Cour d'appel, 28 septembre 2018, La Société en liquidation amiable S.A.R.L. DOLPHINA, Madame DA.DE WI. et Monsieur j MA. c/ Monsieur m. TS. et Monsieur le Procureur Général

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Abstract🔗

Exequatur - Reconnaissance et exécution d'un jugement étranger - Conditions - Jugement japonais - Exequatur (non)

Résumé🔗

Les articles 473 à 475 du Code de procédure civile ont été abrogés par la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au droit international privé. Il est de principe que les lois nouvelles s'appliquent immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elles entrent en vigueur, et cela même lorsqu'une semblable situation fait l'objet d'une instance judiciaire, sauf s'il a déjà été rendu une décision de justice passée en force de chose jugée.

La reconnaissance et l'exécution des jugements et actes publics étrangers sont désormais régis par les articles 13 à 20 de la loi n° 1.448. Aux termes des articles 13 et 14 de ladite loi, les jugements rendus par les tribunaux étrangers et passés en force de chose jugée sont reconnus de plein droit dans la Principauté, s'il n'y a pas de motifs de refus au sens de l'article 15, et ils ne sont susceptibles d'exécution qu'après avoir été déclarés exécutoires par le Tribunal de première instance, sauf stipulation contraire des traités. En toute hypothèse, un jugement rendu par un tribunal étranger ne peut en aucun cas faire l'objet d'une révision au fond, en application des dispositions de l'article 16 de cette loi.

L'article 15 précité prévoit qu'un jugement rendu par un Tribunal étranger n'est ni reconnu ni déclaré exécutoire dans la Principauté si : il a été rendu par une juridiction incompétente au sens de l'article 17 ; les droits de la défense n'ont pas été respectés, notamment lorsque les parties n'ont pas été régulièrement citées et mises à même de se defender ; la reconnaissance ou l'exécution est manifestement contraire à l'ordre public monégasque ; il est contraire à une décision rendue entre les mêmes parties dans la Principauté ou avec une décision antérieurement rendue dans un autre État et reconnue dans la Principauté ; un litige est pendant devant un Tribunal de la Principauté, saisi en premier lieu, entre les mêmes parties portant sur le même objet.

Si les tribunaux de la Principauté avaient une compétence exclusive pour connaître de la demande ou si le litige ne présentait pas un lien suffisant avec l'État dont relève le Tribunal étranger ayant rendu un jugement, celui-ci est alors considéré comme incompétent aux termes des dispositions de l'article 17 de la loi.

Enfin, en application de l'article 18 de la loi du 28 juin 2017, le demandeur à fin d'exécution ou de reconnaissance doit produire : une expédition authentique du jugement ; l'original de l'exploit de signification ou de tout autre acte en tenant lieu dans l'État où le jugement aura été rendu ; un certificat délivré, soit par la juridiction étrangère dont émane le jugement, soit par le greffier de cette juridiction, constatant que cette décision n'est ni frappée, ni susceptible d'être frappée d'opposition ou d'appel, et qu'elle est exécutoire sur le territoire de l'État où elle est intervenue, dûment légalisés et au besoin avec traduction en langue française légalisée.

Ces dispositions permettent ainsi à la juridiction saisie d'une demande d'exequatur d'une décision étrangère de déclarer celle-ci exécutoire dans la Principauté après avoir vérifié, au regard de la loi du pays d'origine l'authenticité de cette décision, la régularité des citations délivrées aux parties, ainsi que la réalité de sa force de chose jugée, puis au regard du droit de for, soit de la loi monégasque, l'absence de contrariété à l'ordre public des dispositions qu'elle comporte et enfin au regard des lois des deux pays la compétence de la juridiction dont elle émane, et ce, à la condition qu'aucune décision contraire n'ait été rendue entre les mêmes parties dans la Principauté ou antérieurement dans un autre État et reconnue dans la Principauté et qu'il n'existe pas de cas de litispendance.


Motifs🔗

COUR D'APPEL

R.

ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2018

En la cause de :

- 1/ La Société en liquidation amiable S. A. R. L. DOLPHINA, anciennement S. A. R. L. DA. DE WI.(Monaco), dont le siège de la liquidation a été fixé au domicile de son liquidateur, Madame DA. DE WI. X1à Monaco, agissant poursuites et diligences de son liquidateur, Madame DA. DE WI. ;

2/ Madame DA. DE WI., demeurant et domiciliée Immeuble « Le X1 » - X1à Monaco ;

3/ Monsieur j MA., demeurant et domicilié Immeuble « X2 », X2 à Monaco ;

Ayant tous trois élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur en cette même Cour, ès-qualités d'administrateur ad hoc ;

APPELANTS,

d'une part,

contre :

- 1/ Monsieur m. TS., né le 16 décembre 1968 à YOKOHAMA (Japon), entrepreneur, demeurant et domicilié X3à TOKYO (Japon) ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant ledit avocat-défenseur ;

- 2/ Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de Monaco, en ses bureaux au Palais de Justice, rue Colonel Bellando de Castro, audit Monaco ;

COMPARAISSANT EN PERSONNE,

INTIMÉS,

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 2 mars 2017 (R. 3327) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 27 juin 2017 (enrôlé sous le numéro 2017/000171) ;

Vu les conclusions déposées le 3 octobre 2017 par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de Monsieur m. TS.;

Vu les conclusions déposées le 19 février 2018 par Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur, au nom de la S. A. R. L. DOLPHINA, Madame DA. DE WI. et Monsieur j MA.;

Vu les conclusions déposées le 9 mars 2018 par le Ministère Public ;

À l'audience du 26 juin 2018, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties, le ministère public entendu ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par la S. A. R. L. DOLPHINA, Madame DA. DE WI. et Monsieur j MA. à l'encontre d'un jugement du Tribunal de première instance du 2 mars 2017.

Considérant les faits suivants :

Par jugement du 28 octobre 2013, le Tribunal de district de Tokyo section civile n° 31 a condamné solidairement la société DOLPHINA, DA. DE WI. et j MA. à payer à m. TS. la somme de 70.000 euros au titre du capital restant dû sur le prêt, ainsi que « la somme calculée au taux annuel de 14 % » à compter du 5 juin 2009 pour la SARL DOLPHINA et DA. DE WI. et à compter du 17 juin 2009 pour j MA.

Par ordonnance du 2 mars 2016, le Président du Tribunal de première instance de Monaco a autorisé m. TS. à faire pratiquer une saisie arrêt auprès des établissements bancaires dénommés BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR et CIC LYONNAISE DE BANQUE, à concurrence de la somme de 128.800 euros sur toutes sommes ou valeurs dues à DA. DE WI. et ce, pour avoir sûreté, garantie et paiement de ladite somme.

C'est dans ces conditions que par acte d'huissier en date du 7 avril 2015, suivi d'une réassignation en date du 11 mai 2015, m. TS. a assigné devant le Tribunal de première instance la SARL DOLPHINA, DA. DE WI. j MA. et le Procureur Général de Monaco, aux fins d'obtenir l'exequatur du jugement du 28 octobre 2013 du Tribunal de district de Tokyo section civile n° 31.

Par jugement en date du 2 mars 2017 (R3327), le Tribunal de première instance a statué ainsi :

« - déclare exécutoire en Principauté de Monaco le jugement du Tribunal de district de Tokyo section civile n° 31 du 28 octobre 2013,

- déclare irrecevable la demande reconventionnelle de DA. DE WI.

dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamne la société à responsabilité limitée de droit monégasque DOLPHINA, DA. DE WI. et j MA. solidairement aux dépens de la procédure, distraits au profit de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, sous son affirmation de droit,

- ordonne que lesdits dépens soient provisoirement liquidés sur état par le Greffier en Chef, au vu du tarif applicable ».

Au soutien de cette décision, le Tribunal de première instance a pour l'essentiel retenu :

- que la réciprocité étant établie il lui appartenait de vérifier sans examen du fond si les décisions soumises à exequatur obéissaient aux prescriptions de l'article 473 du Code de procédure civile,

- que les exigences de cet article étaient remplies, sans qu'il y ait lieu à examen des discussions concernant la clause d'arbitrage et la recevabilité de l'action,

- que les dispositions de l'article 475 du même Code sont remplies et non discutées,

- que la demande reconventionnelle de DA. DE WI. tendant à la condamnation de m. TS. était irrecevable dans le cadre de la demande d'exéquatur,

- que les conditions d'octroi de l'exécution provisoire n'étaient en l'espèce pas réunies.

