Cour d'appel, 6 mai 2021, f. M. c/ Le Ministère Public et c. H.
Abstract🔗
Diffamation et injures publiques - Bonne foi (oui) - Éléments constitutifs - Propos portant atteinte à l'honneur ou à la considération (non) - Relaxe
Résumé🔗
Aux termes de l'article 21 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005 sur la liberté d'expression publique toute allégation ou imputation d'un fait déterminé qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne, d'un groupe de personnes liées par la même appartenance au sens de l'article 24 ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. L'article 23 de la même loi prévoit l'incrimination et la répression de la diffamation commise à l'encontre d'un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l'autorité publique, par l'un des moyens énoncés à l'article 15 du même texte. Ce texte fait état de tout moyen de communication au public par voie électronique ou de tout moyen de communication audiovisuelle et la communication par le biais d'internet via le réseau social F, par le moyen de publications ou « posts » accessibles à tous entre dans le champ d'application de ce texte. En l'espèce, le prévenu a toujours reconnu être le titulaire du compte portant son nom sur le réseau social et être l'auteur et le rédacteur des propos litigieux. Ceux-ci visent une personne déterminée et imputent des faits déterminés portant atteinte à son honneur et sa considération. Les propos s'inscrivent dans un débat d'intérêt général à Monaco, caractérisant un but légitime. Les allégations de collusion et de corruption, sous une forme dubitative pour cette dernière, reposaient sur une base factuelle suffisante. L'expression est mesurée puisque si le ton est vif, le prévenu s'exprime en l'espèce tant en nom personnel, comme justiciable faisant l'objet d'un acte d'enquête coercitif, qu'en qualité d'avocat d'un tiers et qu'il a entendu exprimer ses doutes quant à la possibilité d'exercer pleinement sa mission aux intérêts de son client. La relaxe doit donc être prononcée.
Le prévenu doit être relaxé du chef de diffamation. Un propos peut être qualifié de diffamatoire même s'il est présenté par voie d'insinuation. Toutefois, il est nécessaire que l'appréciation du lecteur soit irrémédiablement biaisée et qu'aucun doute raisonnable quant à l'interprétation des propos litigieux ne soit possible. En l'espèce, il ne peut être déduit de manière univoque des propos du prévenu qu'une violation de règles procédurales par des enquêteurs va être réalisée mais seulement qu'il craint une telle violation. Par conséquent, l'élément matériel de l'infraction n'est pas constitué.
Motifs🔗
Dossier PG n° 2018/000904
Cour d'appel correctionnelle JI n° CAB2-2018/000904
ARRÊT DU 6 MAI 2021
En la cause de :
f. M., né le 24 mai 1964 à MONACO (98000), d a. et de m. F. de nationalité monégasque, avocat-défenseur, demeurant X1 à MONACO (98000) ;
Prévenu de :
DIFFAMATION PUBLIQUE
PRESENT aux débats, assisté de Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et de Maître William BOURDON, avocat au Barreau de Paris, plaidant par ledit avocat ;
APPELANT / INTIMÉ
Contre :
le MINISTÈRE PUBLIC ;
INTIMÉ / APPELANT
En présence de :
- c. H., né le 14 décembre 1966 à MELUN (77), de nationalité française, Commissaire principal de police et chargé de mission auprès du Directeur de la Sureté publique, ayant élu domicile à la Direction de la Sûreté publique à Monaco, X2 à MONACO (98000), constitué partie civile, PRESENT, assisté de Maître Florent ELLIA, avocat au Barreau de Nice, plaidant par ledit avocat ;
INTIMÉ
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience du 19 avril 2021 ;
Vu le jugement contradictoirement rendu par le Tribunal correctionnel le 18 novembre 2020 ;
Vu l'appel interjeté tant par f. M. prévenu, le 24 novembre 2020, que par le Ministère public, à titre incident, le 25 novembre suivant ;
Vu l'ordonnance présidentielle en date du 7 janvier 2021 ;
Vu la citation à prévenu et à partie civile signifiée, suivant exploit, enregistré, de Maître Claire NOTARI, Huissier, en date du 15 février 2021 ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu les conclusions de Maître William BOURDON, avocat, pour f. M. prévenu, en date des 19 mars et 15 avril 2021 ;
Vu les conclusions du Ministère public en date du 9 avril 2021 ;
Ouï Sébastien BIANCHIERI, Conseiller, en son rapport ;
Ouï le prévenu en ses réponses ;
Ouï Maître Florent ELLIA, avocat au Barreau de Nice, régulièrement autorisé par le Président à assister c. H. partie civile, en ses plaidoiries ;
Ouï le Ministère public en ses réquisitions ;
Ouï Maître William BOURDON, avocat au Barreau de Paris, régulièrement autorisé par le Président à assister f. M. prévenu, en ses moyens d'appel et plaidoiries ;
Ouï le prévenu, en dernier, en ses moyens de défense ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Par jugement contradictoire en date du 18 novembre 2020, le Tribunal correctionnel a, sous la prévention :
« D'avoir à Monaco, les 25 janvier et 8 février 2018, commis sur la page publique du réseau social F intitulée « f. M.» des faits de diffamation publique au préjudice de M. c. H. à raison de ses fonctions ou de sa qualité de fonctionnaire public, de dépositaire ou d'agent de l'autorité publique, par une allégation ou une imputation d'un fait qui porte atteinte à son honneur ou à sa considération, en écrivant : « certains policiers parmi lesquels Monsieur H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de penser, de corruption », « sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés », « les policiers dont la presse ont révélé qu'ils travaillent en réalité (SIC) pour d. R., » sale petite dictature «, » où la corruption et les réseaux ont le pouvoir « »
