Cour de révision, 25 octobre 2012, R. c/ B.

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Abstract🔗

Cessation des paiements d'une personne morale

Liquidation des biens de l'administrateur

  • Mesure prononcée contre l'administrateur par jugement du tribunal confirmé par la Cour d'appel, en application de l'article 565-2° du Code de commerce : le dirigeant ayant fait supporter à la société qu'il avait créée, la position débitrice de son compte bancaire personnel et ayant encaissé sur son compte des factures émises par la société

  • Pourvoi en révision : rejeté en l'état des motifs erronés du requérant.

Résumé🔗

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches et le second moyen, réunis :

L'arrêt attaqué a prononcé la liquidation des biens de M. R. pour avoir, en sa qualité de dirigeant de la société SAM Entreprise M. R. (la société), disposé des biens de cette dernière comme des siens propres et poursuivi abusivement une exploitation déficitaire ne pouvant que conduire à la cessation des paiements ;

M. R. fait grief à la Cour d'appel de statuer ainsi, alors selon le moyen, de première part, que le prononcé de la liquidation des biens d'un dirigeant social sur le fondement de l'article 565, 2° du Code de commerce suppose établie la preuve de l'existence d'un ou plusieurs actes de disposition des biens de la société sans contrepartie pour la personne morale ; qu'en omettant de rechercher si les actes reprochés à M. R. n'avaient pas été compensés par les contreparties invoquées par ce dernier dans ses écritures, ce qui leur retirerait tout caractère frauduleux, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 565, 2° du Code de commerce ; alors de seconde part qu'en retenant que la volonté de la banque de conserver des garanties sur les biens de M. R. lors de la création de la société tendait à confirmer la confusion installée dans l'esprit de ce dernier entre ses biens et ceux de la société, la Cour d'appel a violé l'article susvisé et alors enfin que la poursuite par une société d'une activité déficitaire ne constitue une faute justifiant le prononcé de la liquidation des biens de son dirigeant que si elle a été faite dans l'intérêt personnel de ce dernier ; qu'en l'espèce, pour ordonner la liquidation des biens de M. R. la Cour d'appel retient qu'il a poursuivi l'activité de la société en connaissance du caractère « objectivement déficitaire » de celle-ci, et ajoute que « la poursuite de l'activité de la société dans les conditions ainsi décrites pendant plusieurs années implique en conséquence l'existence chez M. R. d'un intérêt personnel dont la finalité, liée à des considérations affectives selon lui ou à la revente des parts sociales selon le syndic, n'est pas de nature à l'exonérer de la responsabilité qu'il encourt dans le préjudice causé aux créanciers » ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à caractériser l'intérêt personnel qu'aurait eu M. R. à la poursuite déficitaire de l'activité de la société qu'il dirigeait, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 565, 3° du Code de commerce ;

Mais l'arrêt retient que, à l'occasion de la mise en société de son entreprise individuelle, M. R. a fait supporter à la société la position débitrice de son compte bancaire personnel tout en prétendant, à tort, apporter son fonds de commerce « net de tout passif », sans que l'on puisse tenir compte des remises postérieurement effectuées au bénéfice de la société, dès lors qu'il s'agissait de compensations entre le compte de la société et le sien propre, sans incidence sur le montant du débit engendré par le virement querellé du 28 décembre 1994 ; qu'il retient aussi que M. R. a encaissé sur son compte personnel le règlement de factures émises par la société ; qu'ainsi, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants justement critiqués par les deuxième et troisième branches la Cour d'appel a effectué la recherche prétendument omise justifiant sa décision de prononcer la liquidation des biens de M. R. en vertu de l'article 565, 2° du Code de commerce ; que le moyen ne peut être accueilli ;


Motifs🔗

Pourvoi N°2012-35 Hors Session

CA 2008/000132 Civile-commerce

COUR DE RÉVISION

ARRET DU 25 OCTOBRE 2012

En la cause de :

- Monsieur M. R., administrateur de sociétés, né le 21 novembre 1926 à Monaco, demeurant X à Monaco ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco ;

Demandeur en révision,

d'une part,

Contre :

- Monsieur Christian BOISSON, expert-comptable, de nationalité monégasque demeurant 13, avenue des Castelans à Monaco en sa liquidation des biens de la société anonyme monégasque M. R. ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco ;

Défendeur en révision,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 459 du code de procédure civile ;

VU :

  • l'arrêt de la cour d'appel, statuant en matière civile, rendu le 18 octobre 2011 (R275), signifié le 11 janvier 2012 ;

  • la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 10 février 2012 par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. M. R. ;

  • le récépissé délivré par la caisse des dépôts et consignations sous le n°41652, en date du 9 février 2012 attestant de la remise par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom du demandeur de la somme de 300 euros au titre de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

