Cour de révision, 13 mai 2015, Mme k. KU. épouse KA. c/ M. r. KA.

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Abstract🔗

Prestation compensatoire - Pension alimentaire - Fixation - Appréciation des juges du fond - Résidence des enfants et droit de visite - Pourvoi abusif - Dommages et intérêts (non)

Résumé🔗

En l'état de ses constatations, c'est par une décision motivée que la Cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à de simples allégations dépourvues d'offres de preuve, a souverainement fixé le montant de la prestation compensatoire à la somme de 150.000 euros ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches.

L'arrêt constate encore, par motifs propres, que l'organisation actuelle de la résidence des enfants et des droits de visite et d'hébergement ne présente pas de difficulté si ce n'est la volonté exprimée en procédure d'appel par la mère de quitter la Principauté et d'emmener ses enfants en Allemagne; que dès lors, la Cour d'appel a répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument omises ; que le moyen ne peut être accueilli.

Sous couvert d'un défaut de réponse à conclusions, Mme KU. ne fait que contester l'évaluation souveraine, par les juges du fond, du montant de la part contributive de M KA. à l'entretien et à l'éducation des enfants ; que le moyen ne peut être accueilli ;

En formant un pourvoi en révision, Mme KU. n'a fait qu'user de son droit d'exercer une voie de recours ; qu'il n'y a donc pas lieu d'accueillir la demande de M. KA. au titre des dommages et intérêts pour pourvoi abusif.


Motifs🔗

Pourvoi N° 2015-17

Hors Session civile

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 13 MAI 2015

En la cause de :

- Mme k. KU. épouse KA., née le 21 décembre 1974 à Berlin (Allemagne), de nationalité allemande, en recherche d'emploi, demeurant X, à Monaco,

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant comme avocat plaidant Maître François-Henri BRIARD, Avocat aux Conseils ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- M. r. KA., né le 7 août 1958 à Cambridge (Grande-Bretagne, de nationalité britannique, se disant domicilié à l'hôtel X à Beausoleil (06240) et en dernier lieu X à Monaco ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel ;

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de 458 et 459 du Code de procédure civile ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière civile, le 29 septembre 2014, signifié 4 novembre 2014;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 4 décembre 2014, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de Mme k. KU. épouse KA. ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 45175, en date du 3 décembre 2014, attestant du dépôt par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la demandeuse, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 5 janvier au greffe général, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de Mme. k. KU. épouse KA., signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 4 février 2015 au greffe général, par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de M. r. KA., signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère Publique en date du 9 février 2015 ;

- la réplique déposée le 12 février 2015 au greffe Général, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA avocat-défenseur, au nom de Mme. k. KU. épouse KA., signifiée le même jour ;

- la duplique déposée le 20 février 2015 au Greffe Général, par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de M. r. KA., signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 9 mars 2015, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 16 avril 2015, sur le rapport de Monsieur Jean-Pierre DUMAS, Vice-Président,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt critiqué, que M. KA. et Mme KU. se sont mariés le 19 septembre 2003 ; que, de cette union sont nés deux enfants, le 30 juillet 2005 et le 12 novembre 2006 ; que, par arrêt du 29 septembre 2014, la Cour d'appel a, notamment, prononcé le divorce des époux aux torts et griefs partagés, condamné le mari à payer à son épouse la somme de 150.000 euros à titre de prestation compensatoire et confirmé le jugement du Tribunal de première instance en ses dispositions fixant la résidence habituelle des enfants chez leur mère, organisant le droit de visite et d'hébergement du père et fixant la part contributive de celui-ci à l'entretien et l'éducation des enfants à 600 euros par mois et par enfant ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, réunies

Attendu que Mme KU. reproche à l'arrêt infirmatif de limiter à 150.000 euros la prestation compensatoire que doit lui verser M. KA., alors, selon le moyen,d'une part que la prestation compensatoire intervient à titre indemnitaire, pour compenser les investissements matériels, professionnels ou familiaux laissés dans le couple par l'un des époux ; qu'après son mariage, elle s'est investie dans les projets de son mari jusqu'en 2013, en particulier dans le groupe ARX détenu par M. KA., à la demande de ce dernier; qu'elle a occupé des postes à responsabilité et a participé au développement du groupe ARX avant d'en être licenciée tandis que les époux étaient en train de se séparer ; qu'elle ne pourra bénéficier des fruits de son travail et se trouve ainsi obligée de trouver un emploi à Monaco, pendant que M. KA. reste le dirigeant du groupe ARX et profite de l'investissement unilatéral de son épouse dans son développement ; que son investissement répondait à la demande de son mari et révèle ainsi un investissement unilatéral dans le couple ; que dès lors, en limitant la prestation compensatoire à 150.000 euros, sans tenir compte de son investissement unilatéral dans le couple, par sa présence aux côtés de son mari dans le groupe qu'il détenait et sans s'intéresser aux conséquences sur une carrière qu'elle aurait pu développer autrement, indépendamment de son mari, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 204-5 du Code civil ; et alors, d'autre part que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, elle faisait valoir que M. KA. cherchait à dissimuler les résultats réels de son groupe ARX, qu'il a déposé plusieurs brevets de nature à valoriser son entreprise et qu'il a refusé de vendre son groupe, malgré une offre importante, avant que le divorce soit définitivement prononcé (conclusions d'appel, pages 26 à 29) ; que M. KA. a donc cherché à dissimuler artificiellement ses revenus ainsi que la valeur réelle de son groupe pour fausser l'appréciation de la disparité dans les conditions de vie des époux et résultant de leur séparation; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, pourtant déterminant et de nature à modifier l'évaluation de la prestation compensatoire due par M. KA., la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et a violé l'article 199 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt retient que Mme KU. a collaboré à l'activité professionnelle de son mari comme cadre de haut niveau dans le groupe que celui-ci dirigeait, qu' après son licenciement, le 10 avril 2013, elle a refusé tout reclassement, y compris à domicile, qui lui était proposé, qu'elle a reçu une somme de 43.725,62 euros à l'occasion de son licenciement, qu'elle dispose d'économies sous forme de contrats d'assurance-vie, est propriétaire indivise d'un bien immobilier à Monaco acquis par le couple en 2006 pour 1.300.000 euros, que, parlant plusieurs langues étrangères et étant diplômée d'études supérieures, elle déclare avoir récemment accepté un emploi en Allemagne qui lui procurerait un revenu mensuel de 6.300 euros, qu'en 2009, ses comptes, coupons et titres étaient d'un total de 83.725,62 euros et qu'en revanche elle ne justifie pas d'une recherche d'emploi sérieuse à Monaco malgré ses qualités et compétences professionnelles ; que l'arrêt relève encore, s'agissant de M. KA., qu'il reçoit un salaire mensuel de 6.083,28 euros, que le groupe qu'il dirige connaît actuellement de graves difficultés et se révèle d'une grande fragilité, qu'il a dû recourir à un prêt de son père de 750.000 dollars US pour le réinvestir dans ses sociétés dont le remboursement du premier terme n'a pu se faire que par la clôture d'un contrat d'assurance-vie; qu'en l'état de ces constatations, c'est par une décision motivée que la Cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à de simples allégations dépourvues d'offres de preuve, a souverainement fixé le montant de la prestation compensatoire à la somme de 150.000 euros ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen

