Cour d'appel, 10 novembre 2015, g. RI., b. GH. épouse RI. c/ Société Civile Immobilière dénommée TE.

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Abstract🔗

Copropriété - Responsabilité civile - Dommages causés à une partie privative par des désordres affectant une partie commune - Action en responsabilité d'un copropriétaire contre le syndicat - Responsabilité de plein droit du syndicat (oui)

Résumé🔗

Aux termes de l'article 5 de la loi n° 1.329 du 8 janvier 2007, le syndicat des copropriétaires est chargé de la conservation de l'immeuble et de l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires et aux tiers par le vice de construction des parties communes ou par leur défaut d'entretien, sans préjudice de toutes actions nécessaires. Ainsi, le syndicat des copropriétaires a l'obligation légale de conservation de l'immeuble, en sorte que tout manquement à l'entretien des parties communes, générateur d'un dommage, entraîne la responsabilité du syndicat des copropriétaires, sans que le demandeur à l'action en responsabilité ait à rapporter la preuve d'une faute. Il se déduit, en conséquence, de l'article susvisé que :

- Le demandeur à l'action en responsabilité doit seulement rapporter la triple démonstration de l'existence d'un vice de construction ou d'un défaut d'entretien des parties communes, de l'existence d'un dommage et du lien de causalité direct existant entre eux.

- Le syndicat des copropriétaires ne peut pas s'exonérer de sa responsabilité en prouvant qu'il n'a pas commis de faute.

- Il peut, en revanche, échapper à sa responsabilité en rapportant la preuve de l'absence de lien de causalité entre l'état de l'immeuble et le préjudice invoqué.

En l'espèce, il n'est pas contesté, que le joint de dilatation situé entre les deux bâtiments de l'immeuble « Le Panorama » est une partie commune dont l'entretien et la conservation incombent au syndicat des copropriétaires et que l'origine des infiltrations constatées dans l'appartement des époux RI. provient d'une défectuosité de l'étanchéité de ce même joint. Il s'ensuit que le syndicat des copropriétaires doit être déclaré responsable des dommages subis par les époux RI.


Motifs🔗

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2015

En la cause de :

1/ Monsieur g. RI., né le 24 avril 1938 à Gênes (Italie), de nationalité italienne, retraité, domicilié et demeurant immeuble « X », à Monaco ;

2/ Madame b. GH. épouse RI., née le 2 février 1943 à Lavagna (Italie), de nationalité italienne, sans profession, domiciliée et demeurant immeuble « X », à Monaco ;

Ayant tous deux élu domicile en l'Étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTS,

d'une part,

contre :

1/ La Société Civile Immobilière dénommée TERPAN, dont le siège social est sis à Monaco, « Le Millefiori », 1 rue des Genêts, prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur j. WO., domicilié et demeurant en cette qualité à Monaco, 2 avenue Saint-Charles ;

Ayant primitivement élu domicile en l'Étude de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, puis en celle de Maître Joëlle PASTOR-BENSA et plaidant par Maître Antoine PONCHARDIER, avocat au Barreau de Nice ;

2/ le Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble dénommé « Le Panorama », sis à Monaco, 57 rue Grimaldi, pris en la personne de son syndic en exercice, la Société Anonyme Monégasque dénommée « Cabinet WO. », dont le siège social est à Monaco, « Le Millefiori », 1 rue des Génêts, elle-même prise en la personne de son Président délégué en exercice, Monsieur j. WO., demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉS,

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 5 juin 2014 (R.5831) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 30 juillet 2014 (enrôlé sous le numéro 2015/000020) ;

Vu les conclusions déposées les 18 novembre 2014 et 2 juin 2015 par Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur, au nom du Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble dénommé « LE PANORAMA » ;

Vu les conclusions déposées les 17 février et 2 juin 2015 par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la Société Civile Immobilière dénommée TERPAN ;

Vu les conclusions déposées les 29 avril et 15 juillet 2015 par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de Monsieur g. RI. et de Madame b. GH. épouse RI. ;

À l'audience du 6 octobre 2015, ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par Monsieur g. RI. et Madame b. GH. épouse RI. à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Première Instance du 5 juin 2014.

