Cour de révision, 15 mai 2020, La Société HSBC PRIVATE BANK (SUISSE) SA c/ Madame E. divorcée B.

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Abstract🔗

Cassation par voie de conséquence - Principe du contradictoire - Recours effectif - Pourvoi en révision - Griefs non fondés - Rejet

Résumé🔗

Le moyen, qui demande la cassation de l'arrêt par voie de conséquence d'une déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 852 du Code de procédure civile, dont il n'est pas justifié, est irrecevable

Ayant relevé, d'une part, que le tiers auquel l'ordonnance de compulsoire est opposée peut, lorsque la compétence du juge des référés n'a pas été réservée par ladite ordonnance, se pourvoir devant le juge du fond et, d'autre part, que la banque HSBC n'a pas exercé un tel recours, c'est sans méconnaître les principes du contradictoire et du droit à un recours effectif, et sans violer les textes invoqués, que la cour a statué comme elle l'a fait ; que le moyen n'est pas fondé.

C'est sans insuffisance ni contradiction que la cour d'appel a souverainement interprété la loi suisse pour reconnaître à Madame E. le statut d'héritière virtuelle, et qu'ainsi, c'est sans encourir les griefs du moyen, et abstraction faite de ses troisième et quatrième branches qui critiquent des motifs surabondants, qu'elle a pu en déduire que cette héritière disposait d'un droit légitime à l'information s'agissant de la détermination du montant de la réserve héréditaire, ce qui justifiait la communication des documents visés par l'ordonnance de compulsoire ; le moyen n'est pas fondé.


Motifs🔗

Pourvoi N° 2019-62

en session civile

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 15 MAI 2020

En la cause de :

- La Société HSBC PRIVATE BANK (SUISSE) SA, venant aux droits de la société HSBC PRIVATE BANK (MONACO) SA en raison d'une transmission universelle de patrimoine intervenue le 3 mai 2019, dont le siège social est situé au 9-17 Quai des Bergues - 1201 Genève (Suisse), agissant poursuites et diligences de son Président en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Olivier TAFANELLI, avocat au barreau de Nice ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- Madame c. a. E. divorcée B., née le 27 février 1966 à Mannheim (Allemagne), de nationalité américaine, domiciliée et demeurant à Westchester (NY-USA), X1NY 10576 (USA) ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

DÉFENDERESSE EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

VU :

- l'arrêt rendu le 9 juillet 2019 par la Cour d'appel, signifié le 12 juillet 2019 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 8 août 2019, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la Société HSBC PRIVATE BANK (SUISSE) SA, venant aux droits de la société HSBC PRIVATE BANK (MONACO) SA ;

- la requête déposée le 6 septembre 2019 au Greffe général, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la Société HSBC PRIVATE BANK (SUISSE) SA, venant aux droits de la société HSBC PRIVATE BANK (MONACO) SA, accompagnée de 12 pièces, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 4 octobre 2019 au Greffe général, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de c. a. E. divorcée B. accompagnée de 11 pièces, signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère public en date du 14 octobre 2019 ;

- le certificat de clôture établi le 8 novembre 2019 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 11 mars 2020 sur le rapport de Monsieur François-Xavier LUCAS, Conseiller,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï Madame le Procureur général ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Madame C. E. arguant de sa qualité d'hériter réservataire de son père, Monsieur C. E. décédé à Gstaad en laissant pour lui succéder ses cinq enfants ainsi que son épouse, a obtenu du président du tribunal de première instance une ordonnance de compulsoire en date du 17 novembre 2017, l'autorisant à mandater tel huissier de justice à l'effet d'obtenir communication par la SAM HSBC PRIVATE BANK MONACO (la banque HSBC) des documents d'ouverture et de tous relevés, pour les 10 années précédant son décès survenu le 13 octobre 2016, des comptes dont feu C. E. était titulaire à titre personnel ; que, par exploit d'assignation en référé sur difficulté d'exécution en date du 31 janvier 2018, Madame E. a fait citer devant le juge des référés du tribunal de première instance la banque HSBC, laquelle a demandé à titre reconventionnel la rétractation de l'ordonnance du 17 novembre 2017 ; que, par ordonnance en date du 28 septembre 2018, le juge des référés, d'une part, s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de rétractation de l'ordonnance présidentielle du 17 novembre 2017 et sur la demande d'ajout à cette ordonnance et, d'autre part, a enjoint à la banque HSBC de communiquer à Madame E.la totalité des éléments mentionnés au dispositif de l'ordonnance présidentielle du 17 novembre 2017 dans le délai de huit jours suivant la signification de la présente décision, sous astreinte provisoire, passé ce délai, de 10 000 euros par jour de retard pendant trois mois ; que la banque HSBC ayant interjeté appel de cette ordonnance de référé, par arrêt du 9 juillet 2019, la cour d'appel l'a confirmée en toutes ses dispositions et a débouté les parties de l'ensemble de leurs prétentions ; que la banque HSBC s'est pourvue en révision contre cet arrêt ;

