Cour d'appel, 28 mars 2017, Monsieur IA. c., b. c. c/ la BNP PARIBAS

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Contrats et obligations - Contrat de prêt - Réaménagement des modalités de remboursement - Novation (non) - Cautionnement - Nécessité d'un nouvel engagement exprès de la caution (non) - Action en responsabilité pour faute - Recevabilité (non) - Prescription décennale acquise (oui)

Résumé🔗

Selon les articles 1271, alinéa 1er et 1273 du Code civil français, dans leur version applicable au litige, la novation, qui s'opère lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, ne se présume pas, la volonté de l'opérer devant résulter clairement de l'acte.

En l'espèce, les parties ont intitulé l'acte du 4 janvier 1995 « avenant » au prêt consenti par la BNP à la SCI le 22 septembre 1989. De plus, comme le souligne la banque, elles n'ont procédé qu'à un réaménagement des modalités de remboursement des sommes restant dues par la SCI au titre de ce prêt, en convenant d'un taux d'intérêt variable, et non plus fixe, d'une période différée de remboursement et d'un allongement de la durée du crédit. Ainsi, elles ont maintenu les autres clauses du contrat et écarté expressément toute volonté de nover.

Par conséquent, la BNP et la SCI n'ont pas entendu conclure un nouveau contrat le 4 janvier 1995 ayant pour effet de se substituer à celui du 22 septembre 1989, de sorte que, comme l'a exactement jugé le tribunal, elles ont maintenu l'obligation existante et n'ont pas opéré de novation. Et contrairement à ce que soutient l'appelant, l'acte du 4 janvier 1995 ne nécessitait pas un nouvel engagement exprès de la caution.

Le principe allégué par l'appelant selon lequel l'engagement de caution ne peut être prorogé à l'occasion d'un aménagement de contrat de prêt, si celui-ci aggrave la situation du débiteur, n'est ni légal, ni jurisprudentiel. En effet, les décisions de la Cour de cassation dont il se prévaut ne sont relatifs qu'à l'éventuelle responsabilité de la banque, s'agissant de l'arrêt du 28 novembre 2006, à l'égard d'une caution dirigeante lorsqu'elle aggrave la situation du débiteur principal en augmentant abusivement le concours qu'elle lui accorde et, s'agissant de l'arrêt du 18 juin 2013, à l'égard de l'emprunteur à qui un prêt de restructuration comporte un risque d'endettement et constitue un soutien abusif.

Ainsi, l'appelant n'est pas libéré de son obligation de caution à l'égard de la BNP, comme l'a jugé à bon droit le tribunal. Le jugement sera donc confirmé sur la condamnation en paiement de l'appelant à l'égard de la BNP, sauf à ramener le montant à la somme de 1.504.647,36 euros pour tenir compte de la déduction des intérêts et du prix de vente perçu en cours de procédure.

Le délai de prescription de l'action en responsabilité intentée par l'appelant à l'égard de la BNP a commencé à courir à partir du jour où il a connaissance que les obligations résultant de son engagement étaient mises à exécution par cette dernière.

Au regard des éléments fournis, et comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, le délai de prescription, qui était de dix ans en application de l'article 189 bis, alors en vigueur, devenu L. 110-4 du Code de commerce dans sa version applicable au litige, a commencé à courir à compter de cette date.

Le réaménagement du prêt du 22 septembre 1989, ne démontre en aucun cas que la BNP a renoncé, de façon expresse et non équivoque, au droit de se prévaloir de la prescription.

De plus, la prescription décennale était acquise lorsque l'appelant a introduit son action en responsabilité contre la banque par ses conclusions déposées le 22 mai 2013, à l'occasion de l'instance introduite le 20 février 2013 par la BNP en validation de la saisie-arrêt.

En conséquence, par voie de confirmation du jugement, son action en responsabilité pour faute sera déclarée irrecevable.


Motifs🔗

COUR D'APPEL

R.