Suivant exploit du 27 juin 2017, la SARL DOLPHINA, DA. DE WI. et j MA. ont interjeté appel du jugement précité signifié le 9 juin 2017 à l'effet d'être reçus et déclarés fondés en leur appel et de voir :

réformer le jugement du 2 mars 2017,

dire que les conditions pour que s'applique la procédure d'exequatur simplifiée ne sont pas réunies,

- dire que le Tribunal pouvait rejuger au fond le litige en tout ou partie,

dire que le jugement du 28 octobre 2013 a été rendu par un Tribunal incompétent,

déclarer l'action irrecevable contre DA. DE WI. et j MA.

en tout état de cause, rejeter la demande d'exequatur,

À titre reconventionnel :

condamner m. TS. à payer à DA. DE WI. la somme de 154.683,27 euros,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Ils exposent pour l'essentiel au soutien de leur appel que :

- m. TS. ne rapporte pas la preuve qui lui incombe, en l'absence de convention d'entraide judiciaire entre Monaco et le Japon, de la réciprocité avec le Japon permettant un examen purement formel des décisions des deux pays,

- en conséquence le Tribunal devait vérifier la validité au fond du jugement dont l'exequatur est demandé,

la demande d'exequatur aurait dû être rejetée dès lors que :

le jugement a été rendu par une juridiction incompétente en l'état de la clause d'arbitrage figurant à l'article 8 du contrat de prêt renvoyant au contrat cadre de distribution liant les parties dont l'article 17 dispose que tout litige devra être tranché par un Tribunal arbitral,

l'action de m. TS. aurait dû être déclarée irrecevable en l'absence de tout lien de droit de DA. DE WI. et j MA. avec ce dernier,

compte tenu des créances réciproques des parties en présence, une compensation aurait dû être opérée.

Enfin DA. DE WI. réclame à m. TS. le paiement de la somme de 154.683,27 euros au titre d'une créance qui lui a été cédée à la suite d'une assemblée générale de la SARL DOLPHINA du 4 novembre 2013.

m. TS. intimé, sollicite la confirmation du jugement rendu par le Tribunal de première instance le 2 mars 2017 au visa des dispositions de l'article 1er de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 d'application immédiate et entend voir les appelants déboutés de leurs demandes et condamnés in solidum à lui payer la somme de 10.000 euros pour procédure abusive.

Il fait valoir pour l'essentiel que les textes régissant la matière ont été modifiés par la loi susvisée qui ne fait plus référence au critère de réciprocité, de sorte que cette question et celle de l'examen au fond du litige n'ont plus aucun objet pour être exclues du champ d'application des nouvelles dispositions relatives à l'exequatur de décisions étrangères en Principauté.

Il affirme que les conditions posées par la loi n° 1.448 sont remplies dès lors que :

- la décision étrangère est passée en force de chose jugée et exécutoire sur le territoire de l'État dans lequel elle a été rendue,

- la décision étrangère a été rendue par une juridiction compétente,

- il n'est nullement établi ni soutenu que les tribunaux de la Principauté avaient une compétence exclusive pour connaître de la demande,

- les droits de la défense ont été respectés, les parties ayant été régulièrement citées et représentées devant les juridictions japonaises,

- le jugement japonais, qui a tranché un litige portant sur une créance contractuelle, ne contient aucune mention contraire à l'ordre public monégasque,

il n'y a pas de litispendance.

m. TS. soulève l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle en paiement formée par DA. DE WI. au motif que concernant le fond du contentieux elle ne peut être examinée dans le cadre d'une procédure aux fins d'exequatur conformément à l'article 16 de la loi précitée.

Il réclame l'allocation de la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive au motif que la voie de recours formée par les appelants n'est manifestement animée que par la volonté de retarder l'exécution de la décision japonaise rendue à leur encontre en l'absence de moyen de défense nouveau ou de pièce complémentaire à l'appui de leur opposition.

La société DOLPHINA, DA. DE WI. et j MA. ont répliqué le 19 février 2018 pour voir la Cour :

réformer le jugement du 2 mars 2017,

- statuer ce que de droit quant à la reconnaissance et l'exécution de la décision étrangère dans la Principauté de Monaco,

- dire que le jugement japonais du 28 octobre 2013 a été rendu par un Tribunal incompétent,

- dire que la procédure japonaise ne présente en l'espèce aucune garantie quant aux droits de la défense,

En tout état de cause,

- rejeter la demande d'exequatur,

À titre reconventionnel :

- déclarer l'action irrecevable contre DA. DE WI. et j MA.

