Cour d'appel, 26 mai 2020, Monsieur j-p. SA. et la SAM B. c/ La SAM A.

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Abstract🔗

Contrats et obligations - Contrat de promotion commerciale - Bien-fondé de l'action en paiement (oui) - Constat de l'état de cessation des paiements du débiteur (non)

Résumé🔗

La preuve étant apportée de la créance dans le cadre du contrat de promotion commerciale, il convient de condamner la société débitrice à paiement. La demande du créancier tendant à constater l'état de cessation des paiements de la débitrice est en revanche rejetée, l'existence d'une créance impayée ne suffisant pas à caractériser à elle seule, l'état de cessation des paiements.


Motifs🔗

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 26 MAI 2020

En la cause de :

  • - 1/ Monsieur j-p. SA., né le 27 mai 1946 à Monaco (98000), de nationalité monégasque, expert-comptable, demeurant à Monaco (98000), X1, agissant en qualité de syndic à la liquidation des biens de la société B., société anonyme monégasque, immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco sous le numéro X, dont le siège social se trouvait X2 à Monaco (98000), désigné à cette fonction par jugement du Tribunal de première instance de Monaco en date du 8 janvier 2016 ;

Bénéficiaire de l'assistance judiciaire n° 442-BAJ-16, par décision du Bureau du 29 septembre 2016

  • 2/ La SAM B., société anonyme monégasque, immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco sous le numéro X, dont le siège social se trouvait X2, société en liquidation des biens, représentée par son syndic Monsieur j-p. SA., né le 27 mai 1946 à Monaco (98000), de nationalité monégasque, expert-comptable, demeurant à Monaco (98000), X1, désigné à cette fonction suivant jugement du Tribunal de première instance du 8 janvier 2016 ;

Ayant tous deux élu domicile en l'Étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant ledit avocat-défenseur ;

APPELANTS,

d'une part,

contre :

  • - La SAM A, société anonyme monégasque, immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco sous le numéro X, dont le siège social se trouve X3 à Monaco (98000), prise en la personne de son Président Administrateur Délégué en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉE,

EN PRÉSENCE DE :

  • Madame le Procureur Général près la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, étant en son Parquet Général, au Palais de Justice, 5 rue Colonel Bellando de Castro audit Monaco ;

COMPARAISSANT EN PERSONNE

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 6 décembre 2018 (R. 1419) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Patricia GRIMAUD-PALMERO, huissier, en date du 18 janvier 2019 (enrôlé sous le numéro 2019/000064) ;

Vu les conclusions déposées les 2 avril 2019, 9 juillet 2019 et 26 novembre 2019 par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la SAM A ;

Vu les conclusions déposées les 28 mai 2019 et 8 octobre 2019 par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de Monsieur j-p. SA. et de la SAM B. ;

Vu les conclusions déposées le 10 décembre 2019 par le ministère public ;

À l'audience du 17 décembre 2019, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties, le ministère public entendu ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par Monsieur j-p. SA. et la SAM B. à l'encontre d'un jugement du Tribunal de première instance du 6 décembre 2018.

Considérant les faits suivants :

Le 15 janvier 2013, la SAM B. a conclu avec la SAM A un contrat de promotion commerciale aux termes duquel elle s'engageait à réaliser la promotion et la représentation de produits de la société A., et ceci, en vue de la négociation et de la conclusion de contrats de vente sur le secteur France-DOM-TOM-Monaco.

Le 17 janvier 2013, celles-ci ont conclu un contrat d'information médicale de spécialités pharmaceutiques dont l'objet était, selon l'article 2.1, de « définir les relations contractuelles entre les parties et de décrire les modalités d'exécution des missions de la société B. dans le cadre de la promotion des produits sur le territoire ».

