Cour d'appel, 11 juillet 2017, La société ARROW BURGER MONACO SARL c/ Monsieur AI. a. et Madame AI. née PI. j.

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Abstract🔗

Baux commerciaux - Gérance libre - Commandement de payer - Signification régulière en la forme et au fond (oui) - Clause résolutoire - Résiliation de plein droit du contrat de gérance libre (oui)

Résumé🔗

Le commandement de payer signifié à la SARL ARROW BURGER MONACO le 16 juin 2016, a été régulièrement délivré s'agissant d'une société de commerce ayant son siège social à Monaco.

Il convient de préciser qu'en effet, en l'absence au siège social du gérant ou de toute autre personne habilitée à recevoir l'acte au nom de cette entité, le clerc suppléant d'huissier de Justice en charge de la signification a régulièrement indiqué avoir déposé la copie de l'acte destinée à la SARL ARROW BURGER MONACO à la Mairie de Monaco et avoir avisé cette personne morale de ce dépôt par lettre recommandée.

Les dispositions de l'article 148 du Code de procédure civile ont été respectées, la signification apparaissant dès lors régulière en la forme et au fond.

En l'espèce, le Juge des référés a fait une juste application des dispositions de l'article 989 du Code civil pour dire que la clause résolutoire avait produit ses effets et que le contrat de gérance libre se trouvait en conséquence résilié de plein droit depuis le 19 juin 2016.

L'avis de recouvrement erroné émanant du mandataire de Monsieur et Madame AI. au titre de la gestion locative, ne saurait laisser présumer la renonciation de ces derniers au droit de se prévaloir de la clause résolutoire que ne corrobore par ailleurs en l'espèce aucun acte positif de leur part, étant au contraire observé qu'ils ont dès le 22 juillet 2016 assigné en référé leur locataire aux fins, précisément, de voir constater la résiliation du contrat de gérance et d'obtenir son expulsion avant de conclure et de maintenir leurs prétentions le 26 octobre 2016.

Les pièces produites dans les débats démontrent que la société ARROW BURGER MONACO SARL avait cessé depuis le mois de décembre 2015 de s'acquitter des redevances dues au titre de la location du commerce et des locaux.

L'ordonnance rendue le 4 janvier 2017 par le Juge des référés sera confirmée en toutes ses dispositions et la société ARROW BURGER MONACO SARL déboutée de l'ensemble de ses prétentions.


Motifs🔗

COUR D'APPEL

R.

ARRÊT DU 11 JUILLET 2017

En la cause de :

- La société ARROW BURGER MONACO SARL, venant aux droits de la société « ZAPP MC » SARL, dont le siège social est sis 6 et 8 rue des Carmes à Monaco-Ville, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

1- Monsieur AI. a., né le 16 juillet 1926 à Monaco, de nationalité française, retraité, demeurant X1 à Monaco ;

2- Madame AI. née PI. j., le 18 janvier 1929 à Menton, de nationalité française, demeurant X1 à Monaco ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉS,

d'autre part,

LA COUR,

Vu l'ordonnance de référé rendue le 4 janvier 2017 (R.1952) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 19 janvier 2017 (enrôlé sous le numéro 2017/000082) ;

Vu les conclusions déposées le 4 avril 2017 par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom d a. AI. et de j. AI. née PI. ;

Vu les conclusions déposées le 5 mai 2017 par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la société ARROW BURGER MONACO SARL ;

À l'audience du 6 juin 2017, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par la société ARROW BURGER MONACO SARL à l'encontre d'une ordonnance de référé du 4 janvier 2017.

Considérant les faits suivants :

Par acte reçu les 18 et 19 décembre 2014 par Maître CROVETTO AQUILINA, Notaire à Monaco, les époux a. AI. et j. PI. ont donné à bail en gérance libre à la SARL ZAPP MC, devenue la SARL ARROW BURGER MONACO, pour une durée de trois années un fonds de commerce exploité dans des locaux sis à Monaco 6 et 8 rue des Carmes sous l'enseigne « AU BEBE JOUFLU ».

