Cour d'appel, 28 septembre 2023, Le A. c/ Le B. et Madame C.

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Abstract🔗

Établissement public - Élections des représentants des personnels non-médicaux du Conseil d'Administration d'un établissement public - Annulation de l'élection (non) - Absence de bulletins d'une candidate sur la table - Irrégularité ayant pu affecter la régularité du scrutin (non)

Résumé🔗

L'une des candidates aux élections des représentants des personnels non-médicaux du Conseil d'Administration d'un établissement public et l'un des assesseurs du bureau de vote, membre d'un syndicat, contestent la validité du résultat de ces élections. Ils estiment que l'absence sur la table de bulletins au nom de la candidate a entaché la validité de ces élections. La cour relève toutefois que cet incident n'a pu avoir un impact significatif compte tenu de sa durée et de l'impossibilité matérielle pour que 84 électeurs votent en vingt minutes (soit près de 4 électeurs par minute), alors qu'il n'y avait qu'un seul bureau de vote et qu'une seule urne, compte tenu du temps incompressible nécessaire aux opérations : récupération des bulletins, entrée dans l'isoloir, positionnement du ou des bulletins dans l'enveloppe afférente, sortie d'isoloir, vote et émargement. Infirmant la décision entreprise, la cour rejette la demande d'annulation des élections.


COUR D'APPEL

ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2023

En la cause de :

  • Le A. (en abrégé, « le A. »), dont le siège est sis à Monaco, x1, agissant poursuites et diligences de son Directeur en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANT,

d'une part,

contre :

  • 1/Le B. (en abrégé, « le B. »), dont le siège social est sis à Monaco, x2, représenté par son Secrétaire Général en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;

  • 2/Madame C., née le jma à Tunis (Tunisie), de nationalité française, demeurant x3, « x4 », x5, à Nice (06300) ;

Ayant tous deux élu domicile en l'Étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Aurélie SOUSTELLE, avocat au barreau de Nice ;

INTIMÉS,

EN PRÉSENCE DE :

  • Monsieur le Procureur Général de la Cour d'Appel de Monaco, séant en ses bureaux, en son Parquet Général, Palais de Justice, rue du Colonel Bellando de Castro à Monaco ;

COMPARAISSANT EN PERSONNE,

d'autre part,

Visa🔗

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 12 mai 2022 (R. 3921) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Patricia GRIMAUD-PALMERO, huissier, en date du 15 juin 2022 (enrôlé sous le numéro 2022/000112) ;

Vu les conclusions déposées les 25 octobre 2022 et 21 mars 2023 par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom du B. (en abrégé, « le B. ») et de Madame C. ;

Vu les conclusions déposées le 17 janvier 2023 par Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom du A. (en abrégé, « le A. ») ;

Vu les conclusions déposées le 25 avril 2023 par le ministère public ;

Vu l'ordonnance de clôture du 10 mai 2023 ;

À l'audience du 20 juin 2023, ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Motifs🔗

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par le A. (en abrégé, « le A. ») à l'encontre d'un jugement du Tribunal de première instance du 12 mai 2022.

Considérant les faits suivants :

Les 28, 29 et 30 septembre 2020, se sont déroulées les élections des représentants des personnels non-médicaux du Conseil d'Administration de l'établissement public A. (ci-après A.), en application des dispositions de l'arrêté n° 96-21 du 22 janvier 1996 modifié, fixant les modalités de désignation des représentants des personnels au Conseil d'administration du A..

Huit candidats se sont présentés à cette élection : m.D, C., g.E, o.F, a.G, s.H, m.I etn.J.

Le scrutin s'est déroulé durant ces trois jours, de 7 heures à 17 heures, sans interruption, au sein d'un bureau de vote unique, constitué par un président, cadre du A., et quatre assesseurs, ces derniers membres des différents syndicats : le B. (B.), le K. (K.), le L. (L.) et le M.(M.).

