Cour d'appel, 28 juin 2021, Le Ministère public et m. l. D. c/ a j L.

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Abstract🔗

Abandon de famille - Éléments constitutifs - Non-paiement de frais relatifs à une villa - Frais constituant une contribution aux charges du ménage (non) - Frais constituant une pension alimentaire (non) - Relaxe 

Résumé🔗

Le prévenu doit être relaxé du chef d'abandon de famille. L'article 296 du Code pénal ne vise que le non-paiement d'une contribution aux charges du ménage ou d'une pension alimentaire. En l'espèce, aux termes de l'ordonnance de non conciliation, le prévenu a été condamné à régler notamment l'intégralité des frais inhérents à une villa, outre les frais d'abonnement et de consommation électrique, chauffage, téléphone, internet et télévision y afférents à titre du devoir de secours. Ces frais ne constituent pas une contribution aux charges du ménage dans la mesure où ils ont été fixés dans le cadre de la procédure de divorce par l'ordonnance de non-conciliation. Ils sont également distincts de la pension alimentaire qui est elle-même une forme du devoir de secours. Ces frais ne constituant ainsi ni une contribution aux charges du ménage ni une pension alimentaire dont seul le non-paiement est visé par l'article 296 du Code pénal d'interprétation stricte, le délit n'est pas constitué.


Motifs🔗

Dossier PG n° 2020/000493

Cour d'appel correctionnelle

R.5086

ARRÊT DU 28 JUIN 2021

En la cause du :

  • MINISTÈRE PUBLIC ;

Et de :

  • m. l. D., née le 18 avril 1981 à MANCHESTER (Grande-Bretagne), de nationalité britannique, sans profession, demeurant X1 à SAINT-JEAN-CAP-FERRAT (06230), constituée partie civile ;

ABSENTE, bénéficiaire de l'assistance judiciaire par décision en date du 13 octobre 2020 portant le numéro XX et représentée à ce titre par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, plaidant par ledit avocat-défenseur, et par Maître Maéva ZAMPORI, avocat-stagiaire ;

APPELANTS

Contre :

  • a j L., né le 1er novembre 1969 à DUBLIN (Irlande), de t. et de d. G. de nationalité irlandaise, sans profession, demeurant X2 à MONACO (98000) ;

PRÉSENT aux débats, assisté de Maître Franck CHOUMAN, avocat au Barreau de Nice, plaidant par ledit avocat ;

Prévenu de :

  • ABANDON DE FAMILLE

INTIMÉ

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience du 10 mai 2021 ;

Vu le jugement contradictoirement rendu par le Tribunal correctionnel le 16 février 2021 ;

Vu les appels interjetés le 22 février 2021, par le Ministère public, à titre principal, et le 1er mars suivant par Maître Thomas BREZZO, avocat, substituant Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur et celui de m. l. D. partie civile ;

Vu les conclusions de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, pour m. l. D. en date du 10 mai 2021 ;

Vu l'ordonnance présidentielle en date du 12 mars 2021 ;

Vu la citation à prévenu et à partie civile, suivant exploit, enregistré, de Maître Claire NOTARI, Huissier, en date du 1er avril 2021 ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï Sandrine LEFEBVRE, Conseiller, en son rapport ;

Ouï le prévenu en ses réponses et ce avec l'assistance de b. LV., demeurant X3 à CAP-D'AIL (06320), interprète en langue anglaise, serment préalablement prêté ;

Ouï Maîtres Thomas GIACCARDI et Maéva ZAMPORI, respectivement avocat-défenseur et avocat-stagiaire, pour m. l. D. partie civile, en leurs moyens d'appel et plaidoiries ;

Ouï le Ministère public en ses réquisitions ;

Ouï Maître Franck CHOUMAN, avocat au Barreau de Nice, régulièrement autorisé par le Président à assister a j L. prévenu, en ses moyens de défense et plaidoiries ;

Ouï le prévenu, en dernier, en ses moyens de défense ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Par jugement contradictoire en date du 16 février 2021, le Tribunal correctionnel a, sous la prévention :

« D'être à Monaco, courant 2019 à mars 2020, en tout cas depuis temps non prescrit, en méconnaissance d'une ordonnance rendue par le juge conciliateur du Tribunal de première instance de Monaco le 21 mai 2019, l'ayant condamné à régler l'intégralité des frais inhérents à la villa appartenant à la SCP A, outre les frais d'abonnement et de consommation électrique, chauffage, téléphone, internet et télévision y afférents à titre de devoir de secours, volontairement demeuré plus de deux mois sans acquitter le montant intégral »,

DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26, 27 et 296 du Code pénal,

sur l'action publique

  • - relaxé a j L. des fins de la poursuite sans peine ni dépens,

sur l'action civile

  • - reçu m. l. D. en sa constitution de partie civile, mais l'a déboutée de ses demandes de dommages-intérêts en état de la relaxe,

  • - laissé les frais à la charge du Trésor.

