Cour d'appel, 24 novembre 2020, La SA A c/ Monsieur s. K.
Abstract🔗
Exequatur – Conditions – Violation de l'ordre public (non)
Résumé🔗
Les conditions de reconnaissance en Principauté de Monaco des décisions rendues par les tribunaux étrangers sont régies par les dispositions de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au droit international privé, dont l'article 13 dispose que « les jugements rendus par les tribunaux étrangers et passés en force de chose jugée sont reconnus de plein droit dans la Principauté s'il n'y a pas de motif de refus au sens de l'article 15 ».
Pour refuser l'exequatur sollicité par la SA A les premiers juges ont considéré que celle-ci aurait dû solliciter la motivation de la décision comme le lui permettait le droit suisse et qu'en l'état de l'impossibilité de connaître les causes de la condamnation prononcée il n'est pas établi que le principe du contradictoire et des droits de la défense aient été respectés. Il est manifeste qu'en application des dispositions de l'article 199 du Code de procédure civile monégasque, la minute du jugement doit comprendre, notamment, les motifs de la décision pour chaque chef de la demande. L'exigence de motivation protège le justiciable contre l'arbitraire et permet le contrôle de la motivation dans l'exercice des voies de recours. Elle représente une exigence nécessaire pour s'assurer du caractère équitable du procès qui s'est déroulé devant le juge étranger et fait partie de l'ordre public international de procédure. Le jugement suisse dont l'exequatur est requis en Principauté précise qu'il est rendu dans la cause opposant la SA A à la SA B et K s. à l'issue d'une procédure de « cas clair » prévue par l'article 257 du Code de procédure civile suisse. Les pièces de la procédure établissent les conditions dans lesquelles la décision suisse a été rendue et permettent de constater que la procédure sommaire suivie respecte les droits procéduraux des parties, s'agissant du principe du contradictoire, de la notification des actes, du droit d'obtenir une décision motivée et de l'indication des voies de recours. L'ensemble des documents et des pièces de procédure fournis par l'appelante permettent de s'assurer, par équivalent, que le jugement suisse du 31 janvier 2018 est conforme aux principes fondamentaux du droit processuel et qu'il n'y a pas de contrariété manifeste à l'ordre public atténué monégasque. En conséquence qu'infirmant le jugement déféré, il convient de déclarer exécutoire en Principauté de Monaco le jugement rendu le 31 janvier 2018 par le juge délégué de la Chambre patrimoniale Cantonale de Lausanne (Suisse) entre la SA A d'une part et la SA B et s.K. d'autre part.
Motifs🔗
COUR D'APPEL
ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2020
En la cause de :
- La société A, société anonyme de droit suisse dont le siège social est sis c/o X1 8002 Zurich (Suisse), agissant poursuites et diligences de son Directeur en exercice, Monsieur f D. M. dûment autorisé à représenter la société, domicilié ès-qualité audit siège ;
Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Pierre-Anne NOGHES-DU MONCEAU, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant ledit avocat-défenseur ;
APPELANTE,
d'une part,
contre :
- Monsieur s. K., banquier, domicilié et demeurant à la « X2 », X2à Monaco ;
NON COMPARANT, NI REPRÉSENTÉ
EN PRÉSENCE DE :
Madame le Procureur Général près la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, étant en ses bureaux au Parquet Général, Palais de Justice, 5 rue Colonel Bellando de Castro, 98000 Monaco ;
COMPARAISSANT EN PERSONNE
d'autre part,
LA COUR,
Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 19 décembre 2019 (R.1522) ;
Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Patricia GRIMAUD-PALMERO, huissier, en date du 9 juin 2020 (enrôlé sous le numéro 2020/000117) ;
Vu les conclusions déposées le 20 juillet 2020 par le ministère public ;
À l'audience du 15 septembre 2020, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties, le ministère public entendu ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
La Cour statue sur l'appel relevé par la SA A à l'encontre d'un jugement du Tribunal de première instance du 19 décembre 2019.
Considérant les faits suivants :
Par acte d'huissier de justice du 5 avril 2019, la société anonyme de droit suisse A, fournisseur de prestations de service dans les domaines de l'informatique et d'internet, a fait assigner s. K. devant le Tribunal de première instance afin de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, déclarer exécutoire en Principauté de Monaco le jugement prononcé le 31 janvier 2018 par la Chambre patrimoniale cantonale de Lausanne (Suisse) avec toutes conséquences de droit.