À l'issue du dépouillement, réalisé sous le contrôle d'un juge du Tribunal de première instance, le procès-verbal de résultat, signé sans réserve par les assesseurs et scrutateurs présents a mentionné :

  • Nombre d'électeurs inscrits : 2095

  • Nombre de votants : 704

  • Nombre de bulletins blancs : 3

  • Nombre de bulletins nuls : 7

  • Suffrages exprimés : 694

  • (ensemble des bulletins moins les votes blancs et nuls)

  • Ont obtenu :

    • m.D : 50

    • g.E : 142

    • o.F : 148

    • a.G : 61

    • s.H: 75

    • m.I : 261

    • k.C : 138

    • a.J : 222

  • Sont déclarés élus :

    • m.I : 261

    • a.J : 222

Ces résultats ont été publiés suivant note de service du 1er octobre 2020 au sein de l'établissement. Par Ordonnance Souveraine n° 8.308 du 23 octobre 2020, portant nomination des membres du Conseil d'Administration du A., la composition du nouveau Conseil d'Administration, nommé pour trois ans, a été fixée, comprenant m.I etn.J. Cette Ordonnance Souveraine a été publiée au Journal de Monaco du 30 octobre 2020.

Suivant acte en date du 6 octobre 2020, C. et le B. (ci-après B.) ont fait citer le A. devant le Tribunal de première instance, en sollicitant que soit constaté l'irrégularité des opérations électorales du 30 septembre 2020, et prononcée l'annulation des élections des représentants des personnels non médicaux au Conseil d'Administration du A., avec exécution provisoire. En défense, le A. s'est opposé à ces demandes.

Suivant jugement contradictoire en date du 12 mai 2022, le Tribunal de première instance a :

  • constaté l'irrégularité des élections des personnels non médicaux au Conseil d'administration du A. (A.) des 28, 29 et 30 septembre 2020,

  • prononcé en conséquence l'annulation desdites élections,

  • débouté le A. (A.) de sa demande tendant à différer les effets de cette annulation,

  • dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, incompatible avec la nature de l'affaire,

  • débouté les parties du surplus de leurs demandes,

  • condamné le A. (A.) aux dépens, dont distraction au profit de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu les éléments suivants :

  • que la compétence ratione materiae de la juridiction n'était pas contestée,

  • sur la validité du scrutin, qu'il n'est pas contestable que pour justifier une annulation, une fraude ou une irrégularité doit être susceptible d'avoir une influence déterminante sur son résultat,

  • qu'il n'était pas contesté que le 30 septembre à 13 heures 15, les bulletins au nom de « C. » n'étaient pas sur la table, et que d'autres bulletins étaient positionnés à l'emplacement correspondant,

  • que l'absence des bulletins au nom de Madame C. n'était pas évidente à déceler, dans la mesure où d'autres bulletins avaient été posés à l'emplacement concerné,

  • qu'il est significatif que le président du bureau lui-même, selon les termes du procès-verbal qui a été dressé, s'est contenté de répondre à un premier votant signalant la difficulté « qu'il y a bien 8 paquets de 8 candidats », et a attendu que ce votant, contraint de voter malgré l'absence de bulletin « C. », ne revienne plus tard se plaindre accompagné d'une collègue, pour vérifier par lui-même que cette absence était réelle,

  • qu'il n'est pas démontré à suffisance, contrairement à ce que soutient le A., que cette irrégularité n'aurait perduré qu'une quinzaine de minutes, au motif que le président du bureau avait vidé les poubelles 20 minutes avant que l'incident ne soit signalé, et qu'il aurait cependant encore trouvé deux bulletins « C. » dans la poubelle lors de ce signalement. Les assesseurs ne semblent pas d'accord à ce propos,

  • que la durée pendant laquelle ces bulletins ont été remplacés par ceux d'un autre candidat n'est donc pas établie avec certitude, jusqu'à la remise en ordre de la table par le président du bureau,

  • qu'il existe un écart de 84 suffrages entre C. (138) et l'élu Monsieur J. (222),