Ce contrat de gérance libre a été conclu moyennant paiement par le preneur d'une redevance fixée annuellement à la somme de 16.800 euros hors taxes, payable par trimestres anticipés de 4.200 euros, hors taxes chacun, révisable annuellement selon les variations de l'indice du coût de la construction, outre le montant du loyer afférent aux locaux dans lesquels le fonds est exploité, lequel s'élève à la somme de 16.200 euros par an, hors charges, payable également par trimestres anticipés de 4.050 euros.

Ledit contrat de gérance comporte une clause stipulant sa résiliation de plein droit, à défaut par le preneur d'exécuter une seule de ses conditions, et notamment de payer les loyers ci-dessus rappelés aux échéances convenues, 48 heures après un simple commandement de payer ou une sommation d'exécuter la condition non accomplie, demeuré sans effet et contenant déclaration par le bailleur de son intention d'user du bénéfice de la présente clause.

Suivant acte du Ministère de Maître NOTARI, huissier de Justice à Monaco en date du 16 juin 2016, a. AI. et j. PI., son épouse, ont fait commandement à la SARL ARROW BURGER MONACO d'avoir à leur payer la somme de 15.140 euros se décomposant ainsi :

  • solde restant dû pour la période du 1er janvier 2016 au 31 mars 2016 : 6.050 euros,

  • loyer du 1eravril au 30 juin 2016 : 4.050 euros,

  • gérance du 1er avril au 30 juin 2016 : 4.200 euros,

  • TVA sur gérance du 1er avril au 30 juin 2016 : 840 euros, Total : 15.140 euros.

Tout en faisant valoir que la SARL ARROW BURGER MONACO ne s'était acquittée le 6 juillet 2016, soit après ledit commandement, que d'une somme de 3.030 euros sur la dette globale de 15.140 euros, les époux AI., ont, par exploit du 22 juillet 2016, fait assigner en référé la SARL ARROW BURGER MONACO, à l'effet de voir :

  • constater qu'en l'absence de paiement des causes du commandement du 16 juin 2016 dans le délai accordé au preneur à cet effet, le contrat de location gérance se trouve résilié de plein droit depuis le 19 juin 2016,

  • constater que la SARL ARROW BURGER MONACO occupe, sans droit ni titre depuis cette date, les locaux, sis 8 rue des Carmes à Monaco-Ville,

  • en conséquence ordonner leur expulsion et celle de tous occupants de leur chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Suivant ordonnance en date du 4 janvier 2017, le Juge des référés a :

  • constaté que par le jeu de la clause résolutoire qui y était contenue, le contrat de location gérance conclu les 18 et 19 décembre 2014, réitéré le 2 juin 2015 entre les époux a. et j. AI. et la SARL ZAPP MC dénommée depuis SARL ARROW BURGER MONACO se trouvait résilié de plein droit depuis le 19 juin 2016,

  • constaté que la SARL ARROW BURGER MONACO occupait en conséquence, depuis le 19 juin 2016, sans droit, ni titre, le local composé d'une pièce et cuisine situé au rez-de-chaussée de l'immeuble portant le n°8 de la rue des Carmes à Monaco-Ville dans un passage reliant la rue du Colonel Bellando de Castro à ladite rue des Carmes et un local avec wc situé au rez-de-chaussée de l'immeuble portant le n°6 de la rue des Carmes, ayant son entrée indépendante en retrait de la rue Colonel Bellando de Castro,

  • accordé à la SARL ARROW BURGER MONACO un délai d'UN MOIS à compter de la signification de la présente ordonnance pour quitter les lieux,

  • ordonné d'ores et déjà, à défaut pour cette dernière d'avoir volontairement libéré les locaux ci-dessus désignés dans le délai qui lui a été accordé, son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier,