Par jugement réputé contradictoire et avant dire droit du 11 juillet 2019 le Tribunal de première instance a invité la SA A à justifier de l'apostille ou de toute forme de légalisation énumérée à l'article 18 de la loi n° 1.448 relativement au certificat délivré par la première greffière du Tribunal d'arrondissement de Lausanne (Suisse) constatant que cette décision n'est pas susceptible d'appel et est exécutoire en Suisse et a renvoyé pour ce l'affaire au 10 octobre 2019.
Suivant jugement réputé contradictoire du 19 décembre 2019, le Tribunal de première instance a débouté la société de droit suisse A de sa demande tendant à voir déclarer exécutoire sur le territoire de la Principauté de Monaco le jugement rendu le 31 janvier 2018 par la Chambre patrimoniale cantonale de Lausanne (Suisse) JI 17.040961 et a condamné la SA A aux dépens y compris ceux réservés par jugement du 11 juillet 2019.
Pour statuer ainsi les premiers juges ont constaté que la décision dont l'exequatur est requis n'était pas motivée et que la SA A s'était abstenue de requérir la motivation de ce jugement dans les dix jours suivant sa communication comme le prévoit l'article 239 du code de procédure civile helvétique. Ils en ont déduit qu'en l'état de l'impossibilité de connaître les causes de la condamnation prononcée, la décision judiciaire rendue le 31 janvier 2018 par la Chambre patrimoniale cantonale de Lausanne ne pouvait faire l'objet d'un exequatur en Principauté de Monaco.
Par exploit d'assignation délivré le 9 juin 2020, la SA A a relevé appel du jugement du 19 décembre 2019, non signifié.
Aux termes de cet exploit, elle demande à la Cour de :
- déclarer son appel recevable,
- le déclarer fondé,
- réformer le jugement du Tribunal de première instance du 19 décembre 2019,
Statuant à nouveau,
- déclarer le jugement prononcé le 31 janvier 2018 par la Chambre patrimoniale Cantonale de Lausanne (Suisse) exécutoire en Principauté de Monaco, avec toutes conséquences de droit,
En tout état de cause,
- condamner s. K. à lui payer la somme évaluée provisoirement à 10.000 euros à titre de légitimes dommages-intérêts,
- condamner s. K. à tous frais et dépens, lesquels comprendront notamment les frais et accessoires, frais d'huissiers, d'expertises et traductions éventuels dont distraction au profit de Maître Pierre-Anne NOGHES-du MONCEAU, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.
Au soutien de son appel, la SA A fait valoir en substance les éléments suivants :
- le principe de l'obligation de motivation qui s'impose au juge monégasque doit être atténué lorsqu'il s'agit de reconnaître dans l'ordre interne les effets d'une décision étrangère qui présente toutes les garanties du procès équitable,
- en l'espèce, il s'agit de la procédure suisse dite de « cas clairs » qui suppose un état de fait non litigieux ou susceptible d'être immédiatement prouvé, et une situation juridique claire,
- les droits de la SA B et de s. K. ont été respectés, car ils ont eu connaissance par le greffe du Tribunal Suisse de la notification de la requête et ont donc eu la possibilité de répondre à ses arguments,
- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation, dès lors que la décision en cause comporte bien une motivation, dont la communication est dissociée de l'instrumentum puisqu'elle n'est disponible que lorsqu'une demande est formulée selon les dispositions prévues à l'article 239 du Code de procédure suisse,
- un jugement non motivé n'est pas nécessairement contraire à l'ordre public international monégasque si les pièces de la procédure permettent d'établir dans quelles conditions la décision étrangère a été rendue, comme le permet en l'espèce la requête introductive d'instance,
- la loi suisse ne prévoit pas qu'il faille, en vue d'une exécution à l'étranger, solliciter la motivation dans les dix jours de la communication de la décision et la reconnaissance et l'exécution des jugements étrangers sont régies exclusivement par le Code de droit international privé qui ne prévoit pas non plus cette condition,
- il n'y a aucune contrariété manifeste à l'ordre public international monégasque, en sorte qu'elle a bien respecté les règles édictées aux articles 13 et suivants de la loi n° 1.448 relative au droit international privé,
- la résistance manifestement abusive et la mauvaise foi de s. K. justifient sa condamnation à des dommages-intérêts, son comportement l'ayant contrainte à engager des frais pour recouvrer les sommes dues au titre du contrat de prestation de services informatiques.
s. K., assigné par dépôt de la copie de l'exploit à la Mairie de Monaco le 9 juin 2020 selon les formes prévues par l'article 148 du Code de procédure civile, a réceptionné le recommandé le 17 juin 2020 et n'a pas comparu.
