Cour de révision, 24 mars 2017, Monsieur Antoine MA, Monsieur Antoine MA. et la SAM NORTH ATLANTIC SOCIÉTÉ D'ADMINISTRATION c/ Monsieur g. GI., Monsieur m. GI., Monsieur l. f. GI. et Monsieur f. GI.

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Abstract🔗

Bénéficiaire économique - Définition - Entité juridique - Divulgation d'identité - Atteinte à la vie privée et familiale (non) - Procès-verbal de constat d'huissier - Dénaturation (non) - Compétence territoriale - Règles

Résumé🔗

Après avoir retenu que le bénéficiaire économique effectif est défini, en droit monégasque, particulièrement par la loi n° 1.381 du 29 juin 2011 relative aux droits d'enregistrement exigibles sur les mutations de biens et droits immobiliers, comme la ou les personnes physiques qui, en dernier lieu, en tout ou en partie, possèdent ou contrôlent, ou encore ont le bénéfice ou une part du bénéfice d'une entité juridique laquelle correspond à toute société, toute personne morale ou toute construction juridique tels que notamment les fiducies, les trusts ou les fonds d'investissement, la Cour d'appel en a exactement déduit, sans dénaturer le procès-verbal de constat, que M. MA. n'avait pas livré à l'huissier instrumentaire, le 22 juillet 2014, le nom du ou des bénéficiaires économiques effectifs des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS puisqu'il ne lui avait communiqué que le nom de l'entité juridique qui en est le bénéficiaire économique, soit le trust néo-zélandais SAFE HARBOUR TRUST, représenté lui-même par la société BASTION ASSETS TRUSTEE LIMITED.

Ayant relevé qu'aucune juridiction monégasque n'était saisie, au fond, du différend successoral opposant les consorts GI. à Mme MA. GI., le Tribunal de Turin étant saisi d'une demande tendant uniquement à l'annulation du testament olographe établi par M. lu. GI. le 21 mars 2016 et à la contestation de la quotité disponible attribuée à Mme MA. GI. à la suite de la souscription par M lu. GI. de plusieurs contrats d'assurance vie, c'est sans violer les articles 851 et 852 du Code de procédure civile que la Cour d'appel, tirant les conséquences légales de ses propres constatations, a dit que la demande des consorts GI. était recevable.

Après avoir rappelé les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance souveraine n° 4.104 du 26 décembre 2012 remplaçant, à droit constant, l'article 15 de l'ordonnance souveraine n° 2.318 du 3 août 2009 fixant les conditions d'application de la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, la Cour d'appel en a déduit à bon droit que ces dispositions ne constituait pas un obstacle à la divulgation, à des héritiers, de l'identité du bénéficiaire économique effectif d'une entité juridique afin de permettre à ces derniers de déterminer l'actif successoral.

Ayant relevé d'une part que MM. m. et g. GI., héritiers de lu. et lu. a GI., disposaient d'un intérêt légitime à solliciter les informations nécessaires leur permettant de s'assurer qu'aucune atteinte n'avait été portée à leurs droits successoraux par l'intermédiaire d'un éventuel bénéficiaire économique effectif et qu'il importait peu qu'ils soient ou non, détenteurs des droits sur les actions des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVEREAS ; que d'autre part, la communication des informations sollicitées n'était pas de nature à porter atteinte à la vie privée et familiale consacrée par l'article 22 de la Constitution, s'agissant de ses mandants qui sont des personnes morales, c'est sans encourir les griefs du moyen que la Cour d'appel a légalement justifié sa décision.


Motifs🔗

Pourvoi N° 2016-59

en session civile

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 24 MARS 2017

En la cause de :

- Monsieur Antoine MA., ès qualités de mandataire agréé en exercice de la société de droit panaméen CARONTE OVERSEAS INC, domicilié en cette qualité à Monaco, au sein des locaux de la SAM NORTH ATLANTIC SOCIÉTÉ D'ADMINISTRATION, sise immeuble « Le Patio Palace », 41 avenue Hector Otto ;

- Monsieur Antoine MA., ès qualités de mandataire agréé en exercice de la société de droit panaméen TRADE RAINBOW INC, domicilié en cette qualité à Monaco, au sein des locaux de la SAM NORTH ATLANTIC SOCIÉTÉ D'ADMINISTRATION, sise immeuble « Le Patio Palace », 41 avenue Hector Otto ;

