat de crédit-bail : «À compter du trentième jour suivant l'échéance du crédit-bail, l'Utilisateur devra restituer le bateau avec tous ses équipements, accessoires, transformations, aménagements (conformément à la description faite dans le Procès-Verbal de livraison et dans la facture d'achat)» ; qu'en conséquence et ainsi que M. R. a fait valoir dans ses conclusions, il en découle nécessairement que, même à défaut de mandat ad litem, aussi bien l'obligation de résultat du crédit-preneur ayant comme objet la restitution, à l'échéance du contrat, du navire conforme au procès-verbal de livraison, que l'obligation de continuer à payer les loyers et subir tous les risques, justifient l'intérêt personnel du crédit-preneur à solliciter la réparation du préjudice subi par le navire donc son intérêt à agir, et ceci même avant l'exercice de l'option d'achat. Qu'en affirmant telle qu'elle l'a fait que «l'exercice de l'action en indemnisation de la perte de valeur du bateau appartient exclusivement au propriétaire rendant irrecevables par la même les demandes de j. R. en paiement des coûts des travaux de réparation du bateau», la Cour d'appel n'a pas répondu à ces chefs de conclusions et a privé de motifs sa décision « ;

Mais attendu que la Cour d'appel a exactement retenu, qu'au moment de l'incendie du » Shake'n Bake II «, pas plus qu'à la date d'introduction de l'instance, M. R. crédit-preneur, n'avait pas la qualité de propriétaire du bateau, lequel appartenait à la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR et que le fait qu'il en ait acquis ultérieurement, le 6 mai 2016, la propriété et ait procédé au rachat de la valeur résiduelle du contrat de crédit-bail, ne lui conférait pas pour autant la qualité pour agir en l'absence de toute cession à son bénéfice du droit à indemnisation dont était titulaire la banque ; que, répondant aux conclusions invoquées, elle a relevé, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que les termes de l'article 9 des conditions générales du contrat de crédit-bail qui prévoyait que le crédit-preneur devait » informer immédiatement la Banque par LRAR ou par télégramme, de tout acte ou tout fait qui pourraient de quelque manière que ce soit porter préjudice au droit de propriété du bateau, assumant à ses propre frais et dans l'intérêt de la Banque toute initiative opportune dans le cadre d'une procédure judiciaire « mettaient uniquement une obligation contractuelle à la charge du locataire d'informer le propriétaire de tout évènement susceptible de porter préjudice au droit de propriété du bailleur, l'action en indemnisation de la perte de valeur du bateau appartenant exclusivement au propriétaire ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que M R. fait encore grief à l'arrêt d'écarter » comme inapplicables, les dispositions de l'article L. 633-31 du Code de la Mer et de déclarer bien fondé le moyen tiré de l'absence de faute prouvée de m. K-V. ou de son préposé M. a N. au sens de l'article unique de la loi n° 69 du 30 mai 1923 «, alors, selon le moyen, qu' » il est constant et non contesté que M. N. était engagé à bord du «MAMIMO II» en tant que capitaine professionnel ; il est constant et non contesté qu'au moment des faits, il se trouvait ivre à bord du navire «MAMIMO II» ; qu'aux termes de l'article L. 633-31 du Code de la Mer : «Infractions touchant à la police intérieure du navire.- Est puni d'un emprisonnement de six jours à six mois tout capitaine qui s'est trouvé en état d'ivresse à bord de son navire, et tout officier, maître ou hommes d'équipage qui s'enivre habituellement ou qui s'est trouvé en état d'ivresse pendant le quart. Est punie d'une peine double tout capitaine qui s'enivre habituellement, sans préjudice des mesures disciplinaires prévues à l'article L. 632-10» ; qu'aux termes de l'article L. 632-7 du Code de la Mer : «-Sont réputés fautes graves contre la discipline et entraînent l'une des punitions prévues à l'article L. 632-8 : 4° l'ivresse à bord, avec désordre, sauf ce qui est prévu à l'article L. 633-31» ; qu'aux termes de l'article L. 632-4 du même code : «-sont réputées fautes légères contre la discipline : 2° l'ivresse à bord, sans désordre et en dehors du service ; 5° et, généralement, toute faute non spécifiée à l'article L. 632-7» ; que pour autant, selon la teneur littérale de l'article L. 633-31 du Code de la Mer, l'état d'ivresse du capitaine caractérise une faute punie par la loi avec une sanction pénale en toutes circonstances et situations, même en repos et donc en dehors du service, le capitaine ayant interdiction d'être ivre lorsqu'il se trouve à bord du navire par rapport auquel il exerce son commandement de manière professionnelle, alors que, en revanche, les officiers, maîtres ou hommes d'équipage seront punis, au même titre que le capitaine, seulement en cas d' ivresse «pendant le quart» à savoir pendant le service ou en cas de consommation habituelle de l'alcool à bord du navire sur lequel ils sont engagés, commettant au sens de l'article L. 632-4 du Code de la Mer, une faute légère contre la discipline dès lors que ces mêmes membres de l'équipage (à l'exclusion du Capitaine) se trouvent occasionnellement ivres à bord et cela même en dehors du service et sauf faute grave d'ivresse avec désordre au sens de l'article L. 632-7 du Code de la Mer ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du Code de la Mer : «- L'armateur répond de ses préposés terrestres et maritimes dans les termes du droit commun. Il est notamment personnellement responsable des obligations dérivant des actes accomplis et des contrats conclus par le capitaine dans l'exercice de ses fonctions légales ainsi que des faits et fautes du capitaine, de l'équipage et de tout autre personne au service du navire, agissant dans le cadre de leurs fonctions respectives (...)» ; qu'aux termes de l'article unique de la loi n° 69 du 30 mai 1923 : «Toute personne qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie d'un immeuble ou de biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance, peut être déclaré responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie, lorsqu'il est prouvé que celui-ci doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont elle est responsable. La présente disposition ne s'applique pas aux rapports entre propriétaires et locataires qui demeurent régis par les articles 1573 et 1574 du Code civil ». Que la Cour d'appel, écartant, telle qu'elle l'a fait, l'application de l'article L.633-31 du Code de la Mer au motif que « il n'est pas contesté par l'appelant comme le soutient le propriétaire du bateau que le capitaine n'était pas en service au moment de l'incendie» a transformé la norme subordonnant son application à une condition qui n'y figure pas, à savoir que le capitaine se soit trouvé ivre à bord de son navire «pendant le service» alors que le non-respect de la norme est caractérisé par le simple fait, pour un capitaine, de se trouver ivre à bord de son navire, même en dehors de son service et indépendamment du fait qu'il en soit résulté un désordre ; et par conséquence, en confirmant le jugement du tribunal de première instance sur le point de l'absence de faute prouvée, écartant expressément et à tort l'application de l'article L. 633 -31 du Code de la Mer dans le processus de détermination de la faute au sens de l'article unique de la loi n° 69 du 30 mai 1923 et en affirmant que « La circonstance que celui-ci ait été soumis à un contrôle de son alcoolémie et qu'il présentait 2h30 (sic) après le sinistre un taux de 0, 59 mg /seconde mesure) doit s'apprécier dans le cadre de ses obligations professionnelles liées à ses fonctions de capitaine au moment où l'incendie s'est déclaré afin de déterminer si cet état d'alcoolisation a réduit ses capacités de jugement et a pu entraîner de sa part des actions inadéquates ou des omissions pouvant être qualifiées de fautives» et, qu'en se déterminant par de tels motifs « Qu'il ne peut dès lors être caractérisé à l'encontre de m. K-V. en qualité de propriétaire du bateau »MAMIMO II« ou de son préposé a. N. aucune faute au sens de l'article unique de la loi n° 69 du 30 mai 1923 » alors qu'en hypothèse de violation légale la faute est ipso jure déterminée, la Cour d'appel a violé les textes susvisés « ;