  • que la juridiction avait souhaité connaître le nombre d'agents ayant voté lors des deux premiers jours du scrutin et que le A. avait produit un document « confrontant » le nombre exact de votants au compteur de l'urne le 29 septembre au soir, soit en l'espèce 453, au nombre de votants constatés dans la liste d'émargement, soit 451, ledit document étant signé par le président du bureau de vote et ses assesseurs,

  • que ce document démontrait, outre une absence de rigueur du fait de cet écart de 2 voix, que 251 ou 253 agents avaient donc voté au cours de la journée du 30 septembre 2020,

  • qu'au regard de l'importance de ce nombre d'électeurs, lesquels ont pu placer, selon les règles de ce scrutin, un ou deux bulletins dans leur enveloppe, soit jusqu'à 502 ou 506 bulletins, et de l'écart de voix entre Madame C. et Monsieur J., limité à 84, il apparaît que l'irrégularité dénoncée et reconnue a pu jouer un rôle déterminant sur les résultats du vote,

  • s'agissant des effets de l'annulation du scrutin, que le A. ne pouvait être suivi quand il invoquait les conséquences manifestement excessives de l'annulation pour demander au Tribunal d'en limiter les effets dans le temps, puisque, d'une part l'établissement public se contentait d'invoquer des considérations d'ordre général et d'autre part aucune disposition légale ou réglementaire ne permettait au Tribunal de différer les effets de sa décision.

Par acte en date du 15 juin 2022, le A. a relevé appel du jugement du 12 mai 2022. Aux termes de conclusions récapitulatives en date du 17 janvier 2023, il sollicite :

  • la réformation du jugement du 12 mai 2022 en toutes ses dispositions et que la Cour, statuant à nouveau, déclare valide le scrutin litigieux, déboute le B. et C. de leur demande d'annulation de ces élections et les condamne aux dépens.

A l'appui de ses demandes le A. fait valoir en substance les arguments suivants :

  • lors du dernier jour du scrutin, le mercredi 30 septembre à 13 h 15, deux votants ont fait savoir au Président du bureau de vote, g.N, qui avait pris ses fonctions peu de temps avant l'incident, qu'aucun bulletin de vote « C. » ne se trouvait mis à disposition des électeurs. Le Président avait alors constaté la présence de bulletins de vote « D. », en lieu et place de ceux « C. », sur une des 8 piles mises à disposition des électeurs et avait redisposé des bulletins « C. » à l'emplacement correspondant,

  • un procès-verbal contresigné par l'ensemble des membres du bureau de vote a été dressé, duquel il ressortirait que le Président avait alors retrouvé des bulletins « C. » dans la poubelle centrale, alors qu'il avait procédé à un ramassage des poubelles 20 minutes avant l'incident, ce qui était confirmé par deux assesseurs,

  • ainsi, contrairement aux conclusions des premiers juges, la durée pendant laquelle l'irrégularité s'est déroulée peut être circonscrite dans le temps, soit une vingtaine de minutes au maximum,

  • en conséquence, l'irrégularité du scrutin n'a pas eu d'influence déterminante sur son résultat, du fait de ce court laps de temps. Au regard du nombre d'électeurs ayant voté le 30 septembre 2020, soit 253 sur un total de 704 votants, de 7 heures à 17 heures, une moyenne de 25 personnes par heure peut être dégagée, soit environ 8 personnes toutes les 20 minutes. Or, l'écart de voix séparant l'appelante du premier élu est de 84.

Le B. (B.) et C., intimés, ont présenté des conclusions récapitulatives en date du 21 mars 2023, aux termes desquelles ils sollicitent la confirmation du jugement du Tribunal de première instance du 12 mai 2022 et la condamnation reconventionnelle du A. au paiement d'une somme de 5.000 euros, sur le fondement de l'article 238-1 du Code de procédure civile.