- la SAM NORTH ATLANTIC SOCIÉTÉ D'ADMINISTRATION, 41 avenue Hector Otto, prise en la personne de son administrateur délégué en exercice, Monsieur Antoine MA., domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

DEMANDEURS EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- Monsieur g. GI., né le 26 mars 1952 à Turin, de nationalité italienne, gérant de sociétés, demeurant à Monaco, X1 ;

- Monsieur m. Riccardo Sebastiano GI., né le 5 avril 1949 à Turin, de nationalité italienne, sans profession, demeurant à Turin, X2 ;

- Monsieur l. f. GI., né le 25 février 1977 à Turin, de nationalité italienne, travailleur indépendant, demeurant à Turin, Via X3 ;

- Monsieur f. GI., né le 10 novembre 1980 à Turin, de nationalité italienne, employé, demeurant à Turin, Via X3 ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Christophe BALLERIO, avocat près la Cour d'appel de Monaco ;

DÉFENDEURS EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

VU :

- l'arrêt rendu le 21 juin 2016 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 29 juin 2016 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 21 juillet 2016, par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de M. Antoine MA., es-qualité de mandataire agrée en exercice de la société CARONTE OVERSEAS INC, TRADE RAINBOW INC et de la SAM NORTH ATLANTIC SOCIÉTÉ D'ADMINISTRATION ;

- la requête déposée le 19 août 2016 au greffe général, par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de M. Antoine MA. es-qualité de mandataire agrée en exercice de la société CARONTE OVERSEAS INC, TRADE RAINBOW INC et de la SAM NORTH ATLANTIC SOCIÉTÉ D'ADMINISTRATION, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 19 septembre 2016 au greffe général, par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de Mrs g. GI., m., l. GI. et f. GI., signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 21 septembre 2016 ;

- le certificat de clôture établi le 11 novembre 2016, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 14 mars 2017 sur le rapport de Madame Cécile CHATEL-PETIT, Vice-Président ;

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Ministère Public ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. lu. GI. est décédé le 28 septembre 2012 laissant pour lui succéder son épouse, Mme lu.a GI., elle-même décédée le 3 février 2013 ; que les époux, de nationalité italienne, ont été résidents monégasques jusqu'à leur décès ; que Mme lu.a GI. a laissé pour lui succéder les trois enfants issus du couple : m., g. et MA., désignant en qualité de légataires les enfants de M m. GI., l. et f. ; qu'invoquant l'acquisition par leurs parents de divers biens immobiliers sis à Monaco, soit en leur nom personnel, soit à travers diverses sociétés offshores, MM m. et g. GI., Mme l. GI. et M f. GI. ont saisi le président du Tribunal de première instance lequel, par ordonnance du 10 juillet 2014, les a autorisé à mandater un huissier à l'effet de se rendre dans les locaux de la SAM NORTH ATLANTIC pour se faire communiquer par M. MA., en sa qualité de mandataire agréé des sociétés de droit panaméenne TRADE RAINBOW INC et CARONTE OVERSEAS INC et par la SAM NORTH ATLANTIC, le ou les noms des bénéficiaires économiques effectifs actuels et précédents, pour les années 2012 et 2013, de ces sociétés, se faire communiquer également par la société NORTH ATLANTIC le ou les noms du ou des bénéficiaires actuels et précédents du trust néo-zélandais dénommé «  SAFE HARBOUR TRUST », l'historique de l'actionnariat des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS ainsi que la copie de tout acte de cession ou de mutation auxquels M. lu. GI. et Mme lu.a GI. ont été parties ; que le 22 juillet 2014, l'huissier de justice s'étant rendu dans les locaux de la SAM NORTH ATLANTIC, M MA., lui a déclaré que le bénéficiaire économique des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS était un trust néo-zélandais dénommé SAFE HARBOUR TRUST représenté par la société BASTION ASSETS TRUSTEE LIMITED ; qu'en suite d'une nouvelle requête des consorts GI., par ordonnance du 22 octobre 2014, le président du tribunal les a, de nouveau, autorisé a mandater un huissier aux mêmes fins, lequel a dressé le 27 octobre 2014 un procès-verbal de carence, M MA. ayant déclaré qu'il était tenu au secret professionnel en vertu de l'article 12 de la loi n° 1.381 et que l'ordonnance ne l'exonérait pas des poursuites prévues par l'article 308 du Code pénal ; que les consorts GI. ont saisi le juge des référés pour obtenir sous astreinte la communication des informations sus- mentionnées et que, par ordonnance du 7 octobre 2015, le juge des référés a déclaré irrecevable leur demande ; que, sur appel des consorts GI., la cour d'appel, par arrêt du 21 juin 2016, a infirmé l'ordonnance de référé, déclaré recevable leur demande et dit que l'ordonnance du 22 octobre 2014 recevra plein et entier effet à l'égard de MM m. et g. GI. ; que M. Antoine MA., es-qualités de mandataire agréé des sociétés TRADE RAINBOW INC et CARONTE OVERSEAS et, la SAM NORTH ATLANTIC, prise en la personne de son administrateur délégué, se sont pourvus en révision à l'encontre de cet arrêt ;