Considérant les faits suivants :

Monsieur et Madame RI. étaient propriétaires d'un appartement au 16e et dernier étage de l'immeuble dénommé « LE PANORAMA », situé […] à Monaco, soumis au statut de la copropriété, et sur le toit duquel se trouve une terrasse à usage de la SCI TE., dont le gérant, Monsieur WO., est également syndic de la copropriété.

Déplorant la survenance de fissures et d'infiltrations d'eau affectant le plafond de leur appartement et de leur terrasse, et estimant que leur origine était liée à l'usage de la terrasse par la société précitée lors des manifestations du Grand prix automobile de Monaco, Monsieur et Madame RI. ont saisi le juge des référés afin que soit ordonnée une expertise.

Selon ordonnance en date du 28 mai 2008, le juge des référés a désigné Monsieur FE. en qualité d'expert judiciaire.

Par acte notarié en date du 26 février 2010, Monsieur Madame RI. ont vendu leur appartement à Monsieur DA. au prix de 12.000.000 d'euros.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 7 décembre 2010.

Selon exploit d'huissier en date du 12 mai 2011, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » et la SCI TE. ont fait assigner Monsieur Madame RI. devant le Tribunal de Première Instance aux fins, notamment, de voir homologuer le rapport d'expertise judiciaire et obtenir condamnation des défendeurs au paiement de la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis.

Selon exploit d'huissier en date du 13 mai 2011 (R2011/000591), Monsieur et Madame RI. ont fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » et la SCI TE. aux fins, notamment, d'obtenir leur condamnation in solidum au paiement d'une somme de 1.000.000 d'euros à titre de dommages-intérêts pour préjudices subis outre la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Par jugement contradictoire en date du 5 juin 2014, le Tribunal de Première Instance a statué ainsi qu'il suit :

  • « ordonne la jonction des instances enregistrées sous les numéros 2011/000547 et 2011/000591,

  • déclare recevable l'action introduite par les époux RI. selon assignation en date du 13 mai 2011,

  • déclare irrecevable l'action engagée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « selon assignation en date du 12 mai 2011,

  • homologue le rapport d'expertise déposé par Monsieur Robert FE. le 7 décembre 2010, à l'exception de sa conclusion relative au respect des prescriptions légales durant le Grand prix automobile 2009,

  • déboute Monsieur et Madame RI. de leurs demandes de dommages et intérêts à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « et de la SCI TE.,

  • condamne Monsieur et Madame RI. à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « et à la SCI TE. la somme de 10.000 euros chacun à titre de dommages-intérêts pour abus du droit d'agir en justice,

  • dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision,

  • condamne Monsieur et Madame RI. aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise réalisée par Monsieur FE., distraits au profit de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

  • ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ».

Par exploit d'appel et d'assignation délivré le 30 juillet 2014, Monsieur et Madame RI. ont relevé appel de la décision à l'encontre de toutes les parties.

Au terme de cet exploit et des conclusions récapitulatives des 29 avril 2015 et 15 juillet 2015, les appelants demandent à la Cour de :

  • « déclarer Monsieur et Madame RI. recevables en leur appel et les disant bien-fondés,

  • réformer le jugement entrepris du Tribunal de Première Instance du 5 juin 2014 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « selon assignation du 12 mai 2011 et en ce qu'il n'a pas homologué le rapport d'expertise déposée par Monsieur r. FE. le 7 décembre 2010 dans sa conclusion relative au respect des prescriptions légales durant le Grand prix automobile 2009,

statuant à nouveau,

  • dire et juger que le rapport d'expertise en date du 7 décembre 2010 de Monsieur FE. revêt un certain nombre d'incohérences et de contradictions, et refuser, en conséquence, son homologation, avec toutes conséquences de droit,

  • déclarer le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « responsable des troubles survenus dans l'appartement de Monsieur Madame RI. et du retard à y remédier,