La SAM B. faisant état de difficultés intervenues dans l'exécution de ces contrats et de ce que la SAM A était débitrice d'une somme de 392.958,725 euros correspondant à des factures impayées pour l'année 2015, a assigné par acte en date du 1er décembre 2015, la SAM A. en paiement de la somme de 385.400 euros avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 7 octobre 2015, outre la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 8 janvier 2016, le Tribunal de première instance a constaté l'état de cessation des paiements de la société B., a fixé provisoirement la date de la cessation des paiements au 30 avril 2014 et a désigné j-p. SA. en qualité de Syndic.

j-p. SA. ès-qualités de syndic a repris à son compte la demande en paiement de la société B. en la réduisant à la somme de 356.591,13 euros.

Par jugement en date du 6 décembre 2018, le Tribunal de première instance a statué comme suit :

  • - déboute le Procureur Général de ses demandes de supplément d'information,

  • - accueille j-p. SA. en son intervention volontaire,

  • - constate que j-p. SA., ès-qualités, de syndic de la liquidation des biens de la SAM B., reprend pour son compte l'exploit introductif d'instance du 1er décembre 2015,

  • - déboute la SAM B. et la SAM A. de l'ensemble de leurs prétentions,

  • - condamne la SAM B. aux entiers dépens de l'instance, lesquels seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

Par acte en date du 18 janvier 2019 et par conclusions récapitulatives des 28 mai et 8 octobre 2019, j-p. SA., ès-qualités de syndic de la liquidation des biens de la SAM B. et la SAM B. ont formé appel parte in qua de ce jugement en ces termes :

  • déclarer Monsieur j-p. SA. et la SAM B. recevables en leur appel et le disant bien fondé,

  • débouter la SAM A. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ainsi que des fins de son appel incident,

  • réformer le jugement entrepris en date du 6 décembre 2018 du Tribunal de première instance (R. 1419) en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Monsieur le Procureur Général de ses demandes de supplément d'information, en ce qu'il a accueilli Monsieur j-p. SA. en son intervention volontaire, ès-qualités de syndic à la liquidation des biens de la SAM B., et constaté que ce dernier reprenait pour son compte l'exploit introductif d'instance du 1er décembre 2015, et en ce qu'il a débouté la SAM A. en sa demande reconventionnelle de voir fixer la créance de la SAM A. sur la SAM B. à la somme de 500.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Et ce faisant, ce que les premiers juges auraient du faire,

Statuant à nouveau,

À titre principal,

  • - condamner la SAM A. à payer à la SAM B. la somme de 356.591,13 euros TTC, et ce avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 7 octobre 2015,

  • - condamner la SAM A. à payer à la SAM B. la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive à paiement,

  • - ordonner l'exécution provisoire de la décision intervenir,

À défaut, faute de paiement à la barre à deniers découverts et au premier appel de la cause des sommes réclamées,

  • constater l'état de cessation des paiements de la SAM A. conformément à l'article 408 du Code de commerce préalable désignation au besoin de tel mandataire de justice qu'il plaira au Tribunal, conformément à l'article 411 du Code de commerce afin de recueillir tous renseignements sur la situation de la débitrice et en conséquence,

  • fixer au jour de l'assignation la date de cessation des paiements,

  • désigner tel syndic qu'il plaira conformément à l'article 411 du Code de commerce chargé de suivre la procédure, d'assister ou représenter la requise d'agir au nom et pour le compte de la masse des créanciers,

  • désigner un des juges du Siège en qualité de juge-commissaire conformément à l'article 417 du Code de commerce chargé de suivre la procédure et de contrôler les opérations et actes du syndic,

En tout état de cause,

  • - condamner la SAM A. aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Maître Patricia REY, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

aux motifs essentiellement que :

  • - les engagements de la SAM A. en vue d'un règlement de sa dette contractuelle n'ont pas été respectés,

  • - la SAM A. ne peut pas contester avoir donné son accord sur le montant des sommes dues comme cela ressort d'un courriel du 7 juillet 2015,

  • - la réalité de l'activité facturée en exécution des deux contrats les liant n'est pas contestable,

  • - elle produit plusieurs documents établissant la réalité de sa créance qui correspondent pour l'essentiel à trois factures d'avril et juin 2015,