Sur le premier moyen pris en ses deux branches

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de dire que l'ordonnance du 22 octobre 2014 n'est pas privée d'objet et qu'elle recevra plein et entier effet à l'égard de MM. m. et g. GI. et que M. Antoine MA. es-qualités de mandataire agréé des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS et la société NORTH ATLANTIC, prise en la personne de M. Antoine MA., administrateur délégué, devront l'exécuter dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai, alors, selon le moyen, d'une part que le bénéficiaire économique au sens de la loi n° 1.381 est « la ou les personnes physiques qui, en dernier lieu, en tout ou en partie, possèdent ou contrôlent, ou encore ont le bénéfice ou une part du bénéfice d'une entité juridique, y compris les souscripteurs et les bénéficiaires de toute police d'assurance visée au chiffre 1 » ; que s'agissant d'un trust, tant que l'entrée en possession ou en jouissance du « bénéficiaire » du trust n'a pas eu lieu, le trustee et ses représentants sont les seuls bénéficiaires économiques effectifs ; que lors du premier compulsoire diligenté par les consorts GI. en juillet 2014 leur a été communiqué le nom des bénéficiaires économiques des deux sociétés panaméennes TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS, à savoir le trust néo-zélandais dénommé SAFE HARBOUR TRUST, repésenté par une société néo-zélandaise BASTION ASSETS TRUSTEE LIMITED dont les « Directors » sont Messieurs LI., RE. et WI. ; qu'en jugeant néanmoins que leur demande n'était pas dépourvue d'objet, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi n° 1.381 du 29 juin 2011 ; alors, d'autre part, que les juges ne peuvent dénaturer le sens et la portée des documents qui sont produits par les parties au soutien de leur prétention ; qu'il résulte du procès-verbal de constat établi par Maître Notari le 22 juillet 2014 (pièce n° 21, produite par les consorts GI.) que sur interrogation de l'huissier de justice, M. MA. a déclaré que le bénéficiaire économique des sociétés panaméennes TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS est un trust néo-zélandais dénommé SAFE HARBOUR TRUST, représenté lui-même par la société BASTION ASSETS TRUSTEE LIMITED dont les « DIRECTORS » sont Messieurs LI., RE. et WI. ; que les noms des personnes physiques qui, en dernier lieu, contrôlent les entités juridiques concernées, c'est-à-dire leurs bénéficiaires économiques effectifs au sens de la loi n° 1.381, leur avaient été communiqué ; qu'en relevant néanmoins au soutien de sa décision que lors du compulsoire diligenté en juillet 2014, M MA. s'était borné à communiquer le nom de l'entité juridique qui est le bénéficiaire économique des sociétés panaméennes, soit le trust néo-zélandais SAFE HARBOUR TRUST, représenté lui-même par la société BASTION ASSETS TRUSTEE LIMITED, la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal de constat et a ainsi violé l'article 989 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir retenu que le bénéficiaire économique effectif est défini, en droit monégasque, particulièrement par la loi n° 1.381 du 29 juin 2011 relative aux droits d'enregistrement exigibles sur les mutations de biens et droits immobiliers, comme la ou les personnes physiques qui, en dernier lieu, en tout ou en partie, possèdent ou contrôlent, ou encore ont le bénéfice ou une part du bénéfice d'une entité juridique laquelle correspond à toute société, toute personne morale ou toute construction juridique tels que notamment les fiducies, les trusts ou les fonds d'investissement, la cour d'appel en a exactement déduit, sans dénaturer le procès-verbal de constat, que M MA. n'avait pas livré à l'huissier instrumentaire, le 22 juillet 2014, le nom du ou des bénéficiaires économiques effectifs des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS puisqu'il ne lui avait communiqué que le nom de l'entité juridique qui en est le bénéficiaire économique, soit le trust néo-zélandais SAFE HARBOUR TRUST, représenté lui-même par la société BASTION ASSETS TRUSTEE LIMITED ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de dire que l'ordonnance du 22 octobre 2014 recevra plein et entier effet à l'égard de M.M m. et g. GI. et que M. Antoine MA. ès-qualités de mandataire agréé des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS et la société NORTH ATLANTIC, pris en la personne de M. Antoine MA., administrateur délégué, devront l'exécuter dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai, alors, selon le moyen, que toute demande tendant à contribuer à la manifestation de la vérité, autrement qualifiée compulsoire, ne saurait être accueillie hors de tout débat contradictoire quand la juridiction du fond est déjà saisie du différent opposant les parties ; que la cour d'appel a constaté que les consorts GI. avaient d'ores et déjà saisi le Tribunal de Turin du différend successoral les opposant à leur sœur relativement à certains actifs de la succession tout en se réservant €toute action, demande et instance visant à l'identification des masses successorales laissées effectivement par le de cujus, ainsi que la détermination et répartition exacte des quotités entre les différents cohéritiers€ ; qu'il en résulte que le compulsoire avait le même objet que la procédure d'ores et déjà pendante devant la juridiction italienne, à savoir le litige successoral opposant les consorts GI. et leur sœur ; qu'en jugeant néanmoins que la demande de compulsoire était recevable en l'état de la procédure italienne, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé les articles 851 et 852 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'aucune juridiction monégasque n'était saisie, au fond, du différend successoral opposant les consorts GI. à Mme MA. GI., le Tribunal de Turin étant saisi d'une demande tendant uniquement à l'annulation du testament olographe établi par M. lu. GI. le 21 mars 2016 et à la contestation de la quotité disponible attribuée à Mme MA. GI. à la suite de la souscription par M lu. GI. de plusieurs contrats d'assurance vie, c'est sans violer les articles 851 et 852 du Code de procédure civile que la Cour d'appel, tirant les conséquences légales de ses propres constatations, a dit que la demande des consorts GI. était recevable ;