DÉLIT prévu et réprimé par les articles 15, 21, 23, 26, 27, 35, 36, 37, 39 et 58 de la Loi n° 1 . 299 du 15 juillet 2005 sur la liberté d'expression publique, ainsi que par les articles 26 et 41 à 43 du Code pénal,
- constaté le désistement de la partie civile sur les faits du 8 février 2018,
- déclaré c. H. irrecevable en son action pour les propos « sale petite dictature [...] où la corruption et les réseaux ont le pouvoir »,
- déclaré f. M. coupable d'avoir à Monaco, le 25 janvier 2018 commis sur la page publique du réseau social F intitulée « f. M. » des faits de diffamation publique au préjudice de c. H. à raison de ses fonctions ou de sa qualité de fonctionnaire public, de dépositaire ou d'agent de l'autorité publique, par une allégation ou une imputation d'un fait qui porte atteinte à son honneur ou à sa considération, en écrivant : « sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés »,
- relaxé f. M. pour le surplus de la prévention,
en répression, faisant application des articles visés par la prévention, et de l'article 392 du Code pénal,
- condamné f. M. à la peine de CINQ MILLE EUROS D'AMENDE,
- rejeté la demande du prévenu concernant l'abus de constitution de partie civile,
- reçu c. H. en sa constitution de partie civile,
- déclarant c. H. partiellement fondé en sa demande, condamné f. M. à lui payer la somme de 7.000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice,
- condamné, enfin, f. M. aux frais.
f. M. prévenu, a interjeté appel de cette décision par acte de greffe en date du 24 novembre 2020.
Le Ministère public a interjeté appel, à titre incident, de ladite décision le 25 novembre 2020.
Considérant les faits suivants :
Le 14 février 2018, c. H. déposait plainte entre les mains du Procureur général pour violation du secret de l'instruction et diffamation publique ; le plaignant visait une page d'un compte du réseau social F intitulé « f. M.» en date du 25 janvier 2018, dont les déclarations et commentaires avaient été constatés par Maître Patricia GRIMAUD-PALMERO, Huissier de Justice, selon procès-verbal du 25 janvier 2018.
Ce post se présentait comme suit :
« Des nouvelles du front, pour ceux que ça intéresse.
Peu avant Noel, répondant à la sonnette chez moi le matin, j'ai trouvé huit flics dans le couloir.
La suite : je suis interpellé, placé en garde à vue, embarqué, on perquisitionne mon cabinet et mon appartement, on saisit mes téléphones, mes ordinateurs personnels et professionnels.
On copie le disque dur de mon cabinet et on s'empare de correspondances relevant du secret professionnel.
Ainsi, certains policiers parmi lesquels M. c. H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de le penser, de corruption, sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés.
L'espace d'un instant, au début, j'avoue que j'ai eu la trouille, sachant que je n'ai strictement rien à me reprocher, j'ai repensé à mon pote D. M. dans la voiture duquel les policiers avaient placé un sac de cocaïne.
C'est parti me dis-je, ils t'ont monté un bastringue, un truc bien gras à base de drogue ou de blanchiment.
Jusqu'à ce qu'on m'annonce le motif de ces civilités : je suis soupçonné de recel de violation du secret de l'instruction (en clair j'ai trop parlé donc) ... auquel les avocats ne sont pas soumis à Monaco !
J'avoue les avoir alors traités de pitres, mais j'ai quelques excuses.
Au final, je n'ai même pas été inculpé et pour être franc, la réaction des magistrats m'a vraiment rassuré, surtout ceux de la Cour d'Appel qui m'ont fait part de leur « trouble » dans des termes que je n'oublierai pas.
C'est ce qu'il y a de rassurant dans cette affaire, la réaction du corps judiciaire à titre d'exemple, les deux juges d'instruction, Monsieur L. et Monsieur R. ont refusé de procéder à cet acte éminemment critiquable
Reste un tout petit nombre de tristes sires. l. A. Le procureur général D. et le commandant K. sorte de brute picaresque et sans nuance qui passe à la police pour une éminence grise, sans compter un Confrère, G. franc-maçon lui aussi puisque l'on me souffle que cette opération se serait décidée en loge.
Voilà Monégasques ce qu'est devenu votre pays, une sale petite dictature où la violence peine à se dissimuler derrière une apparence de légalité et où la corruption et les réseaux ont le pouvoir, jusqu'à ce que nous devenions une Principauté d'oligarques, Monacov, en quelque sorte.
Car si je résume la situation, les policiers dont la presse ont révélé qu'ils travaillaient en réalité pour d. R. n'ont jamais fait l'objet de la moindre enquête disciplinaire, sans parler de sanction, mais on place en garde à vue l'avocat de leur victime !!!
Ils ont juste oublié un truc, maintenant la balle est dans mon camp ».
Le 3 avril 2018, le Procureur général notifiait à c. H. sa décision de classer sa plainte sans suite ; il estimait, concernant le délit de violation du secret de l'instruction, que le plaignant n'avait pas qualité pour agir de ce chef, en raison de l'absence de préjudice et que f. M. ne révélait pas le contenu des actes de police judiciaire dont il avait été l'objet.
