Cour de révision, 6 mars 2002, V.-D. c/ A.

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Abstract🔗

Responsabilité civile

Notaire - Faute professionnelle commise en tant que rédacteur d'un acte de vente d'un fonds de commerce annulé et de conseil des parties - Préjudice apprécié souverainement par les juges du fond

Résumé🔗

Déclaré responsable de l'annulation, pour défaut d'objet de la vente d'un fonds de commerce, le notaire, qui en avait rédigé l'acte, a été condamné pour faute professionnelle par la cour d'appel, à payer 50 000 francs de dommages-intérêts à la venderesse, Mme V., laquelle fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir violé les articles 1229, 1230 et 1200 du Code civil et 199-4° du Code de procédure civile en ne réparant pas la perte d'une chance de vendre le fonds de commerce moyennant une modification de l'objet du bail au motif qu'elle serait purement hypothétique, en retenant que Mme V. connaissait depuis l'origine la contradiction du bail avec le règlement de co-propriété et de ne pas s'être prononcé sur la dualité des fautes commises par le notaire et sur le caractère absolu de son obligation.

Mais après avoir relevé la faute du notaire qui aurait dû procéder à toutes les vérifications utiles sur l'état du litige opposant Mme V. à la SCI le Gallion bailleresse de cette dernière et conseiller aux parties de ne pas passer un acte contraire aux intérêts de la venderesse, exposée au risque grave de l'annulation du contrat de vente, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié l'étendue du préjudice subi à cet égard par la venderesse, a, sans encourir aucun des griefs du moyen, dans la limite des conclusions des parties, légalement justifié sa décision.

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé.


Motifs🔗

La Cour de révision,

Attendu que par acte du 18 janvier 1994, reçu par Maître A., notaire, Mme V. a vendu à la SCS Valente et Cie le fonds de commerce de « bar de luxe et de jour, avec annexe salon de thé, glaces avec vente au détail, crêpes, club, sandwiches, jus de fruits », exploité à Monaco dans un local qui lui avait été donné à bail le 24 octobre 1988 par la SCI le Gallion, copropriétaire dans cet immeuble ; que la Cour d'appel de Monaco, confirmant un jugement du 19 octobre 1995, a, par arrêt du 26 novembre 1996, devenu irrévocable par rejet du pourvoi en révision le 3 octobre 1997, prononcé l'annulation de cette vente pour défaut d'objet ; que par le même arrêt la cour d'appel a, d'une part, débouté Mme V. de sa demande tendant à obtenir la garantie de son bailleur, la SCI le Gallion, pour les condamnations susceptibles d'être prononcées à la suite de l'action en nullité de la vente, et, d'autre part, a prononcé la résiliation du bail ;

Attendu que Mme V., considérant que le notaire A. avait engagé sa responsabilité professionnelle lors de la rédaction de l'acte de vente, notamment par l'insertion d'une clause d'exonération de responsabilité l'a assigné en garantie de l'ensemble des condamnations résultant du jugement du 19 octobre 1995 et des arrêts du 26 novembre 1996 et 7 octobre 1997 et en réparation du préjudice subi du fait de ces procédures ; que par l'arrêt attaqué du 26 juin 2001, la cour d'appel a confirmé le jugement du tribunal de première instance qui a condamné Maître A. au paiement de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts, mais a refusé de prendre en compte la perte pour la venderesse, d'une chance de vendre son fonds avec une modification de l'objet du bail ;

Sur les deux moyens réunis :

Mme V. fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir violé les articles 1229, 1230 et 1200 du Code civil et 199-4° du Code de procédure civile en ne réparant pas la perte d'une chance de vendre le fonds de commerce moyennant une modification de l'objet du bail au motif qu'elle serait purement hypothétique, en retenant que Mme V. connaissait depuis l'origine la contradiction du bail avec le règlement de co-propriété et de ne pas s'être prononcé sur la dualité des fautes commises par le notaire et sur le caractère absolu de son obligation ;

Mais après avoir relevé la faute du notaire qui aurait dû procéder à toutes les vérifications utiles sur l'état du litige opposant Mme V. à la SCI le Gallion et conseiller aux parties de ne pas passer un acte contraire aux intérêts de la venderesse, exposée au risque grave de l'annulation du contrat de vente, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié l'étendue du préjudice subi à cet égard par la venderesse, a, sans encourir aucun des griefs du moyen, dans la limite des conclusions des parties, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS :

Rejette le pourvoi ;

Condamne Madame V. à l'amende et aux dépens.

Composition🔗

MM. Jouhaud, prem. prés. ; Malibert, vice-prés. rap. ; Apollis, cons. ; Cathala, cons. rap. ; Mmes Pasquier-Ciulla et Brugneti, av. déf.

Note🔗

Cet arrêt rejette le pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt confirmatif de la cour d'appel du 26 juin 2001 qui avait condamné Me A. notaire au paiement de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts mais avait refusé de prendre en compte la perte d'une chance de vendre pour la venderesse son fonds avec une modification de l'objet du bail. La responsabilité du notaire s'est trouvée engagée à la suite de l'annulation de la vente d'un fonds de commerce et la résiliation du bail afférent - prononcées par arrêt devenu irrévocable de la cour d'appel en date du 26 octobre 1997, le notaire ayant été rédacteur de l'acte de vente, dans lequel il avait inséré une clause d'exonération de sa responsabilité.

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