  • la requête à l'appui du pourvoi, déposée au greffe général le 12 mars 2012, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. M. R., accompagnée de 16 pièces, signifiée le même jour ;

  • la contre-requête, déposée au greffe général le 10 avril 2012, par Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de M. Christian BOISSON, signifiée le même jour ;

  • la réplique, déposée au greffe général le 18 avril 2012 par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. M. R., accompagnée de 5 pièces, signifiée le même jour ;

  • la duplique, déposée au greffe général le 25 avril 2012 par Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de M. Christian BOISSON, signifiée le même jour ;

  • le certificat de clôture établi le 26 juin 2012, par le greffier en chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

  • les conclusions du ministère public en date du 29 juin 2012;

Ensemble le dossier de la procédure,

A l'audience du 25 octobre 2012, sur le rapport de Monsieur François-Xavier LUCAS, conseiller,

La Cour,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches et le second moyen, réunis :

Attendu que l'arrêt attaqué a prononcé la liquidation des biens de M. R. pour avoir, en sa qualité de dirigeant de la société SAM Entreprise M. R. (la société), disposé des biens de cette dernière comme des siens propres et poursuivi abusivement une exploitation déficitaire ne pouvant que conduire à la cessation des paiements ;

Attendu que M. R. fait grief à la Cour d'appel de statuer ainsi, alors selon le moyen, de première part, que le prononcé de la liquidation des biens d'un dirigeant social sur le fondement de l'article 565, 2° du Code de commerce suppose établie la preuve de l'existence d'un ou plusieurs actes de disposition des biens de la société sans contrepartie pour la personne morale ; qu'en omettant de rechercher si les actes reprochés à M. R. n'avaient pas été compensés par les contreparties invoquées par ce dernier dans ses écritures, ce qui leur retirerait tout caractère frauduleux, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 565, 2° du Code de commerce ; alors de seconde part qu'en retenant que la volonté de la banque de conserver des garanties sur les biens de M. R. lors de la création de la société tendait à confirmer la confusion installée dans l'esprit de ce dernier entre ses biens et ceux de la société, la Cour d'appel a violé l'article susvisé et alors enfin que la poursuite par une société d'une activité déficitaire ne constitue une faute justifiant le prononcé de la liquidation des biens de son dirigeant que si elle a été faite dans l'intérêt personnel de ce dernier ; qu'en l'espèce, pour ordonner la liquidation des biens de M. R. la Cour d'appel retient qu'il a poursuivi l'activité de la société en connaissance du caractère « objectivement déficitaire » de celle-ci, et ajoute que « la poursuite de l'activité de la société dans les conditions ainsi décrites pendant plusieurs années implique en conséquence l'existence chez M. R. d'un intérêt personnel dont la finalité, liée à des considérations affectives selon lui ou à la revente des parts sociales selon le syndic, n'est pas de nature à l'exonérer de la responsabilité qu'il encourt dans le préjudice causé aux créanciers » ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à caractériser l'intérêt personnel qu'aurait eu M. R. à la poursuite déficitaire de l'activité de la société qu'il dirigeait, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 565, 3° du Code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt retient que, à l'occasion de la mise en société de son entreprise individuelle, M. R. a fait supporter à la société la position débitrice de son compte bancaire personnel tout en prétendant, à tort, apporter son fonds de commerce « net de tout passif », sans que l'on puisse tenir compte des remises postérieurement effectuées au bénéfice de la société, dès lors qu'il s'agissait de compensations entre le compte de la société et le sien propre, sans incidence sur le montant du débit engendré par le virement querellé du 28 décembre 1994 ; qu'il retient aussi que M. R. a encaissé sur son compte personnel le règlement de factures émises par la société ; qu'ainsi, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants justement critiqués par les deuxième et troisième branches la Cour d'appel a effectué la recherche prétendument omise justifiant sa décision de prononcer la liquidation des biens de M. R. en vertu de l'article 565, 2° du Code de commerce ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

- Rejette le pourvoi ;

- Condamne M. R. à une amende de 300 euros et aux dépens dont distraction au profit de Maître Arnaud Zabaldano, avocat-défenseur sous sa due affirmation.

Composition🔗

Ainsi jugé le vingt-cinq octobre deux mille douze par la Cour de révision composée de Monsieur Jean APOLLIS, premier président, Commandeur de l'ordre de Saint-Charles, Monsieur François-Xavier LUCAS, conseiller, rapporteur, et Monsieur Guy JOLY, conseiller, en présence du Ministère public, assistés de Madame Béatrice BARDY, greffier en chef, chevalier de l'ordre de Saint-Charles.-

Le Greffier en Chef, le Premier Président,

Note🔗

Cet arrêt rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour d'appel rendu le 18 octobre 2011 lequel avait confirmé le jugement rendu par le Tribunal de première instance le 8 mai 2008.

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