ARRÊT DU 28 MARS 2017

En la cause de :

- Monsieur IA. c., b., né le 1er février 1954 à Lyon de nationalité italienne, demeurant X1, 98000 MONACO ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, plaidant par Maître Gérard BAUDOUX, avocat au Barreau de Nice ;

APPELANT,

d'une part,

contre :

- La BNP PARIBAS, société anonyme immatriculée au RCS Paris sous le n° B 662 042 449, dont le siège social est 16 boulevard des Italiens, Paris 9ème, prise en la personne de son Président et/ou directeur général en exercice demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, ayant pour avocat plaidant Maître Frédéric ALLEAUME, avocat au Barreau de Lyon, plaidant par Maître Hélène BAUDRIER, avocat en ce même Barreau ;

INTIMÉE,

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 3 mars 2016 (R. 3511) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 18 mai 2016 (enrôlé sous le numéro 2016/000173) ;

Vu les conclusions déposées le 5 juillet 2016 par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de la BNP PARIBAS ;

Vu les conclusions déposées les 4 octobre 2016 et 13 décembre 2016 par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de Monsieur c. IA. ;

À l'audience du 31 janvier 2017, ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par Monsieur c., b. IA. à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Première Instance du 3 mars 2016 (R. 3511).

Considérant les faits suivants :

Par acte authentique reçu à LYON le 22 septembre 1989, la société BNP PARIBAS (la BNP) a consenti à la SCI PARC D'ACTIVITES LYON-IRIGNY (la SCI), représentée par son gérant, M. p. IA., un prêt d'un montant global de 19.500.000 francs destiné à financer l'achat d'un ensemble de bâtiments à usage industriel situé à IRIGNY (RHÔNE) ainsi que des travaux sur ces immeubles, remboursable en 144 mensualités de 234.130,26 francs avec un TEG de 10,565 % l'an.

Aux termes du même acte, M. c. IA. (M. IA.) s'est porté caution solidaire et indivisible de l'obligation de remboursement de la SCI.

Par lettres recommandées avec avis de réception du 1er mars 1994, la BNP a :

  • informé la SCI de l'exigibilité anticipée du prêt en raison du non-paiement des échéances, et mis celle-ci en demeure de lui payer la somme de 23.532.529,71 francs,

  • joint à M. IA. le courrier envoyé à la SCI et mis en demeure celui-ci de lui payer les sommes dues par la SCI.

Le 4 janvier 1995, la BNP, la SCI et M. IA. ont signé un document intitulé « avenant au crédit global de 19.500.000 francs consenti à la SCI PALI suivant acte en date du 22 septembre 1989 », pour tenir compte « des difficultés rencontrées par l'emprunteur en raison de la conjoncture » et « des dispositions prises par l'emprunteur en vue de faire face à ses obligations » et prévoyant :

  • un « réaménagement, à compter du 1er mars 1994, du taux d'intérêt applicable pour le ramener au taux PIBOR 3 mois augmenté d'une marge de 1,50 % l'an, la prime d'assurance de 0,54 % l'an s'appliquant en sus pour la partie assurée »,

  • une « période de différé d'amortissement de capital d'une durée de 36 mois à compter du 1er mars 1994 devant permettre à l'emprunteur de reconstituer sa trésorerie et d'effectuer des travaux dans l'ensemble immobilier en vue de disposer de surfaces supplémentaires pouvant être louées »,

  • un «  allongement de la durée du crédit global, lequel sera remboursable à l'issue d'une période de 13 ans à compter du 1er mars 1994, période de différé incluse ».

Les parties ont ajouté la clause suivante : « il est expressément entendu qu'il n'est apporté aucune autre modification aux clauses et conditions contenues dans l'acte notarié susvisé auquel les présentes ne font pas novation ».

Par courrier du 22 octobre 1997, la banque a informé la SCI de la mise en application de « la clause d'exigibilité anticipée prévue au contrat » et l'a mise en demeure de lui régler l'intégralité des échéances impayées, soit 1.057.544,36 francs.