Suivant conclusions déposées le 20 juillet 2020, le Procureur général demande à la Cour de réformer le jugement du 19 décembre 2019, de déclarer exécutoire en Principauté de Monaco la décision prononcée le 31 janvier 2018 par la Chambre patrimoniale cantonale de Lausanne et de lui donner acte de ce qu'il s'en rapporte à justice sur le mérite de la demande de dommages-intérêts.
Le ministère public fait valoir que les pièces versées par le conseil de la SA A permettent à la Cour d'exercer un contrôle sur le respect des exigences prévues aux articles 13 et suivants de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 et de démontrer que le jugement suisse n'est pas contraire à l'ordre public monégasque. Il soutient que les premiers juges ont ajouté à ce texte en s'arrogeant le droit de vérifier « l'existence d'éléments probants sur lesquels le juge étranger se serait fondé » et de contrôler les éléments qui lui ont été soumis pour apprécier la cause et qu'ils ont fait une application inexacte des règles de la procédure civile suisse dès lors que l'article 239 du code de procédure suisse dispose que « si la motivation n'est pas demandée, les parties sont considérées avoir renoncé à l'appel ou au recours ».
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.
SUR CE,
1- Attendu que l'appel relevé dans les conditions de fond et de forme prescrites par le Code de procédure civile, est régulier et recevable ;
2- Attendu que les conditions de reconnaissance en Principauté de Monaco des décisions rendues par les tribunaux étrangers sont régies par les dispositions de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au droit international privé, dont l'article 13 dispose que « les jugements rendus par les tribunaux étrangers et passés en force de chose jugée sont reconnus de plein droit dans la Principauté s'il n'y a pas de motif de refus au sens de l'article 15 » ;
Que l'article 15 de ladite loi énonce : « qu'un jugement rendu par un tribunal étranger n'est ni reconnu ni déclaré exécutoire dans la Principauté si :
il a été rendu par une juridiction incompétente au sens de l'article 17 ;
les droits de la défense n'ont pas été respectés, notamment lorsque les parties n'ont pas été régulièrement citées et mises à même de se défendre ;
la reconnaissance ou l'exécution est manifestement contraire à l'ordre public monégasque ;
il est contraire à une décision rendue entre les mêmes parties dans la Principauté ou avec une décision antérieurement rendue dans un autre Etat et reconnue dans la Principauté ;
un litige est pendant devant un tribunal de la Principauté, saisi en premier lieu, entre les mêmes parties portant sur le même objet. »
Qu'il résulte des pièces de la procédure que la SA A a produit les pièces requises par l'article 18 du Code de droit international privé, savoir :
- une expédition authentique du jugement rendu le 31 janvier 2018 par le juge délégué de la chambre patrimoniale cantonale de Lausanne, régulièrement apostillé le 8 mars 2019,
- l'original de l'exploit de signification en Principauté de Monaco à s. K. de la décision suisse,
- le certificat délivré le 24 juillet 2019 par la Première greffière du Tribunal d'arrondissement de Lausanne constatant que cette décision n'est pas susceptible d'appel et est exécutoire en Suisse, Etat d'origine, ce certificat étant revêtu de l'apostille conformément à la Convention de La Haye du 5 octobre 1961 ;
Que les conditions de forme inhérentes aux pièces produites ont donc été respectées ;
Attendu sur le fond de la demande d'exequatur, que par jugement rendu le 31 janvier 2018 en application de l'article 257 du Code de procédure civile helvétique (procédure de « cas clair ») le juge délégué de la chambre patrimoniale cantonale de Lausanne, a :
- dit que les intimés de la SA B et s. K. solidairement entre eux, doivent payer à la SA A le montant de 169.980,55 euros avec intérêts à 18% l'an dès le 1er avril 2017,
- arrêté les frais judiciaires à 800 francs et les a mis à la charge des intimés, solidairement entre eux,
- dit que si la motivation du présent jugement n'est pas demandée, ces frais seront réduits à 640 francs,
- dit que les intimés, solidairement entre eux, rembourseront à la requérante la somme de 800 francs, versée au titre de son avance des frais judiciaires,
- dit que si la motivation du présent jugement n'est pas demandée, le montant à rembourser sera réduit à 640 francs,
- dit que les intimés, solidairement entre eux verseront à la requérante la somme de 3.500 francs à titre de dépens ;
Que ce jugement, rendu sous forme de dispositif et notifié à la requérante la SA A par l'intermédiaire de son conseil ainsi qu'aux intimés de la SA B et s. K. personnellement, précise en outre que les parties peuvent requérir la motivation du jugement dans un délai de 10 jours dès la réception du présent dispositif, à défaut de quoi le jugement deviendra définitif et exécutoire ;