  • - il appartient à celui qui se prévaut d'une inexécution d'en rapporter la preuve alors que pour sa part, elle n'a pas failli dans le respect de ses obligations contractuelles dès lors qu'elle n'a pas manqué de lui adresser à chaque fin de mois l'ensemble de ses rapports d'activité effectués par plusieurs visiteurs médicaux et réceptionnés par M. V. Directeur général, lequel avait pouvoir pour la gestion courante depuis le 23 novembre 2012,

  • - ce dernier en sa qualité de Directeur général et également d'administrateur, avait le pouvoir pour valider le décompte de créance du 2 septembre 2015 et la démission de Madame P. de ses fonctions d'Administrateur délégué était effective au 10 avril 2015 et non le 27 novembre 2015 comme cela ressort du procès-verbal du conseil d'administration du 27 novembre 2015,

  • - Madame P. n'a accompli aucun acte de gestion à compter du 30 mars 2015 et suite à sa démission, c'est M. V. qui est devenu Administrateur délégué et référait de ces décisions à M. Z. qui était « la voix » ou « la courroie de transmission » de l'administrateur personne morale C. SAM de la SAM A.,

  • - il n'est pas établi que lors des réunions du conseil d'administration de la SAM A. entre 2013 et avril 2015, il ait été fait état de difficultés avec la SAM B.,

  • - le comportement de la SAM A. l'a plongée dans une situation économique très difficile,

  • - la preuve d'une inexécution de ses obligations n'est pas rapportée et la créance dont se prévaut A. reconventionnellement n'est pas justifiée,

  • - la créance invoquée par la SAM A. à son passif a été rejetée à titre provisionnel par ordonnance du juge commissaire en date du 19 décembre 2017 et le Tribunal de première instance saisi a sursis à statuer par jugement du 8 février 2018,

  • - le fait de ne pas avoir réglé la créance exigible réclamée démontre l'état de cessation des paiements de la SAM A. et qui justifie la désignation d'un mandataire de justice conformément à l'article 411 du Code de commerce.

Par conclusions en date du 2 avril 2019 et récapitulatives des 9 juillet 2019 et 26 novembre 2019, la SAM A., appelante incidente, demande à la Cour de :

  • allouer à l'intimée l'entier bénéfice de ses précédentes écritures,

  • débouter la société B. et son syndic Monsieur j-p. SA. des fins de leur appel et assignation en date du 18 janvier 2019 et de toutes conclusions subséquentes,

  • dire et juger que la société A. a valablement soulevé l'exception d'inexécution de sa co-contractante,

  • confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté la société B. de l'ensemble de ses prétentions y compris, outre la demande principale en paiement de factures sans fondement, la demande subsidiaire tendant à voir constater l'état de cessation des paiements de la société concluante qui ne repose sur rien,

  • recevoir la société A. en son appel incident,

  • l'y déclarer bien fondée,

Et statuant à nouveau,

  • - dire et juger que la société A. a subi un préjudice économique du fait de l'inexécution par la société B. de ses obligations contractuelles,

  • - dire et juger que la société A. est en droit de réclamer à ce titre de légitimes dommages-intérêts destinés à réparer ledit préjudice conformément à l'article 1002 du Code civil,

  • - chiffrer le montant de ce préjudice à la somme de 500.000 euros,

Compte-tenu de la mise en liquidation des biens de la société B.,

  • - voir fixer la créance de la société A. sur la société B. à la somme de 500.000 euros à titre de dommages-intérêts,

  • - mettre à la charge de la société B. en liquidation des biens représentée par son syndic Monsieur j-p. SA., les entiers dépens de l'instance distraits au profit de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation, et dire qu'ils seront employés en frais privilégiés de procédure collective,

aux motifs essentiellement que :

  • - l'appelante doit rapporter la preuve de ce qu'elle a exécuté les obligations qui s'imposaient à elle au titre des contrats, de sorte que celle-ci n'est pas fondée à solliciter le paiement d'une rémunération alors qu'elle ne justifie pas de l'exécution de sa contrepartie,