- condamner m. TS. à payer à DA. DE WI. la somme de 154.683,27 euros,

- le condamner aux entiers dépens.

Pour ce faire les appelants prétendent que les conditions posées par la nouvelle loi ne seraient pas réunies en l'espèce en ce que :

- le jugement a été rendu par une juridiction incompétente, reprenant à cet égard le moyen soulevé dans l'acte introductif d'instance,

- il n'est pas démontré, en l'absence de production de l'exploit de signification du jugement rendu que les droits de la défense n'ont pas été respectés, l'attestation produite ne permettant pas d'établir que la décision a été effectivement signifiée et qu'ils ont été mis en mesure d'exercer tout recours utile,

- la traduction en langue française du jugement n'a pas été légalisée.

Aux termes de ses conclusions en date du 9 mars 2018, le Procureur général a conclu à la confirmation de la décision du Tribunal de première instance en date du 2 mars 2017.

Il rappelle que les lois nouvelles de compétence sont d'application immédiate en l'absence de dispositions transitoires et que le principe de réciprocité n'est plus exigé.

Il relève qu'aucune des clauses d'exclusion prévue par l'article 15 de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au droit privé ne peut être en l'espèce retenue, la décision, non contraire à l'ordre public monégasque, ayant été rendue par une juridiction compétente et les droits de la défense ayant été respectés.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que l'appel interjeté dans les formes et délais prescrits est régulier et recevable ;

Attendu que les articles 473 à 475 du Code de procédure civile ont été abrogés par la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au droit international privé ;

Attendu qu'il est de principe que les lois nouvelles s'appliquent immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elles entrent en vigueur, et cela même lorsqu'une semblable situation fait l'objet d'une instance judiciaire, sauf s'il a déjà été rendu une décision de justice passée en force de chose jugée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

Attendu que la loi susvisée est donc applicable en l'espèce ;

Attendu que la reconnaissance et l'exécution des jugements et actes publics étrangers sont désormais régis par les articles 13 à 20 de la loi n° 1.448 ;

Attendu qu'aux termes des articles 13 et 14 de ladite loi, les jugements rendus par les tribunaux étrangers et passés en force de chose jugée sont reconnus de plein droit dans la Principauté, s'il n'y a pas de motifs de refus au sens de l'article 15, et ils ne sont susceptibles d'exécution qu'après avoir été déclarés exécutoires par le Tribunal de première instance, sauf stipulation contraire des traités ;

Qu'en toute hypothèse, un jugement rendu par un tribunal étranger ne peut en aucun cas faire l'objet d'une révision au fond, en application des dispositions de l'article 16 de cette loi ;

Attendu que l'article 15 précité prévoit qu'un jugement rendu par un Tribunal étranger n'est ni reconnu ni déclaré exécutoire dans la Principauté si :

1) il a été rendu par une juridiction incompétente au sens de l'article 17,

2) les droits de la défense n'ont pas été respectés, notamment lorsque les parties n'ont pas été régulièrement citées et mises à même de se défendre,

3) la reconnaissance ou l'exécution est manifestement contraire à l'ordre public monégasque,

4) il est contraire à une décision rendue entre les mêmes parties dans la Principauté ou avec une décision antérieurement rendue dans un autre État et reconnue dans la Principauté,

5) un litige est pendant devant un Tribunal de la Principauté, saisi en premier lieu, entre les mêmes parties portant sur le même objet ;

Que si les tribunaux de la Principauté avaient une compétence exclusive pour connaître de la demande ou si le litige ne présentait pas un lien suffisant avec l'Etat dont relève le Tribunal étranger ayant rendu un jugement, celui-ci est alors considéré comme incompétent aux termes des dispositions de l'article 17 de la loi ;

Qu'enfin, en application de l'article 18 de la loi du 28 juin 2017, le demandeur à fin d'exécution ou de reconnaissance doit produire :

une expédition authentique du jugement,

2) l'original de l'exploit de signification ou de tout autre acte en tenant lieu dans l'État où le jugement aura été rendu,