  • débouté les époux AI. du surplus de leurs prétentions,

  • condamné la société SARL ARROW BURGER MONACO aux entiers dépens distraits au profit de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Le Premier Juge a pour l'essentiel relevé qu'en application des dispositions de l'article 989 du Code Civil, la clause résolutoire conventionnelle a produit ses effets et que le contrat de gérance libre se trouve résilié de plein droit depuis le 19 juin 2016. Il a par ailleurs observé que la renonciation à un droit ne se présume pas et doit résulter d'actes non équivoques de leur auteur, tel n'étant pas le cas de l'attitude des époux AI., qui n'ont pas renoncé au bénéfice de la clause résolutoire ni mis en œuvre celle-ci en faisant preuve de mauvaise foi.

Suivant exploit en date du 19 janvier 2017, la SARL ARROW BURGER MONACO a régulièrement interjeté appel de l'ordonnance susvisée en date du 4 janvier 2017 à l'effet de voir réformer cette décision en toutes ses dispositions et débouter Monsieur et Madame AI. de l'ensemble de leurs demandes tout en les condamnant aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle expose en substance, aux termes de l'ensemble de ses écrits judiciaires, que les époux AI. ont fait adresser par leur mandataire un nouvel avis d'échéance à la fin du mois de septembre 2016 portant sur la période du 1er octobre au 31 décembre 2016 et faisant état de loyers et non pas d'indemnités d'occupation, la clause résolutoire devant dès lors être considérée comme caduque. La qualification de loyers ne procèderait selon elle pas d'une erreur matérielle alors même que toutes les sommes requises sur l'avis d'échéance du 28 septembre 2016 ont été acquittées, ce qui implique selon elle une renonciation expresse et non équivoque des bailleurs à se prévaloir du bénéfice de la clause résolutoire.

Les époux AI., intimés, entendent quant à eux voir débouter la société ARROW BURGER MONACO de l'ensemble de ses demandes et confirmer l'ordonnance du Président du Tribunal de Première Instance du 4 janvier 2017.

Ils font en substance valoir que la clause résolutoire conventionnelle a régulièrement acquis ses effets le 19 juin 2016, le paiement tardif de la redevance et des indemnités d'occupation postérieures ne remettant pas en cause son acquisition.

Ils confirment ne pas avoir renoncé à se prévaloir de ladite clause résolutoire, l'intitulé de la demande de paiement émise par leur mandataire, la société COTE INVESTISSEMENT, procédant d'une erreur matérielle et exposent que ce n'est que sous la menace d'une expulsion que la société ARROW BURGER MONACO a commencé à exécuter ses obligations de paiement et contestent le principe de toute novation à défaut d'accord de volonté des parties.

Ils font enfin valoir qu'ils n'ont pas fait preuve de mauvaise foi en mettant en œuvre la clause résolutoire conventionnelle dès lors que le commandement de payer du 16 juin 2016 a régulièrement été signifié conformément aux dispositions applicables du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que l'appel interjeté par la SARL ARROW BURGER MONACO conformément aux conditions de forme et de délais prescrites par le Code de procédure civile apparaît régulier et doit être déclaré recevable ;

Attendu que le commandement de payer la somme de 15.140 euros signifié à la SARL ARROW BURGER MONACO le 16 juin 2016, a été régulièrement délivré en application des dispositions de l'article 153-4° du Code de procédure Civile, s'agissant d'une société de commerce ayant son siège social à Monaco ;

Qu'en effet, en l'absence au siège social du gérant ou de toute autre personne habilitée à recevoir l'acte au nom de cette entité, le clerc suppléant d'huissier de Justice en charge de la signification a régulièrement indiqué avoir déposé la copie de l'acte destinée à la SARL ARROW BURGER MONACO à la Mairie de Monaco et avoir avisé cette personne morale de ce dépôt par lettre recommandée ;

Qu'il s'ensuit que les dispositions de l'article 148 du Code de Procédure Civile ont été respectées, la signification apparaissant dès lors régulière en la forme et au fond ;