  • - elle a soulevé une exception d'inexécution dès lors que l'appelante a été défaillante dans l'exécution de ses obligations au titre de l'exécution des deux contrats, notamment s'agissant de la remise mensuelle d'un compte-rendu d'activité et de la souscription d'une police d'assurance couvrant sa responsabilité civile,

  • - elle n'a pas reçu les comptes rendus d'activité que le syndic a produit en cours d'instance,

  • - elle n'a jamais accepté un règlement échelonné de la créance réclamée qu'elle a contestée et les décisions prises par Monsieur V. en sa qualité de directeur général de A. n'ont pas engagé cette société,

  • - les factures émises par Madame P. ne sont pas pertinentes eu égard à sa double qualité, d'administrateur des deux sociétés pendant cette période,

  • - Madame P. a établi des factures qu'elle s'adressait à elle-même et qui ne correspondait à rien,

  • - il est démontré que Messieurs Z. et V. n'avaient pas la capacité d'engager la SAM A.,

  • - le courriel de M. Z. du 7 juillet 2015 n'a aucune portée et ne lui est pas opposable,

  • - M. V. qui n'avait aucun pouvoir décisionnel, n'a fait que donner son accord sur des chiffres prévus aux contrats mais à aucun moment n'a reconnu que sa co-contractante avait rempli ses obligations, ni accepté un échéancier,

  • - Madame P. avait bien la qualité d'administrateur délégué pendant la période litigieuse et détenait seule les pleins pouvoirs pour engager cette société tant que sa démission n'avait pas été entérinée,

  • - la lettre adressée le 26 juin 2015 par M. V. à la SAM B. a été dictée par Mme P.

  • - l'état de cessation des paiements n'est pas caractérisé à son égard,

  • - en application de l'article 1002 du Code civil, elle est fondée à réclamer l'indemnisation de l'inexécution fautive des contrats,

  • - les nombreuses défaillances de la SAM B. justifient sa demande indemnitaire.

  • Par conclusions en date du 10 décembre 2019, le Procureur Général sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que les appels régulièrement formés sont recevables ;

Attendu que les dispositions du jugement déféré par lesquelles le Tribunal a débouté le Procureur Général de ses demandes de supplément d'information, a accueilli j-p. SA. en son intervention volontaire et a constaté que j-p. SA., ès-qualités, de syndic de la liquidation des biens de la SAM B., reprenait pour son compte l'exploit introductif d'instance du 1er décembre 2015, ne sont pas appelées par aucune des parties et sont donc définitives ;

Attendu qu'il est constant que la SAM A. représentée par son directeur général, M. Pascal V. et la SAM B. ont conclu deux conventions, l'une le 15 janvier 2013, portant sur un contrat de promotion commerciale aux termes duquel la société B. s'engageait à réaliser la promotion et la représentation de produits de la société A., et ceci, en vue de la négociation et de la conclusion de contrats de vente sur le secteur France-DOM-TOM, Monaco et l'autre, le 17 janvier 2013, relative à un contrat d'information médicale de spécialités pharmaceutiques dont l'objet était, selon l'article 2.1, de « définir les relations contractuelles entre les parties et de décrire les modalités d'exécution des missions de la société B. dans le cadre de la promotion des produits sur le territoire » ;

Que lors de la signature de ces deux contrats, la société A. était représentée par Pascal V. en tant que Directeur Général, agissant conformément à la délibération du conseil d'administration de la société A. du 25 janvier 2013 qui rappelait que le conseil d'administration en date du 23 novembre 2012 lui avait délégué les pouvoirs pour la gestion courante de la société ;

Que si k P. était à cette période administrateur délégué de la société A., la circonstance que celle-ci ait démissionné de ses fonctions par lettre du 31 mars 2015 à effet au 10 avril 2015, n'a pas privé pour autant Pascal V. de la délégation de pouvoirs dont il était titulaire avant d'être nommé par délibération du conseil d'administration du 27 novembre 2015, administrateur-délégué de la société A. en lieu et place de k P. démissionnaire ;

