Cour de révision, 15 octobre 2009, M. F. B. c/ M. C. W.

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Abstract🔗

Pourvoi en révision

Pièces justificatives du pourvoi jointes obligatoirement à la requête (article 449 du Code de procédure civile) - Aucune autre pièce ne peut fait partie de la procédure (article 451 du Code de procédure civile) d'ou toute nouvelle pièce versée aux débats postérieurement doit en être écartée

Pension alimentaire

Fixation lors de l'instance en divorce - Prise en compte de l'aide financière des proches dans la mesure où elle permet aux époux d'assurer le complément de leurs dépenses

Droit de visite et d'hébergement

Décision ordonnant son exercice hors la présence d'étrangers Intervention souveraine du juge pour organiser dans l'intérêt de l'enfant les modalités de cet exercice, conformément à l'article 8 alinéa 2 de la Convention européenne des droits de l'homme

Résumé🔗

Le 5 mars 2008 Mme W. a présenté une requête en divorce contre M. de B. ; par ordonnance du 7 mai 2008 le magistrat chargé de la procédure a autorisé Mme W. à assigner son mari aux fins de sa demande en divorce et, sur les mesures provisoires, a fixé la résidence habituelle des deux enfants du couple chez la mère avec l'exercice conjoint de l'autorité parentale, déterminé le droit de visite et d'hébergement du père et condamné celui-ci à payer à son épouse diverses sommes au titre de la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants, de la pension alimentaire de l'épouse et d'une provision pour frais d'instance ; sur appel de M. de B. la Cour d'appel, par arrêt du 10 mars 2009, a confirmé partiellement l'ordonnance, y a ajouté que le droit de visite et d'hébergement du père devrait s'exercer hors la présence de tiers étrangers à la famille et a diminué les sommes allouées au titre de la participation à l'entretien et à l'éducation des enfants et de la pension alimentaire ;

Selon les articles 449 et 451 du Code de procédure civile les pièces justificatives du pourvoi sont jointes à la requête et « qu'aucune autre pièce ne pourra faire partie de la procédure » ; la pièce n° 14 doit dès lors être écartée des débats ;

Sur le premier moyen

M. de B. fait grief à l'arrêt d'avoir violé les articles 202-1, 181 et 185 du Code civil, en tenant compte, pour fixer le montant de la pension alimentaire, de l'aide financière reçue des proches des conjoints, alors, selon le moyen, que cette pension doit être fixée en fonction des ressources du débiteur et de celles du créancier et qu'une aide financière n'est pas constitutive d'une ressource ;

Mais après avoir analysé les éléments de preuve avancés par les parties, la Cour d'appel qui a souverainement évalué le montant des revenus et des charges de chacune d'elles et, à partir de ces calculs, la somme due par M. de B. au titre de la pension alimentaire, a constaté, sans violer les textes visés au moyen, que l'aide financière des proches permettait aux époux d'assurer le complément de leurs dépenses ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen

M. de B. fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que son droit de visite et d'hébergement s'exercerait hors la présence d'étrangers à la famille, alors, selon le moyen, que cette décision est contraire à l'intérêt des enfants et au respect du droit à la vie privée et familiale de leur père et que la Cour d'appel qui s'est fondée sur l'attestation d'une psychologue sans tenir compte d'une autre attestation établie postérieurement par la même personne et dont la production est possible devant la Cour de révision en raison de l'effet suspensif du recours en matière de divorce, a ainsi violé les articles 202-1 et 202-2 du Code civil, 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 22 de la Constitution et 22 du Code civil ;

Mais d'une part, conformément aux dispositions de l'article 8, alinéa 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, l'ingérence d'une autorité publique dans la vie privée et familiale d'une personne, est autorisée dès lors qu'elle est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; il en est ainsi de l'intervention du juge en vue d'organiser les modalités de l'exercice, par les parent séparés, du droit de visite et d'hébergement de leurs enfants dans l'intérêt de ceux-ci que les juges du fond apprécient souverainement.