Le Ministère public a interjeté appel principal de ladite décision le 22 février 2021.

Maître Thomas BREZZO, avocat, substituant Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, pour m. l. D. partie civile, a interjeté appel de cette décision par acte de greffe en date du 1er mars 2021.

Considérant les faits suivants :

a L. et m. l. D. se mariaient le 26 novembre 2010, quatre enfants étant issus de cette union.

Par ordonnance de non conciliation du 21 mai 2019 signifiée à a L. par acte d'huissier en date du 23 mai 2019, le magistrat conciliateur condamnait notamment a L. à régler l'intégralité des frais inhérents à la villa appartenant à la SCP A et occupée par m. l. D. outre les frais d'abonnement et de consommation électrique, chauffage, téléphone, internet et télévision y afférents au titre du devoir de secours, au paiement d'une pension alimentaire mensuelle de 10.000 euros au titre du devoir de secours au profit de m. l. D. ainsi qu'au paiement d'une somme mensuelle de 5.000 euros au titre de la part contributive à l'entretien et l'éducation des quatre enfants dont la résidence était toutefois fixée au domicile du père.

Par ordonnance du 26 octobre 2019, le magistrat du Tribunal de grande instance aux affaires familiales de Londres entérinait un accord financier conclu entre a L. et m. l. D. portant notamment sur la villa appartenant à la SCP A et sur le paiement par a L. à m. l. D. d'une somme de 10.000 euros au titre des pensions périodiques au bénéfice de m. l. D. et des enfants de la famille jusqu'à la majorité du plus jeune enfant.

Une procédure de divorce était engagée devant les juridictions monégasque et anglaise.

Le 7 mai 2020, m. l. D. déposait plainte à l'encontre d a L. pour abandon de famille auprès de Madame le Procureur général, soutenant qu a L. s'était abstenu de lui régler les aliments mis à sa charge par l'ordonnance du 21 mai 2019 depuis plus de deux mois.

m. l. D. était entendue par les services de police le 9 juillet 2020.

Elle confirmait avoir déposé une requête en divorce devant les juridictions londoniennes, a L. et elle-même ayant également déposé une requête en divorce auprès des juridictions monégasques dont elle s'était désistée mais qui était toujours pendante en l'absence de désistement d a L.

La décision de divorce avait été prononcée en Angleterre le 10 janvier 2020 et était passée en force de chose jugée le 4 mars 2020.

m. l. D. affirmait qu a L. n'avait pas réglé les sommes mises à sa charge par l'ordonnance de non conciliation et par l'accord qu'ils avaient conclu en Angleterre, a L. étant débiteur d'une somme de 277.203 euros au titre des charges de la Villa A pour la période de février 2019 à mars 2020 et n'ayant pas réglé l'intégralité des sommes dues au titre du crédit en cours pour l'acquisition de la Villa A à l'origine d'une procédure de saisie immobilière.

a L. entendu par les services de police le 12 août 2020, contestait tout abandon de famille.

Il confirmait être divorcé de m. l. D. par décision du Tribunal londonien en date du 4 mars 2020. Il faisait état d'un accord signé en Angleterre avec m. l. D. aux termes duquel il s'engageait à régler une pension alimentaire de 10.000 euros pour les enfants à condition qu'il puisse vendre la maison X1 engagement que m. l. D. n'avait pas respecté.

Il déclarait que l'ordonnance de non conciliation rendue par le Tribunal de première instance de Monaco en date du 21 mai 2019 était non avenue aux motifs qu'il s'était présenté à deux reprises devant les juridictions monégasques pour arrêter la procédure de divorce et dans la mesure où m. l. D. n'était plus en Principauté de Monaco.

Il soutenait avoir réglé les sommes visées à l'ordonnance de non conciliation du 21 mai 2019 jusqu'en mars 2020, mois à compter duquel il n'avait plus régler l'ensemble des pensions en raison de l'effondrement des loyers de ses biens immobiliers. Il admettait également ne pas avoir réglé la pension ad litem de 40.000 euros ainsi que les charges et l'entretien de la Villa A, faute d'argent.