Que Pascal V. disposait d'une délégation de pouvoirs avant et après la démission de k P. en sorte qu'il était habilité à engager financièrement la société A. ;

Attendu que pour exciper de l'existence d'une reconnaissance de dette établie par cette dernière, l'appelante a produit aux débats les pièces suivantes :

  • - un courriel adressé le 7 juillet 2015 par Elie Z. à k P. selon lequel « la société C., actionnaire unique de RD s'engage à payer tous les montants dus et dont nous avons les factures par un échéancier que nous organiserons toi et moi (...) »,

  • - un courriel du 31 août 2015 émanant de S. B. et adressé à k P. faisant état de deux ordres de virement de 25.000 euros et 15.000 euros,

  • - un extrait de compte faisant état d'un solde dû de 277.032,99 euros au 31 décembre 2015,

  • - un récapitulatif des factures émises en 2014 et 2015 édité le 1er septembre 2015 et portant la mention manuscrite attribuée à Monsieur V.« bon pour accord sur la somme indiquée » et un tampon de la société A. ainsi qu'un récapitulatif de la même forme daté du 3 septembre 2015 indiquant un restant dû de 321.043,13 euros à cette date ;

Que par ailleurs, les échanges par courriels qui sont produits, établissent que les parties se sont entendues pour un règlement des sommes dues par la société A. sous la forme d'un échéancier ;

Qu'ainsi, par courriel en date du 2 juillet 2015, Sandrine K. a indiqué à Virginie M. de la société A. : « le tableau des paiements à ce jour - montant à nous régler 406.625,61 euros. Merci de me confirmer votre accord pour les affectations des sommes versées et pour le montant du. » ;

Qu'en réponse, par courriel du 3 juillet 2015, Virginie M. a indiqué « Ok pour moi » ;

Qu'il est constant que des virements ont été effectués par la SAM A. au profit de la SAM B. postérieurement à ces échanges ;

Que dans ces conditions, la mention « bon pour accord » apposée par Pascal V. qui avait qualité pour ce faire pour le compte de la société A. sur le dernier décompte établi par elle, signifie qu'il a reconnu le principe des sommes dues sans avoir émis aucune réserve sur l'accomplissement des prestations de la société B. notamment quant à la transmission des rapports d'activité ;

Que néanmoins, ce décompte global ne permet pas de savoir s'il se rattache à l'exécution des deux contrats en cause et dès lors cette acceptation ne suffit pas à caractériser une reconnaissance des sommes dues dépourvue de toute ambiguïté par la société A. ;

Attendu que par courrier recommandé en date du 30 mars 2015, la société B. a adressé à sa co-contractante une mise en demeure de payer la somme de 227.737,09 euros au titre des factures émises pour l'exercice 2014 ;

Qu'un second courrier recommandé valant mise en demeure de payer a été adressé le 18 juin 2015 à la société A., suivi par un courrier de rupture du contrat de promotion commerciale adressé le 13 août 2015 par k P. ;

Que la société appelante a produit les rapports d'activité de visites médicales des mois de juillet à octobre 2014 et de janvier à mars 2015 ;

Que ces rapports font état de la réalisation de plusieurs centaines de visites pour chacun de ces mois en précisant leur emplacement géographique, leur durée moyenne et leur répartition par spécialités des professionnels concernés ;

Qu'il est également fait mention des dispositions et des attentes des médecins quant aux produits qui leur ont été présentés ;

Que selon l'article 5 du contrat d'information médicale de spécialités pharmaceutiques en date du 17 janvier 2013, la société B. s'est engagée à adresser à sa contractante dans les 15 jours suivants la fin de chaque mois un rapport sur l'activité de ses délégués médicaux comportant les informations relatives à ces visites ;

Que selon l'article 7 du contrat du 15 janvier 2013, la société B. s'est engagée à informer régulièrement la société A. de l'état du marché, des souhaits de la clientèle et des actions de la concurrence ;