Par Jugement du Tribunal de commerce de Lyon du 9 novembre 1999, la SCI a été mise en liquidation judiciaire.

Le liquidateur judiciaire a admis la créance de la banque à hauteur de 26.894.185,73 francs.

Par Jugement du 12 octobre 2010, le Tribunal de commerce de Lyon a clôturé les opérations de liquidation judiciaire de la SCI pour insuffisance d'actif.

Par ordonnances du 18 janvier 2013 et du 12 février 2013, le Président du Tribunal de première instance de Monaco a déclaré exécutoire l'acte authentique du 22 septembre 1989 et autorisé la banque à faire pratiquer une saisie-arrêt auprès du CREDIT DU NORD de toutes sommes ou valeurs dues à la BNP, à hauteur de

  1. 000.000 euros.

Par exploit du 20 février 2013, la BNP a signifié au CREDIT DU NORD la saisie-arrêt et assigné M. IA. devant le Tribunal de première instance en paiement du montant de ses causes et en validation de cette mesure.

Par déclaration affirmative du 26 février 2013, le CREDIT DU NORD a indiqué que le solde global des deux comptes de M. IA. était débiteur.

Par jugement du 3 mars 2016, le Tribunal a :

  • condamné M. IA. à payer à la BNP la somme de 1.699.647,36 euros au titre de son engagement de caution du 22 septembre 1989 et de l'avenant du 4 janvier 1995,

  • débouté les parties de leurs demandes respectives en dommages et intérêts,

  • validé la saisie-arrêt du 20 février 2013,

  • constaté son caractère infructueux et ordonné en tant que de besoin la mainlevée,

  • déclaré irrecevable comme prescrite la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de mise en garde formée par M. IA. à l'encontre de la BNP,

  • dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,

  • condamné M. IA. aux dépens distraits au profit de Maître REY, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

M. IA. a relevé appel le 10 mai 2016.

Aux termes de son exploit d'appel et assignation ainsi que de ses conclusions du 4 octobre 2016 et 13 décembre 2016, il demande à la Cour de :

  • infirmer le jugement,

  • débouter la BNP de ses demandes,

  • ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée auprès du CRÉDIT DU NORD, À titre subsidiaire :

  • condamner la BNP à lui payer la somme de 1.700.000 euros à titre de dommages-intérêts,

  • dire que cette somme se compensera avec la créance de cette dernière,

  • condamner la BNP à lui payer 5.000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1 229 du Code civil monégasque,

  • il sollicite également, en tout état de cause, la condamnation de la BNP au paiement de la somme de 4.000 euros pour procédure abusive et aux entiers dépens distraits au profit de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Il fait essentiellement valoir que :

Sur la novation du contrat de prêt et sur ses conséquences :

  • le contrat du 4 janvier 1995 emporte novation de celui du 22 septembre 1989 en ce qu'il s'agit d'un nouveau contrat de prêt qui modifie substantiellement les conditions prévues par le précédent,

  • en application de l'article 1281, alinéa 2, du Code civil français, la novation opérée à l'égard du débiteur principal libère les cautions,

  • en tout état de cause, l'acte du 4 janvier 1995 nécessitait un nouvel engagement exprès de la caution, nonobstant la clause prévoyant qu'il n'emportait pas novation à l'égard du débiteur principal,

  • l'engagement de caution ne peut être prorogé dans le cadre d'un aménagement de contrat si celui-ci aggrave la situation du débiteur et donc l'engagement de la caution, comme cela résulte de la jurisprudence qui juge, dans un arrêt du 28 novembre 2006, que la situation du débiteur n'est pas aggravée dans le cadre d'un renouvellement de l'engagement de la caution dans des conditions strictement identiques et sans que les concours de la banque aient été augmentés, et, dans un arrêt du 18 juin 2013, que la banque commet une faute de nature à engager sa responsabilité lorsqu'elle pratique une politique de crédit ruineux pour l'entreprise ou apporte un soutien artificiel à une entreprise dont elle connaît ou aurait dû connaître la situation irrémédiablement compromise,

  • or les sommes remboursées dans le cadre du prêt de 1989 ajoutées à celles prêtées par le contrat de 1995 dépassent largement les sommes prêtées en 1989, la durée du prêt a été allongée, ce dont il résulte que la situation du débiteur s'est aggravée.