Sur le troisième moyen

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt de dire que l'ordonnance du 22 octobre 2014 recevra plein et entier effet à l'égard de MM. m. et g. GI., alors, selon le moyen, que le bénéficiaire économique au sens de la loi n° 1.381 est « la ou les personnes physiques qui, en dernier lieu, en tout ou en partie, possèdent ou contrôlent, ou encore ont le bénéfice ou une part du bénéfice d'une entité juridique, y compris les souscripteurs et les bénéficiaires de toute police d'assurance visée au chiffre 1 » ; que s'agissant d'un trust auquel la propriété des actifs est transférée jusqu'à la mise en distribution au profit du « bénéficiaire », le bénéficiaire économique est le trustee qui contrôle la structure ; que l'ordonnance n° 2.318 du 3 août 2009 confirme cette analyse en précisant que l'identité des « bénéficiaires du trust » n'a à être recherchée et vérifiée que lorsque les actifs sont sur le point d'être distribués; que M MA. et la société NORTH ATLANTIC SAM soutenaient qu'il résulte de la combinaison de ces textes que jusqu'à la mise en distribution ou à l'entrée en jouissance, c'est le trustee lui-même qui est le seul bénéficiaire effectif et que seule son identité doit être connue ; que seule son identité pouvait donc être communiquée aux héritiers, ce qui avait été fait en juillet 2014 ; qu'en accueillant néanmoins l'action des consorts GI. au motif que l'ordonnance n° 2.318 ne constitue pas un obstacle à la divulgation, à des héritiers, de l'identité du bénéficiaire économique effectif d'une entité juridique afin de permettre à ces derniers de déterminer l'actif successoral sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 199 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance souveraine n° 4.104 du 26 décembre 2012 remplaçant, à droit constant, l'article 15 de l'ordonnance souveraine n° 2.318 du 3 août 2009 fixant les conditions d'application de la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, la cour d'appel en a déduit à bon droit que ces dispositions ne constituait pas un obstacle à la divulgation, à des héritiers, de l'identité du bénéficiaire économique effectif d'une entité juridique afin de permettre à ces derniers de déterminer l'actif successoral ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le quatrième moyen pris en ses trois branches