Il ajoutait enfin avoir réglé toutes les sommes qu'il devait aux termes d'une décision de Londres d'octobre 2019.

a L. était renvoyé devant le Tribunal correctionnel pour s'être à Monaco, courant 2019 à mars 2020, en tout cas depuis temps non prescrit, en méconnaissance d'une ordonnance rendue par le juge conciliateur du Tribunal de première instance de Monaco le 21 mai 2019, l'ayant condamné à régler l'intégralité des frais inhérents à la villa appartenant à la SCP A, outre les frais d'abonnement et de consommation électrique, chauffage, téléphone, internet et télévision y afférents au titre du devoir de secours, volontairement demeuré plus de deux mois sans acquitter le montant intégral.

Par jugement en date du 16 février 2021, le Tribunal correctionnel relaxait a L. des fins de la poursuite sans peine ni dépens, recevait m. l. D. en sa constitution de partie civile mais la déboutait de ses demandes en dommages et intérêts en état de la relaxe et laissait les frais à la charge du Trésor.

Pour statuer ainsi, le Tribunal retenait que :

  • - l'article 296 du Code civil visait expressément et limitativement la contribution aux charges du ménage et les pensions alimentaires dues aux ascendants, descendants ou conjoint,

  • - la procédure civile spécifique sur les charges du ménage, qui supposait que les époux vivent toujours ensemble mais que l'un d'eux ne contribue pas aux charges courantes du ménage, n'était pas applicable aux couples séparés et en instance de divorce,

  • - de ce fait, les frais inhérents à l'occupation d'un bien immobilier, outre abonnements et consommations électriques, chauffage, internet et télévision ne pouvaient être considérés comme une contribution aux charges du ménage au sens de l'article 296 du Code pénal,

  • - si le visa du devoir de secours entre époux par la décision du 21 mai 2019 pouvait donner lieu au règlement de ces frais un caractère alimentaire, cela ne pouvait être considéré comme une pension alimentaire due au conjoint qui, par essence, prenait la forme de subsides fixes, déterminée par la décision condamnant une personne à la régler,

  • - plusieurs des frais visés étaient des dettes de la société civile détenant un bien immobilier qu'elle devait régler.

Le Ministère public interjetait appel de cette décision par déclaration au Greffe de la Cour d'appel le 22 février 2021, formalisé sur le registre ad hoc le même jour.

m. l. D. partie civile, interjetait appel de cette décision par déclaration au Greffe de la Cour d'appel le 1er mars 2021, formalisé sur le registre ad hoc le même jour.

Par conclusions reçues le 7 mai 2021, m. l. D. demandait à la Cour de :

  • - la recevoir en son appel et l'y déclarant bien fondée,

  • - réformer le jugement du Tribunal correctionnel du 16 février 2021 en toutes ses dispositions,

et statuant de nouveau,

sur l'action publique :

  • - déclarer J. L. coupable des faits qui lui sont reprochés,

  • - le retenir dans les liens de la prévention,

  • - statuer ce que de droit sur les réquisitions de madame le Procureur général,

sur l'action civile :

  • - déclarer m. l. D. recevable et bien fondée en sa constitution de partie civile,

  • - condamner J. L. au paiement de la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice moral subi,

  • - condamner a L. aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les dépens de première instance ainsi que tous les frais et accessoires, tels que frais de greffe et d'enregistrement, frais d'huissier, procès-verbaux de constat, sommations, frais d'expertise et de traduction éventuels, dont distraction au profit de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation de droit.

Faisant état du désistement d a L. de la procédure de divorce engagée devant les juridictions monégasques selon jugement du Tribunal de première instance du 10 décembre 2020, de l'accord financier des parties repris à l'ordonnance du 26 octobre 2019 et de l'ordonnance d'accord financier et avis d'audience du 3 mars 2020, m. l. D. soutenait que les mesures provisoires de l'ordonnance de non-conciliation du 21 mai 2019 étaient exécutoires jusqu'au 4 mars 2020, date du prononcé du divorce par les juridictions anglaises.

Elle indiquait qu'en sus d'un paiement partiel des pensions alimentaires et des parts contributives à l'entretien et l'éducation des enfants, a L. n'avait pas réglé les frais inhérents à l'occupation de la villa de Y soit la somme de 33.309,87 euros pour les mois de mai 2019 à avril 2020.

Disposant d'une créance alimentaire reconnue par une décision de justice exécutoire, en l'espèce l'ordonnance de non-conciliation du 21 mai 2019, m. l. D. faisait grief au jugement déféré d'avoir considéré que la pension alimentaire prenait par essence la forme de subsides et ne pouvait être constituée par le règlement de frais inhérents au logement et à la vie courante, faisant état à l'appui de ses dires de :

  • - l'arrêt de la Cour d'appel du 10 mars 2015 aux termes duquel une pension alimentaire pouvait prendre la forme des frais inhérents au logement du bénéficiaire,

  • - d'un jugement du 23 juillet 2013 et d'une ordonnance du 26 juin 2020 aux termes desquels un parent pouvait être condamné au paiement des frais de scolarité et de cantine au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant,

  • - d'un jugement du 25 avril 2016 du Tribunal de grande instance de Lyon aux termes duquel une pension alimentaire pouvait être constituée par le règlement de frais d'une SCI détenue par les époux.