Sur la responsabilité de la banque :

Sur la recevabilité de l'action en responsabilité :

  • la créance de la banque étant fondée sur le contrat réaménagé en 1995, celle-ci ne peut se prévaloir de la lettre de dénonciation de 1994,

  • de plus, le concluant n'a pas été destinataire de la lettre du 1er mars 1994 puisqu'elle a été adressée à son ancien domicile et réceptionnée par Mme PE., la nouvelle occupante des lieux,

  • en tout état de cause, en consentant un nouveau prêt en janvier 1995, la banque a renoncé aux effets de la notification de la déchéance du terme du 1er mars 1994, et une nouvelle notification de la déchéance du terme postérieure à l'acte du 4 janvier 1995 s'imposait,

  • la banque n'établit pas que la lettre de dénonciation du 27 octobre 1997 a été notifiée au concluant,

  • la prescription de l'action en responsabilité de la banque n'ayant pu commencer à courir qu'à compter de l'acte introductif d'instance du 12 février 2013, l'action est recevable.

Sur le fond :

  • la responsabilité de la banque est engagée dès lors que le renouvellement du concours qu'elle a donné était abusif puisque les conditions des prêts consentis antérieurement et dès l'année 1989 n'avaient pu être respectées par l'emprunteur, que son comportement a retardé la procédure collective de la société et maintenu l'illusion de sa prospérité financière, que les engagements de caution du prêt de 1989 et de 1995 étaient disproportionnés par rapport aux biens et aux revenus du concluant et qu'elle a manqué à son obligation de mise en garde ainsi qu'à son obligation d'information de la caution imposée par l'article L.313-22 du code monétaire et financier,

  • la banque est également défaillante dans son obligation d'information annuelle de la caution prévue par l'article L.313-22 du Code monétaire et financier.

Aux termes de ses conclusions du 5 juillet 2016, la BNP demande à la Cour de :

  • confirmer le jugement,

  • rejeter comme irrecevables et non fondées les demandes de M. IA.,

  • condamner celui-ci à lui payer la somme de 1.504.647,36 euros, déduction faite des intérêts contractuels et du prix de vente perçu en cours de procédure, avec intérêts au taux légal, outre 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance et appel abusifs,

  • condamner M. IA. aux dépens d'appel distraits au profit de Maître Patricia REY, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Elle soutient en substance que :

Sur la novation du contrat de prêt :

  • en consentant, le 4 janvier 1995, le réaménagement des sommes restant dues sur le crédit consenti le 22 septembre 1989, la concluante n'a renoncé qu'à la déchéance du terme prononcée le 1er mars 1994 et non à sa créance,

  • l'avenant du 4 janvier 1995 ne constitue pas un nouveau prêt mais un réaménagement des modalités de remboursement du solde dû sur le prêt du 22 septembre 1989,

  • le crédit réaménagé porte ainsi sur la somme de 18.084.017,10 euros correspondant au capital restant dû sur le crédit octroyé en 1989, déduction faite des mensualités réglées qui se sont imputées pour partie sur les intérêts,

  • le taux d'intérêt ayant diminué de manière significative, la situation de l'emprunteur ne s'est pas aggravée,

  • en l'absence d'aggravation, il n'y avait pas lieu de signer un nouvel engagement de caution,

  • M. IA. ne peut prétendre au bénéfice des articles L.341-2 et suivants du Code civil qui étaient inapplicables en 1995,

  • les parties ont exprimé clairement l'absence de novation de la dette initiale,

  • en l'absence de justificatif de l'information de la caution, la concluante a recalculé sa créance avec application de la déchéance des intérêts et déduction du principal de sa créance à compter du 1er juillet 1999 des règlements effectués, soit 1.504.647,36 euros que M. IA. doit être condamné à lui payer.