À l'appui de leurs demandes, les intimés font valoir les arguments suivants :

  • l'article 8 de l'arrêté ministériel n° 96-21 du 22 janvier 1996, fixant les modalités de désignation des représentants des personnels au conseil d'administration du A. dispose que les électeurs choisissent sur le bulletin de vote le nom de deux candidats au plus.

L'irrégularité survenue le 30 septembre 2020 et signalée ce jour à 13 h 15 a eu pour effet de priver les électeurs de la possibilité de voter pour C. et ce pendant un temps indéterminé.

Sur ce point, les premiers juges auraient fait une juste appréciation de la cause, puisque l'ensemble des assesseurs n'ont pas attesté de la présence de bulletins de vote « C. », déchirés ou froissés dans les poubelles de la salle où se déroulait le scrutin.

La disparition des bulletins de l'un des candidats est en tout état de cause un évènement revêtant une particulière gravité et naturellement susceptible d'influer sur le résultat du vote.

Enfin, la carence dans l'organisation du vote serait manifeste en ce que le A. aurait été incapable de chiffrer avec précision le nombre de votants au cours de la journée du mercredi 30 septembre (251 ou 253).

Par conclusions en date du 25 avril 2023, le Ministère Public s'en est rapporté à la sagesse de la Cour.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2023.

À l'audience du 20 juin 2023, les parties ont repris oralement leur argumentation écrite. Sur demande de la Cour, une note en délibéré a été autorisée, pour permettre au A. de fournir des éléments sur un éventuel horodatage des votes réalisés. Cette communication, au contradictoire des intimés, a été réalisée le 10 juillet 2023, sans appeler de nouvelles observations des parties.

SUR CE,

  • 1/Attendu que l'appel du A. relevé dans les formes et délais prescrits par le Code de procédure civile, doit être déclaré recevable ;

  • 2/Attendu que l'article 11 de l'arrêté ministériel n° 96-21 du 22 janvier 1996 modifié fixant les modalités de désignation des représentants des personnels au Conseil d'administration du A. dispose que les contestations sur la validité des opérations électorales sont portées, dans un délai de cinq jours à compter de la proclamation des résultats, devant la juridiction désignée par la loi ;

Qu'en l'absence de dispositions légales particulières, le Tribunal de première instance, juge de droit commun en matière électorale s'est valablement reconnu compétent pour connaître du litige ;

  • 3/Attendu que l'arrêté ministériel n° 96-21 du 22 janvier 1996 modifié ne contient pas de disposition spécifique relative aux causes de nullité du scrutin ;

Que les articles pertinents de ce texte s'agissant du présent litige disposent :

« Article 4 :

Le Directeur du A. convoque les électeurs par voie d'affichage et précise les dates, les heures et le lieu de la consultation ainsi que les modalités matérielles d'organisation du scrutin.

Un bureau de vote est constitué au A..

Les opérations électorales se déroulent au A. sur trois jours pendant les heures de service. Les horaires d'ouverture et de clôture du scrutin sont arrêtés par le Directeur du A.. Le scrutin doit être ouvert sans interruption pendant au moins dix heures.

Article 7 :

Le vote a lieu au scrutin secret majoritaire à un tour sous le contrôle du directeur du A..

Article 8 :

Les électeurs choisissent sur le bulletin de vote le nom de deux candidats au plus. Le bulletin et l'enveloppe qui le contient ne peuvent, à peine de nullité, comporter aucune indication personnelle ou aucun signe de reconnaissance.

Article 9 :

Le dépouillement du scrutin est effectué sous le contrôle d'un bureau composé d'un magistrat désigné par le directeur des services judiciaires, président, du candidat le plus âgé et du candidat le plus jeune.