Soulignant que l'ordonnance du 21 mai 2019 avait mis à la charge d a L. les frais inhérents de la villa du Y, outre les frais d'abonnement et de consommation électrique, chauffage, téléphone, internet et télévision y afférents au titre du devoir de secours, ces frais liés au logement et à la vie courante de l'épouse et des enfants constituaient nécessairement selon elle une portion du paiement global de la pension alimentaire qui lui avait été octroyée, l'absence de détermination du montant de ces frais important peu.

m. l. D. rappelait par ailleurs qu a L. avait admis à deux reprises ne pas avoir réglé la somme de 14.000 euros au titre des factures d'eau et de gaz liées à la villa Y et celle de 225.517 euros au titre des impôts de la SCI A aux termes de l'ordonnance d'accord financier et avis d'audience du 3 mars 2020 et lors de l'audience du 12 août 2020. Ce défaut de paiement, qui était présumé volontaire, révélait la mauvaise foi et l'intention d a L. de ne pas régler les sommes dues pendant plus de deux mois alors qu'il disposait des moyens financiers pour le faire, ne réglant l'arriéré des pensions alimentaires ainsi que les factures d'électricité des mois de décembre 2019, de janvier et février 2020 de 4.054,35 euros que la veille de l'audience.

Le délit d'abandon de famille étant ainsi constitué, m. l. D. sollicitait par conséquent l'indemnisation de son préjudice moral, soulignant en substance à l'appui de sa demande que :

  • - elle vivait dans l'incertitude et selon le bon vouloir de payer d a L.

  • - la carence d a L. dans ses obligations avait abouti à des coupures d'électricité et de chauffage,

  • - a L. ne lui avait versé aucune somme au titre des pensions alimentaires en mars 2020 en dépit de ses nombreuses relances et alors même qu'il avait exigé qu'elle se confine à son domicile avec les enfants,

  • - elle avait été contrainte de solliciter l'aide financière de sa famille et de ses amis pour pouvoir nourrir les enfants et payer les factures,

  • - la carence d a L. conjuguée à son comportement irrespectueux, humiliant et à sa mauvaise foi lui avait causé un état de stress et d'angoisse permanent.

À l'audience, m. l. D. réitérait les moyens et les demandes développés à ses conclusions.

Le Ministère public soutenait que les dépenses faites pour le logement du conjoint entraient dans le devoir de secours et s'en rapportait sur la condamnation.

a L. demandait la confirmation du jugement déféré et sa relaxe.

À l'appui de sa demande, il rappelait que la villa A ne constituait pas le domicile principal de m. l. D. mais était un investissement qu'il avait fait dans le cadre de la proposition d'investisseur.

Il soulignait que :

  • - seule une pension alimentaire devait être payée, sinon le juge aurait fait la précision,

  • - qu'une ordonnance avait été rendue par les juridictions britanniques en 2019 réduisant la pension alimentaire et la prise en charge des frais afférents à la villa,

  • - les deux époux étaient d'accord le 26 octobre 2019 de porter leur litige devant les juridictions britanniques,

  • - si on avait dû lui reprocher des faits, la prévention aurait dû être plus courte, l'ordonnance de non-conciliation ayant été rendue le 21 mai 2019,

  • - à ce jour, ces décisions ne pouvaient trouver application devant les juridictions monégasques dans la mesure où elles n'avaient pas fait l'objet d'exequatur, m. l. D. ayant depuis lors engagé une procédure d'exequatur,

  • - il n'y avait pas eu de défaut de paiement des factures qu'il avait réglées avec un peu de retard.

a L. avait la parole en dernier et déclarait notamment que m. l. D. vivait dans une villa magnifique dont il réglait toutes les factures et qu'elle n'avait rien fait pour l'aider.