Ce magistrat faisait valoir qu'ayant été personnellement mis en cause dans la publication sur le réseau social F du 25 janvier 2018, il ne donnait pas suite à la plainte, « en vue de respecter la règle de l'impartialité objective telle que définie par la cour européenne des droits de l'homme dans son interprétation de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme ». c. H. était dès lors invité à citer l'intéressé directement devant le Tribunal correctionnel ou à se constituer partie civile devant le juge d'instruction.
Le 7 juin 2018, c. H. déposait plainte avec constitution de partie civile pour diffamation publique.
Le 28 septembre 2018, le Procureur général délivrait des réquisitions aux fins d'informer contre personne non dénommée du chef de diffamation publique.
Il était procédé à l'audition de la partie civile, le 27 novembre 2018 qui confirmait au juge d'instruction qu'il n'y avait de propos diffamatoires que dans la publication ou « post » du 25 janvier 2018 et non dans un post du 8 février 2018.
Les allégations ou imputations retenues dans la prévention étaient précisées par la partie civile comme étant les suivantes :
« certains policiers parmi lesquels Monsieur H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de penser, de corruption »
« sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés »
« les policiers dont la presse ont révélé qu'ils travaillent en réalité pour d. R. »
« sale petite dictature »
« où la corruption et les réseaux ont le pouvoir ».
Convoqué les 24 janvier et 7 février 2019, f. M. ne se présentait pas devant le juge d'instruction. Il était inculpé pour diffamation publique, le 12 mars 2019.
Il était interrogé le 2 avril 2019 et il reconnaissait être le titulaire du compte sur le réseau social F intitulé « f. M. » ainsi que l'auteur du post du 25 janvier 2018.
f. M. estimait que ces propos n'étaient pas diffamatoires : la publication ou « post » litigieux ne contenant selon lui aucune contre-vérité. A titre probatoire, il sollicitait le versement de la copie du rapport d'expertise en téléphonie en date du 31 mai 2018 du dossier pénal numéro XX. Ce rapport était versé au dossier le 27 juin 2019.
La partie civile sollicitait également, sans opposition du prévenu, le versement de l'intégralité des pièces de l'instruction ouverte des chefs de violation du secret de l'instruction et de recel du secret de l'instruction (CAB1-2017/000025). Ces pièces étaient versées au dossier le 27 juin 2019.
Après que les avis de dépôt au greffe aient été rendus le 23 août 2019, le conseil de c. H. a sollicité, le 2 septembre 2019, l'audition de son client, puis a fait savoir que celle-ci était sans objet et a produit un nouveau constat d'huissier en date du 7 septembre 2018 aux fins d'éventuelles réquisitions supplétives visant des faits nouveaux. Du fait de la prescription énoncée par l'article 59 de la Loi n° 1.299 du 15 juillet 2005, le Ministère public ne délivrait aucune réquisition supplétive.
Aux termes d'une ordonnance du magistrat instructeur en date du 27 avril 2020, f. M. a été renvoyé par devant le Tribunal correctionnel, sous la prévention :
« D'avoir à Monaco, les 25 janvier et 8 février 2018, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, par tout moyen de communication au public par voie électronique, en l'espèce sur la page du réseau social F intitulée » f. M. « ouverte au public, diffamé Monsieur c. H. à raison de ses fonctions ou de sa qualité de fonctionnaire public et de dépositaire ou d'agent de l'autorité publique, par une allégation ou une imputation d'un fait qui porte atteinte à son honneur ou à sa considération, en l'espèce en publiant les propos suivants :
« certains policiers parmi lesquels Monsieur H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de penser, de corruption, sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés »
« les policiers dont la presse ont révélé qu'ils travaillent en réalité (SIC) pour d. R. »
« sale petite dictature »
« où la corruption et les réseaux ont le pouvoir »
DÉLITS prévus et réprimés par les articles 15, 16 21 alinéa 1, 23, 26, 27, 35, 36, 37, 39 et 58 de la Loi n° 1.299 du 15 juillet 2005 sur la liberté d'expression publique et 26 du Code pénal ».
À l'audience tenue devant le Tribunal correctionnel, le conseil du prévenu a déposé des conclusions aux fins d'être renvoyé des fins de la poursuite, de débouter c. H. de l'intégralité de sa demande et de condamner celui-ci à lui payer 10.000 euros en application de l'article 391 du Code de procédure pénale.
c. H. s'est constitué partie civile et a demandé au Tribunal, par l'intermédiaire de son conseil, la condamnation du prévenu à lui payer la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts.
Par jugement contradictoirement rendu le 18 novembre 2018, le Tribunal correctionnel a :
- constaté le désistement de la partie civile sur les faits du 8 février 2018,
- déclaré c. H. irrecevable en son action pour les propos « sale petite dictature [...] où la corruption et les réseaux ont le pouvoir »,
- déclaré f. M. coupable d'avoir à Monaco, le 25 janvier 2018 commis sur la page publique du réseau social F intitulée « f. M. » des faits de diffamation publique au préjudice de c. H. à raison de ses fonctions ou de sa qualité de fonctionnaire public, de dépositaire ou d'agent de l'autorité publique, par une allégation ou une imputation d'un fait qui porte atteinte à son honneur ou à sa considération, en écrivant : « sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés »,
- relaxé f. M. pour le surplus de la prévention,
- condamné f. M. à la peine de 5.000 euros d'amende,
- rejeté la demande du prévenu concernant l'abus de constitution de partie civile,
- reçu c. H. en sa constitution de partie civile, le déclarant partiellement fondé en sa demande, a condamné f. M. à lui payer la somme de 7.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice,
- condamné, enfin, f. M. aux frais.