  • déclarer la SCI TE. responsable des troubles survenus dans l'appartement de Monsieur Madame RI., causés par son utilisation abusive de la toiture terrasse,

en conséquence,

  • condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « et la SCI TE. à payer à Monsieur Madame RI. les sommes suivantes à titre de réparation :

  • préjudice de jouissance 450.000 €,

  • préjudice matériel générateur d'une moins-value pour la revente de l'immeuble 200.000 €,

  • préjudice moral 350.000 €,

l'ensemble de ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 13 mai 2011, date de la demande en justice,

  • condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « et la SCI TE. à payer à Monsieur et Madame RI. la somme de 10.000 € en raison de leur résistance abusive,

  • débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « et la SCI TE. de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions et notamment de leurs demandes de condamnation des époux RI. au paiement de la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts,

  • condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA « et la SCI TE. aux entiers dépens distraits au profit de Maître Patricia REY, avocat défenseur, sous sa due affirmation. »

Au terme de leurs écritures, les appelants soutiennent essentiellement que :

  • le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré le syndicat des copropriétaires irrecevable à ester en justice à leur encontre en application de l'article 21 de la loi n° 1.329 du 8 janvier 2007, le syndic n'ayant pas été autorisé à agir par l'assemblée générale des copropriétaires,

  • le jugement doit également être confirmé en ce qu'il a déclaré les époux RI. recevables à agir, l'intérêt à agir s'appréciant au jour de l'introduction de la demande en justice, et la vente de leur appartement le 26 février 2010 étant sans influence sur leur droit à obtenir réparation du préjudice subi du fait des désordres antérieurs,

  • le rapport d'expertise judiciaire, qui contient des incohérences et des erreurs, ne peut pas être homologué,

  • l'expert judiciaire, qui a émis un doute sur l'origine des désordres, n'a pas procédé à la moindre recherche de fuite ; il se contredit dans la date des travaux de réparation de l'étanchéité du joint de dilatation, il ne pouvait pas conclure dans son pré-rapport que les infiltrations avaient cessé alors qu'elles avaient été constatées deux mois plutôt au cours d'une visite effectuée sur site,

  • l'analyse de l'expert sur l'origine des désordres est discutable dans la mesure où ces désordres persistaient en octobre 2009 alors que le syndic avait réalisé les travaux préconisés par l'expert, ce dernier n'ayant nullement préconisé les travaux restant nécessaire ni chiffré leur coût,

  • les conclusions de l'expert sur l'origine des infiltrations qui proviendraient d'une simple défaillance du traitement d'étanchéité du joint sont erronées, les travaux réalisés par le syndic s'étant avérés inefficaces,

  • il aura fallu attendre le mois de juillet 2010 pour que la copropriété, consciente des désordres affectant toujours l'appartement de Monsieur RI., fasse procéder à la réfection complète du joint de dilatation entre les bâtiments AB et CD,

  • ce ne sont pas moins de trois réparations sur le joint de dilatation qui ont finalement été réalisées par la copropriété au cours des opérations d'expertise, seule la dernière, réalisée plus de deux ans après l'ordonnance de référé, mettant fin aux désordres constatés,

  • l'expert a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que le revêtement en carrelage de la toiture terrasse était un ouvrage privatif alors que le règlement de copropriété mentionne qu'il s'agit d'une partie commune,

  • il a omis, dans son rapport définitif, d'aborder la question des désordres de fissuration des carrelages de la toiture terrasse qu'il avait pourtant constatés et attribués, à l'origine, à l'exposition aux rayons du soleil et aux variations de température,

  • alors que des incertitudes demeurent sur les effets d'une surcharge de la toiture-terrasse en raison de son utilisation intensive durant les manifestations du Grand prix, l'expert a procédé à des calculs erronés et s'est mépris sur la réglementation applicable à l'usage des terrasses en visant un arrêté ministériel abrogé,