Sur l'action en responsabilité exercée par M. IA.

Sur sa recevabilité :

  • la prescription de l'action en responsabilité a couru à partir du jour de la mise en demeure de la caution d'avoir à respecter ses engagements,

  • M. IA. n'établit pas que la personne qui aurait réceptionné cette lettre et porté sa signature sur l'avis de réception n'avait pas qualité pour le faire,

  • l'action de la caution se prescrivant, sous l'empire des textes en vigueur antérieurement à la réforme de 2008, par dix ans, M. IA. disposait d'un délai expirant au plus tard le 5 mars 2004 pour présenter des demandes indemnitaires contre la concluante,

  • son action indemnitaire n'ayant été introduite qu'à travers la présente instance en 2013, elle est prescrite.

Sur le fond :

  • le devoir de mise en garde ne constitue une obligation qu'à l'égard d'une caution profane, ce que n'est pas M. IA., que si l'opération financée présente un risque particulier d'endettement née de l'octroi de crédit et si l'emprunteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise lors du crédit, ce qui n'est pas le cas.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures précitées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que les appels, principal et incident, régulièrement formés dans les conditions de fond et de forme prévues par le Code de procédure civile, doivent être déclarés recevables ;

Sur la novation

Attendu que, selon les articles 1271, alinéa 1er, et 1273 du Code civil français, dans leur version applicable au litige, la novation, qui s'opère lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, ne se présume pas, la volonté de l'opérer devant résulter clairement de l'acte ;

Attendu qu'au cas particulier, les parties ont intitulé l'acte du 4 janvier 1995 «  avenant » au prêt consenti par la BNP à la SCI le 22 septembre 1989 ; que, de plus, comme le souligne la banque, elles n'ont procédé qu'à un réaménagement des modalités de remboursement des sommes restant dues par la SCI au titre de ce prêt, en convenant d'un taux d'intérêt variable, et non plus fixe, d'une période différée de remboursement et d'un allongement de la durée du crédit ; que, de surcroît, elles ont maintenu les autres clauses du contrat et écarté expressément toute volonté de nover ;

Qu'en agissant ainsi, la BNP et la SCI n'ont pas entendu conclure un nouveau contrat le 4 janvier 1995 ayant pour effet de se substituer à celui du 22 septembre 1989, de sorte que, comme l'a exactement jugé le Tribunal, elles ont maintenu l'obligation existante et n'ont pas opéré de novation ;

Qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient M. IA., l'acte du 4 janvier 1995 ne nécessitait pas un nouvel engagement exprès de la caution ;

Attendu que le principe allégué par l'appelant selon lequel l'engagement de caution ne peut être prorogé à l'occasion d'un aménagement de contrat de prêt, si celui-ci aggrave la situation du débiteur, n'est ni légal, ni jurisprudentiel ;

Qu'en effet, les décisions de la Cour de cassation dont il se prévaut ne sont relatifs qu'à l'éventuelle responsabilité de la banque, s'agissant de l'arrêt du 28 novembre 2006, à l'égard d'une caution dirigeante lorsqu'elle aggrave la situation du débiteur principal en augmentant abusivement le concours qu'elle lui accorde et, s'agissant de l'arrêt du 18 juin 2013, à l'égard de l'emprunteur à qui un prêt de restructuration comporte un risque d'endettement et constitue un soutien abusif ;

Qu'il s'ensuit que M. IA. n'est pas libéré de son obligation de caution à l'égard de la BNP, comme l'a jugé à bon droit le Tribunal ;

Attendu que le jugement sera donc confirmé sur la condamnation en paiement de M. IA. à l'égard de la BNP, sauf à ramener le montant à la somme de 1.504.647,36 euros pour tenir compte de la déduction des intérêts et du prix de vente perçu en cours de procédure ;

Sur la recevabilité de l'action en responsabilité pour faute exercée par M. IA.

