Cour européenne des droits de l'Homme, 10 juillet 2012, De Baets c/ Monaco

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Abstract🔗

Divorce – Procédure - CEDH

Cour européenne des droits de l'homme - violation de l'article 8 (non) - convention de règlement à l'amiable du divorce - renonciation à un droit garanti par la Convention

Cour européenne des droits de l'homme - violation de l'article 6 (non) - droit au procès équitable - recours en réplique

Résumé🔗

Une procédure de divorce oppose le requérant, ressortissant franco-belge à son ex-épouse. Deux procédures ont été ouvertes : une concernant les mesures provisoires à adopter suite à une ordonnance de non-conciliation entre les parties et une sur le fond de l'affaire. Lors de la procédure concernant les mesures provisoires, le requérant se plaint de n'avoir pu introduire de recours en réplique à l'encontre de la demande reconventionnelle de son ex-épouse, ainsi que du rejet d'une pièce qu'il avait apportée au dossier. À ce titre il invoque une violation de l'article 6 de la Convention. Par ailleurs, il estime que l'article 8 a également été violé en ce que le droit de visite qui lui a été accordé a été soumis à l'interdiction pour les enfants de rencontrer une personne tierce à la famille. La Cour conclut à l'absence de violation desdits articles.

La Cour analyse d'abord l'article 8 de la Convention. Elle note, en premier lieu, que la convention de règlement à l'amiable du divorce est valide puisqu'elle a été homologuée par la cour d'appel monégasque. De plus, en vertu de cette convention le requérant était censé retirer la requête du présent recours, ce qu'il n'a pas fait. La Cour applique, en second lieu, les critères de sa jurisprudence Zu Leiningen (CEDH, 17 nov. 2005, n° 59624/00) à la présente affaire. Cette dernière constate que le requérant a clairement renoncé à ses droits issus de la Convention européenne des droits de l'homme en la signant et demandant son homologation. Il ne peut donc guère s'estimer victime et ester devant la Cour européenne des droits de l'homme. La requête doit donc être rayée du rôle. 

Enfin, la Cour estime que la requête fondée sur la violation de l'article 6 n'est pas pertinente, car mal fondée. Par conséquent elle la rejette.


DÉCISION

La Cour européenne des droits de l'homme (deuxième section), siégeant le 10 juillet 2012 en une chambre composée de :

          Françoise Tulkens, présidente,

          Dragoljub Popović,

          Isabelle Berro-Lefèvre,

          András Sajó,

          Guido Raimondi,

          Paulo Pinto de Albuquerque,

          Helen Keller, juges,

et de Françoise Elens-Passos, greffière adjointe de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 3 février 2010,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par le requérant,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

En fait🔗

Le requérant, M. Frédéric de Baets, est un ressortissant franco-belge, né en 1971 et résidant à Nice. Il est représenté devant la Cour par Me F. Saint‑Pierre, avocat à Lyon. Le gouvernement monégasque (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. Jean-Laurent Ravera.

Informés de la requête, les gouvernements belge et français n'ont pas exercé le droit d'intervention que leur reconnaît l'article 36 § 1 de la Convention.

Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

1. Procédure relative à l'ordonnance de non-conciliation statuant sur les mesures provisoires🔗

Le 7 mai 2008, saisi par l'épouse du requérant d'une requête en divorce, un juge du tribunal de première instance de Monaco rendit une ordonnance de non-conciliation et fixa des mesures provisoires concernant les droits et devoirs des époux à l'égard de leurs enfants alors âgés de 8 et 14 ans. Il fixa leur résidence habituelle chez la mère, avec exercice conjoint de l'autorité parentale, et réserva un large droit de visite et d'hébergement au requérant. Ce dernier fut également condamné à payer une pension alimentaire, ainsi qu'une part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants.

Le requérant releva appel de cette décision le 30 mai 2008.

Dans ses conclusions d'appel, l'épouse du requérant, critiquant le départ de ce dernier du domicile conjugal et ses suites, reprocha au requérant d'avoir présenté sa nouvelle compagne à ses enfants, précisant qu'elle se serait comportée pendant tout un week-end comme « sa maîtresse à son domicile » et ce alors même que leur famille était « pieuse et très attachée aux convictions religieuses ». Partant, elle demanda que le droit de visite et d'hébergement du requérant s'exerce hors la présence de tiers étrangers à la famille. Au soutien de sa demande, elle produisit, d'une part, une attestation rédigée par une de ses connaissances dont la fille était amie avec la sienne et, d'autre part, une attestation de consultations psychologiques rédigée par I. A., psychologue clinicienne, le 19 novembre 2008, indiquant la mise en place, à la demande unilatérale de la mère, d'un espace de parole dans le cadre d'une procédure de divorce difficile pour sa fille, le « suivi psychologique étant d'une durée indéterminée pour le moment ».