  • la responsabilité du syndicat des copropriétaires, telle qu'elle résulte de la loi du 8 janvier 2007, est une responsabilité de plein droit, dont il ne peut s'exonérer qu'en établissant un cas de force majeure ou une faute de la victime, non constitués au cas d'espèce, et sa condamnation à réparer l'atteinte portée à la jouissance, par les époux RI., de leur lot privatif, consécutive à un défaut d'entretien des parties communes, s'impose,

  • dès lors, le jugement qui, pour exonérer le syndicat des copropriétaires, a retenu l'absence de faute, encourt la réformation,

  • les préjudices subis sont multiples : préjudice de jouissance dû à l'impossibilité d'user normalement de la pièce, siège des désordres, et de la terrasse pendant trois ans, préjudice matériel générateur d'une moins-value pour la revente de l'immeuble (appartement estimé à la somme de 15 millions d'euros, vendu 12 millions d'euros), préjudice moral résultant de l'attitude de la copropriété et qui a conduit les époux RI. à déménager, frais de procédure en raison de la résistance abusive opposée par le syndicat des copropriétaires,

  • la condamnation à paiement de dommages-intérêts pour abus de droit d'ester en justice prononcée par les premiers juges n'est pas justifiée, aucune faute ne pouvant être reprochée aux époux RI. dans leur action judiciaire.

Aux termes de conclusions en date du 18 novembre 2014 et de conclusions n° 2 dites récapitulatives et en réponse en date du 2 juin 2015, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » demande à la Cour de :

  • « voir débouter Monsieur et Madame RI. de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

  • voir réformer le jugement rendu par le Tribunal de Première Instance en date du 5 juin 2014 en ce qu'il a déclaré recevable l'action introduite par les époux RI. suivant assignation du 13 mai 2011,

  • statuant à nouveau, voir dire et juger que l'action engagée par Monsieur et Madame RI. selon assignation en date du 13 mai 2011 est irrecevable avec toutes conséquences de droit,

  • voir réformer le jugement rendu par le Tribunal de Première Instance en date du 5 juin 2014 en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA «, selon assignation en date du 12 mai 2011,

  • statuant à nouveau, voir dire et juger que l'action engagée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA «, selon assignation en date du 12 mai 2011, est recevable,

  • voir réformer ledit jugement en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise déposé par Monsieur r. FE. le 7 décembre 2010, à l'exception de sa conclusion relative au respect des prescriptions légales durant le Grand prix automobile 2009,

  • statuant à nouveau, voir homologuer avec toutes conséquences de droit le rapport d'expertise de Monsieur FE. en date du 7 décembre 2010 dans son intégralité,

  • voir confirmer le jugement du 5 juin 2014 en ce qu'il a notamment débouté Monsieur et Madame RI. de leur demande de dommages-intérêts à l'encontre du syndicat des copropriétaires » LE PANORAMA «,

  • voir confirmer le jugement du 5 juin 2014 en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame RI. » et « (sic) payer des dommages-intérêts notamment au syndicat des copropriétaires de l'immeuble » LE PANORAMA «, mais le voir réformer uniquement sur le quantum et condamner les consorts RI. au paiement d'une somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

  • voir condamner Monsieur et Madame RI. aux entiers frais et dépens, tant de première instance que d'appel, lesquels comprendront le coût de l'expertise réalisée par Monsieur FE., dont distraction au profit de Me Christophe SOSSO, avocat-défenseur, sous sa due affirmation. »

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » fait valoir, en premier lieu, qu'il est recevable à agir sur le fondement de l'article 21 de la loi du 8 janvier 2007.

Il considère que dans la mesure où Monsieur RI. a pris l'initiative de l'assigner en référé, il a bien la qualité de défendeur dans les actions intentées à son encontre.

Il ajoute que l'inertie opposée par les consorts RI. suite au dépôt du rapport d'expertise est à l'origine de l'assignation qu'il a été contraint de délivrer le 12 mai 2011 aux fins d'homologation de ce rapport.