Que pour justifier de l'accomplissement de ces obligations, l'appelante se prévaut d'un courriel adressé le 18 mars 2014 à Pascal V. indiquant « comme promis, tu trouveras en pièce jointe le rapport d'activité du mois de février ainsi que le fichier des médecins thérapeutes visités » ;

Que pour le surplus, si la réalité de la transmission de ces rapports est aujourd'hui contestée, dont la copie est néanmoins produite par le syndic, il s'avère qu'à aucun moment, l'intimée n'a fait état de défaillances de son co-contractant à cet égard alors qu'elle a même continué d'effectuer des règlements partiels correspondant à des prestations réclamées au titre de l'exercice 2015 ;

Que le total de la facturation émise à l'égard de la société A. s'établit à hauteur d'un montant de 320.408,57 euros pour la période allant de janvier à juin 2015 ;

Que les prestations facturées se réfèrent à des actes de « promotion et information médicale » (factures du 3 avril 2015, du 16 juin 2015 et du 26 juin 2015) et de « commissions sur promotion commerciale » (facture du 1er septembre 2015) ;

Que le détail de ces factures ne permet pas d'appréhender sur lequel de ces contrats se fondent les sommes facturées, lesquels prévoyaient des modalités distinctes de rémunération ;

Que seules quatre factures sont produites correspondant à celles qui sont demeurées impayées sur l'exercice 2015 pour un montant de 162.408,57 euros ;

Que les décomptes produits par la société B. visent une série de factures émises au cours des années 2014 et 2015 qui ne sont pas versées aux débats en se limitant à produire un extrait de compte du grand livre client reprenant pour l'ensemble des factures et des règlements intervenus avec la société A., ce qui n'apparait pas suffisant pour pallier l'absence de toutes les factures dont il est réclamé le paiement dès lors que celles-ci sont contestées ;

Qu'il convient donc de faire droit à la demande en paiement de la société B. dans la seule limite de 162.408,57 euros ;

Qu'en conséquence, le jugement sera réformé en ce sens ;

Attendu que s'agissant de la créance relative à l'indemnité de résiliation, il est constant que par courrier daté du 13 août 2015, la société B., en la personne de k P. a indiqué à la société A. mettre un terme au contrat de promotion commerciale signé le 15 janvier 2013 avec effet au 31 juillet 2015, cette rupture étant motivée par les nombreux impayés accumulés par le cocontractant ;

Que l'appelante réclame le paiement de la somme de 35.557 euros correspondant au montant de cette indemnité tel que précisé par la société A. selon le courriel adressé par Monsieur V. à Madame K. le 7 septembre 2015 ;

Que l'article 12 du contrat prévoyait qu' « en cas de résiliation, quelle qu'en soit la cause, du présent contrat par la société A. (sauf si cette résiliation est consécutive à une faute grave de la société B.), la société B aura droit à une indemnité de rupture en réparation du préjudice subi. Le montant de cette indemnité est fixé à 18 mois de commission (...) » ;

Que les premiers juges ont justement relevé que cette indemnité de rupture n'était due à la SAM B. que dans l'hypothèse d'une cessation du contrat à l'initiative de la société A. alors qu'il résultait du courrier du 13 août 2015 que la société B. était à l'origine de la rupture du contrat ;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef ;

Qu'enfin, l'appelante n'établit pas en quoi, l'intimée aurait fait preuve d'une résistance abusive à son endroit et a donc été déboutée à juste titre de sa demande de dommages et intérêts formée à l'encontre de la société A. ;

  • Sur la demande de constat de l'état de cessation des paiements de la SAM A.

