Cour de révision, 17 juin 2010, Ministère Public c/ M. T. M. en présence de plusieurs parties

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Abstract🔗

Instruction

Réquisitoire supplétif - Annulation de cet acte par la Chambre du conseil de la Cour d'appel - Excès de pouvoir de cette juridiction laquelle n'a point constaté l'absence d'une des mentions exigées par l'article 83 du Code de procédure pénale et la non-satisfaction de cet acte aux conditions essentielles de son existence légale

Résumé🔗

Sur le moyen unique

Vu les articles 82, 83, 90 et 91 du Code de procédure pénale :

Pour prononcer la nullité du réquisitoire supplétif et des actes subséquents, la Chambre du conseil énonce qu'il lui appartient d'analyser souverainement les pièces annexées au réquisitoire afin de vérifier si leur contenu recèle des indices faisant présumer l'existence des infractions déterminées dont il saisit le juge d'instruction ; que la Chambre du conseil examine ensuite les pièces dont il s'agit pour en déduire qu'il n'en résulte aucun élément objectif en lien avec les faits faisant l'objet de la saisine initiale ou de nature à révéler l'existence d'autres faits susceptibles de recevoir une qualification pénale à Monaco et que le seul énoncé de noms de manière indicative et énumérative ne peut caractériser l'existence d'indices de blanchiment de produits d'une infraction et de recel d'abus de confiance ;

En statuant ainsi sans constater l'absence dune des mentions exigées par l'article 83 du Code de procédure pénale, la Chambre du conseil qui ne peut annuler un réquisitoire que s'i ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale, a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;

Que la cassation du chef de dispositif annulant le réquisitoire du 15 avril 2009 entraîne la cassation de tous les autres chefs de décision qui ont la conséquence de cette annulation ;


Motifs🔗

(Instruction)

La Cour,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 17 mars 2009, Madame B. a déclaré aux services de police que par acte du 27 février 2007, la société B., dépendant de sa holding familiale, avait versé, au titre d'un contrat de gestion de fortune, une somme de 25 millions d'euros à la société P. BV investment corp dont le dirigeant, M. L. R., lui avait indiqué être autorisé à effectuer des placements dans la Principauté de Monaco ; que ce capital n'ayant pas été restitué et les intérêts versés aux dates prévues, la société B. a résilié le contrat ; qu'une information judiciaire contre X. a été ouverte du chef d'abus de confiance et d'exercice d'une activité de gestion de portefeuille sans avoir obtenu l'agrément nécessaire ; qu'il est apparu que M. L. R. avait constitué avec ses fils au sein du P. group diverses sociétés financières ; que M. M., mandataire pour certaines de ces sociétés, a été inculpé le 7 juillet 2009 et que le 14 avril suivant le juge d'instruction a délivré une commission rogatoire en exécution de laquelle ont eu lieu le blocage des avoirs de certaines sociétés et, le 15 avril, des perquisitions avec saisies ; qu'au vu d'une note du juge d'instruction et du procès verbal des opérations effectuées le 15 avril, le ministère public a émis ce même jour un réquisitoire supplétif du chef de recel d'abus de confiance et de blanchiment du produit d'une infraction ; qu'en vertu de ce réquisitoire de nouvelles perquisitions et saisies ainsi que des blocages d'avoirs ont été pratiqués ; qu'après plusieurs requêtes en mainlevée des mesures de blocage et des saisies, rejetées par le juge d'instruction dont les décisions ont été frappées d'appel, les consorts R., M. M. et les sociétés du groupe P. ont, le 17 mars 2010, saisi la Chambre du conseil notamment en déclaration de nullité du réquisitoire supplétif du 15 avril 2009 ainsi que des commissions rogatoires des 14 et 15 avril 2009 et des actes subséquents ; que, par arrêt du 26 mars 2010, la Chambre du conseil a prononcé la nullité du réquisitoire supplétif du 15 avril 2009 et des actes subséquents ; que le ministère public a formé un pourvoi contre cette décision ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 82, 83, 90 et 91 du Code de procédure pénale :

Attendu que pour prononcer la nullité du réquisitoire supplétif et des actes subséquents, la Chambre du conseil énonce qu'il lui appartient d'analyser souverainement les pièces annexées au réquisitoire afin de vérifier si leur contenu recèle des indices faisant présumer l'existence des infractions déterminées dont il saisit le juge d'instruction ; que la Chambre du conseil examine ensuite les pièces dont il s'agit pour en déduire qu'il n'en résulte aucun élément objectif en lien avec les faits faisant l'objet de la saisine initiale ou de nature à révéler l'existence d'autres faits susceptibles de recevoir une qualification pénale à Monaco et que le seul énoncé de noms de manière indicative et énumérative ne peut caractériser l'existence d'indices de blanchiment de produits d'une infraction et de recel d'abus de confiance ;

Qu'en statuant ainsi sans constater l'absence d'une des mentions exigées par l'article 83 du Code de procédure pénale, la Chambre du conseil qui ne peut annuler un réquisitoire que s'il ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale, a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;

Attendu que la cassation du chef de dispositif annulant le réquisitoire du 15 avril 2009 entraîne la cassation de tous les autres chefs de décision qui sont la conséquence de cette annulation ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

– Casse et annule l'arrêt attaqué sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de prononcer la nullité de la commission rogatoire du 14 avril 2009 et des saisies pratiquées dans le cadre de cette dernière, a ordonné la mainlevée des saisies pratiquées dans le cadre de cette commission et a dit n'y avoir lieu à ordonner la communication au président de l'association monégasque des activités financières des termes des mainlevées des saisies des comptes bancaires ;

– Renvoie l'affaire à la première session utile de la Cour de révision ;

– Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

Composition🔗

MM. Roger BEAUVOIS, Vice-Président, Rapporteur ; José CHEVREAU, Conseiller ; Mme Cécile PETIT, Conseiller ; Mme Béatrice BARDY, Greffier en Chef.

Note🔗

Cet arrêt a cassé et annulé en partie l'arrêt rendu par la Chambre du conseil de la Cour d'appel statuant comme juridiction d'instruction le 26 mars 2010 et a renvoyé l'affaire à la première session utile de la Cour de révision.

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