Mais attendu que par motifs propres et adoptés, la Cour d'appel a constaté que le capitaine du » Mamimo II " n'était pas en service au moment de l'incendie, que si le contrôle d'alcoolémie effectué 2h30 après le sinistre avait révélé un taux de 0,54 mg par litre d'air expiré, il résultait de l'analyse tant des divers témoignages, que du déroulement des faits, qu'il avait agi avec sang-froid et détermination en prenant toutes les mesures de sécurité nécessaires, que la multiplication de ses tentatives et l'enchainement des interventions menées ne révélaient pas une réaction inadéquate mais au contraire un comportement diligent et totalement maitrisé ; qu'elle a ainsi pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, qu'aucune faute tant du propriétaire du bateau que de son préposé n'était caractérisée, quel qu'en soit le fondement invoqué ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la demande de dommages-intérêts de la société AXA FRANCE IARD :

Attendu que la société anonyme de droit français AXA France IARD sollicite la condamnation de M. R. à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 459-4 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'au vu des circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Rejette la demande de la Sté AXA France IARD sur le fondement de l'article 459-4 du Code de procédure civile ;

Condamne j. m. s. R. aux entiers dépens, en fait masse et dit qu'ils seront partagés par tiers avec distraction au profit de Maîtres Thomas GIACCARDI, Christophe SOSSO et Sophie LAVAGNA, avocats-défenseurs, chacun en ce qui le concerne ;

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé le douze octobre deux mille vingt, par la Cour de révision de la Principauté de Monaco, composée de Madame Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Messieurs François-Xavier LUCAS, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles et François CACHELOT, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence du Ministère Public, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, Le Premier Président,

  • Consulter le PDF