Cour de révision, 14 octobre 2015, SARL E c/ M. j-a. BE.

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Abstract🔗

Baux - Promesse unilatérale de prendre à bail - Dol (non) - Validité (oui) – Effets - Volonté des parties - Pouvoir souverain des juges du fond - Validité de la clause pénale - Effets

Résumé🔗

Ayant exactement relevé, sans dénaturation, que l'engagement du 26 janvier 2011 était une promesse unilatérale de prendre à bail des locaux et que la cause de cet engagement était la nécessité pour le promettant de prendre à bail des bureaux pour l'exercice de son activité, que le dol n'était pas caractérisé en l'état de la condition suspensive relative à l'obtention de l'autorisation de manipulation de marchandises dans les bureaux et de l'absence de preuve de manœuvres frauduleuses, alors que la location de bureaux ne relevait pas du statut des baux commerciaux et que rien ne permettait de retenir que l'interdiction portée dans le règlement de copropriété était incompatible avec l'activité logistique minimale envisagée par la SARL, et, enfin, qu'il n'y avait pas de condition potestative, ledit engagement étant un contrat préparatoire de l'éventuel bail futur par lequel le promettant s'engageait envers le bénéficiaire à louer les locaux si ce dernier levait l'option, ladite acceptation rendant l'engagement définitif et concrétisant sa réalisation sans incidence sur son exécution, la cour d'appel, répondant aux conclusions et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu, sans violer les textes visés au moyen, que c'est à bon droit et par une exacte appréciation des faits de la cause non démentie devant elle que le tribunal a admis la validité de l'engagement de prendre à bail.

C'est dans l'exercice de leur pouvoir souverain que les juges du fond apprécient la volonté des parties. L'existence d'un déséquilibre entre leurs prestations respectives, inhérente à tout contrat unilatéral, ne prive pas ce contrat de sa force obligatoire. Ayant constaté que le contrat était formé puisque l'engagement est devenu définitif du fait de l'acceptation de la bailleresse, et retenu que l'économie générale de l'engagement de location n'est pas d'exclure dans tous les cas de figure le remboursement de la somme perçue, que le montant versé est restitué au preneur si l'option n'est pas levée, vaut en tant qu'acompte des loyers si l'option est levée et est conservé à titre d'indemnité par le jeu de la clause pénale si l'option est levée mais que le preneur refuse de signer le bail, la cour d'appel en a exactement déduit, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant tenant à l'absence de déséquilibre dans l'engagement, que la clause pénale contractuellement prévue en cas de refus de signature par le preneur était valable et avait vocation à s'appliquer dans son principe.

En premier lieu, qu'ayant constaté que l'engagement du 26 janvier 2011 prévoyait la signature du bail au plus tard le 17 février de la même année et que dès le 14 février la SARL informait l'Agence BE. de ce qu'elle renonçait « à la location des bureaux à Seaside », la cour d'appel a exactement retenu que dans ce cas particulier où le débiteur refuse expressément d'exécuter l'obligation, la mise en demeure n'apparait pas nécessaire car ce comportement équivaut à la reconnaissance de son manquement, que la violation définitive de l'obligation vaut en soi mise en demeure et donne immédiatement droit au créancier à des dommages-intérêts. En deuxième lieu, qu'ayant relevé que pour exister la novation suppose une obligation civile préexistante qui faisait défaut en l'espèce dans la mesure où le premier engagement de location proposé par la SARL a été refusé par la bailleresse et qu'il n'y avait pas d'obligation qui puisse servir de base à une novation, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'état des dispositions contractuelles ladite SARL n'était pas en droit de récupérer la somme versée dans le cadre de l'engagement de location en cause, celui-ci étant, par le jeu de la clause pénale, acquise à titre d'indemnité forfaitaire pour le créancier. En troisième lieu, que l'article 1017 du Code civil formule, pour l'interprétation des conventions, des règles qui ne présentent pas un caractère impératif et dont une éventuelle méconnaissance ne saurait, à elle seule, donner ouverture à cassation. Il appartient au juge du fond de rechercher l'intention des parties contractantes dans les termes employés par elles comme dans tout comportement ultérieur de nature à la manifester. En raison de l'imprécision de l'engagement de location quant à la nature et la destination de la somme litigieuse, la cour d'appel, sans méconnaître le principe « nul ne plaide par procureur » qui est exclu lorsque plusieurs personnes ont des intérêts communs et que l'une d'elles seule agit en justice, a pu estimer que M. BE., en sa qualité de mandataire du bailleur créancier de l'engagement, pouvait conserver ladite somme.