Sur le premier moyen pris en sa première branche

Attendu que la banque HSBC fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande de la banque HSBC en rétractation de l'ordonnance de compulsoire du 17 novembre 2017 et de lui avoir en conséquence enjoint de communiquer à Madame E.la totalité des éléments mentionnés au dispositif de cette ordonnance sous astreinte de 10 000 € par jour de retard pendant trois mois, alors, selon le moyen, « que l'article 852 du Code de procédure civile, en tant qu'il interdit au tiers à qui une ordonnance rendue sur requête cause grief de se pourvoir en référé afin d'en demander la rétractation, sauf si cette voie de recours a été autorisée par la loi ou formellement réservée par l'ordonnance en cause, méconnaît les principes constitutionnels d'égalité des armes, des droits de la défense, du contradictoire et du droit à un recours effectif ; que la déclaration d'inconstitutionnalité de ce texte par le Tribunal suprême, saisi d'une question préjudicielle, entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a déclaré irrecevable la demande en référé-rétractation de la banque HSBC à l'encontre de l'ordonnance de compulsoire rendue à son encontre sur requête de Madame E. » ;

Mais attendu que le moyen, qui demande la cassation de l'arrêt par voie de conséquence d'une déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 852 du Code de procédure civile, dont il n'est pas justifié, est irrecevable ;

Sur le premier moyen pris en sa seconde branche

Attendu que la banque HSBC fait grief à l'arrêt attaqué de déclarer irrecevable sa demande en rétractation de l'ordonnance de compulsoire du 17 novembre 2017 et de lui avoir en conséquence enjoint de communiquer à Madame E. la totalité des éléments mentionnés au dispositif de cette ordonnance sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard pendant trois mois, alors, selon le moyen, « que l'article 852 du Code de procédure civile, en tant qu'il interdit au tiers à qui une ordonnance rendue sur requête cause grief de se pourvoir en référé afin d'en demander la rétractation, sauf si cette voie de recours a été autorisée par la loi ou formellement réservée par l'ordonnance en cause, méconnaît les principes du contradictoire et du droit à un recours effectif ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la demande en référé-rétractation de la banque HSBC Private Bank Suisse à l'encontre de l'ordonnance de compulsoire rendue à son encontre, sur requête de Madame E. que cette voie de recours n'était ni prévue par la loi ni formellement réservée par l'ordonnance en cause et que cette rétractation pouvait être demandée devant le juge de droit commun à l'occasion d'une instance au fond, la cour d'appel a violé les articles 6.1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales » ;

Mais attendu qu'ayant relevé, d'une part, que le tiers auquel l'ordonnance de compulsoire est opposée peut, lorsque la compétence du juge des référés n'a pas été réservée par ladite ordonnance, se pourvoir devant le juge du fond et, d'autre part, que la banque HSBC n'a pas exercé un tel recours, c'est sans méconnaître les principes du contradictoire et du droit à un recours effectif, et sans violer les textes invoqués, que la cour a statué comme elle l'a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen pris en ses quatre branches