Le 20 janvier 2009, les parties plaidèrent devant la cour d'appel.

Après cette date, l'avocat du requérant aurait, selon ce dernier (ce que conteste le Gouvernement), produit une lettre rédigée par la psychologue clinicienne, I. A., dans laquelle cette dernière précisait avoir reçu la fille du requérant pour trois séances les 12, 16 novembre et 12 décembre 2008 pour l'aider à verbaliser ses difficultés émotionnelles face à une situation qui la dépassait, mais qu'en commun accord avec sa mère il n'avait pas été décidé de suivi thérapeutique dès lors que les symptômes avaient finalement cédé.

Par un arrêt du 10 mars 2009, la cour d'appel de Monaco confirma l'ordonnance, à l'exception du droit de visite et d'hébergement du requérant. Sur ce point, elle estima que les difficultés de la fille du requérant à accepter la présence d'une tierce personne aux côtés de son père lors d'un week-end en octobre 2008 ressortait des attestations établies par la mère de l'une de ses amies et par la psychologue clinicienne le 19 novembre 2008 et que, partant, elle retenait la demande de la mère dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Elle ajouta que l'épouse du requérant avait soutenu que son fils avait réagi de la même façon et qu'il n'était pas possible de dissocier l'exercice du droit de visite et d'hébergement pour les deux enfants. En conséquence, la cour d'appel précisa que le droit de visite et d'hébergement devait s'exercer « hors la présence de tiers étrangers à la famille jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné ». Elle ne fit pas mention de la lettre de la psychologue clinicienne produite par le requérant postérieurement aux plaidoiries.

Le requérant se pourvut en révision. Dans sa requête déposée le 18 mai 2009, il se fonda notamment sur l'article 8 de la Convention pour critiquer l'obligation de ne recevoir ses enfants qu' « hors la présence d'étrangers à la famille ». Il soutint que cette mesure était d'abord contraire à l'intérêt de ses enfants, dès lors qu'il n'existait aucun risque de compromission de la santé, de la sécurité, de la moralité ou de l'éducation de l'un d'eux, outre le fait qu'une telle mesure revenait à isoler les enfants du monde extérieur en interdisant au requérant de les recevoir, par exemple, en présence d'amis de leur classe. Il rappela que la cour d'appel s'était fondée sur la première attestation d'une psychologue clinicienne sans tenir compte de celle qui avait été établie postérieurement et qui écartait le besoin de suivi psychologique. Par ailleurs, le requérant allégua une atteinte à sa vie privée en raison de cette contrainte fixée en appel.

Son épouse répondit par une contre-requête, dans laquelle elle formula une demande reconventionnelle tendant à faire condamner le requérant à payer 20 000 euros pour procédure abusive et injustifiée.

Le 25 juin 2009, le requérant adressa un courrier accompagné d'une pièce complémentaire à la Cour de révision. Le 3 juillet 2009, son épouse sollicita le rejet de cette pièce.

Le 15 octobre 2009, la Cour de révision écarta la pièce complémentaire des débats au motif que celle-ci aurait dû être jointe à la requête initiale, rejeta le pourvoi du requérant et le condamna à payer 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

2. Procédure au fond🔗

Le 5 juin 2008, le requérant fut assigné par son épouse.

Des conclusions furent déposées respectivement : les 13 octobre 2008 et 17 juin 2009 par le requérant ; les 13 mai et 22 octobre 2009 par son épouse.

Par un jugement du 11 février 2010, le tribunal de première instance prononça le divorce. Dans le cadre des mesures réglant les conséquences du divorce, il modifia notamment le droit de visite et d'hébergement du requérant en supprimant les restrictions liées à la présence d'un tiers étranger à la famille, jugeant que les enfants avaient eu le temps de se préparer à la présence d'une tierce personne aux côtés de leur père et que le prononcé du divorce ne justifiait plus de maintenir le droit de visite et d'hébergement hors la présence d'un tiers.

Le 19 mars 2010, le requérant interjeta appel de ce jugement.