Motifs🔗

Pourvoi N° 2015-23 en session

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2015

En la cause de :

  • - SARL E, dont le siège social est sis X, à Monaco, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant Ollivier CARLES de CAUDEMBERG substituant, Maître Dominique SALVIA, avocats au barreau de Nice ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

  • - M. j-a. BE., personne physique exerçant une activité commerciale sous l'enseigne « AGENCE IMMOBILIERE BE. », immatriculé au répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco, sous le n° X, au X, à Monaco, demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

VU :

  • - l'arrêt rendu le 25 novembre 2014 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 17 décembre 2014 ;

  • - la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 15 janvier 2015, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la SARL E ;

  • - le récépissé délivré par un organisme privé en charge de la gestion d'un service public E sous le n° X, en date du 13 janvier 2015, attestant du dépôt par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la société demanderesse, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

  • - la requête déposée le 16 février 2015 au greffe général, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la SARL E, signifiée le même jour ;

  • - la contre-requête déposée le 17 mars 2015 au greffe général, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. j-a. BE., signifiée le même jour ;

  • - les conclusions du Ministère Public en date du 19 mars 2015 ;

  • - le certificat de clôture établi le 16 avril 2015, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 9 octobre 2015 sur le rapport de M. Jean-François RENUCCI, Conseiller,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Ministère Public ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 26 janvier 2011, la SARL E (la SARL) a signé avec M. BE., agent immobilier, mandataire du propriétaire, un acte unilatéral par lequel elle s'engageait à prendre à bail des locaux composés de bureaux et de deux parkings, sous conditions suspensives, prévoyant la signature du bail avant le 17 février 2011 et le versement immédiat de la somme de 35.880 euros ; qu'un projet de bail conforme à cet engagement, si ce n'est pour la situation d'un emplacement de voiture, a été établi le 4 février 2011 ; que le 14 février 2011, la SARL a informé M. BE. qu'elle renonçait à la location ; qu'aucune location n'a été conclue, mais que M. BE. a conservé la somme de 35.880 euros ; que saisi par la SARL d'une demande en paiement de ladite somme, le tribunal a déclaré valables l'engagement de location du 26 janvier 2011 et la clause pénale qui y est contenue, dit n'y avoir lieu à examiner la demande tendant à la caducité de cet acte, condamné M. BE. à restituer à la SARL la somme principale de 35.880 euros, rejeté les demandes d'exécution provisoire et de dommages-intérêts formés par elle, déclaré irrecevable la demande reconventionnelle de dommages-intérêts à hauteur de 36.000 euros et mal fondée celle formée à hauteur de 10.000 euros, condamné M. BE. aux dépens ; que sur appel de M. BE., la cour d'appel, le 25 novembre 2014, a confirmé le jugement du tribunal de première instance du 27 juin 2013 en ce qu'il avait rejeté la demande aux fins d'annulation de l'engagement de location signé le 26 janvier 2011 et rejeté la demande tendant à voir annuler la clause pénale qui y est insérée ou la déclarer non écrite ; qu'y ajoutant, elle a rejeté la demande aux fins de caducité de l'engagement de location signé le 26 janvier 2011, l'a réformé en ce qu'il avait condamné M. BE. exerçant sous l'enseigne Agence immobilière BE. à restituer à la SARL la somme principale de 35.880 euros et, statuant à nouveau, a débouté la SARL de l'intégralité de ses demandes, a rejeté les demandes de dommages-intérêts et toutes conclusions et demandes plus amples ou contraires des parties et a condamné la SARL aux dépens de première instance et d'appel ; que la SARL s'est pourvue en révision contre cet arrêt ;

  • Sur les premier, deuxième et troisième moyens réunis :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de confirmer la décision des premiers juges en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de l'engagement signé le 26 janvier 2011 par la SARL, alors, selon le moyen :

  • - de première part, qu'aux termes de l'article 986 du Code civil, l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet, que la cause des obligations créées par les contrats à titre onéreux est la considération d'une contre-prestation, que l'acte intitulé engagement de location doit être considéré comme une promesse de bail sous conditions suspensives, que l'acte litigieux n'impose des obligations qu'au seul preneur et ne mentionne pas que le bailleur s'engage à réserver les locaux au preneur ; qu'en jugeant que la convention litigieuse était valable car la cause de l'engagement était la nécessité pour le promettant de prendre à bail des bureaux pour l'exercice de son activité, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et explicites de l'acte, privé sa décision de base légale au sens de l'article 199 du Code de procédure civile en ne faisant aucune réponse sur l'absence de cause de l'acte, au regard de l'absence d'obligation du bailleur de lui réserver les locaux, violé par non-application les dispositions de l'article 986 du Code civil ;

