Cour de révision, 24 mars 2017, Monsieur g. CA. et Monsieur f. CA. c/ la SAM BNP PARIBAS WEALTH MANAGEMENT MONACO

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Abstract🔗

Pourvoi en révision - Grief - Absence Irrecevabilité - Compte titre - Banque - Instructions téléphoniques du client - Contestation - Preuve (non) - Appréciation souveraine

Résumé🔗

Aucun grief n'est formulé à l'encontre de l'arrêt en ce qu'il a déclaré M. f. CA. irrecevable en son appel ; que cet arrêt est devenu définitif à son égard ; qu'il s'ensuit que le pourvoi doit être déclaré irrecevable en ce qu'il émane de lui.

La Cour d'appel a retenu que, dès lors qu'à l'ouverture de son compte-titres, M. g. CA. avait signé un document par lequel il avait souhaité transmettre ses instructions par téléphone sans confirmation écrite et déchargé dans ce cas expressément la banque de toute responsabilité pour avoir exécuté ces instructions, il ne pouvait lui reprocher de ne pas avoir conservé la trace de ses ordres d'achat et de vente ni d'avoir pratiqué des opérations d'achat et de vente en l'absence d'autorisation écrite. Elle a par ailleurs relevé l'absence de toute réaction et de demande d'explications de M. g. CA., qui s'était borné à demander à la banque la copie d'ordres de cession et d'achat et avait signé des états de situation de son portefeuille de titres mentionnant la diminution drastique de la valeur des obligations litigieuses, la Cour d'appel en a souverainement déduit que ces circonstances ôtaient toute crédibilité à son allégation. En l'état de ces constatations et appréciations, elle légalement justifiée sa décision.


Motifs🔗

Pourvoi N° 2017-03

en session civile

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 24 MARS 2017

En la cause de :

- Monsieur g. CA., né le 25 juillet 1936 à Chiusanico (Impéria - Italie), de nationalité italienne, retraité, demeurant X2 à Monaco (98000) ;

Bénéficiaire de l'assistance judiciaire n° 104 BAJ 15, par décision du Bureau du 12 mai 2015

- Monsieur f. CA., né le 8 juillet 1928 à Chiusanico (Impéria - Italie), de nationalité italienne, retraité, demeurant à X1 (18030) Province d'Impéria - Italie ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

DEMANDEURS EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- La SAM BNP PARIBAS WEALTH MANAGEMENT MONACO, dont le siège social est sis 15/17 avenue d'Ostende à Monaco (98000), prise en la personne de son Administrateur délégué en exercice, Monsieur Dominique RO., domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maitre Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

DÉFENDERESSE EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

VU :

- l'arrêt rendu le 3 mai 2016 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 22 septembre 2016 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 19 octobre 2016, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de Mrs g. CA. et f. CA. ;

- la requête déposée le 18 novembre 2016 au greffe général, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de Mrs g. et f. CA., signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 19 décembre 2016 au greffe général, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la SAM BNP PARIBAS WEALTH MANAGEMENT MONACO, signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 28 décembre 2016 ;

- le certificat de clôture établi le 17 janvier 2017, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 15 mars 2017 sur le rapport de Monsieur Jean-Pierre DUMAS, Premier Président,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Ministère Public ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt critiqué et le jugement partiellement confirmé, que, le 5 décembre 1997, M. g. CA. a ouvert à l'Union European Bank Monaco un compte de titres n° 6149294, sur lequel ont été virés ses avoirs provenant du Crédit Foncier de Monaco, d'un montant de 714.439,27 euros au 31 octobre 1997, composés, notamment, d'obligations émises par l'État argentin ; que la valeur des obligations argentines a ensuite chuté ; que, le 21 mars 2003, M. g. CA., qui était en instance de divorce, a transféré l'intégralité de ses titres sur le compte de son frère, M. f. CA., ouvert à l'Union European Bank Monaco ; que les obligations argentines ont été cédées le 6 octobre 2006 au prix de 194.709 euros ; que, le 23 décembre 2011, la BNP Paribas Wealth Management Monaco, venant aux droits de l'Union European Bank, a clôturé le compte n° 614294 dont M. g. CA. était titulaire ; qu'estimant que la Bnp Paribas Wealth Management Monaco avait engagé sa responsabilité, M. g. CA. et M. f. CA. l'ont fait assigner devant le Tribunal de première instance par acte d'huissier délivré le 20 décembre 2011 ; que le tribunal a déclaré M. f. CA. irrecevable en son action pour défaut d'intérêt, déclaré l'action introduite par M. g. CA. prescrite pour la période antérieure au 20 décembre 2001, dit qu'il ne pouvait être retenu de manquement de la BNP Paribas Wealth Management Monaco à son obligation d'information et de conseil et débouté en conséquence M. g. CA. de sa demande de dommages et intérêts en réparation de la perte financière et du manque à gagner ; que, sur recours de MM. g. et f. CA., la Cour d'appel a déclaré l'appel de M. f. CA. irrecevable, déclaré recevable l'appel de M. g. CA., infirmé le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite l'action introduite par celui-ci pour la période antérieure au 20 décembre 2001 et confirmé le jugement pour le surplus ; que MM. g. et f. CA. ont formé un pourvoi en révision contre cet arrêt ;

Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense en ce qui concerne M. f. CA.