Pour statuer ainsi, le Tribunal correctionnel a considéré :
I/ Sur les propos : « sale petite dictature [...] où la corruption et les réseaux ont le pouvoir », qu'ils ne visaient aucune personne en particulier, mais constituaient un jugement de valeur.
II/ Sur les propos :
« ainsi, certains policiers parmi lesquels M. c. H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de le penser, de corruption, sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés »
« si je résume la situation, les policiers dont la presse ont révélé qu'ils travaillaient en réalité pour d. R. n'ont jamais fait l'objet de la moindre enquête disciplinaire, sans parler de sanction, mais on place en garde à vue l'avocat de leur victime !!! »,
que ceux-ci sont diffamatoires envers c. H. mais que f. M. se prévalait valablement du fait justificatif de bonne foi au sens de la loi sur la liberté d'expression publique, c'est-à-dire en réunissant en l'espèce les quatre critères cumulatifs nécessaires en la matière, soit la légitimité du but poursuivi par ces publications, l'absence d'animosité personnelle envers la partie civile, une certaine prudence dans l'expression et une base factuelle suffisante et sérieuse.
III/ Sur les propos « sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés », que ceux-ci sont diffamatoires envers c. H. et que f. M. ne démontrait pas à suffisance sa bonne foi.
Les premiers juges ont estimé que la base factuelle n'était pas suffisante et sérieuse, le dossier d'information judiciaire n° CAB2-2017/000025, versé au présents débats, permettant de constater le placement sous scellés des objets saisis tant à son domicile qu'à son cabinet d'avocat-défenseur, outre le fait que la perquisition décrite dans la publication litigieuse avait été menée par un magistrat instructeur, en présence du Bâtonnier de l'Ordre des avocats-défenseurs et avocats de Monaco ainsi que d'un expert en informatique.
De plus, les premiers juges ont estimé que la présentation de cette perquisition faisait l'objet d'une dénaturation volontaire, d'une présentation tendancieuse, exclusive de toute prudence, de mesure et donc de bonne foi.
f. M. a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe du 24 novembre 2020. Le Ministère public a formé appel incident le 25 novembre 2020. c. H. n'a pas relevé appel de ce jugement.
Aux termes de conclusions en date des 19 mars 2020 f. M. sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré c. H. irrecevable en son action pour les propos « sale petite dictature [...] où la corruption et les réseaux ont le pouvoir » et l'a relaxé pour les propos « certains policiers parmi lesquels M. c. H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de penser, de corruption » et « les policiers dont la presse a révélé qu'ils travaillent en réalité pour d. R. ».
Il poursuit l'infirmation du surplus du jugement, sollicite son renvoi des fins de la poursuite, le débouté de l'intégralité des demandes de c. H. et sa condamnation au paiement d'une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 391 du Code de procédure pénale.
À l'appui de ses demandes, il rappelle des éléments du contexte dans lequel la perquisition décrite dans la publication litigieuse a eu lieu. Ainsi, f. M. fait état de la plainte pénale de d. R. le 12 janvier 2015 à l'encontre d y. B. et de t. R. par l'intermédiaire desquels le plaignant avait acquis un certain nombre d'œuvres d'art, dans des conditions qu'il avait estimé frauduleuses. Une première information judiciaire avait été ouverte le 24 février 2015 (CAB1-2015/000004), dans le cadre de laquelle y. B. et t. R. avaient été inculpés. Dans ce même cadre, t. B. avocate de d. R. avait réalisé un enregistrement audio d'une conversation tenue par t. R. dans un but probatoire.
Mise au courant, cette dernière avait déposé plainte et une information judiciaire pour violation de la vie privée avait été ouverte à Monaco (CAB2-2015/20). Au titre des investigations menées dans ce dossier, le magistrat instructeur avait saisi le téléphone portable de t. B. support de l'enregistrement de la conversation litigieuse et avait fait procéder à une expertise de son contenu. Celle-ci a mis au jour un certain nombre de messages types SMS révélant de nombreux échanges entre t. B. et diverses personnalités publiques de Monaco, dont des membres de la Sûreté publique, en particulier c. H. L'expert avait déposé son rapport au mois de juillet 2017 et suite à la parution dans la presse du contenu de certains SMS, une information judiciaire avait été ouverte contre X des chefs de violation du secret de l'instruction et de recel de ce délit, le 27 septembre 2017 (CAB2-2017/000025). C'était dans le cadre de cette dernière information judiciaire que la perquisition décrite par f. M. dans la publication litigieuse avait eu lieu.
f. M. fait valoir, au plan juridique, que les critères de la bonne foi doivent être appréciés souplement, les exigences imposées notamment aux professionnels de l'information, tels les journalistes, ne pouvant pas s'appliquer à des propos tenus par des avocats ou de simples citoyens. De plus, il ne serait pas réaliste d'exiger la même distance et la même objectivité que celle d'un tiers, lorsqu'une personne témoigne de son propre vécu, notamment pour relater une affaire judiciaire qui la concerne.