Attendu par ailleurs que le Premier Juge a justement et par des motifs que la Cour adopte, observé que le commandement susvisé mentionnait expressément la volonté des époux AI. de se prévaloir de la clause résolutoire stipulée au contrat de gérance souscrit les 18 et 19 décembre 2014, dont la teneur s'y trouvait en outre intégralement reproduite ;

Attendu qu'il est par ailleurs établi par les pièces produites qu'il n'a pas été satisfait à l'objet de ce commandement, c'est-à-dire au paiement dans un délai de 48 heures de la somme de 15.140 euros correspondant au solde restant dû pour la période du 1er janvier au 31 mars 2016, le loyer et la redevance de gérance afférents au 2e trimestre 2016, ainsi que la TVA ;

Qu'en effet les seuls paiements effectués, c'est-à-dire une somme de 3.030 euros le 6 juillet 2016 et une somme de 18.292 euros le 1er septembre 2016, sont intervenus postérieurement à l'expiration du délai prévu par la clause conventionnelle ;

Attendu que le Juge des référés a dès lors fait une juste application des dispositions de l'article 989 du Code Civil pour dire que la clause résolutoire avait produit ses effets et que le contrat de gérance libre se trouvait en conséquence résilié de plein droit depuis le 19 juin 2016 ;

Attendu enfin que si le mandataire des époux AI., l'agence COTE INVESTISSEMENT, a adressé à la SARL ARROW BURGER MONACO les 30 juin, 28 septembre et 14 octobre 2016, des avis d'échéance à l'effet de lui réclamer le règlement des redevances de gérance et les loyers afférents aux 3e et 4e trimestres 2016 et non des indemnités d'occupation et a encaissé sans réserve le chèque de 18.292,20 euros représentant le « loyer » restant dû jusqu'au 30 septembre 2016, il n'en résulte pas la manifestation claire et univoque des époux AI. de renoncer au bénéfice de la clause résolutoire ;

Attendu que l'avis de recouvrement erroné émanant du mandataire de Monsieur et Madame AI. au titre de la gestion locative, ne saurait laisser présumer la renonciation de ces derniers au droit de se prévaloir de la clause résolutoire que ne corrobore par ailleurs en l'espèce aucun acte positif de leur part, étant au contraire observé qu'ils ont dès le 22 juillet 2016 assigné en référé leur locataire aux fins, précisément, de voir constater la résiliation du contrat de gérance et d'obtenir son expulsion avant de conclure et de maintenir leurs prétentions le 26 octobre 2016 ;

Attendu que la novation ne se présumant pas plus que la renonciation à un droit par application des dispositions de l'article 1121 du Code civil, l'extinction volontaire d'une obligation et la création corrélative de nouvelles obligations requièrent un accord des volontés qui ne saurait résulter du seul intitulé du document libellé « avis d'échéance » émanant exclusivement du mandataire immobilier ;

Attendu enfin que la mauvaise foi des époux AI. dans la mise en œuvre de la clause résolutoire ne saurait résulter des améliorations apportées dans les locaux par le locataire gérant, voire même des investissements réalisés, les pièces produites démontrant que la société ARROW BURGER MONACO avait cessé depuis le mois de décembre 2015 de s'acquitter des redevances dues au titre de la location du commerce et des locaux ;

Attendu en définitive que l'ordonnance rendue le 4 janvier 2017 par le Juge des référés sera confirmée en toutes ses dispositions et la société appelante déboutée de l'ensemble de ses prétentions ;

Attendu que les dépens d'appel demeureront à la charge de la société ARROW BURGER MONACO qui succombe ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit la SARL ARROW BURGER MONACO en son appel,

Au fond, l'en déboute et confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 4 janvier 2017 par le Juge des référés,

Condamne la SARL ARROW BURGER MONACO aux entiers dépens d'appel et dit qu'ils seront distraits au profit de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, Monsieur Éric SENNA, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 11 JUILLET 2017, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Nadine VALLAURI, Greffier, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Premier Substitut du Procureur Général.

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