3) un certificat délivré, soit par la juridiction étrangère dont émane le jugement, soit par le greffier de cette juridiction, constatant que cette décision n'est ni frappée, ni susceptible d'être frappée d'opposition ou d'appel, et qu'elle est exécutoire sur le territoire de l'État où elle est intervenue,

dûment légalisés et au besoin avec traduction en langue française légalisée ;

Attendu que ces dispositions permettent ainsi à la juridiction saisie d'une demande d'exequatur d'une décision étrangère de déclarer celle-ci exécutoire dans la Principauté après avoir vérifié, au regard de la loi du pays d'origine l'authenticité de cette décision, la régularité des citations délivrées aux parties, ainsi que la réalité de sa force de chose jugée, puis au regard du droit de for, soit de la loi monégasque, l'absence de contrariété à l'ordre public des dispositions qu'elle comporte et enfin au regard des lois des deux pays la compétence de la juridiction dont elle émane, et ce, à la condition qu'aucune décision contraire n'ait été rendue entre les mêmes parties dans la Principauté ou antérieurement dans un autre État et reconnue dans la Principauté et qu'il n'existe pas de cas de litispendance ;

Attendu, sur la compétence, que le jugement a bien été rendu par la juridiction compétente au regard du lieu d'exécution du contrat de prêt au Japon, et plus précisément à Tokyo, ainsi que cela résulte du jugement interlocutoire du Tribunal de district de Tokyo section civile n° 31 du 10 mars 2011 qui a rejeté l'application de l'article 8, invoquée une nouvelle fois dans le cadre de la présente instance, au motif qu'il s'agissait effectivement en réalité d'une clause relative au droit applicable ; qu'en outre, la domiciliation des défendeurs à Monaco ne crée pas un cas de compétence exclusive des tribunaux de la Principauté pour connaître de la demande ;

Que toutefois, et ainsi que le soutiennent les appelants, si la décision a bien été produite en original et revêtue de l'apostille, il n'en est pas de même de sa traduction en langue française par un traducteur assermenté qui n'est pas accompagnée de l'apostille ;

Que n'est pas davantage produite la signification du jugement rendu, en sorte que la Cour n'est pas en mesure de s'assurer que la décision a bien été régulièrement signifiée aux appelants, notamment à leur domicile, et qu'ils ont été mis en mesure d'exercer tout recours utile, l'attestation délivrée par le greffier le 5 février 2014, qui ne mentionne ni le lieu où la décision aurait été signifiée, ni les formes par lesquelles la signification aurait été réalisée ne pouvant s'y substituer ;

Attendu que les conditions posées par l'article 18 de la loi du 28 juin 2017 ne sont pas respectées ;

Que dans ces conditions l'exequatur du jugement du Tribunal de district de Tokyo section civile n° 31 du 28 octobre 2013 ne saurait être accordé, sans qu'il y ait lieu en conséquence à statuer sur l'irrecevabilité de l'action dirigée contre les appelants ;

Attendu que la décision des premiers juges sera réformée en ce sens ;

Attendu par ailleurs que c'est à bon droit que les premiers juges ont déclaré irrecevable la demande en paiement présentée par DA. DE WI. dès lors que l'instance en exequatur présente un caractère autonome qui interdit à la juridiction de statuer sur toute demande qui lui est étrangère, leur décision étant confirmée ;

Attendu, en dernier lieu, que m. TS. qui succombe pour l'essentiel sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif et condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit l'appel,

Le déclare partiellement fondé,

Réforme le jugement du 2 mars 2017 en ce qu'il a déclaré exécutoire en Principauté de Monaco le jugement du Tribunal de district de Tokyo section civile n° 31 du 28 octobre 2013, et du chef des dépens,

Statuant à nouveau :

Dit n'y avoir lieu à exequatur du jugement du Tribunal de district de Tokyo section civile n° 31 du 28 octobre 2013,

Confirme le jugement du 2 mars 2017 en ce qu'il a déclaré DA. DE WI. irrecevable en sa demande en paiement,

Déboute m. TS. de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif,

Condamne m. TS. aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,

Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Éric SENNA, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 28 SEPTEMBRE 2018, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Monsieur Hervé POINOT, Procureur Général adjoint.

Bien vouloir cocher, Merci

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