Il estime qu'ayant été destinataire d'une injonction adressée par les époux RI., aucune autorisation d'ester en justice n'était nécessaire puisqu'il s'agissait, pour lui, de prendre des mesures provisoires.

Il souligne que les copropriétaires ont toujours été tenus informés du déroulement de la procédure et ce, dès l'origine.

Rappelant que la loi du 8 janvier 2007 n'impose aucun formalisme précis dans le libellé du mandat donné au syndic, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » fait état du libéralisme de la jurisprudence française et considère, dès lors, que les différentes assemblées générales ainsi que les délibérations du conseil syndical valident l'action judiciaire entreprise.

En second lieu, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » soutient que les époux RI. sont irrecevables en leurs demandes pour défaut d'intérêt à agir.

Il fait grief au jugement de ne pas avoir tiré les conséquences légales du principe selon lequel l'intérêt à agir doit être né et actuel.

Il observe que l'assignation introductive d'instance a été délivrée le 13 mai 2011 par les époux RI. alors que depuis le 26 février 2010, date à laquelle ils ont vendu leur appartement, ceux-ci n'avaient plus de lien de droit avec la copropriété.

Il considère qu'ayant en outre vendu leur appartement en réalisant une plus-value de plus de 10 millions d'euros, les appelants n'ont subi aucun préjudice, l'expert judiciaire n'ayant, par ailleurs, relevé aucun désordre, ni malfaçon, ni dangerosité dans le cadre de sa mission.

Il se fonde sur une disposition de l'acte de vente du 26 février 2010, signé entre les appelants et Monsieur DA., pour en déduire que l'acquéreur du bien a estimé qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre la procédure mise en place en l'absence de préjudice réel et direct.

Il constate que les époux RI. n'ont pas déclaré le sinistre à leur compagnie d'assurance.

Sur le fond, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » conclut à l'homologation du rapport de l'expert judiciaire, à propos duquel il affirme qu'il ne contient aucune contradiction et que l'expert a clairement répondu aux chefs de mission qui lui ont été confiés.

Sur les fissurations du revêtement du sol en carrelage, le syndicat des copropriétaires rappelle qu'aux termes du règlement de copropriété, les terrasses, même affectées privativement, constituent des parties communes.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » souligne, en outre, que selon le rapport de l'expert judiciaire, les désordres constatés sont dus, non pas à l'emplacement des jardinières, mais au joint de dilatation qui a été successivement réparé en juin 2008, février 2009, septembre 2009 avant qu'il ne soit procédé à sa réfection complète.

Il affirme qu'en droit monégasque, il n'existe pas de responsabilité de plein droit du syndicat des copropriétaires

Il estime qu'il n'a pas commis de faute, qu'il a fait diligence pour définir l'origine des désordres et entreprendre les travaux nécessaires et considère, dès lors, qu'il ne peut lui être reproché aucun défaut d'entretien des parties communes.

Si sa responsabilité de plein droit devait, malgré tout, être retenue, il invoque, pour s'exonérer, l'inertie et le laxisme des époux RI. qui ont reporté à plusieurs reprises le rendez-vous avec l'expert de la compagnie d'assurances de la copropriété, retardant ainsi les travaux.

Il observe, par ailleurs, que l'expert judiciaire a bien pris en considération l'arrêté ministériel du 9 mai 2005, en vigueur lors du Grand prix automobile de 2009, et non pas l'arrêté ministériel de 2001, abrogé.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » estime que les époux RI., qui n'ont effectué aucune déclaration de leur sinistre à leur propre compagnie d'assurances, qui n'ont subi que de très légères infiltrations, qui n'ont entrepris aucuns travaux d'embellissement dans leur appartement, et qui ont réalisé une plus-value substantielle, de plus de 10.000.000 d'euros, lors de la vente de celui-ci, ne justifient d'aucun préjudice.

À l'inverse, il précise avoir lui-même subi un préjudice. À ce titre, il reproche aux premiers juges d'avoir considéré le syndic comme une personne juridique distincte de la copropriété, ce dernier n'agissant, dans le présent litige, qu'ès-qualités et non à titre personnel. Il rappelle que les allégations des époux RI., qui n'ont pas hésité à remettre en cause la probité du syndic, ont porté atteinte à l'image de marque de cette résidence de standing.