Ainsi, il estime que le Tribunal correctionnel a fait une juste application de ces critères, s'agissant des chefs de prévention pour lesquels il a été relaxé.
Pour le chef de condamnation, il estime que son propos véhicule une information relative à une erreur procédurale, dont la faute est imputable aux enquêteurs ayant procédé à la perquisition, à laquelle c. H. ne participait pas. La publication ne renfermerait en outre aucune atteinte à l'honneur ou à la réputation de c. H. dans la mesure où en tant que chef de la police judiciaire il serait normal que celui-ci soit en mesure d'accéder aux documents se trouvant dans les locaux de la Sûreté publique dans le cadre d'une enquête pénale. Enfin, le prévenu exprimerait sa crainte à l'idée que c. H. puisse faire un usage malveillant des documents qui sont à sa disposition.
Le conseil de f. M. a repris oralement la teneur de ces conclusions à l'audience du 19 avril 2021.
Par conclusions en date du 9 avril 2021, le Ministère public a requis la confirmation du jugement du Tribunal correctionnel du 18 novembre 2020 en toutes ses dispositions, s'agissant de la déclaration de culpabilité et de la relaxe pour le surplus de la prévention. Il a réservé ses réquisitions sur la peine à l'audience.
Il fait valoir que les propos litigieux sont placés en fin de la description que fait f. M. du déroulement des perquisitions à son cabinet et à son domicile, qui sont intervenues le 12 décembre 2017, en présence du magistrat instructeur et de son greffier. Il ne serait pas contesté que les éléments saisis avaient été immédiatement placés sous scellés, aucun incident n'étant relevé, notamment par le Bâtonnier présent et au demeurant f. M. avait signé les procès-verbaux afférents, sans aucune observation.
Les propos du prévenu auraient pour base une fausse allégation originaire prouvée, puisque les éléments informatiques saisis avaient bien été placés sous scellés. Par son propos, le prévenu insinuerait que c. H. ne se borne pas à détenir une copie de disque dur mais bien le produit d'une extraction des données dudit disque. Sans même qu'il y ait lieu d'examiner si f. M. laisse supposer à ses lecteurs que c. H. ait participé personnellement aux perquisitions et aux saisies, le seul fait de laisser entendre qu'il puisse détenir copie d'un disque dur et de l'importation des données qu'il contenait suffirait à caractériser une atteinte à l'honneur et à sa réputation, s'agissant notamment d'un manquement aux dispositions de l'article 100 du Code de procédure pénale, voire d'une infraction pénale de recel de violation du secret de l'instruction et du secret professionnel ou de recel de violation d'atteinte à la vie privée.
Cet élément acquis, f. M. ne pourrait être considéré comme de bonne foi, le prévenu, professionnel du droit et intervenant en droit pénal, ne pouvant se méprendre sur le caractère inexact de ses affirmations. D'autre part, la prudence dans l'expression ferait défaut, notamment parce qu'à titre d'avocat il est tenu à la rigueur.
Le Ministère public réitérait les termes de ses conclusions à l'audience, ajoutant que c. H. était le seul policier nommément cité et, sur la peine, sollicitait le prononcé d'une amende d'un montant de 7.000 euros, dont 2.000 euros assortis du sursis.
À l'audience tenue le 19 avril 2021, le prévenu a eu la parole en dernier.
SUR CE,
Attendu que les appels, principal de f. M. et incident du Ministère public, relevés dans les délais et formes prescrits par les articles 406 et 411 du Code de procédure pénale, sont réguliers et recevables ;
Attendu que si le Ministère public a conclu, postérieurement à sa déclaration générale d'appel, à la confirmation du jugement sur la relaxe partielle prononcée, la Cour n'est nullement saisie d'un appel parte in qua, si bien que tous les chefs du jugement querellé doivent être analysés ;
Sur l'action publique :
Attendu qu'aux termes de l'article 21 de la Loi n° 1.299 du 15 juillet 2005 modifiée sur la liberté d'expression publique toute allégation ou imputation d'un fait déterminé qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne, d'un groupe de personnes liées par la même appartenance au sens de l'article 24 ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation ;
Que l'article 23 de la même loi prévoit l'incrimination et la répression de la diffamation commise à l'encontre d'un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l'autorité publique, par l'un des moyens énoncés à l'article 15 du même texte ;
Qu'à ce titre l'article 15 fait état de tout moyen de communication au public par voie électronique ou de tout moyen de communication audiovisuelle et en l'espèce la communication par le biais d'internet via le réseau social F, par le moyen de publications ou « posts » accessibles à tous entre dans le champ d'application de ce texte ;
Attendu en l'espèce que tant au cours de l'information judiciaire qu'à l'audience f. M. a toujours reconnu être le titulaire du compte portant son nom sur le réseau social, sous le mode d'un « profil ouvert » c'est-à-dire accessible à toute personne souhaitant le consulter sans avoir préalablement à être acceptée comme « ami » par le titulaire du compte ; qu'il affirme également de manière constante être l'auteur et le rédacteur des propos litigieux ;
I/ Sur les faits du 8 février 2018 :
