Cour de révision, 25 septembre 2014, Mme g. MA. c/ Le Ministère Public

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Abstract🔗

Requête en révision – Récépissé de la consignation – Expédition de l'arrêt attaqué

Infractions distinctes – Concours réel

Amende prévue par l'article 502 du Code de procédure pénale – Appréciation selon les circonstances

Résumé🔗

L'État de Monaco soutient que ne sont annexés à la requête en révision ni le récépissé de la consignation effectuée auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations, ni une expédition de l'arrêt attaqué conformément aux articles 480 et 483 du Code de procédure pénale. Mais il résulte des pièces de la procédure qu'est joint à la requête le récépissé de la consignation de la somme de 300 euros en date du 7 mai 2014. Et s'il résulte de l'article 483 du Code de procédure pénale qu'il incombe au greffier de joindre aux pièces une expédition de l'arrêt attaqué lorsque le pourvoi est formé par le Ministère Public, l'inculpé, l'accusé ou le condamné, aucune disposition ne lui impose d'accomplir cette formalité dans un certain délai sous peine d'irrecevabilité, dès lors qu'une copie de l'arrêt critiqué étant jointe à la déclaration de pourvoi, le défendeur a pu prendre connaissance de la décision sur laquelle devait porter sa contre-requête. Par conséquent, le pourvoi est recevable.

Répondant aux conclusions prétendument délaissées et sans se contredire, la Cour d'appel a retenu à bon droit que les trois chefs de fraudes commises au préjudice de l'État de Monaco, à travers ses trois directions spécifiques, établissaient l'existence de trois types d'infractions distinctes poursuivies dans un concours réel.

La condamnation systématique à une amende de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, eu égard aux circonstances de la cause ci-dessus énoncées, il y a de lieu de prononcer une condamnation au paiement de l'amende prévue par l'article 502 du Code de procédure pénale.


Motifs🔗

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2014

En la cause de :

  • - Mme g. MA., née le 22 septembre 1965 à Monaco, de Joseph et Lilia MA., de nationalité monégasque, fonctionnaire, demeurant « Y », X à Monaco ;

Prévenue de :

  • FRAUDE OU FAUSSE DÉCLARATION POUR L'OBTENTION D'ALLOCATIONS ;

  • ESCROQUERIES

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

  • - MINISTÈRE PUBLIC,

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

En présence de :

  • L'État de Monaco, représenté au sens de l'article 153 du Code de procédure civile par Monsieur le Ministre d'État, pris tant en son service des prestations médicales de l'État, en la direction de l'Habitat, qu'en la direction de l'Éducation nationale de la jeunesse et des sports, constitué partie civile, représenté par Maître Christophe SOSSO, avocat défenseur près de la Cour d'appel ;

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

  • - l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, le 5 mai 2014 ;

  • - la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 8 mai 2014, par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de Mme g. MA. ;

  • - le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 44522, en date du 7 mai 2014, attestant du dépôt par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de Mme g. MA., demanderesse, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

  • - la requête déposée le 19 mai 2014 au greffe général, par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de Mme g. MA., signifiée le même jour ;

  • - l'avis donné le 27 mai 2014, par lettre recommandée avec avis de réception, du greffe général à la partie civile, du dépôt de la requête conformément à l'article 477 du Code de procédure pénale ;

  • - la contre-requête déposée le 10 juin 2014 au greffe général, par Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur, au nom de l'État de Monaco, signifiée le même jour ;

  • - le certificat de clôture établi le 1er juillet 2014 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

  • - les conclusions du Ministère Public en date du 7 juillet 2014 ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 11 septembre 2014, sur le rapport de Monsieur Serge PETIT, Conseiller,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu que par arrêt du 5 mai 2014, la Cour d'appel de Monaco a déclaré Madame g. MA. coupable du délit de fraude ou fausses déclarations aux fins d'obtention de l'allocation de soutien de famille et coupable des délits d'escroqueries aux fins d'obtention de l'aide nationale au logement et de bourses d'études universitaires ; qu'elle a condamné celle-ci à une peine d'emprisonnement avec sursis et a ordonné son placement sous le régime de la liberté d'épreuve avec obligation de réparer les dommages causés par ces infractions ;

  • Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la partie civile ;

Attendu que l'État de Monaco soutient que ne sont annexés à la requête en révision ni le récépissé de la consignation effectuée auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations, ni une expédition de l'arrêt attaqué conformément aux articles 480 et 483 du Code de procédure pénale ;

Mais attendu qu'il résulte des pièces de la procédure qu'est joint à la requête le récépissé de la consignation de la somme de 300 euros en date du 7 mai 2014 ;

Et attendu que s'il résulte de l'article 483 du Code de procédure pénale qu'il incombe au greffier de joindre aux pièces une expédition de l'arrêt attaqué lorsque le pourvoi est formé par le Ministère Public, l'inculpé, l'accusé ou le condamné, aucune disposition ne lui impose d'accomplir cette formalité dans un certain délai sous peine d'irrecevabilité, dès lors qu'une copie de l'arrêt critiqué étant jointe à la déclaration de pourvoi, le défendeur a pu prendre connaissance de la décision sur laquelle devait porter sa contre-requête ;

D'où il suit que le pourvoi est recevable ;

  • Sur les deux moyens réunis :

Attendu que Madame MA. fait grief à l'arrêt attaqué de statuer comme il le fait alors, selon le moyen, d'une part, que viole les articles 361 et 390 du Code de procédure pénale la Cour d'appel qui n'a pas répondu au moyen tiré de ce qu'il est impossible d'escroquer la fortune de services administratifs, seuls mentionnés dans la prévention, dans la mesure où il s'agit de services de l'Administration dépourvus de personnalité juridique, tout en admettant, par contradiction de motifs, qu'il n'y avait qu'une prétendue victime, l'État de Monaco, sans retenir qu'il y avait cumul idéal d'infractions ; et alors, d'autre part, que viole l'article 330 alinéa 1 du Code pénal, la Cour d'appel qui, pour la déclarer coupable d'escroquerie de la fortune d'autrui, retient l'escroquerie de la fortune de directions administratives, dépourvues de personnalité juridique, donc de patrimoine ;

Mais attendu que répondant aux conclusions prétendument délaissées et sans se contredire, la Cour d'appel a retenu à bon droit que les trois chefs de fraudes commises au préjudice de l'État de Monaco, à travers ses trois directions spécifiques, établissaient l'existence de trois types d'infractions distinctes poursuivies dans un concours réel ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

  • Sur la demande dommages et intérêts :

Attendu que l'État de Monaco sollicite la condamnation de Madame MA. à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Mais attendu qu'il résulte des circonstances de la cause énoncées ci-dessus que Madame MA. n'a pas abusé de son droit de se pourvoir en révision ; que la demande de dommages et intérêts doit être rejetée ;

  • Sur l'amende prévue à l'article 502 du Code de procédure pénale :

Attendu que la condamnation systématique à une amende de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu toutefois qu'eu égard aux circonstances de la cause ci-dessus énoncées, il y a de lieu de prononcer une condamnation au paiement de l'amende ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Rejette la demande de dommages et intérêts pour pourvoi abusif ;

Condamne Madame MA. à l'amende et aux dépens dont distraction au profit de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Composition🔗

Ainsi délibéré et jugé le vingt-cinq septembre deux mille quatorze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, Madame Cécile PETIT, Messieurs Jean-Pierre GRIDEL, Guy JOLY, Serge PETIT, rapporteur, Conseillers.

Et Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président.

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