Attendu qu'aux termes de l'article 408 du Code de commerce : « Toute personne physique ou morale, tout groupement d'intérêt économique qui, exerçant même en fait une activité commerciale, se trouve en état de cessation des paiements, quelle que soit la nature de la créance, est soumis à une procédure collective de règlement du passif. L'état de cessation des paiements est constaté par jugement du tribunal de première instance rendu sur déclaration du débiteur ou sur assignation d'un créancier ou même d'office. En l'absence de ce jugement, la cessation des paiements ne produit aucun effet » ;

Que l'état de cessation des paiements est caractérisé par l'impossibilité manifeste de faire face au passif exigible avec l'actif disponible ou immédiatement réalisable ;

Que si la présente décision établit que l'intimée est redevable d'une créance à l'égard de la SAM B. d'un montant de 162.408,57 euros, l'existence d'une créance impayée devant figurer comme un élément du passif de la SAM A. ne suffit pas à caractériser à elle seule, l'état de cessation des paiements, dont elle demande la reconnaissance, de sorte que le Tribunal l'a justement déboutée de cette demande ;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef ;

  • Sur la demande de la SAM A.

Attendu qu'au soutien de son appel incident, la SAM A. sollicite une indemnisation à hauteur de 500.000 euros en faisant valoir que les sommes qu'elle lui a versées, l'ont été sans contrepartie sur ordre de k P. Administrateur délégué sans que la société B. n'ait exécuté ses prestations ;

Que par courrier en date du 12 février 2016, la SAM A. a produit cette créance à titre chirographaire à la procédure collective ouverte à l'égard de la SAM B. ;

Que par ordonnance en date du 17 décembre 2017, le Juge commissaire de la liquidation des biens de la SAM B. a rejeté à titre provisionnel cette créance ;

Que s'il est constant que la créance dont se prévaut la société B. n'est établie que pour partie, il n'apparait pas justifié de ce que la société B. ait failli à ses obligations au cours de l'intégralité de la période 2013/2015 alors que pendant les deux premières années de relations contractuelles, aucune contestation n'a été formulée malgré le fait que la SAM A. ait été informée des conditions d'exécution du contrat notamment en prenant en compte le courriel précité adressé à Pascal V. le 18 mars 2014 indiquant « comme promis, tu trouveras en pièce jointe le rapport d'activité du mois de février ainsi que le fichier des médecins thérapeutes visités » ;

Qu'au cours de cette période, les émissions de factures et les paiements se sont succédés de façon régulière entre ces partenaires contractuels, alors que k P. occupait des fonctions dirigeantes dans chacune des sociétés sans qu'aucune suspicion sur la bonne exécution des prestations prévues ne soit apparue ;

Qu'en outre, la somme réclamée correspond à une estimation forfaitaire de l'indemnisation au titre d'une inexécution de ses engagements par la SAM B. mais n'apparait pas fondée sur aucun élément probant permettant de caractériser la réalité des manquements, ni la réalité du préjudice allégué ;

Que dès lors, c'est à bon droit que le Tribunal l'a déboutée de sa demande indemnitaire ;

Que le jugement sera confirmé également de ce chef ;

Attendu que la SAM A. qui succombe, sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit les appels,

Constate que les dispositions du jugement du Tribunal de première instance du 6 décembre 2018 qui ont débouté le Procureur Général de ses demandes de supplément d'information, accueilli j-p. SA. en son intervention volontaire et constaté que j-p. SA., ès-qualités, de syndic de la liquidation des biens de la SAM B., reprenait pour son compte l'exploit introductif d'instance du 1er décembre 2015, sont définitives,

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SAM B. de l'ensemble de ses prétentions,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la SAM A. à payer à la SAM B. représentée par j-p. SA., ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la SAM B., la somme de 162.408,57 euros au titre des factures impayées de l'année 2015,

Confirme le jugement pour le surplus,

Condamne la SAM A. aux dépens d'appel, distraits au profit de l'Administration qui en poursuivra le recouvrement comme en matière d'enregistrement, conformément aux dispositions de l'article 19 de la loi n° 1.378 du 18 mai 2011,

Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Monsieur Éric SENNA, Conseiller, Madame Claire GHERA, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture étant considérée comme donnée à l'audience publique du 26 MAI 2020, par Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, assistée de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Madame Sylvie PETIT-LECLAIR, Procureur général, le dispositif de la décision étant affiché dans la salle des pas perdus du Palais de justice.

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