Cour d'appel, 9 janvier 2017, La SARL A c/ Monsieur Jean-Paul SAMBA

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Abstract🔗

Juge commissaire – Ordonnance – Appel – Formalisme – Recevabilité de l'appel (non)

Résumé🔗

Les dispositions de l'article 418 du Code de commerce sont applicables à l'appel interjeté par la SARL A. Il résulte de ce texte que l'ordonnance du Juge commissaire est immédiatement déposée au Greffe général et publiée au Journal de Monaco à la diligence du Greffier en chef, toute personne y ayant intérêt, pouvant interjeter appel par déclaration motivée faite au Greffe général dans les huit jours de cette publication, la Cour d'appel devant alors statuer dans le mois. Un tel formalisme tend à concilier les impératifs de célérité requis en matière de procédure collective et le nécessaire respect du contradictoire, le syndic et le Procureur général étant ainsi en mesure de répliquer à un acte d'appel motivé avant la mise en délibéré de l'affaire dans le délai susvisé d'un mois. Mais, en l'espèce, la déclaration d'appel effectuée par i. IV. au Greffe général le 9 décembre 2016 ne répond pas aux prescriptions légales en ce qu'elle n'est pas motivée, en sorte que ni le Procureur général, ni le syndic de la cessation des paiements de la SARL A n'ont été mis en mesure de connaître les griefs énoncés à l'encontre de l'ordonnance entreprise et de faire valoir leurs moyens pour que la Cour statue dans le délai impératif susvisé. Il s'ensuit que l'appel doit être déclaré irrecevable.


Motifs🔗

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 9 JANVIER 2017

En la cause de :

  • - La Société à responsabilité limitée A, dont le siège social est sis X1, à Monaco, prise en la personne de sa gérante associée Mademoiselle i. IV., demeurant en cette qualité audit siège ;

COMPARAISSANT EN PERSONNE ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

  • - Monsieur Jean-Paul SAMBA, expert-comptable, syndic près les Tribunaux de Monaco, demeurant à Monaco, Stade Louis II, entrée F 9, avenue des Castelans, agissant en qualité de Syndic de la cessation des paiements de la SARL A, nommé à cette fonction par jugement du Tribunal de première instance de la Principauté de Monaco en date du 20 septembre 2016 ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉ,

d'autre part,

En présence de :

  • - Monsieur le Procureur Général,

LA COUR,

Vu l'ordonnance rendu le 24 novembre 2016 par Monsieur le Juge Commissaire de la cessation des paiements de la SARL A, publiée au Journal de Monaco du 2 décembre 2016 ;

Vu la déclaration d'appel effectuée au Greffe général le 9 décembre 2016 par i. IV., ès-qualités de gérante associée de la SARL A (enrôlée sous le n° 2017/000064) ;

Vu les conclusions du Ministère Public en date du 27 décembre 2016 ;

Vu les débats à l'audience du 3 janvier 2017 ;

Vu la note en délibéré valant conclusions et les pièces jointes déposées le 5 janvier 2017 au Greffe de la Cour d'appel par i. IV., ès-qualités de gérante associée de la SARL A ;

Vu la note en délibéré valant conclusions déposée le 5 janvier 2017 au Greffe de la Cour d'appel par Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur, au nom de Monsieur Jean-Paul SAMBA ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé selon déclaration en date du 9 décembre 2016, par i. IV., gérante associée de la SARL A, à l'encontre d'une ordonnance rendue par le Juge Commissaire le 24 novembre 2016.

Considérant les faits suivants :

Suivant jugement en date du 20 septembre 2016, le Tribunal de première instance a prononcé la cessation des paiements de la SARL A, jusqu'alors dirigée par Dominique STAGLIANO, gérant démissionnaire.

Au terme d'une assemblée générale extraordinaire en date du 12 octobre 2015, les associés avaient en effet préalablement pris acte de la démission de ce dernier et nommé, sous condition suspensive de l'obtention de l'autorisation du Gouvernement Princier, i. IV. en qualité de nouveau gérant ; suivant décision ministérielle 4 octobre 2016, cette dernière était autorisée à exercer en qualité de gérante associée au lieu et place du gérant démissionnaire, l'avis de publicité ayant été ultérieurement inséré dans le journal de Monaco du 28 octobre 2016.

Le syndic désigné par le jugement de cessation des paiements du 20 septembre 2016, rencontrait le 23 septembre 2016 Dominique STAGLIANO qui lui faisait part du souhait des associés de poursuivre l'activité de la SARL A.

La demande de poursuite d'activité était réitérée par ce dernier et Mademoiselle IV. gérante, suivant courrier du 20 octobre 2016, faisant état de leur volonté de continuer les différents chantiers en cours, outre ceux signés après le 20 septembre 2016.

Selon courrier avec accusé de réception en date du 4 novembre 2016, le syndic, observant notamment que les avances permettant de couvrir trois mois d'exploitation et la constitution d'un fond de roulement n'avaient pas été effectués, mettait alors en demeure les associés d'effectuer un apport de 360.000 euros correspondant aux frais d'administration ainsi qu'aux salaires et charges pour trois mois d'exploitation.

La gérante répliquait que l'apport requis par le syndic afin de garantir la continuation de l'activité n'était pas justifié.

Suivant un ultime courrier du 8 novembre 2016, le syndic mettait en demeure la SARL A de cesser toute activité et de communiquer par retour son accord afin de licencier l'ensemble du personnel pour motif économique.