Attendu qu'il est enfin fait grief à l'arrêt de dire que l'ordonnance du 22 octobre 2014 recevra plein et entier effet à l'égard de MM. m. et g. GI. alors, selon le moyen, que, de première part, seuls les héritiers réservataires qui disposent d'un intérêt légitime à solliciter des informations nécessaires leur permettant de s'assurer qu'aucune atteinte n'a été portée à leur héritage par l'intermédiaire d'un éventuel bénéficiaire économique effectif peuvent voir lever à leur profit le secret professionnel ; que pour condamner M MA. et la société NORTH ATLANTIC à communiquer de larges informations sur les bénéficiaires économiques effectifs et l'actionnariat des sociétés CARONTE OVERSEAS et TRADE RAINBOW et du trust SAFE HARBOUR TRUST, la cour d'appel s'est bornée à relever que m. et g. GI. sont les héritiers réservataires de lu. et lu.a GI. ; qu'en statuant ainsi, sans constater ni même rechercher si les auteurs des consorts GI. étaient détenteurs, au moment de leur décès, d'un quelconque droit sur ces entités juridiques qui aurait eu vocation à entrer dans leur succession, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 607 du Code civil, 12 de la loi n° 1.381, 308 du Code pénal, 199 du Code de procédure civile ; et alors que, de deuxième part, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'en condamnant M MA. et la société NORTH ATLANTIC à lever le secret auxquels ils sont tenus au profit de m. et g. GI. et à leur divulguer le nom des bénéficiaires économiques effectifs des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS au motif qu'ils sont les héritiers réservataires de lu. et lu.a GI., sans caractériser ni même constater que ces derniers étaient détenteurs au moment de leur décès d'un quelconque droit sur ces sociétés, ce qui leur aurait permis de s'assurer que l'exécution de l'ordonnance de compulsoire ne porterait pas atteinte au droit au respect de la vie privée de tiers étrangers au litige, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 22 de la Constitution du 17 septembre 1962 et 8 de la Convention Européenne des droits de l'homme ; et alors que, de troisième part, le droit à l'obtention de documents dans le cadre d'un compulsoire doit être combiné avec les principes relatifs à la charge de la preuve édictée par l'article 1162 du Code civil et demeure soumis à diverses conditions pour ne pas dégénérer en abus de droit : un intérêt légitime pour le demandeur, une utilité de la mesure, une détermination de la personne détentrice des documents et une délimitation des informations demandées ne portant pas atteinte aux droits des tiers, qu'en autorisant les consorts GI. à se faire communiquer le ou les noms du ou des bénéficiaires économiques effectifs actuels et précédents des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS et du trust dénommé SAFE HARBOUR TRUST, la cour d'appel a ordonné la production forcée d'informations permettant de retracer l'historique des droits que toute personne, y compris des tiers, ont pu détenir effectivement dans ces structures ; qu'en statuant sans s'assurer au préalable que les informations auxquelles il leur a ainsi été donné accès ne portaient pas atteinte aux droits des tiers, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1162 du Code civil, 851 et 852 du Code de procédure civile ensemble les articles 22 de la Constitution du 17 septembre 1962 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu qu'ayant relevé d'une part que MM. m. et g. GI., héritiers de lu. et lu.a GI., disposaient d'un intérêt légitime à solliciter les informations nécessaires leur permettant de s'assurer qu'aucune atteinte n'avait été portée à leurs droits successoraux par l'intermédiaire d'un éventuel bénéficiaire économique effectif et qu'il importait peu qu'ils soient ou non, détenteurs des droits sur les actions des sociétés TRADE RAINBOW et CARONTE OVEREAS ; que d'autre part, la communication des informations sollicitées n'était pas de nature à porter atteinte à la vie privée et familiale consacrée par l'article 22 de la Constitution, s'agissant de ses mandants qui sont des personnes morales, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être rejeté en ses diverses branches ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne M. Antoine MA., es-qualité de mandataire agréé des sociétés panaméennes TRADE RAINBOW et CARONTE OVERSEAS et la SAM NORTH ATLANTIC, aux dépens dont distraction au profit de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur sous sa due affirmation.

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé le vingt-quatre mars deux mille dix-sept, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Madame Cécile CHATEL-PETIT, Présidente, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Messieurs Jean-Pierre GRIDEL, et Serge PETIT, Conseillers, en présence de Monsieur Hervé POINOT, Procureur Adjoint, assistés de Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, La Présidente,

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