  • - de deuxième part, que selon l'article 971 du Code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; qu'en application de l'article 8 du règlement de copropriété de l'immeuble où se trouvent les locaux donnés à bail, lesdits locaux avaient une destination de bureau et non une destination commerciale, destination contraire à l'activité de la SARL ; qu'en jugeant que la convention litigieuse était valable en l'absence de preuve de manœuvres dolosives, la cour d'appel s'est déterminée sur les seules allégations de M. BE., sans faire l'analyse des pièces soumises à son appréciation et a privé ainsi de motivation sa décision en violation des articles 199 du Code de procédure civile et 971 du Code civil, qu'elle n'a pas répondu aux conclusions de la SARL en ce qu'elle indiquait que ni le bailleur, ni M. BE. n'avaient porté à sa connaissance l'interdiction de toute activité commerciale, ainsi que toute activité nécessitant de la réception de marchandise, stipulée dans le règlement de copropriété, au mépris des dispositions des articles 199 du Code de procédure civile, 1, 2 et 26 du Code de commerce, et de la loi n° 490 du 24 novembre 1948 sur les baux commerciaux ;

  • - de troisième part, qu'aux termes de l'article 1025 du Code civil, « la condition potestative est celle qui fait dépendre l'exécution de la convention d'un événement qui est au pouvoir de l'une ou de l'autre des parties contractantes de faire arriver ou d'empêcher », et aux termes de l'article 1029 du même code « toute obligation est nulle, lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige » ; qu'en jugeant que la convention litigieuse était valable en l'absence de condition purement potestative, la cour d'appel a violé les articles 1025 et 1029 du Code civil par refus d'application et n'a pas répondu aux conclusions de la SARL en ce que l'acte signé par elle n'emportait aucune obligation pour le bailleur ou M. BE. de réserver les locaux à cette dernière, au mépris des dispositions de l'article 199 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant exactement relevé, sans dénaturation, que l'engagement du 26 janvier 2011 était une promesse unilatérale de prendre à bail des locaux et que la cause de cet engagement était la nécessité pour le promettant de prendre à bail des bureaux pour l'exercice de son activité, que le dol n'était pas caractérisé en l'état de la condition suspensive relative à l'obtention de l'autorisation de manipulation de marchandises dans les bureaux et de l'absence de preuve de manœuvres frauduleuses, alors que la location de bureaux ne relevait pas du statut des baux commerciaux et que rien ne permettait de retenir que l'interdiction portée dans le règlement de copropriété était incompatible avec l'activité logistique minimale envisagée par la SARL, et, enfin, qu'il n'y avait pas de condition potestative, ledit engagement étant un contrat préparatoire de l'éventuel bail futur par lequel le promettant s'engageait envers le bénéficiaire à louer les locaux si ce dernier levait l'option, ladite acceptation rendant l'engagement définitif et concrétisant sa réalisation sans incidence sur son exécution, la cour d'appel, répondant aux conclusions et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu, sans violer les textes visés au moyen, que c'est à bon droit et par une exacte appréciation des faits de la cause non démentie devant elle que le tribunal a admis la validité de l'engagement de prendre à bail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

  • Sur le quatrième moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de confirmer la décision des premiers juges rejetant la demande de juger non écrite la clause pénale contenue dans l'engagement signé le 26 janvier 2011, alors, selon le moyen, qu'en application des articles 989 et 990 du Code civil, les conventions doivent être exécutées de bonne foi et obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature, et alors qu'il y avait un déséquilibre significatif dans cet engagement ; qu'en jugeant que la clause pénale litigieuse était valable, la cour d'appel a violé les articles susvisés par refus d'application ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de leur pouvoir souverain que les juges du fond apprécient la volonté des parties ; que l'existence d'un déséquilibre entre leurs prestations respectives, inhérente à tout contrat unilatéral, ne prive pas ce contrat de sa force obligatoire ; qu'ayant constaté que le contrat était formé puisque l'engagement est devenu définitif du fait de l'acceptation de la bailleresse, et retenu que l'économie générale de l'engagement de location n'est pas d'exclure dans tous les cas de figure le remboursement de la somme perçue, que le montant versé est restitué au preneur si l'option n'est pas levée, vaut en tant qu'acompte des loyers si l'option est levée et est conservé à titre d'indemnité par le jeu de la clause pénale si l'option est levée mais que le preneur refuse de signer le bail, la cour d'appel en a exactement déduit, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant tenant à l'absence de déséquilibre dans l'engagement, que la clause pénale contractuellement prévue en cas de refus de signature par le preneur était valable et avait vocation à s'appliquer dans son principe ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

  • Sur le cinquième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'infirmer la décision des premiers juges en ce qu'ils avaient condamné M. BE. à restituer à la SARL la somme de 35.880 euros, alors, selon le moyen :