SUR CE,

Attendu que les appels, relevés par le Ministère public et la partie civile dans les délais et formes prescrits par les articles 406 et 411 du Code de procédure pénale, sont réguliers et recevables ;

  • Sur l'action publique,

Attendu qu a L. a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel pour s'être à Monaco, courant 2019 à mars 2020, en tout cas depuis temps non prescrit, en méconnaissance d'une ordonnance rendue par le juge conciliateur du Tribunal de première instance de Monaco le 21 mai 2019, l'ayant condamné à régler l'intégralité des frais inhérents à la villa appartenant à la SCP A, outre les frais d'abonnement et de consommation électrique, chauffage, téléphone, internet et télévision y afférents au titre du devoir de secours, volontairement demeuré plus de deux mois sans acquitter le montant intégral ;

Attendu que l'article 296 du Code pénal dispose : « sera punie d'un emprisonnement de trois mois à un an et de l'amende prévue au chiffre 2 de l'article 26 ou de l'une de ces deux peines seulement, toute personne qui, en méconnaissance d'une décision l'ayant condamnée à verser une contribution aux charges du ménage, ou une pension alimentaire à son conjoint, à ses ascendants, à ses descendants, sera volontairement demeurée plus de deux mois sans fournir la totalité des subsides déterminés par le juge ni acquitter le montant intégral de la pension » ;

Que la loi pénale étant d'interprétation stricte ainsi que l'ont rappelé à juste titre les premiers juges, l'élément légal de l'infraction ne vise que le non-paiement d'une contribution aux charges du ménage ou d'une pension alimentaire ;

Attendu qu'aux termes de l'ordonnance de non conciliation du 21 mai 2019 signifiée par acte d'Huissier en date du 23 mai 2019, a L. a été condamné à :

  • « - régler l'intégralité des frais inhérents à cette villa, outre les frais d'abonnement et de consommation électrique, chauffage, téléphone, internet et télévision y afférents à titre du devoir de secours,

  • - verser à m. l. D. au titre du devoir de secours une pension alimentaire d'un montant mensuel de 10.000 euros,

  • - payer à m. l. D. une somme mensuelle de 1.000 euros par enfant pour r., a., et e. et une somme mensuelle de 2.000 euros pour j. soit la somme mensuelle totale de 5.000 euros à titre de part contributive à l'entretien et l'éducation des enfants » ;

Que les frais inhérents à la villa appartenant à la SCP A mis à la charge d a L. ne constituent pas une contribution aux charges du ménage dans la mesure où ils ont été fixés dans le cadre de la procédure de divorce par l'ordonnance de non-conciliation ;

Que ces frais inhérents à la villa sont également distincts de la pension alimentaire, qui est elle-même une forme du devoir de secours, dans la mesure où cette dernière a par ailleurs été fixée au titre d'une disposition distincte dans le dispositif de l'ordonnance de non-conciliation du 23 mai 2019 au profit de m. l. D. à la somme mensuelle de 10.000 euros ;

Que ces frais ne constituant ainsi ni une contribution aux charges du ménage ni une pension alimentaire dont seul le non-paiement est visé par l'article 296 du Code pénal d'interprétation stricte, l'élément légal de l'infraction fait défaut ;

Que le jugement ayant renvoyé a L. des fins de la poursuite est par conséquent confirmé ;

  • Sur l'action civile,

Attendu que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a reçu la constitution de partie civile de m. l. D.;

Qu'en l'état de la relaxe d a L. le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a débouté m. l. D. de sa demande en paiement d'une somme de 5000 euros en réparation de son préjudice moral,

Que les dépens de l'appel resteront à la charge du Trésor ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO, statuant en matière correctionnelle, publiquement et contradictoirement conformément aux dispositions de l'article 377 du Code de procédure pénale à l'égard de m. l. D., partie civile, et contradictoirement à l'égard d a j L., prévenu,

Reçoit les appels du Ministère public et de m. l. D.

Confirme le jugement du Tribunal correctionnel en date du 16 février 2021 en toutes ses dispositions,

Laisse les frais du présent arrêt à la charge du Trésor ;

Composition🔗

Après débats en audience publique de la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le dix mai deux mille vingt et un, qui se sont tenus devant Madame Françoise CARRACHA, Conseiller, faisant fonction de Président, Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller, Madame Catherine LEVY, Conseiller, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Procureur général adjoint, assistés de Madame Sandra MILLIEN, Greffier ;

Après qu'il en ait été délibéré et jugé, le présent arrêt a été signé par Madame Françoise CARRACHA, Conseiller, faisant fonction de Président, Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller, Madame Catherine LEVY, Conseiller, Magistrats en ayant délibéré et ce en application des articles 58 à 62 de la Loi n° 1.398 du 24 juin 2013, relative à l'administration et à l'organisation judiciaires ;

Lecture étant donnée à l'audience publique du vingt-huit juin deux mille vingt et un par Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller, assistée de Madame Sandra MILLIEN, Greffier, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Procureur général adjoint, et ce en application des dispositions des articles 58 à 62 de ladite Loi.

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