Sont déclarés élus les deux candidats ayant obtenu le plus de suffrages. En cas d'égalité du nombre de voix, le candidat le plus âgé est déclaré élu » ;

Attendu que doivent en conséquence s'appliquer les principes généraux selon lesquels, à moins qu'elles soient directement contraires aux principes généraux de droit électoral, les irrégularités commises dans l'organisation et le déroulement d'un scrutin ne peuvent constituer une cause d'annulation que si elles ont exercé une influence sur le résultat des élections ;

Attendu en l'espèce que n'est pas démontrée une fraude ou une intention de fausser la sincérité du scrutin qui serait imputable à une personne déterminée, si bien que la présente juridiction doit déterminer si l'irrégularité litigieuse a exercé une influence sur le résultat des élections ;

Attendu qu'il est constant qu'une irrégularité manifeste a été signalée le 30 septembre à 13 h 15 minutes, des électeurs alertant le président du bureau de vote de l'absence sur la table mise à disposition des votants, des bulletins portant le nom d'C. ;

Attendu que le A. produit aux débats en pièce n° 12 le procès-verbal du scrutin de la journée du mercredi 30 septembre 2020 qui mentionne :

" Le Président fait le constat, qu'effectivement en lieu et place des bulletins de vote de Madame C., sont positionnés des bulletins au nom de la candidate Madame D.. Il est précisé que sur la table des bulletins de vote, les bulletins de vote ont été positionnés par ordre alphabétique de la manière suivante [ …].

Le président, après avoir fait le constat de la présence des bulletins de Madame D. en lieu et place des bulletins de Madame C., repositionne des bulletins de vote Madame C. à l'emplacement correspondant.

Les opérations de votes ont été maintenues. Le Président procède à la vérification de la poubelle centrale dans laquelle se trouve les bulletins de votes laissés par les électeurs et fait le constat de deux bulletins au nom de Madame C. ; 1 déchiré et 1 froissé.

Il est rappelé que le Président a procédé à un ramassage des poubelles de l'isoloir environ 20 minutes avant l'incident. Par ailleurs, le Président rappelle qu'il n'a pas ajouté de bulletins depuis sa prise de poste à 12 heures. Deux des assesseurs présents, Monsieur O. et Monsieur P.confirment le constat de la présence des bulletins au nom de Madame C. dans la poubelle centrale, ils précisent qu'ils ont fait le constat de la présence de bulletins de Madame C. dans une poubelle d'isoloir tout en rappelant que le Président a vidé toutes les poubelles 20 minutes auparavant.

Le présent constat a été porté à la connaissance des assesseurs : Madame P. (L.), Monsieur P.(K.), Monsieur F. (B.) et Monsieur O. (M.) et du Président Monsieur N., présents au moment des faits, accompagné s'il y a lieu des commentaires et observations manuscrites » ;

Attendu que le Président et les assesseurs ont signé ce procès-verbal, o.F (B.) portant la mention manuscrite suivante : « En complément, je rajoute que M. N. a pris une photo qu'il dit mettre en pièce jointe de ce procès-verbal, qu'aucun bulletin de Mme C. ne se trouvait sur la table au moment du constat. Je n'ai pas pu constater la présence de bulletins de Mme C. dans les poubelles » ;

Que l'assesseur du L. (Madame P.) a porté la mention manuscrite : « Témoins d'avoir vue les 2 bulletins dans la poubelle » (sic) et que les deux autres assesseurs ont simplement signé ;

Attendu que dans le cadre du litige judiciaire, g.N a attesté dans les formes de l'article 324 du Code de procédure civile le 24 novembre 2020 en indiquant « J'ai vidé les poubelles de l'isoloir une poignée de minutes avant l'incident » ;

Qu'Alain P.a attesté dans les mêmes formes le 24 novembre 2020 en écrivant : « -à la prise de fonction de Mr N. a vidé toutes les poubelles des isoloirs, environ 15 minutes avant l'incident,

  • l'incident déclaré, vers 13h15 environ, nous avons trouvé dans toutes les poubelles des isoloirs, des bulletins au nom de « C. » ;

Que Christine O. a attesté dans les mêmes formes le 12 décembre 2020 en mentionnant : « J'ai constaté avec M. a.G qu'il se trouvait dans au moins une poubelle d'isoloir des bulletins « C. » froissés » ;

