Cour de révision, 8 octobre 1993, L. c/ Ministère Public

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Escroquerie

Éléments constitutifs - Manœuvres frauduleuses caractérisées - Intention coupable, appréciée souverainement par les juges du fond, établie

Résumé🔗

En constatant que le prévenu s'était fait remettre un second chèque au prétexte qu'il n'avait pas reçu le premier, qu'il avait endossé les deux chèques et que, contrairement à son engagement écrit, il les avait déposés ou fait déposer aux fins d'encaissement, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié l'intention coupable, a retenu à bon droit que les agissements dudit prévenu constitueraient des manœuvres frauduleuses en vue d'obtenir une remise de fonds caractérisant ainsi le délit d'escroquerie.


Motifs🔗

La Cour de révision,

Statuant hors session et uniquement sur pièces en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale sur le pourvoi formé par D. L. contre un arrêt de la Cour d'appel de Monaco statuant correctionnellement le 7 juin 1993 qui a confirmé un jugement du tribunal de première instance statuant correctionnellement en date du 19 janvier 1993 qui, du chef d'escroquerie l'a condamné à la peine de 8 000 F d'amende et à payer à la partie civile la somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour d'appel correctionnelle le 7 juin 1993 ;

Vu la déclaration de pourvoi du sieur L. en date du 14 juin 1993 ;

Vu le récépissé délivré par la Caisse des dépôts et consignations sous le n° 18577 au titre de l'amende prévue par la loi ;

Vu la requête déposée par Maître Blot, avocat-défenseur, le 28 juin 1993 ;

Vu la contre-requête déposée par Maître Escaut, avocat-défenseur, au nom de L. ;

Vu le certificat du greffier en chef en date du 14 juillet 1993 attestant que tous les délais de la loi étaient expirés ;

Vu les conclusions écrites de Monsieur le Procureur général en date du 8 septembre 1993 ;

Ouï Monsieur Jean-Pierre Cochard, Conseiller, en son rapport ;

Après en avoir délibéré,

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué que, le 7 décembre 1990, F. L., huissier de justice, a adressé à D. L., commerçant, un chèque représentant le montant d'une créance qu'il l'avait chargé de recouvrer ; que le 13 décembre 1990, D. L. ayant indiqué à l'étude de Maître L. qu'il n'avait pas reçu ce chèque, un autre chèque du même montant lui a été remis, contre signature « d'une lettre de désistement » d'encaissement du précédent ; que néanmoins, le second puis le premier chèque, après avoir été endossés par D. L., ont été déposés le 12 et le 26 décembre 1990, auprès de l'ABC Banque internationale de Monaco pour encaissement ; que F. L., dont le compte avait été débité des deux chèques, a réclamé à plusieurs reprises à D. L. le remboursement du trop perçu ; qu'il ne l'a obtenu que le 30 novembre 1991, après avoir déposé, le 11 novembre 1991, une plainte pour escroquerie ;

Sur les trois moyens réunis pris de la violation des articles 330 et 42 du Code pénal, de fausse qualification, défaut de motifs, et manque de base légale :

En ce que la cour d'appel se serait bornée à énoncer que L. avait endossé le chèque litigieux et « l'aurait déposé ou fait déposer en connaissance de cause » et a déclaré L. coupable du délit d'escroquerie ;

Alors d'une part, que l'intention coupable ne pouvait résulter que de la seule connaissance que pouvait avoir l'inculpé de ce que le premier chèque émis par la partie-civile n'avait pas à être encaissé ;

Alors d'autre part, que les juges n'auraient pu considérer que l'usage d'une fausse qualité ou l'emploi de manœuvres frauduleuses constituent le délit d'escroquerie sans constater, ni qu'ils puissent déduire de leurs constatations, que ces manœuvres ont été déterminantes de la remise des fonds ;

Alors, enfin, que la cour d'appel n'aurait pas recherché en quoi le seul dépôt du chèque litigieux avait été déterminant de la remise des fonds ;

Mais attendu qu'ayant constaté que D. L. s'était fait remettre un second chèque au prétexte qu'il n'avait pas reçu le premier, qu'il avait endossé les deux chèques et, contrairement à son engagement écrit, les avait déposés ou fait déposer aux fins d'encaissement, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié l'intention coupable, a retenu que les agissements du prévenu constituaient des manœuvres frauduleuses en vue d'obtenir une remise de fonds caractérisant ainsi le délit d'escroquerie ;

Que les moyens ne sont pas fondés ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne le demandeur à l'amende et aux dépens ;

Composition🔗

MM. Charliac prés. ; Monégier du Sorbier, vice-prés. ; Cochard, cons. rap. Jouhaud, cons. ; Mes Blot et Escaut, av. déf.

  • Consulter le PDF