Le 1er février 2011, les parties, tout en déposant des conclusions séparées, informèrent les juges d'appel de leur rapprochement et de leur régularisation d'une convention aux fins de régler à l'amiable les effets du divorce. Ils sollicitèrent donc conjointement le prononcé du divorce et l'homologation de cette convention signée par eux le 18 janvier 2011.

Par un arrêt du 15 février 2011, la cour d'appel confirma le prononcé du divorce et homologua la convention. Aux termes de cette convention, annexée par la cour d'appel à son arrêt, il est notamment stipulé ce qui suit :

« (...) Après discussion et échanges de vues, les parties se sont rapprochées afin de mettre un terme amiable au litige qui les oppose, et ont décidé d'user de la faculté offerte par l'article 202-5 du Code civil en signant la présente convention et en soumettant son homologation à la Cour d'Appel.

(...)

Dès exécution intégrale des obligations de la convention et notamment des paiements, les Parties se désisteront réciproquement de toutes instances à l'exception de celle pendante par devant la Cour d'Appel de Monaco. Plus précisément, (...) Monsieur De Baets se désiste de sa procédure devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

(...)

Les parties déclarent (...) que c'est sur leurs déclarations et sur les pièces qu'[elles] ont fournies à leurs conseils respectifs que le présent accord a pu être rédigé et qu'[elles] dégagent en conséquence leurs conseils respectifs de toute responsabilité pour le cas où la présente convention serait incomplète.

[Les Parties] déclarent que leur consentement a été réfléchi, muri et éclairé et qu'[elles] ont apprécié pleinement les conséquences de l'ensemble des droits et obligations prévus dans la présente Convention.

[Elles] s'engagent à l'exécuter de bonne foi. »

Les parties n'ayant pas fait de déclaration de pourvoi, cet arrêt est définitif.

Griefs🔗

1.  Invoquant l'article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de ce que les règles de procédure civile ne l'autorisaient pas à répliquer à la demande reconventionnelle de la partie adverse devant la Cour de révision, outre que celle-ci a également rejeté une pièce communiquée postérieurement au dépôt de sa requête en révision.

2.  Il se plaint également de la limitation de son droit de visite et d'hébergement « hors la présence de tiers étrangers à la famille », alléguant une violation de son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la Convention. Tout en relevant que les juges n'ont à aucun moment entendu les enfants ou diligenté une enquête sociale, il estime notamment que la notion de « famille » utilisée est floue, que la restriction le conduit à ne plus pouvoir exercer aucune activité avec ses enfants et que ce n'est pas l'intérêt des enfants qui a primé, mais la volonté d'un État concordataire d'interdire au père judiciairement séparé de mener une vie normale avec sa nouvelle compagne.

En droit🔗

1.  Le requérant se plaint de la limitation apportée à son droit de visite et d'hébergement de ses enfants. Il invoque l'article 8 de la Convention, lequel se lit comme suit :

« 1.  Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2.  Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien‑être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. »

Le Gouvernement soutient à titre principal que la requête doit être rayée du rôle ou déclarée irrecevable. Il estime tout d'abord que la convention signée le 18 janvier 2011 par le requérant avec son ex-épouse et homologuée par la cour d'appel le 15 février 2011 atteste de ce que le requérant a exprimé librement et clairement sa volonté de ne pas maintenir sa requête. Bien que ne produisant ses effets qu'entre les parties, ce désistement, qui a été exprimé solennellement devant les juges internes, montre que le requérant estime que la justice monégasque a apporté une réponse adaptée aux circonstances de l'espèce.

Il considère par ailleurs que le requérant se devait de porter cet élément nouveau et important à la connaissance de la Cour, l'article 47 § 6 du règlement de cette dernière prévoyant que le requérant doit informer la Cour de tout fait pertinent pour l'examen de sa requête. Il estime en outre que le requérant aurait dû informer la Cour que, postérieurement à sa requête, avec le jugement du 11 février 2010, les conditions litigieuses de son droit de visite et d'hébergement avaient pris fin. Par conséquence, le Gouvernement estime que ce défaut d'information caractérise un abus manifeste du droit d'agir du requérant.