Attendu que le 4ème assesseur, o.F n'a pas délivré d'attestation en vue de sa production en justice dans le cadre de la présente instance et que la mention qu'il a portée sur le procès-verbal « je n'ai pas pu constater la présence de bulletin de Mme C. dans les poubelles » ne signifie pas qu'il s'est assuré qu'il ne s'en trouvait pas après qu'il les ait vérifiées ;

Attendu que contrairement à l'appréciation des premiers juges, ces éléments permettent de circonscrire dans le temps la durée de l'irrégularité ;

Qu'en effet, le ramassage des poubelles ayant été réalisé une vingtaine de minutes avant que l'incident soit signalé et le fait que des bulletins « C. » se retrouvent dans les corbeilles à 13 h 15 au moment de la révélation de l'irrégularité signifie que, à prendre l'hypothèse la plus défavorable, les électeurs ont pu encore disposer de ces bulletins aux alentours de 12 h 55 minutes ;

Attendu que la Cour a souhaité savoir si un horodatage des votes avait été réalisé, ce qui aurait permis de connaître le nombre d'électeurs durant ce laps de temps de vingt minutes, le 30 septembre 2020, entre 12 h 55 et 13 h 15 minutes ;

Attendu cependant que les documents transmis par le A. dans le cadre de la note en délibéré, en l'occurrence les cahiers d'émargement des votants pour les trois jours du scrutin, ne permettent pas de fournir une telle information ;

Qu'il est toutefois établi que ce mercredi 30 septembre 2020, 251 ou 253 électeurs ont voté ;

Que le A. ne peut être suivi dans son raisonnement établissant une moyenne horaire sur les dix heures d'ouverture du bureau de vote (de 7 h à 17 h), soit 25 électeurs à l'heure et donc 8 électeurs en vingt minutes, l'affluence pouvant varier d'une période à l'autre, surtout qu'entre 12 heures et 14 heures, le moment de la pause méridienne peut être propice à une participation à des opérations électorales ;

Mais attendu toutefois, qu'à prendre, ici encore, l'hypothèse la plus défavorable à C., pour que le résultat du scrutin soit impacté, il aurait fallu que 84 électeurs votent en vingt minutes soit près de 4 électeurs par minute, ce qui apparaît matériellement impossible pour une élection se déroulant dans un seul bureau de vote, avec une seule urne, si on prend en compte le temps incompressible nécessaire aux opérations : récupération des bulletins, entrée dans l'isoloir, positionnement du ou des bulletins dans l'enveloppe afférente, sortie d'isoloir, vote et émargement ;

Attendu en conséquence que l'irrégularité n'a pas pu jouer un rôle déterminant sur le résultat des votes ;

Attendu qu'il n'y a donc pas lieu à annulation des opérations électorales litigieuses, que le jugement déféré sera donc infirmé en toutes ses dispositions et qu'il y a lieu, statuant à nouveau, de débouter C. et le B. de leurs demandes d'annulation des élections des représentants des personnels non médicaux au Conseil d'Administration du A. des 28, 29 et 30 septembre 2020 ;

Attendu que les appelants, qui succombent, devront supporter les dépens de première instance et d'appel et seront en conséquence déboutés de leur demande sur le fondement de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

par mise à disposition au greffe,

Déclare l'appel du A. recevable,

Infirme le jugement rendu par le Tribunal de première instance le 12 mai 2022 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déboute le B. et C. de leur demande aux fins d'annulation de l'élection des représentants des personnels non médicaux au Conseil d'Administration du A. des 28, 29 et 30 septembre 2020,

Y ajoutant,

Condamne le B. et C. aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que les dépens distraits seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,

Rejette la demande du B. et C. sur le fondement de l'article 238-1 du Code de procédure civile,

Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,

Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 28 SEPTEMBRE 2023, par Madame Françoise CARRACHA, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur Sébastien BIANCHERI, Conseiller, Madame Marie-Hélène PAVON-CABANNES, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Monsieur Morgan RAYMOND, Procureur général adjoint.

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