Que pour refuser l'exequatur sollicité par la SA A les premiers juges ont considéré que celle-ci aurait dû solliciter la motivation de la décision comme le lui permettait le droit suisse et qu'en l'état de l'impossibilité de connaître les causes de la condamnation prononcée il n'est pas établi que le principe du contradictoire et des droits de la défense aient été respectés ;
Qu'il est manifeste qu'en application des dispositions de l'article 199 du Code de procédure civile monégasque, la minute du jugement doit comprendre, notamment, les motifs de la décision pour chaque chef de la demande ;
Que l'exigence de motivation protège le justiciable contre l'arbitraire et permet le contrôle de la motivation dans l'exercice des voies de recours ;
Qu'elle représente une exigence nécessaire pour s'assurer du caractère équitable du procès qui s'est déroulé devant le juge étranger et fait partie de l'ordre public international de procédure ;
Que le jugement suisse dont l'exequatur est requis en Principauté précise qu'il est rendu dans la cause opposant la SA A à la SA B et K s. à l'issue d'une procédure de « cas clair » prévue par l'article 257 du Code de procédure civile suisse ;
Qu'aux termes des dispositions de cet article, le tribunal admet l'application de la procédure sommaire lorsque les conditions suivantes sont remplies :
a/ l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé,
b/ la situation juridique est claire ;
Qu'il résulte de l'avis de droit établi par j. C. de la société C de Lausanne que l'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il est incontesté, en ce sens que les faits tels que présentés par le requérant ne sont pas remis en cause par le défendeur, étant précisé que le droit suisse ne permet pas de déduire un état de fait non litigieux du simple défaut du défendeur ;
Que selon cette procédure de « cas clair », les faits doivent être susceptibles d'être immédiatement prouvés, la preuve se faisant essentiellement sur la base de titres ;
Que la requête en cas clair est notifiée au défendeur, qui a alors l'occasion de se déterminer oralement ou par écrit ;
Que s'il présente des moyens, objections ou exceptions qui ne sont pas d'emblée voués à l'échec et qui supposent une administration des preuves complète, le juge doit déclarer irrecevable la demande de protection en cas clair ;
Que la protection dans les cas clairs doit également être refusée lorsque le créancier réclame une indemnité dont la fixation dépend d'une quelconque manière de l'appréciation du juge ou lorsque se pose un problème d'interprétation ;
Que selon l'auteur de l'avis de droit, en matière pécuniaire, les cas susceptibles de faire l'objet d'une protection en raison de leur clarté sont ceux dans lesquels le requérant parvient à pleinement prouver les faits à l'origine de ses prétentions ;
Qu'en l'occurrence, il résulte de la requête du 19 septembre 2017 ( cas clair-procédure sommaire ) adressée à la chambre patrimoniale cantonale de Lausanne par la SA A que les prétentions de celle-ci se fondent sur un plan de paiement valant reconnaissance de dette du 1er décembre 2016 aux termes duquel la SA B et s. K. ont reconnu être débiteurs solidaires d'une somme de 208.489 euros au 1er décembre 2016 ;
Que la requête expose que les débiteurs n'ont respecté que partiellement le plan de paiement en sorte qu'ils restaient solidairement devoir une somme de 169.980,55 euros avec intérêts à 18% l'an dès le 1er avril 2017 ;
Que la SA B et s. K. n'ont formulé aucune exception ou objection motivée à cette requête puisque le juge suisse a poursuivi la procédure de cas clair et a statué le 31 janvier 2018 ;
Qu'en application des dispositions de l'article 239 du Code de procédure civile suisse, lors de la notification, les parties sont informées de leur droit de demander la motivation de la décision dans un délai de 10 jours à compter de la notification, et elles sont considérées avoir renoncé à l'appel ou au recours, si la motivation n'est pas demandée ;
Que selon l'article 311 alinéa 1 du Code de procédure civile les parties disposent d'un délai de 30 jours à compter de la notification de la décision motivée pour faire appel ;
Qu'il ressort des pièces de procédure qu'à la demande du Tribunal cantonal de Lausanne le jugement du 31 janvier 2018 a été réceptionné le 12 février 2018 par la Direction des services judiciaires de Monaco aux fins de signification ou de notification à s. K.;
Que le récépissé de l'acte judiciaire transmis par le Parquet général de Monaco à la Direction de la Sûreté publique aux fins de remise à s. K. daté du 24 avril 2018, fait état d'un constat de carence ainsi libellé : « disons que l'intéressé habite toujours à l'adresse indiquée mais qu'il n'a pu être touché à son domicile et qu'il n'a pas déféré aux convocations motivées qui lui ont été adressées » ;