À titre subsidiaire, le Gouvernement précise que, contrairement aux affirmations du requérant, la durée de la mesure litigieuse n'a été que de quatre mois : du 6 novembre 2009, date de la signification de l'arrêt de la Cour de révision du 15 octobre 2009, au 20 mars 2010, date à laquelle le jugement du 11 février 2010 est devenu exécutoire, à l'expiration du délai d'appel suspensif de trente jours, le requérant n'ayant formé qu'un appel parte in qua. Il indique que la mesure litigieuse relative à la restriction du droit de visite et d'hébergement du requérant a certes pu constituer une ingérence dans son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens de l'article 8 de la Convention. Il considère toutefois que cette ingérence était prévue par un texte, les dispositions du Code civil donnant toute latitude au juge pour déterminer le droit lui-même ainsi que ses modalités d'exercice, qu'elle poursuivait un but légitime, au regard de l'intérêt supérieur des enfants, et qu'elle était « nécessaire dans une société démocratique », ayant été à la fois adaptée à la situation et limitée dans le temps. Il en conclut que l'article 8 de la Convention n'a pas été violé.

Le requérant estime que les moyens soulevés par le Gouvernement sur la recevabilité de la requête sont sans objet. S'agissant du fait qu'il n'entendrait plus maintenir sa requête devant la Cour, il relève que la production de ses observations en réponse à celles du Gouvernement atteste du contraire. S'agissant du protocole signé le 18 janvier 2011 dans le cadre du divorce, il précise qu'il ne produit ses effets qu'à l'égard des deux parties signataires et que l'intervention de la cour d'appel se limite à son homologation : il ne saurait dès lors être invoqué par un État pour voir déclarer irrecevable une requête devant la Cour.

Le requérant considère en outre que l'argument tiré de l'abus de droit d'agir est infondé. Il indique en premier lieu que la modification apportée par le jugement du 11 février 2010 a été de courte durée puisque son appel, interjeté le 19 mars 2010, a eu pour conséquence de rendre à nouveau applicable, conformément au droit monégasque, l'ordonnance litigieuse fixant l'exercice du droit de visite et d'hébergement hors la présence d'un tiers. Par ailleurs, le requérant relève que si la convention signée le 18 janvier 2011 a mis fin au litige dans le cadre duquel il a été privé du droit de voir ses enfants dans des conditions normales, elle n'a pas fait disparaître la violation de l'article 8 dont il a été victime : le Gouvernement ne peut donc soutenir que la victime d'une violation de la Convention ne serait plus fondée à saisir la Cour dès le moment où la violation a cessé.

Sur le fond, le requérant estime que l'ingérence n'était prévue par aucun texte, le droit monégasque ne permettant pas au juge de préciser les conditions d'exercice du droit de visite et d'hébergement, en particulier pour exclure la présence de tiers étrangers à la famille, et qu'elle ne poursuivait pas un but légitime, notamment au regard de l'intérêt supérieur des enfants compte tenu de la procédure suivie en l'espèce. Il affirme que cette ingérence était inutile et disproportionnée au but légitime, concluant à la violation de l'article 8 de la Convention. Il précise ne rien demander au titre de la satisfaction équitable.

La Cour note d'emblée qu'en vertu de la convention signée le 18 janvier 2011 avec son ex-épouse, le requérant s'est engagé à se désister de la présente requête. Outre le fait que le requérant n'invoque aucun motif de nullité de ladite convention, rien ne permet de douter de sa validité au regard du droit interne, et ce d'autant plus qu'elle a ensuite été homologuée par la cour d'appel, qui l'a annexée à son arrêt du 15 février 2011. Néanmoins, en contradiction avec ses obligations, le requérant n'a pas informé la Cour de son existence et a entendu maintenir la présente requête. Dès lors, la conduite du requérant devant la Cour contredit sa position adoptée dans le cadre national (Zu Leiningen c. Allemagne (déc.), no 59624/00, 17 novembre 2005, et Amzuta c. Roumanie (déc.), no 20214/02, 28 septembre 2006).

En ce qui concerne l'allégation du requérant selon laquelle la convention signée le 18 janvier 2011 ne pourrait étendre ses effets sur la présente requête, la Cour rappelle qu'elle a déjà statué dans le cadre d'affaires où les requérants avaient conclu un accord en vertu duquel ils renonçaient à leurs droits garantis par la Convention. La renonciation à un droit garanti par la Convention - pour autant qu'elle soit licite - doit se trouver établie de manière non équivoque et s'entourer d'un minimum de garanties correspondant à sa gravité (voir, parmi beaucoup d'autres, Pfeifer et Plankl c. Autriche, 25 février 1992, § 37, série A no 227).