Le syndic Jean-Paul SAMBA déposait alors requête le 10 novembre 2016 tout en s'en remettant à la décision du Juge commissaire concernant la demande de poursuite d'activité émanant de la SARL A conformément à l'article 443 du Code de commerce.

Il considérait, aux termes de cette requête, ne pas disposer de garanties suffisantes pour assurer une poursuite d'activité durant une période de trois mois, ni des fonds nécessaires au paiement des créances salariales relatives à des ruptures de contrat de travail en dehors du délai de deux mois garanti par la Caisse de Garantie des Créances des Salariés et il émettait en conséquence un avis défavorable à la demande de poursuite d'activité ainsi présentée.

Suivant ordonnance en date du 24 novembre 2016, le Juge commissaire a rejeté la requête aux fins de poursuite d'activité en excipant des obstacles suivants :

  • - les comptes de l'exercice 2015 n'ont pas été produits,

  • - il n'existe pas de garantie concernant le paiement par les associés des achats, des marchandises et des sous-traitants,

  • - les salaires et charges sociales représentent à eux seuls une somme mensuelle d'environ 40.000 euros, ce qui démontre que la somme de 100.000 euros permettant selon les associés de couvrir trois mois d'activité, s'avère insuffisante.

Suivant déclaration effectuée au Greffe le 9 décembre 2016 i. IV., gérante associée intervenant pour le compte de la SARL A, a déclaré interjeter appel de l'ordonnance rendue le 24 novembre 2016 par le Juge commissaire de la cessation des paiements de la SARL A ayant rejeté la requête aux fins de poursuite d'activité de cette société.

Le Ministère Public a, par conclusions du 27 décembre 2016, conclu à titre principal à l'irrecevabilité de l'appel au motif qu'il serait dépourvu de motivation et ce, en contravention avec les dispositions de l'article 418 du Code de commerce et, à titre subsidiaire, à la confirmation de l'ordonnance déférée, la poursuite d'activité étant selon lui de nature à aggraver la situation des salariés et des créanciers de l'entreprise.

À l'audience de plaidoirie du 3 janvier 2017 la société appelante, prise en la personne de sa gérante associée d'une part, et le syndic Jean-Paul SAMBA d'autre part, ont sollicité un délai de 48 heures pour déposer une note en réponse et ce, à défaut de pouvoir obtenir le renvoi de l'affaire en l'état des dispositions de l'article 418 du Code de commerce imposant à la Cour de statuer dans le délai d'un mois à compter de l'appel.

La gérante de la SARL A a déposé 5 janvier 2007 une note en délibéré aux termes de laquelle elle explique d'une part ne pas avoir motivé sa déclaration d'appel du fait de son manque de connaissances juridiques et réitère d'autre part sa demande de poursuite d'activité pour une période de trois mois en faisant valoir qu'une augmentation de capital de 300.000 euros a été effectuée au mois de juin 2016 et qu'un emprunt de 160.000 euros a été contracté par ses soins pour procéder à des virements mensuels dans le but de ne pas aggraver le passif de la société.

Le conseil du syndic de la SARL A a également déposé une note en délibéré le 5 janvier 2017 aux termes de laquelle il conclut à titre principal à l'irrecevabilité de l'appel non motivé interjeté par Mademoiselle IV. et, à titre subsidiaire, la confirmation de l'ordonnance rendue le 24 novembre 2016 par le Juge commissaire de la cessation des paiements de la SARL A ayant rejeté la demande de poursuite d'activité.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que les dispositions de l'article 418 du Code de commerce sont applicables à l'appel interjeté par la SARL A ;

Qu'il résulte de ce texte que l'ordonnance du Juge commissaire est immédiatement déposée au Greffe général et publiée au Journal de Monaco à la diligence du Greffier en chef, toute personne y ayant intérêt, pouvant interjeter appel par déclaration motivée faite au Greffe général dans les huit jours de cette publication, la Cour d'appel devant alors statuer dans le mois ;

Qu'un tel formalisme tend à concilier les impératifs de célérité requis en matière de procédure collective et le nécessaire respect du contradictoire, le syndic et le Procureur général étant ainsi en mesure de répliquer à un acte d'appel motivé avant la mise en délibéré de l'affaire dans le délai susvisé d'un mois ;

Mais attendu qu'en l'espèce la déclaration d'appel effectuée par i. IV. au Greffe général le 9 décembre 2016 ne répond pas aux prescriptions légales en ce qu'elle n'est pas motivée, en sorte que ni le Procureur général, ni le syndic de la cessation des paiements de la SARL A n'ont été mis en mesure de connaître les griefs énoncés à l'encontre de l'ordonnance entreprise et de faire valoir leurs moyens pour que la Cour statue dans le délai impératif susvisé ;

Qu'il s'ensuit que l'appel doit être déclaré irrecevable ;

Attendu que les dépens d'appel resteront à la charge de la partie appelante qui succombe ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Vu les dispositions de l'article 418 du Code de commerce,

Vu la déclaration non motivée effectuée par i. IV., gérante associée de la SARL A, le 9 décembre 2016 au Greffe général de la Cour d'appel,

Déclare l'appel irrecevable,

Laisse les frais de l'instance à la charge de la SARL A avec distraction au profit de Maître Christophe SOSSO, avocat défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,

Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, Madame Virginie ZAND, Conseiller, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 9 JANVIER 2017, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Monsieur Hervé POINOT, Procureur Général Adjoint.

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