Cour de révision, 25 octobre 2012, S. c/ Ministère Public

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Abstract🔗

Commission rogatoire internationale

Exécution par le juge d'instruction monégasque d'une commission rogatoire émise par le Tribunal de Rome aux fins de saisie d'un compte bancaire - Action devant la Chambre du Consul de la Cour d'appel tendant à la nullité de la procédure d'exécution et à la main levée de la saisie - Arrêt de la Chambre du Conseil se déclarant incompétent - Pourvoi en révision : pour violation de la Convention du Conseil de l'Europe du 8 novembre 1990 (art. 21-3) et de celle du 9 août 2002, en prétendant que la confiscation préventive n'existe pas à Monaco et que la décision d'incompétence rend impossible toute censure, au mépris des droits de la défense, d'un vice procédural ; le juge d'instruction dispose de tout pouvoir en vertu de l'article 87 du Code de procédure pénale pour ordonner toutes les mesures utiles à la manifestation de la route, les violations invoquées pour critiquer la décision d'incompétence étant inopérants

Résumé🔗

Selon l'arrêt attaqué, le 25 février 2006 le procureur de la République près le tribunal de Rome a saisi l'autorité judiciaire de la Principauté de Monaco d'une demande d'assistance judiciaire en matière pénale, aux fins d'exécution de la mesure de saisie émise par le tribunal de Rome le 24 février 2006 dans le cadre d'un procès en phase de débats à l'encontre de Mme S. et autres, accusés d'association criminelle finalisée, délits d'usure et exercice illégal d'activités financières ; le magistrat instructeur, requis par le procureur général, le 6 mars 2006, aux fins d'exécution d'une commission rogatoire, faisait procéder à la saisie immédiate du compte ouvert dans les livres d'une banque à Monaco au nom de Mme S. ; par requête du 5 mars 2012, cette dernière a saisi la chambre du conseil de la Cour d'appel pour voir déclarer nulles les réquisitions du procureur général aux fins d'exécution d'une commission rogatoire et voir ordonner la mainlevée de la « confiscation saisie » pratiquée et elle s'est pourvue en révision contre l'arrêt ayant déclaré incompétente la chambre du conseil pour statuer sur ces demandes ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Mme S. fait grief à l'arrêt de statuer comme il fait, alors, selon le moyen, d'une part, que les mesures provisoires visées à l'article 11 de la Convention du 8 novembre 1990 du Conseil de l'Europe sont exécutées conformément au droit interne de la partie requise en vertu de celui-ci et conformément aux procédures précisées dans la demande dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec ce droit interne ; que la confiscation préventive à laquelle le procureur de la République de Rome a recouru n'existe pas en droit monégasque ; qu'en statuant comme elle a fait, la Cour d'appel a violé l'article 12-1 de la Convention du 8 novembre 1990 ; alors, d'autre part, que l'article 5 du chapitre II de la Convention du 8 novembre 1990 précise que chaque partie adopte les mesures législatives et autres qui se révèlent nécessaires pour faire en sorte que les personnes affectées par les mesures prévues aux articles 2 et 3 disposent de recours juridiques effectifs pour préserver leurs droits ; qu'en faisant obstacle à la communication des éléments du dossier ouvert en Principauté de Monaco sur saisine du procureur de la République de Rome, il y a eu violation des dispositions des articles 5 et 11 de la Convention du 8 novembre 1990 et des droits de la défense ; et alors, enfin, qu'en statuant comme il a fait, le juge monégasque rend impossible toute censure d'un vice procédural et ou de fond, puisque l'autorité judiciaire italienne se rend également incompétente pour se prononcer sur l'appréciation par les autorités monégasques de la régularité de la commission rogatoire présentée et ce en violation de l'article 21-3 de la Convention du 8 novembre 1990 ;

Mais, en premier lieu, en application de l'article 87 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction peut prendre toutes les mesures qu'il estime utiles à la manifestation de la vérité et que ces mesures sont susceptibles de recours en vertu des articles 207 et suivants du même code ;

En second lieu, le moyen qui invoque la violation de l'article 21-3 de la Convention du 8 novembre 1990 pour critiquer la décision d'incompétence, est inopérant ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Mme S. fait le même grief à l'arrêt, alors selon le moyen, d'une part, que l'article 2-3 de l'ordonnance du 9 août 2002 qui traite des mesures conservatoires applicables en la matière a vu violer l'article 4 de ladite ordonnance et que cet article indique précisément l'étendue des mesures conservatoires au regard des commissions rogatoires étrangères qui exclut tout recours à commission rogatoire en ce qui concerne les mesures conservatoires au visa des dispositions des articles 1-1 de la Convention des Nations unies et 2-1 de la Convention du 8 novembre 1990 ; et alors, d'autre part, que l'article 9 de l'ordonnance du 9 août 2002 prévoit que l'exécution des mesures conservatoires étrangères est régie par le Code de procédure civile monégasque, procédure qui n'a pas été respectée, et que de surcroît la mesure conservatoire est limitée à deux ans et doit être renouvelée, ce qui n'a pas été le cas ;

Mais le moyen, qui est fondé sur la violation des dispositions de la convention du 9 août 2002, non applicable en l'espèce, est inopérant.