Attendu que la banque HSBC fait grief à l'arrêt attaqué de lui avoir enjoint de communiquer à Madame E.la totalité des éléments mentionnés au dispositif de l'ordonnance de compulsoire du 17 novembre 2017, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard pendant trois mois, alors, selon le moyen, d'une part, « qu'un héritier ne peut requérir la communication d'informations couvertes par le secret bancaire, afin de prouver l'atteinte à sa réserve, qu'à condition d'établir sa qualité d'héritier ou d'héritier potentiel selon le droit applicable à la succession ; qu'en se fondant sur la qualité »d'héritière virtuelle« de Madame E. pour condamner sous astreinte la banque HSBC à lui remettre des informations soumises au secret bancaire, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, selon le droit Suisse, cette qualité ne supposait pas qu'elle eût engagé au plus tard un an après la découverte du testament de son auteur, soit en novembre 2017, une action en réduction ou en nullité de ces dispositions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 511-33 du Code monétaire et financier français applicable aux banques monégasques » ; alors, de deuxième part, « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à l'absence de motifs ; qu'en l'espèce, la HSBC soutenait dans ses conclusions d'appel que Madame E. ne pouvait bénéficier du statut d'héritier virtuel de droit suisse faute d'avoir engagé dans les délais prescrits par les articles 521 et 533 du Code civil suisse une action en réduction ou en nullité des dispositions testamentaires prises par le de cujus ; qu'en accordant à Madame E. ce statut d'héritier virtuel, pour faire droit à sa demande de communication d'informations bancaires confidentielles, sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions de la HSBC, la cour d'appel a violé l'article 199 du Code de procédure civile » ; alors, de troisième part, « que les juges ne peuvent méconnaître les termes du litige ; qu'en retenant, pour dire que les documents réclamés par Madame E. n'étaient pas couverts par le secret bancaire, qu'ils concernaient de simples informations relatives à la dénomination, à la forme d'entités juridiques et à l'identité et les coordonnées de leurs représentants légaux et mandataires agréés, quand elle demandait la condamnation de la HSBC, sous astreinte, à lui remettre l'ensemble des documents visés par l'ordonnance de compulsoire du 17 novembre 2017, à savoir la totalité des documents d'ouverture et des relevés bancaires détenus par son père depuis 10 ans, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article L. 511-33 du Code monétaire et financier français applicable aux banques monégasques » ; et alors, enfin, « que toute information nominative à caractère confidentiel est protégée par le secret bancaire ; qu'en écartant du champ de cette protection les documents réclamés par Madame E. prétexte pris qu'ils ne concernaient que les informations relatives à la dénomination, à la forme d'entités juridiques et à l'identité et les coordonnées de leurs représentants légaux et mandataires agréés, la cour d'appel a violé l'article L. 511-33 du Code monétaire et financier français applicable aux banques monégasques » ;

Mais attendu que c'est sans insuffisance ni contradiction que la cour d'appel a souverainement interprété la loi suisse pour reconnaître à Madame E. le statut d'héritière virtuelle, et qu'ainsi, c'est sans encourir les griefs du moyen, et abstraction faite de ses troisième et quatrième branches qui critiquent des motifs surabondants, qu'elle a pu en déduire que cette héritière disposait d'un droit légitime à l'information s'agissant de la détermination du montant de la réserve héréditaire, ce qui justifiait la communication des documents visés par l'ordonnance de compulsoire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la demande de dommages et intérêts de Mme E.

Mme E. sollicite l'allocation de 10 000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 459-4, alinéa 2, du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'au vu des circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Rejette la demande de dommages et intérêts formée par Mme c. E. divorcée B.

Condamne la HSBC PRIVATE BANK (SUISSE) SA, venant aux droits de la S.A.M. HSBC PRIVATE BANK (MONACO) aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé le quinze mai deux mille vingt, après prorogation du délibéré dont les avocats-défenseurs ont été avisés le seize mars deux mille vingt, par la Cour de révision de la Principauté de

Monaco, composée de Messieurs François-Xavier LUCAS, faisant fonction de Président, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Serge PETIT et Laurent LE MESLE, Conseillers, en présence du Ministère Public, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, Le Président.

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