Attendu qu'aux termes de l'article 56 de la Loi n° 1.299 du 15 juillet 2005, modifiée, sur la liberté d'expression publique, dans tous les cas de diffamation ou d'injure, le désistement du plaignant arrête la poursuite ; que cette règle spéciale déroge en la matière à la règle générale énoncée par l'article 4 du Code de procédure pénale qui dispose que la renonciation à l'action civile ne peut arrêter ni suspendre l'exercice de l'action publique ;
Que la disposition du jugement du Tribunal correctionnel relative au désistement de c. H. s'agissant d'une publication en date du 8 février 2018 n'est pas remise en cause par les parties, que tant la régularité que le caractère certain et explicite de ce désistement ne sont pas contestés et qu'en conséquence la décision déférée sera confirmée de ce chef ;
II/ Sur les propos : « sale petite dictature [...] où la corruption et les réseaux ont le pouvoir » :
Attendu que comme l'ont à bon droit relevé les premiers juges, ces propos ne visent pas une personne en particulier et notamment pas c. H. mais constituent, en conclusion de la publication litigieuse, l'appréciation, certes véhémente mais qui se veut la résultante des constats du prévenu, sur l'état général des libertés publiques dans son pays ;
Que les éléments constitutifs de l'infraction de diffamation publique ne sont donc pas réunis de ce chef ;
Attendu que le plaignant n'a pas mis en mouvement l'action publique par le biais de la citation directe devant le Tribunal correctionnel, mais que les juridictions du fond ont été saisis par ordonnance de renvoi du magistrat instructeur ; que de plus, le plaignant n'étant pas une administration publique ou une personne morale, dont le défaut de délibération, au sens de l'article 42 de la Loi n° 1.299 du 15 juillet 2015 ou de pouvoir au sens de l'article 46 du même texte pourrait entrainer l'irrecevabilité, il n'y a pas lieu de constater une fin de non-recevoir ;
Qu'il convient de vider la saisine au fond des juridictions, par voie de réformation de ce chef, en prononçant la relaxe de f. M. pour ces propos ;
III/ Sur les propos :
« Ainsi, certains policiers parmi lesquels M. c. H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de le penser, de corruption, (sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés) »
« si je résume la situation, les policiers dont la presse ont révélé qu'ils travaillaient en réalité pour d. R., n'ont jamais fait l'objet de la moindre enquête disciplinaire, sans parler de sanction, mais on place en garde à vue l'avocat de leur victime !!! » :
Attendu que les premiers juges ont valablement relevé que ces propos visent une personne déterminée, en l'espèce c. H. et imputent des faits déterminés portant atteinte à son honneur et sa considération ; qu'au demeurant f. M. ne conteste pas le caractère diffamatoire de ces formulations, mais a entendu voir sa relaxe prononcée du fait de sa bonne foi, entendue au sens du droit pénal spécial dans le domaine de l'expression publique ;
Que ce sur point, c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le Tribunal a indiqué que les propos s'inscrivaient dans un débat d'intérêt général à Monaco, caractérisant un but légitime, dans la mesure où les procédures judiciaires suscitées ont connu un certain retentissement ;
Que les premiers juges ont également à bon droit relevé que les allégations de collusion et de corruption, sous une forme dubitative pour cette dernière, reposaient sur une base factuelle suffisante ; qu'en effet, si la bonne foi ne peut être déduite de faits postérieurs à la diffusion des propos litigieux, les décisions de justice cités par le Tribunal correctionnel (arrêt de la Chambre du conseil de la Cour d'appel du 12 décembre 2019 et arrêt afférent de la Cour de révision du 8 juillet 2020) sont ultérieures à la publication litigieuse mais portent des qualifications juridiques sur des faits et évènements antérieurs à ladite publication ;
Qu'ainsi, dans la procédure d'information judiciaire n° 2015/000004, ouverte le 24 février 2015 l'arrêt de la Cour de révision du 8 juillet 2020 énonce :
« Mais attendu qu'ayant retenu que l'ensemble des investigations avaient été conduites de manière partiale et déloyale dans des conditions qui ont gravement et durablement compromis l'équilibre entre les parties, y compris après la saisine du juge d'instruction auquel avaient été dissimulé l'existence et l'intensité des relations qui ont persisté entre l'avocat des parties civiles, les enquêteurs et le procureur général, ce dont il résulte que chacun des actes d'enquête puis de l'instruction a, en lui-même, été entaché par les manquements qui ont affecté de façon continue et diffuse la procédure, la chambre du conseil a légalement justifié sa décision » ;
Que cette juste appréciation de premiers juges s'applique également s'agissant de la mesure dans l'expression, puisque si le ton est vif, f. M. s'exprime en l'espèce tant en nom personnel, comme justiciable faisant l'objet d'un acte d'enquête coercitif, qu'en qualité d'avocat d y. B. dont il était le conseil tant le 12 décembre 2017, jour de la perquisition relatée, que le 25 janvier 2018 lors de la diffusion du post litigieux et qu'il a entendu par une publication engagée exprimer ses doutes quant à la possibilité d'exercer pleinement sa mission aux intérêts de son client ;
Attendu en conséquence qu'il y a lieu de confirmer la relaxe prononcée de ces chefs par le jugement rendu le 18 novembre 2020 par le Tribunal correctionnel ;
IV/ Sur les propos : « sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés » :
Attendu que ces propos ciblés par la prévention, doivent être lus à la lumière de la phrase dans laquelle ils s'insèrent c'est-à-dire « Ainsi certains policiers parmi lesquels Monsieur H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de le penser, de corruption, sont maintenant en possession de mes dossiers, puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés » ;
Que pour caractériser l'infraction de diffamation envers c. H. il convient de déterminer s'il existe à son égard l'imputation d'un fait déterminé portant atteinte à l'honneur ;
1/ Qu'il convient en premier lieu de rechercher si l'absence alléguée de placement sous scellés d'une copie de disque dur, ce qui constitue a minima une erreur procédurale, peut être considérée comme imputable au plaignant, peu important à ce stade la fausseté de l'affirmation, le débat à cet égard n'intervenant qu'au stade de l'exceptio veritatis, non invoquée en l'espèce, ou de la base factuelle suffisante constitutive de la bonne foi ;
Qu'en premier lieu, il ressort de la copie de la procédure d'information judiciaire n° CAB2-2017/000025 versée aux débats (notamment les cotes D64, D78, D79, D80, mentionnant le nom des enquêteurs présents) que c. H. n'a pas participé aux perquisitions menées le 12 décembre 2017, ce qu'aucune des parties ne conteste au demeurant ;
Que la formulation de la publication est certes véhémente et la relation des faits partielle en ce qu'elle passe sous silence la présence au cours des perquisitions du magistrat instructeur et du Bâtonnier de l'Ordre, garantie supplémentaire pour les droits de la défense, non prévue en droit positif interne et que le juge d'instruction a pourtant entendu mettre en œuvre ; que cette omission, nécessairement volontaire de la part d'un professionnel du droit, occulte la direction par ce magistrat des actes d'information judiciaire et amène le lecteur à penser que les enquêteurs ont pu procéder avec une large marge d'appréciation en dehors de tout contrôle ;
Que pour autant, c. H. n'est pas expressément visé dans la publication comme ayant participé aux perquisitions et qu'il n'est pas le seul policier désigné nommément puisqu a K. est également cité plus loin dans le post ;
Que l'énonciation explicite du nom de c. H. distingué des autres (« certains policiers ») se rattache surtout au fait que celui-ci, aux termes du rapport d'expertise du téléphone de t. B. a été identifié comme un interlocuteur privilégié de cette dernière, d'où les formulations de « collusion et il y a tout lieu de le penser, de corruption » employées en incise dans la phrase, uniquement à son égard ;
Qu'en conséquence, il n'est pas démontré que le lecteur ne peut qu'immanquablement déduire des formulations employées que c. H. serait impliqué dans une erreur de procédure ou un détournement de celle-ci au cours des perquisitions menées le 12 décembre 2017 ;
2/ Attendu qu'en second lieu, il convient d'envisager si peut être considérée comme diffamatoire l'allégation d'être « en possession de [mes] dossiers » employée par f. M. et imputée expressément à c. H. parmi « certains policiers » ;
Que l'emploi du présent de l'indicatif indique au lecteur qu'il existe un libre accès à ses données, du fait de l'existence alléguée d'une copie du disque dur hors procédure ;
Que la publication ne fournit pas d'autre élément et laisse le lecteur réaliser des déductions ;
Attendu que l'imputation ou l'allégation constitutive de l'infraction peut être caractérisée nonobstant les éventuelles précautions dont fait preuve un prévenu, par l'emploi notamment de propos sibyllins, de sous-entendus, d'ambivalences ou de naïveté feinte ;
Qu'en d'autres termes un propos peut être qualifié de diffamatoire même s'il est présenté par voie d'insinuation ;
Mais attendu également que pour que tel soit le cas encore faut-il que l'appréciation du lecteur soit irrémédiablement biaisée et qu'aucun doute raisonnable quant à l'interprétation des propos litigieux ne soit possible ;
Qu'en l'espèce une telle situation n'est pas caractérisée, puisqu'il ne peut être déduit de manière univoque des propos de f. M. qu'une extraction de données a été ou va être réalisée, pour un usage dévoyé ; que de même, il n'est pas prêté à c. H. un élément intentionnel d'une infraction de recel ;
Que la formulation manifeste uniquement une crainte qu'une telle violation de règles procédurales et déontologiques soit réalisée ; qu'une telle inquiétude apparait cohérente avec d'une part, le sentiment dont l'auteur de la publication fait état s'agissant des relations occultes mises au jour entre les enquêteurs et une partie civile opposée au client qu'il défend et d'autre part, le fait qu'au moment des perquisitions et de la publication, c. H. était encore à la tête de la Division de police judiciaire au sein de la Sûreté publique, son inculpation n'étant intervenue que le 8 novembre 2018, selon le procès-verbal de première comparution produit aux présents débats ;
Attendu en conséquence que l'élément matériel de l'infraction de diffamation publique n'est pas constitué et que, par voie de réformation du jugement querellé, la relaxe de f. M. doit être prononcée de ce chef ;
Sur l'action civile :
Attendu que du fait de la relaxe il y a lieu à infirmation de la condamnation civile de f. M. à payer une somme de 7.000 euros à c. H. au titre du préjudice subi par l'infraction ;
Attendu comme indiqué que c. H. n'est pas appelant du jugement rendu par le Tribunal correctionnel le 18 novembre 2020 et qu'il n'avait pas articulé d'argumentation fondée sur les dispositions de l'article 392 du Code de procédure pénale ;
Qu'en conséquence il y a lieu au débouté des demandes présentées par c. H.;