Motifs🔗

(en matière civile)

La Cour,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu que le 5 mars 2008 Mme W. a présenté une requête en divorce contre M. de B. ; que par ordonnance du 7 mai 2008 le magistrat chargé de la procédure a autorisé Mme W. à assigner son mari aux fins de sa demande en divorce et, sur les mesures provisoires, a fixé la résidence habituelle des deux enfants du couple chez la mère avec l'exercice conjoint de l'autorité parentale, déterminé le droit de visite et d'hébergement du père et condamné celui-ci à payer à son épouse diverses sommes au titre de la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants, de la pension alimentaire de l'épouse et d'une provision pour frais d'instance ; que sur appel de M. de B., la Cour d'appel, par arrêt du 10 mars 2009, a confirmé partiellement l'ordonnance, y a ajouté que le droit de visite et d'hébergement du père devrait s'exercer hors la présence de tiers étrangers à la famille et a diminué les sommes allouées au titre de la participation à l'entretien et à l'éducation des enfants et de la pension alimentaire ;

Sur la recevabilité de la pièce n° 14 produite au soutien du pourvoi, contestée par la défense :

Attendu que le 25 juin 2009, M. de B. a versé aux débats une pièce n° 14 venant à l'appui de la requête en révision déposée le 18 mai 2009 ; que Mme W. a demandé, par courrier du 3 juillet 2009, que cette pièce soit écartée des débats ;

Attendu que selon les articles 449 et 451 du Code de procédure civile les pièces justificatives du pourvoi sont jointes à la requête et « qu'aucune autre pièce ne pourra faire partie de la procédure » ; que la pièce n° 14 doit dès lors être écartée des débats ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. de B. fait grief à l'arrêt d'avoir violé les articles 202-1, 181 et 185 du Code civil, en tenant compte, pour fixer le montant de la pension alimentaire, de l'aide financière reçue des proches des conjoints, alors, selon le moyen, que cette pension doit être fixée en fonction des ressources du débiteur et de celles du créancier et qu'une aide financière n'est pas constitutive d'une ressource ;

Mais attendu qu'après avoir analysé les éléments de preuve avancés par les parties, la Cour d'appel qui a souverainement évalué le montant des revenus et des charges de chacune d'elles et, à partir de ces calculs, la somme due par M. de B. au titre de la pension alimentaire, a constaté, sans violer les textes visés au moyen, que l'aide financière des proches permettait aux époux d'assurer le complément de leurs dépenses ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. de B. fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que son droit de visite et d'hébergement s'exercerait hors la présence d'étrangers à la famille, alors, selon le moyen, que cette décision est contraire à l'intérêt des enfants et au respect du droit à la vie privée et familiale de leur père et que la Cour d'appel qui s'est fondée sur l'attestation d'une psychologue sans tenir compte d'une autre attestation établie postérieurement par la même personne et dont la production est possible devant la Cour de révision en raison de l'effet suspensif du recours en matière de divorce, a ainsi violé les articles 202-1 et 202-2 du Code civil, 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 22 de la Constitution et 22 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que conformément aux dispositions de l'article 8, alinéa 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, l'ingérence d'une autorité publique dans la vie privée et familiale d'une personne, est autorisée dès lors qu'elle est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'il en est ainsi de l'intervention du juge en vue d'organiser les modalités de l'exercice, par les parents séparés, du droit de visite et d'hébergement de leurs enfants dans l'intérêt de ceux-ci que les juges du fond apprécient souverainement ;

Attendu, d'autre part, que l'effet suspensif du recours en révision ne saurait faire échec à l'application de l'article 448 du Code de procédure civile, selon lequel les faits constatés par la décision objet du pourvoi ne peuvent être remis en question devant la Cour de révision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la demande reconventionnelle :

Attendu que Mme W. sollicite la condamnation de M. de B. à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour une procédure qu'elle prétend abusive ;

Attendu qu'au regard des circonstances de l'affaire il y a lieu d'accueillir cette demande à hauteur de 10 000 euros ;

Et attendu qu'eu égard aux circonstances de la cause, il y a lieu de condamner M. de B. à l'amende prévue par l'article 459-4 du Code de procédure civile ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

– Dit que la pièce n° 14 produite par M. de B. est écartée des débats ;

– Rejette le pourvoi ;

– Condamne M. de B. à payer à Mme W. la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

– Le condamne à l'amende et aux dépens dont distraction au profit de Maître Pasquier-Ciulla, avocat défenseur, sous sa due affirmation.

Composition🔗

MM. Jean APOLLIS, Premier Président ; Roger BEAUVOIS, Vice-Président, Jerry SAINTE-ROSE, Conseiller ; Mme Béatrice BARDY, Greffier en chef ; Mes Richard MULLOT, Christine PASQUIER-CIULLA, avocats-défenseurs.

Note🔗

Cet arrêt écarte des débats une pièce après la requête en révision et rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour d'appel rendu le 10 mars 2009.

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