Motifs🔗

(an matière de procédure pénale)

La Cour,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 25 février 2006 le procureur de la République près le tribunal de Rome a saisi l'autorité judiciaire de la Principauté de Monaco d'une demande d'assistance judiciaire en matière pénale, aux fins d'exécution de la mesure de saisie émise par le tribunal de Rome le 24 février 2006 dans le cadre d'un procès en phase de débats à l'encontre de Mme S. et autres, accusés d'association criminelle finalisée, délits d'usure et exercice illégal d'activités financières ; que le magistrat instructeur, requis par le procureur général, le 6 mars 2006, aux fins d'exécution d'une commission rogatoire, faisait procéder à la saisie immédiate du compte ouvert dans les livres d'une banque à Monaco au nom de Mme S. ; par requête du 5 mars 2012, cette dernière a saisi la chambre du conseil de la Cour d'appel pour voir déclarer nulles les réquisitions du procureur général aux fins d'exécution d'une commission rogatoire et voir ordonner la mainlevée de la « confiscation saisie » pratiquée et qu'elle s'est pourvue en révision contre l'arrêt ayant déclaré incompétente la chambre du conseil pour statuer sur ces demandes ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que Mme S. fait grief à l'arrêt de statuer comme il fait, alors, selon le moyen, d'une part, que les mesures provisoires visées à l'article 11 de la Convention du 8 novembre 1990 du Conseil de l'Europe sont exécutées conformément au droit interne de la partie requise en vertu de celui-ci et conformément aux procédures précisées dans la demande dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec ce droit interne ; que la confiscation préventive à laquelle le procureur de la République de Rome a recouru n'existe pas en droit monégasque ; qu'en statuant comme elle a fait, la Cour d'appel a violé l'article 12-1 de la Convention du 8 novembre 1990 ; alors, d'autre part, que l'article 5 du chapitre II de la Convention du 8 novembre 1990 précise que chaque partie adopte les mesures législatives et autres qui se révèlent nécessaires pour faire en sorte que les personnes affectées par les mesures prévues aux articles 2 et 3 disposent de recours juridiques effectifs pour préserver leurs droits ; qu'en faisant obstacle à la communication des éléments du dossier ouvert en Principauté de Monaco sur saisine du procureur de la République de Rome, il y a eu violation des dispositions des articles 5 et 11 de la Convention du 8 novembre 1990 et des droits de la défense ; et alors, enfin, qu'en statuant comme il a fait, le juge monégasque rend impossible toute censure d'un vice procédural et ou de fond, puisque l'autorité judiciaire italienne se rend également incompétente pour se prononcer sur l'appréciation par les autorités monégasques de la régularité de la commission rogatoire présentée et ce en violation de l'article 21-3 de la Convention du 8 novembre 1990 ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en application de l'article 87 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction peut prendre toutes les mesures qu'il estime utiles à la manifestation de la vérité et que ces mesures sont susceptibles de recours en vertu des articles 207 et suivants du même code ;

Attendu, en second lieu, que le moyen qui invoque la violation de l'article 21-3 de la Convention du 8 novembre 1990 pour critiquer la décision d'incompétence, est inopérant ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que Mme S. fait le même grief à l'arrêt, alors selon le moyen, d'une part, que l'article 2-3 de l'ordonnance du 9 août 2002 qui traite des mesures conservatoires applicables en la matière a vu violer l'article 4 de ladite ordonnance et que cet article indique précisément l'étendue des mesures conservatoires au regard des commissions rogatoires étrangères qui exclut tout recours à commission rogatoire en ce qui concerne les mesures conservatoires au visa des dispositions des articles 1-1 de la Convention des Nations unies et 2-1 de la Convention du 8 novembre 1990 ; et alors, d'autre part, que l'article 9 de l'ordonnance du 9 août 2002 prévoit que l'exécution des mesures conservatoires étrangères est régie par le Code de procédure civile monégasque, procédure qui n'a pas été respectée, et que de surcroît la mesure conservatoire est limitée à deux ans et doit être renouvelée, ce qui n'a pas été le cas ;

Mais attendu que le moyen, qui est fondé sur la violation des dispositions de la convention du 9 août 2002, non applicable en l'espèce, est inopérant ;

Et sur l'amende prévue à l'article 502 du Code de procédure pénale :

Attendu que la condamnation systématique de la partie qui succombe en son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales ;

Attendu toutefois qu'eu égard aux circonstances de la cause ci-dessus énoncées, il y a lieu de prononcer une condamnation au paiement de l'amende ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne Mme S. à l'amende et aux dépens.

Composition🔗

M.M. Beauvois pres. Badi cons. rap. Renuca cons. - Mme Bardy gref. en chef - Mes Pontis Simonis av. bar. de Nice et Ghiani av. bar. de Rome

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