  • - de première part, que l'article 1085 du Code civil dispose que « soit que l'obligation primitive contienne, soit qu'elle ne contienne pas un terme dans lequel elle doit être accomplie, la peine n'est encourue que lorsque celui qui s'est obligé soit à livrer, soit à prendre, soit à faire, est en demeure », dispositions qui sont le corollaire de celles de l'article 1001, prévoyant une mise en demeure préalable adressée à celui qui s'est obligé avant de lui réclamer des dommages et intérêts et que l'Agence BE. n'a jamais mis la SARL en demeure d'exécuter ses engagements pour prétendre à la clause pénale ; qu'en jugeant que M. BE. pouvait conserver la somme de 35.880 euros versée par la SARL lors de son engagement de location, la cour d'appel a violé les articles 1001 et 1085 du Code civil, en retenant qu'il n'était pas nécessaire d'adresser une mise en demeure à la SARL, puisqu'elle avait déjà renoncé à exécuter son engagement de location ;

  • - de seconde part, que l'article 989 du Code civil dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi, que l'article 1089 du même code précise que les obligations s'éteignent par la novation, que l'article 1017 impose dans le doute d'interpréter la convention contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation et qu'enfin, nul ne plaide par procureur ; qu'en jugeant que M. BE. pouvait conserver la somme de 35.880 euros versée par la SARL lors de son engagement de location, la cour d'appel a violé les articles 989, 1017 et 1119 du Code civil, ainsi que de la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur », en retenant que M. BE. pouvait conserver la somme de 35.880 euros remise par la SARL à l'occasion d'un engagement de location devenu caduc suite au refus du bailleur d'y donner suite, et alors qu'il n'était que l'agent immobilier mandataire du bailleur, de sorte qu'il ne pouvait plaider que pour lui-même, et par conséquent demander en justice qu'au maximum le règlement de ses honoraires à hauteur de 8.611,20 euros ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant constaté que l'engagement du 26 janvier 2011 prévoyait la signature du bail au plus tard le 17 février de la même année et que dès le 14 février la SARL informait l'Agence BE. de ce qu'elle renonçait « à la location des bureaux à Seaside », la cour d'appel a exactement retenu que dans ce cas particulier où le débiteur refuse expressément d'exécuter l'obligation, la mise en demeure n'apparait pas nécessaire car ce comportement équivaut à la reconnaissance de son manquement, que la violation définitive de l'obligation vaut en soi mise en demeure et donne immédiatement droit au créancier à des dommages-intérêts ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant relevé que pour exister la novation suppose une obligation civile préexistante qui faisait défaut en l'espèce dans la mesure où le premier engagement de location proposé par la SARL a été refusé par la bailleresse et qu'il n'y avait pas d'obligation qui puisse servir de base à une novation, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'état des dispositions contractuelles ladite SARL n'était pas en droit de récupérer la somme versée dans le cadre de l'engagement de location en cause, celui-ci étant, par le jeu de la clause pénale, acquise à titre d'indemnité forfaitaire pour le créancier ;

Et attendu, en troisième lieu, que l'article 1017 du Code civil formule, pour l'interprétation des conventions, des règles qui ne présentent pas un caractère impératif et dont une éventuelle méconnaissance ne saurait, à elle seule, donner ouverture à cassation ; qu'il appartient au juge du fond de rechercher l'intention des parties contractantes dans les termes employés par elles comme dans tout comportement ultérieur de nature à la manifester ; qu'en raison de l'imprécision de l'engagement de location quant à la nature et la destination de la somme litigieuse, la cour d'appel, sans méconnaître le principe « nul ne plaide par procureur » qui est exclu lorsque plusieurs personnes ont des intérêts communs et que l'une d'elles seule agit en justice, a pu estimer que M. BE., en sa qualité de mandataire du bailleur créancier de l'engagement, pouvait conserver ladite somme ;

D'où il suit que le moyen pris en ses deux branches n'est pas fondé ;

  • Sur la condamnation à l'amende prévue à l'article 459-4 du Code de procédure civile :

Attendu que compte tenu des circonstances de l'affaire relevées ci-dessus, il y a lieu de dispenser le demandeur au pourvoi de la condamnation à l'amende ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne la SARL E aux dépens de la présente instance, avec distraction au profit de Maître MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé le quatorze octobre deux mille quinze, par la Cour de révision de la Principauté de Monaco, composée de Messieurs Roger BEAUVOIS, Premier-Président, chevalier de l'ordre de Saint-Charles, Guy JOLY, conseiller, Jean-François RENUCCI, rapporteur, conseiller, chevalier de l'Ordre de Saint-Charles et François CACHELOT, conseiller, en présence du Ministère Public, assistés de Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, chevalier de l'ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président.

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