Dans l'affaire Zu Leiningen précitée, la Cour a appliqué les critères de la renonciation à un droit garanti par la Convention, prenant en compte un règlement amiable par lequel le requérant s'était engagé, envers la personne physique à laquelle il s'opposait dans la procédure civile interne, à retirer la requête introduite devant la Cour. En l'espèce, le requérant ayant conclu un accord avec son ex-épouse portant, notamment, sur la question du droit de visite et d'hébergement qui fait l'objet du grief soulevé devant la Cour au titre de l'article 8 de la Convention, les critères établis dans l'affaire Zu Leiningen peuvent être appliqués mutatis mutandis en l'espèce.

La Cour constate ainsi que la convention signée le 18 janvier 2011 a été le résultat de « discussions et [d']échanges de vues », le requérant et son ex‑épouse ayant par ailleurs été assistés de « leurs conseils respectifs ». Elle note que le requérant a ensuite été représenté par un avocat-défenseur près la cour d'appel de Monaco. La cour d'appel a homologué la convention à la demande conjointe du requérant et de son ex-épouse. Elle constate ensuite que la convention de règlement amiable des effets du divorce attire expressément l'attention des parties sur le fait qu'elles « déclarent que leur consentement a été réfléchi, muri et éclairé et qu'[elles] ont apprécié pleinement les conséquences de l'ensemble des droits et obligations prévus », ce qui ne saurait avoir échappé à la vigilance du requérant, assisté d'un conseil et lui-même avocat.

Compte tenu de ce qui précède, la Cour constate que le requérant a sciemment renoncé, de manière non équivoque, à ses droits garantis par la Convention en signant le protocole d'accord le 18 janvier 2011 et en sollicitant ensuite son homologation par la cour d'appel.

Dès lors, la Cour estime que cette convention est valide non seulement au regard du droit interne, ce dont atteste son homologation par l'arrêt du 15 février 2011 auquel elle a été annexée, mais également au regard de la présente requête. En outre, il faut noter que le requérant n'a jamais entendu contester la validité de la transaction devant la Cour, mais qu'il a préféré ne pas l'en informer.

À la lumière de ce qui précède, et en particulier de la déclaration valide du requérant de se désister de la présente requête, la Cour considère qu'il ne peut plus se prétendre victime au sens de l'article 34 de la Convention. De surcroît, le comportement du requérant peut être qualifié d'abusif au sens de la jurisprudence de la Cour (Jian c. Roumanie (déc.), no 46640/99, 30 mars 2004, Keretchachvili c. Géorgie (déc.), no 5667/02, 2 mai 2006, et Amzuta, précitée) : d'une part, en ce qu'il a dissimulé à la Cour les engagements pris en vertu de la convention signée le 18 janvier 2011 et homologuée à sa demande (conjointe avec son ex-épouse) par la cour d'appel de Monaco dans son arrêt du 15 février 2011 ; d'autre part, en s'abstenant d'informer la Cour de la survenance d'un fait pertinent pour l'examen de sa requête au sens de l'article 47 § 6 du règlement, à savoir la cessation de la violation alléguée de l'article 8 de la Convention, en raison de la suppression de la restriction litigieuse, objet du grief, à l'exercice de son droit de visite et d'hébergement, par le jugement du 11 février 2010 devenu exécutoire le 20 mars 2010.

Dès lors, la Cour estime qu'il ne se justifie plus de poursuivre l'examen de cette partie de la requête (article 37 § 1 c) de la Convention). En outre, aucun motif tiré du respect des droits de l'homme garantis par la Convention ou ses Protocoles n'exige de poursuivre son examen (article 37 § 1 c) in fine de la Convention). Partant, il convient de la rayer du rôle.

2.  Le requérant se plaint également d'une violation de l'article 6 § 1 de la Convention.

Compte tenu de l'ensemble des éléments en sa possession, et dans la mesure où elle était compétente pour connaître des allégations formulées, la Cour n'a relevé aucune apparence de violation des droits et libertés garantis par la Convention ou ses Protocoles.

Il s'ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l'article 35 §§ 3 (a) et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l'unanimité,🔗

Décide de rayer du rôle la partie de la requête relative au grief tiré de l'article 8 de la Convention ;

Déclare la requête irrecevable pour le surplus.

Françoise Elens-Passos

Greffière adjointe

Françoise Tulkens

Présidente

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