Sur les demandes fondées sur les dispositions de l'article 391 du Code de procédure pénale et les frais :
Attendu que f. M. fonde sa demande en paiement d'une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts sur les éléments suivants :
- malgré la décision initiale de classement sans suite du Parquet général, c. H. a déposé une plainte avec constitution de partie civile,
- sur les imputations de collusion et de possible corruption, c. H. ne pouvait ignorer la réalité mais au moment où il avait déposé plainte, il espérait peut-être que ses agissements et que la nature de ses contacts avec l'avocate de d. R. ne seraient pas révélés,
- que le plaignant ne pouvait ignorer que la publication ne comportait pas d'imputation de faits le visant,
- qu'il s'agit d'une « procédure bâillon », initiée par une personne pensant jouir d'une impunité, dans le but d'intimider et de dissuader de remettre en cause son intégrité ;
Attendu cependant, de première part, que si c. H. a déposé une plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction le 7 juin 2018 après l'avis de classement sans suite du Parquet général du 3 avril 2018, ce n'est nullement par acharnement procédural, le Ministère public n'ayant pas souhaité exercer l'action publique, non pas parce que l'infraction de diffamation ne lui aurait pas parue constituée, mais uniquement parce que le magistrat occupant les fonctions de Procureur général à cette époque avait été lui-même cité dans la publication litigieuse ;
Que d'autre part, l'intention de nuire de c. H. n'est pas démontrée à suffisance, celui-ci ayant pu légitimement se méprendre sur la portée de ses droits et sur la réunion des éléments constitutifs de l'infraction de diffamation publique, qui a nécessité un débat judiciaire nourri, si bien qu'il ne peut être affirmé que l'exercice de ses droits en qualité de partie civile ait dégénéré en abus ;
Que par ces motifs propres, le jugement du Tribunal correctionnel rendu le 18 novembre 2020 sera confirmé ;
Attendu que les frais, de première instance et d'appel, seront laissés à la charge du Trésor ;
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO, statuant en matière correctionnelle, publiquement et contradictoirement,
Reçoit les appels, principal et incident, formés à l'encontre du jugement rendu le 18 novembre 2020 par le Tribunal correctionnel (R.942),
Sur l'action publique,
Confirme le jugement rendu le 18 novembre 2020 par le Tribunal correctionnel (R.942) en ce qu'il a constaté le désistement de c. H. sur les faits du 8 février 2018 et relaxé f. M. sur les chefs de prévention de diffamation publique envers c. H. à raison de sa qualité de fonctionnaire public pour avoir le 25 janvier 2018 publié sur la page du réseau social F intitulée f. M. les phrases suivantes :
« certains policiers parmi lesquels Monsieur H. surpris en flagrant délit de collusion et, il y a tout lieu de penser, de corruption »
« les policiers dont la presse ont révélé qu'ils travaillent en réalité pour d. R. »,
Le réforme pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Relaxe f. M. des chefs de prévention de diffamation publique envers c. H. à raison de sa qualité de fonctionnaire public pour avoir le 25 janvier 2018 publié sur la page du réseau social F intitulée f. M. les phrases suivantes :
« sale petite dictature où la corruption et les réseaux ont le pouvoir »
« sont maintenant en possession de mes dossiers puisque la copie de mon disque dur n'a pas été placée sous scellés »,
Sur l'action civile,
Confirme le jugement rendu le 18 novembre 2020 par le Tribunal correctionnel (R.942) en ce qu'il a reçu c. H. en sa constitution de partie civile et le réforme en ce qu'il a condamné f. M. à payer à c. H. une somme de 7.000 euros à titre de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau, déboute c. H. de ses demandes en dommages et intérêts,
Confirme le jugement rendu le 18 novembre 2020 par le Tribunal correctionnel (R.942) en ce qu'il a rejeté la demande de f. M. en paiement d'une somme de 10.000 euros à titre de dommage et intérêts pour abus de constitution de partie civile,
Laisse les frais, de première instance et d'appel, à la charge du Trésor ;
Composition🔗
Après débats en audience publique de la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le dix-neuf avril deux mille vingt et un, qui se sont tenus devant Monsieur Sébastien BIANCHERI, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur M. SORIANO, Juge de Paix, Madame Aline BROUSSE, Juge au Tribunal de première instance, complétant la Cour en vertu de l'article 22 de la Loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Procureur général adjoint, assistés de Madame Sandra MILLIEN, Greffier.
Après qu'il en ait été délibéré et jugé, le présent arrêt a été signé .............. par Monsieur Sébastien BIANCHERI, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur M. SORIANO, Juge de Paix, Madame Aline BROUSSE, Juge au Tribunal de première instance, complétant la Cour en vertu de l'article 22 de la Loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires, Magistrats en ayant délibéré et ce en application des articles 58 à 62 de ladite Loi ;
Lecture étant donnée à l'audience publique du six mai deux mille vingt et un par Monsieur Sébastien BIANCHERI, Conseiller, faisant fonction de Président, assisté de Madame Sandra MILLIEN, Greffier, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Procureur général adjoint, et ce en application des dispositions des articles 58 à 62 de ladite Loi.