Que la notification aux parties, du seul dispositif sans motivation écrite n'est pas de nature à porter atteinte à leurs droits procéduraux dès lors qu'elles sont informées de leur droit de demander la motivation de la décision dans un délai de 10 jours à compter de la notification, et qu'elles disposent ensuite d'un délai de 30 jours à compter de la réception de la décision motivée pour faire appel ;
Qu'aucune disposition légale suisse ne fait obligation à une partie de demander la motivation pour solliciter un exequatur ;
Qu'il est par ailleurs admis qu'une décision étrangère qui formellement ne contient pas de motifs peut cependant être reconnue et exécutée si le juge de l'exequatur peut vérifier que la décision étrangère n'est pas contraire à l'ordre public international notamment au moyen des pièces produites ;
Qu'il convient d'observer que la procédure sommaire qui a été appliquée par le juge suisse est réservée aux « cas clairs » tels que décrits ci-dessus, que cette procédure ne peut pas être poursuivie si le défendeur émet une exception ou une contestation ;
Que le juge suisse a été saisi par la requête de la SA A du 19 septembre 2017, qui fonde sa demande en paiement de la somme de 169.980,55 euros avec intérêts à 18% l'an dès le 1er avril 2017 sur le contrat intitulé « plan de paiement valant reconnaissance de dettes » conclu le 1er décembre 2016 entre la SA A, dénommée le fournisseur, et la SA B et s. K. dénommés les débiteurs contrat dûment signé par eux ;
Que ces deux documents, qui sont versés aux débats, contiennent les causes de la condamnation prononcée le 31 janvier 2018 par le juge suisse dans les conditions de la procédure sommaire de l'article 257 du Code de procédure civile sus évoquées et sont de nature à servir d'équivalent à la motivation que les parties n'ont pas souhaité réclamer après qu'elles aient été dûment informées de leur droit de le faire ;
Que les pièces de la procédure établissent les conditions dans lesquelles la décision suisse a été rendue et permettent de constater que la procédure sommaire suivie respecte les droits procéduraux des parties, s'agissant du principe du contradictoire, de la notification des actes, du droit d'obtenir une décision motivée et de l'indication des voies de recours ;
Que l'ensemble des documents et des pièces de procédure fournis par l'appelante permettent de s'assurer, par équivalent, que le jugement suisse du 31 janvier 2018 est conforme aux principes fondamentaux du droit processuel et qu'il n'y a pas de contrariété manifeste à l'ordre public atténué monégasque ;
Attendu en conséquence qu'infirmant le jugement déféré, il convient de déclarer exécutoire en Principauté de Monaco le jugement rendu le 31 janvier 2018 par le juge délégué de la Chambre patrimoniale Cantonale de Lausanne (Suisse) entre la SA A d'une part et la SA B et s. K. d'autre part ;
3- Attendu qu'en application des dispositions de l'article 234 du Code de procédure civile, indépendamment des dépens, des dommages-intérêts pourront être demandés et alloués, conformément à l'article 1229 du Code civil ;
Que la SA A qui n'établit pas la mauvaise foi ou la faute de s. K. dans la présente procédure d'exequatur, doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
4- Attendu que s. K. doit être condamné aux entiers dépens des procédures de première instance et d'appel ;
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,
statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Déclare recevable l'appel,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de première instance le 19 décembre 2019,
Statuant à nouveau,
Déclare exécutoire en Principauté de Monaco le jugement rendu le 31 janvier 2018 par le juge délégué de la Chambre patrimoniale Cantonale de Lausanne (Suisse) entre la SA A d'une part et la SA B et s. K. d'autre part (JI17.040961),
Y ajoutant,
Déboute la SA A de sa demande de dommages-intérêts,
Condamne s. K. aux dépens des procédures de première instance et d'appel, distraits au profit de Maître Pierre-Anne NOGHES-DU MONCEAU, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,
Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,
Composition🔗
Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Madame Françoise CARRACHA, Conseiller, Madame Claire GHERA, Conseiller, assistées de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint,
Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,
Lecture étant considérée comme donnée à l'audience publique du 24 NOVEMBRE 2020, par Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, assistée de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Madame Sylvie PETIT-LECLAIR, Procureur général, le dispositif de la décision étant affiché dans la salle des pas perdus du Palais de justice.