Attendu que Mme KU. reproche encore à l'arrêt de confirmer le jugement sur les dispositions accordant à M. KA. un droit de visite et d'hébergement une semaine sur deux, alors, selon le moyen, que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, elle faisait valoir que son mari délaissait ses enfants lorsqu'ils étaient hébergés chez lui ; qu'elle indiquait en particulier qu'il était très régulièrement en déplacement et que, dès lors, la sœur de M. KA. devait s'occuper des enfants ; que les juges du fond devaient analyser le droit de garde et d'hébergement de M. KA. au regard de ces circonstances ; qu'en justifiant le droit d'hébergement élargi par l'intérêt supérieur des enfants mais en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et a violé l'article 199 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que, par motifs présumés adoptés des premiers juges, l'arrêt retient que le fait que r. KA. effectue des déplacements professionnels et demande parfois à des tiers de confiance de prendre les enfants à la sortie de l'école ne saurait pas plus constituer une difficulté insurmontable dès lors qu'il n'est pas allégué que les enfants seraient à cette occasion soumis à des conditions de garde défectueuses ou nuisibles à leur épanouissement; que l'arrêt constate encore, par motifs propres, que l'organisation actuelle de la résidence des enfants et des droits de visite et d'hébergement ne présente pas de difficulté si ce n'est la volonté exprimée en procédure d'appel par la mère de quitter la Principauté et d'emmener ses enfants en Allemagne; que dès lors, la Cour d'appel a répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument omises ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le troisième moyen

Attendu que Mme KU. reproche enfin à la Cour d'appel d'avoir fixé la part contributive de M. KA. à l'entretien et à l'éducation des enfants à 600 euros par mois et par enfant selon les modalités définies par le jugement, alors, selon le moyen, que la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants doit servir à maintenir le train de vie des enfants et doit être fixé en fonction de celui-ci et des ressources de chacun des parents ; que si maintenir le train de vie des enfants répond à l'impératif de rechercher leur intérêt supérieur et que celui-ci est de rester domiciliés en Principauté de Monaco, il convient de tenir compte du montant des loyers de la mère dans la fixation de cette part contributive; que la Cour d'appel a fixé la résidence des enfants à Monaco, en s'appuyant sur leur intérêt supérieur ; que ce faisant, elle lui a interdit de s'installer avec ses enfants dans son pays d'origine, à savoir l'Allemagne ; que dès lors, pour calculer la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants due par M. KA., la Cour d'appel devait prendre en compte les frais relatifs à ses loyers à Monaco; qu'en s'abstenant de s'intéresser à cet élément, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 300 du Code civil ;

Mais attendu que, sous couvert d'un défaut de réponse à conclusions, Mme KU. ne fait que contester l'évaluation souveraine, par les juges du fond, du montant de la part contributive de M KA. à l'entretien et à l'éducation des enfants ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur la demande de dommages-intérêts formée par M. KA.

Attendu que M. KA. demande que Mme KU. soit condamnée à lui payer la somme de 5.000 euros au motif que son pourvoi serait abusif ;

Mais attendu qu'en formant un pourvoi en révision, Mme KU. n'a fait qu'user de son droit d'exercer une voie de recours ; qu'il n'y a donc pas lieu d'accueillir la demande de M. KA. ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Rejette la demande de dommages-intérêts présentée par M. KA. ; Condamne Mme k. KU. épouse KA. à une amende de trois cents euros ;

La condamne aux dépens de la présente instance, dont distraction au profit de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition🔗

Ainsi délibéré et jugé le treize mai deux mille quinze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Jean-Pierre DUMAS, Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, rapporteur, Madame Cécile PETIT et Monsieur François-Xavier LUCAS, Conseillers.

Et Monsieur Jean-Pierre DUMAS Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Président

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