Cour de révision, 5 mai 2000, SAM Société des bains de mer et du cercle des étrangers c/ L.

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Abstract🔗

Contrat de travail

Prescription de l'article 2092 bis du Code civil - Application aux salaires accessoires et fournitures : objets de versements périodiques - Non-application à l'indemnité de départ, prévue à la Convention collective, s'agissant d'une allocation de fin de carrière payable en une seule fois

Résumé🔗

Selon le jugement attaqué et les pièces de la procédure, Monsieur J. L. a été engagé en 1955 par la Société des bains de mer et du cercle des étrangers (SBM) ;

En 1990, alors qu'il occupait les fonctions de chef de table principal, il a perdu accidentellement l'acuité visuelle d'un œil ; le 30 octobre 1990, il a été informé par son employeur qu'après avis de la commission médicale instituée par l'accord du 21 octobre 1985, son départ à la retraite, pour raisons de santé, prendrait effet le 31 octobre suivant ; il lui a été alors versé l'indemnité de départ prévue par l'article 29 de la Convention collective du personnel correspondant à trois mois du dernier traitement garanti ;

Par lettre recommandée du 16 novembre 1995, adressée à la SBM, J. L. a contesté le montant du salaire ayant servi de base au calcul de l'indemnité qui lui avait été versée et revendique l'application à son profit des articles 30 et 31 de la Convention collective ; sur le refus opposé à sa réclamation par la SBM, il a ainsi saisi le tribunal du travail ;

Cette juridiction a partiellement fait droit à sa demande après avoir rejeté l'exception de prescription soulevée par la défenderesse sur la base de l'article 2092 bis du Code civil ;

Le jugement attaqué, après avoir constaté que la loi incluait dans la prescription de l'article 2092 bis « non seulement les salaires proprement dits, mais aussi les indemnités accessoires et fournitures », n'en confirme pas moins la décision des premiers juges ; pour ce faire, il énonce successivement qu'en raison de leur nature et des circonstances dans lesquelles leur versement est prévu, les indemnités litigieuses s'apparentent à des dommages-intérêts destinés à compenser la perte d'un travail et qu'en dépit de la terminologie employée, elles correspondent à des allocations de fin de carrière payables en une seule fois ; en conséquence, lesdites indemnités échappent à la prescription de l'article 2092 bis, laquelle est fondée sur la périodicité des versements ;

Se déterminant ainsi par une qualification erronée des indemnités litigieuses et par l'adjonction à la loi d'une disposition qu'elle ne comporte pas, le tribunal a violé les textes susvisés ;


Motifs🔗

La Cour de révision

Sur les deuxième et troisième moyens réunis :

Vu l'article 2092 bis du Code civil, ensemble les articles 29, 30, 31 de la Convention collective du 13 novembre 1946 ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, l'action pour le paiement des salaires, indemnités, accessoires et fournitures se prescrit par cinq ans ;

Selon le jugement attaqué et les pièces de la procédure, J. L. a été engagé en 1955 par la Société des bains de mer et du cercle des étrangers (SBM) ;

En 1990, alors qu'il occupait les fonctions de chef de table principal, il a perdu accidentellement l'acuité visuelle d'un œil ; que le 30 octobre 1990, il a été informé par son employeur qu'après avis de la commission médicale instituée par l'accord du 21 octobre 1985, son départ à la retraite pour raisons de santé prendrait effet le 31 octobre suivant ; il lui a été alors versé l'indemnité de départ prévue par l'article 29 de la Convention collective du personnel correspondant à trois mois du dernier traitement garanti ;

Par lettre recommandée du 16 novembre 1995, adressée à la SBM, J. L. a contesté le montant du salaire ayant servi de base au calcul de l'indemnité qui lui avait été versée et revendiqué l'application à son profit des articles 30 et 31 de la Convention collective ; sur le refus opposé à sa réclamation par la SBM, il a saisi le tribunal du travail ;

Cette juridiction a partiellement fait droit à sa demande après avoir rejeté l'exception de prescription soulevée par la défenderesse sur la base de l'article 2092 bis du Code civil ;

Le jugement attaqué, après avoir constaté que la loi incluait dans la prescription de l'article 2092 bis « non seulement les salaires proprement dits, mais aussi les indemnités accessoires et fournitures », n'en confirme pas moins la décision des premiers juges ; pour ce faire, il énonce successivement qu'en raison de leur nature et des circonstances dans lesquelles leur versement est prévu, les indemnités litigieuses s'apparentent à des dommages-intérêts destinés à compenser la perte d'un travail et qu'en dépit de la terminologie employée, elles correspondent à des allocations de fin de carrière payables en une seule fois ; en conséquence, lesdites indemnités échappent à la prescription de l'article 2092 bis, laquelle est fondée sur la périodicité des versements ;

En se déterminant ainsi par une qualification erronée des indemnités litigieuses et par l'adjonction à la loi d'une disposition qu'elle ne comporte pas, le tribunal a violé les textes susvisés ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen,

Casse et annule en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 octobre 1999 entre les parties par le Tribunal de première instance de Monaco ;

Remet en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement ;

Et pour être statué à nouveau, renvoie les parties devant la Cour de révision statuant au fond.

Composition🔗

MM. Jouhaud prem. prés. rap. ; Malibert vice-prés. ; Apollis et Cathala cons. ; Montecucco gref. en chef. ; Mes Escaut et Pastor av. déf.

Note🔗

Cet arrêt casse et annule en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 octobre 1999 et renvoie les parties devant la cour de révision statuant au fond.

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