Attendu que le délai de prescription de l'action en responsabilité intentée par M. IA. à l'égard de la BNP a commencé à courir à partir du jour où il a connaissance que les obligations résultant de son engagement étaient mises à exécution par cette dernière ;

Que cette connaissance résulte de la lettre recommandée du 1er mars 1994 avec avis de réception signé le 5 mars 1994, par laquelle la BNP a mis M. IA. en demeure de lui payer les sommes dues par la SCI, à la suite de la défaillance de celle-ci ;

Que M. IA. produit certes un courrier de Mme PE. du 30 janvier 2014 aux termes duquel celle-ci indique que la signature apposée sur l'avis de réception du 5 mars 1994 est la sienne ;

Que, cependant, Mme PE. n'affirme pas ne pas avoir remis la mise en demeure du 1er mars 1994 à M. IA. ;

Que l'assertion de celui-ci selon laquelle il n'a pas été destinataire de cette mise en demeure est d'autant moins crédible que, comme dans ses conclusions de première instance du 14 octobre 2015 (p.13), il admet, dans ses écritures d'appel du 13 décembre 2016 (p.18), avoir reçu cette lettre ;

Qu'au regard de ces éléments, la Cour retient que M. IA. a été destinataire, le 5 mars 1994, de la mise en demeure du 1er mars 1994 ;

Que, dès lors, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, le délai de prescription, qui était de dix ans en application de l'article 189 bis, alors en vigueur, devenu L.110-4 du Code de commerce dans sa version applicable au litige, a commencé à courir à compter de cette date ;

Attendu qu'en convenant avec la SCI, le 4 janvier 1995, du réaménagement du prêt du 22 septembre 1989, la BNP n'a nullement renoncé, de façon expresse et non équivoque, au droit de se prévaloir de la prescription ;

Attendu que la prescription décennale était donc acquise lorsque M. IA. a introduit son action en responsabilité contre la banque par ses conclusions déposées le 22 mai 2013, à l'occasion de l'instance introduite le 20 février 2013 par la BNP en validation de la saisie-arrêt ;

Qu'en conséquence, par voie de confirmation du jugement, son action en responsabilité pour faute sera déclarée irrecevable ;

Sur les autres demandes de dommages et intérêts

Attendu que M. IA., qui succombe en son appel, ne saurait obtenir le paiement des frais irrépétibles exposés pour sa défense ;

Qu'il ne démontre pas le bien-fondé de sa demande au titre de l'article 1229 du Code civil ; Qu'il en sera donc débouté ;

Attendu que la BNP ne rapporte pas la preuve d'une faute commise par M. IA. de nature à révéler un abus de droit dans l'exercice du droit de résister à une demande en paiement et d'exercer une voie de recours ;

Qu'elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;

Attendu que la procédure initiée par la BNP n'étant pas abusive, M. IA. sera également débouté de sa demande en réparation à ce titre ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit les appels,

Confirme le Jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné M. c. IA. à payer à la société BNP PARIBAS la somme de 1.699.647,36 euros en exécution de son engagement de caution du 22 septembre 1989 et de l'avenant du 4 janvier 1995,

Le réformant de ce chef,

Condamne M. c. IA. à payer à ce titre à la société BNP PARIBAS la somme de 1.504.647,36 euros, Y ajoutant,

Déboute M. c. IA. de sa demande en paiement de dommages et intérêts fondée sur l'article 1229 du Code civil,

Déboute les parties de leurs demandes de dommages et intérêts pour résistance, procédure et voie de recours abusives,

Condamne M. c. IA. aux dépens distraits au profit de Maître Patricia REY, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, Monsieur Paul CHAUMONT, Conseiller, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 28 mars 2017, par Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, faisant fonction de Président, assistée de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Monsieur Jacques DORÉMIEUX, Procureur Général.

Arrêt signé seulement par Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, en l'état de l'empêchement de signer de Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, (article 60 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires).

  • Consulter le PDF