Attendu qu'aucun grief n'est formulé à l'encontre de l'arrêt en ce qu'il a déclaré M. f. CA. irrecevable en son appel ; que cet arrêt est devenu définitif à son égard ; qu'il s'ensuit que le pourvoi doit être déclaré irrecevable en ce qu'il émane de lui ;

Sur le moyen unique du pourvoi, pris en ses deux branches

Attendu que « Monsieur CA. » fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir la responsabilité de la BNP engagée pour avoir accompli, sans son accord, différentes opérations d'acquisition de valeurs mobilière, en l'espèce des obligations dites « argentines », à l'issue desquelles il a subi d'importantes pertes financières, aux motifs que M. g. CA. n'ayant pas confié à la BNP un mandat de gestion, il ne peut lui faire grief de ne pas avoir respecté les obligations édictées par les articles 5 et 9 de la loi n° 1.194 du 9 juillet 1997 qui ne sont applicables qu'aux sociétés agréées agissant en vertu de mandats exprès et qui leur imposent, d'une part, « dans le cadre de ces mandats, de veiller à ce que les clients aient connaissance des risques inhérents à la nature des opérations qu'ils envisagent », et d'autre part, « d'apporter la preuve du moment de la réception ainsi que celui de la transmission de chaque ordre » ainsi que « de justifier que chaque ordre a été donné par le mandant » ; que dès lors qu'à l'ouverture de son compte-titre dans les livres de la société UEB Monaco, il a signé un document par lequel il a souhaité transmettre ses instructions par téléphone « sans chiffre de repère ni confirmation écrite » et décharger dans ce cas « expressément (la banque) de toute responsabilité pour avoir exécuté ces instructions », il ne peut davantage lui reprocher de ne pas avoir conservé la trace de ses ordres d'achat ou de vente ni d'avoir pratiqué des opérations d'achat et de vente en l'absence d'autorisation écrite, alors, selon le pourvoi, de première part, que les conditions fixées par la loi n° 1.194 ne visent pas seulement des sociétés anonymes ayant reçu l'agrément du Ministre d'État mais également les établissements de crédit et les sociétés de bourse visés à l'article 2 (1°) de la loi, conformément aux dispositions de l'article 15 de la loi ; qu'en considérant que les sociétés agréées visées à l'article 2 (2°) de la loi était seules soumises aux obligations édictées par les articles 5, 8 et 9 de la loi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale ; alors de seconde part que la Banque était dans l'obligation, à l'instar des sociétés agréées de n'exercer ses activités, dont l'exécution des ordres transmis qu'en vertu d'un mandat écrit du client ; qu'en l'absence de mandat écrit, il n'en demeure pas moins que la Banque était soumise à l'obligation de justifier de l'origine de l'ordre ; qu'en considérant qu'il ne pouvait être reproché à la BNP PARIBAS de ne pas avoir conservé la trace des ordres d'achat ou de vente, ni d'avoir pratiqué les opérations litigieuses en l'absence d'autorisation écrite, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles 15, 5, 8 et 9 alinéa 2 de la loi n° 1.194 ;

Mais attendu d'une part, que la Cour d'appel n'a pas retenu ce qu'il lui est reproché d'avoir dit ; qu'elle a simplement considéré qu'en l'absence de mandat de gestion confié par M. g. CA. à la banque, celle-ci n'était pas tenue de respecter les obligations légales visées au moyen ; que le moyen, qui manque par le fait qui lui sert de fondement, ne peut être accueilli en sa première branche ;

Attendu d'autre part, que la Cour d'appel a retenu que, dès lors qu'à l'ouverture de son compte-titres, M. g. CA. avait signé un document par lequel il avait souhaité transmettre ses instructions par téléphone sans confirmation écrite et déchargé dans ce cas expressément la banque de toute responsabilité pour avoir exécuté ces instructions, il ne pouvait lui reprocher de ne pas avoir conservé la trace de ses ordres d'achat et de vente ni d'avoir pratiqué des opérations d'achat et de vente en l'absence d'autorisation écrite ; qu'elle a par ailleurs relevé l'absence de toute réaction et de demande d'explications de M. g. CA., qui s'était borné à demander à la banque la copie d'ordres de cession et d'achat et avait signé des états de situation de son portefeuille de titres mentionnant la diminution drastique de la valeur des obligations litigieuses, la Cour d'appel en a souverainement déduit que ces circonstances ôtaient toute crédibilité à son allégation ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, elle légalement justifiée sa décision ; que le moyen n'est pas fondé en sa seconde branche ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Déclare irrecevable le pourvoi en ce qu'il est formé par M. f. CA. ;

Le rejette en ce qu'il émane de M. g. CA. ;

Condamne solidairement MM. g. et f. CA. aux dépens de la présente instance, dont distraction au profit de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé le vingt-quatre mars deux mille dix-sept, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Jean-Pierre DUMAS, Premier Président, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Cécile CHATEL-PETIT, Vice-Présidente, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, et Monsieur François-Xavier LUCAS, Conseiller, en présence de Monsieur Hervé POINOT, Procureur Adjoint, assistés de Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, Le Premier Président,

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