Il approuve, enfin, les premiers juges d'avoir condamné les époux RI. au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive mais estime, néanmoins, que le quantum des sommes allouées devrait être porté à 50.000 euros.

Aux termes de conclusions déposées le 17 février 2015, et de conclusions récapitulatives en date du 2 juin 2015, la société civile immobilière dénommée TE., intimée et appelante incidente, demande à la Cour de :

« - déclarer irrecevable et en tout cas sans fondement l'ensemble des demandes présentées par les époux RI. en cause d'appel,

  • en conséquence les rejeter,

  • statuer ce qu'il appartiendra sur la recevabilité de l'action du syndicat des copropriétaires à l'encontre des époux RI.,

  • en tout cas, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise déposé par Monsieur r. FE. le 7 décembre 2010 mais l'infirmer en ce qu'il a estimé que l'expert judiciaire n'avait pas pris en compte les dispositions de l'arrêté du 9 mai 2005 concernant la manifestation du Grand prix automobile 2009,

  • en conséquence, homologuer dans toute sa teneur ledit rapport d'expertise,

  • dire en conséquence que la SCI TE. n'a commis aucune faute de nature à porter préjudice aux époux RI.,

  • confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu la responsabilité fautive des époux RI. à l'égard de la SCI TE., mais réformer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné lesdits appelants à payer à la SCI TE. la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts et de ce chef entendre condamner les époux RI. à payer à la SCI TE. la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis toutes causes confondues,

  • condamner Monsieur et Madame RI. aux entiers dépens lesquels comprendront les frais d'expertise, les dépens étant distraits au profit de Maître PASTOR-BENSA, défenseur. »

La SCI TE. fait sienne l'argumentation relative à la fin de non-recevoir soulevée par le syndicat des copropriétaires tirée du défaut d'intérêt à agir des appelants.

Sur le fond, la société TE. fait valoir que le rapport d'expertise judiciaire n'encourt aucune critique et que l'expert a clairement répondu aux chefs de mission confiés.

Elle observe que l'expert n'a constaté qu'un seul désordre, consistant en une « très légère infiltration », qui n'existe plus aujourd'hui et qui n'a, au demeurant, pas « induit de risque au sens de la solidité de l'édifice », ni affecté « la solidité de l'appartement du requérant » ; que ce professionnel a également pu constater que les prescriptions légales et réglementaires pour les installations effectuées sur la toiture-terrasse du bâtiment lors du Grand Prix 2009 avaient été respectées, et que le non-respect d'une disposition du règlement de copropriété n'a entraîné aucune conséquence sur l'édifice ou sur les ouvrages de l'appartement RI..

Elle rappelle la position du syndicat des copropriétaires selon laquelle la réparation de l'étanchéité située au droit du joint de dilatation entre les deux blocs de construction a été effectuée en janvier 2008, aucun autre désordre n'a est signalé jusqu'à l'automne 2009, que lors des fortes pluies survenues dans le courant de l'automne 2009, des désordres mineurs se sont manifestés, lesquels ont été réparés, que les désordres présentés par les carrelages n'ont aucun lien avec le présent litige, limité au défaut d'étanchéité d'une partie commune et totalement éradiqué à ce jour, qu'il n'est pas davantage démontré que les bacs jardinières situés sur la toiture terrasse soient en cause dans le sinistre allégué et qu'enfin s'agissant des conditions d'occupation des terrasses à l'occasion de manifestations publiques, les prescriptions de l'arrêté du 9 mai 2005 ont bien été respectées, l'ensemble des pièces et formalités utiles à cette occupation ayant été versé aux débats.

Elle s'étonne que les appelants demandent la condamnation in solidum de la SCI et de la copropriété.

La SCI TE. souligne, en effet, qu'il ne saurait y avoir condamnation in solidum dès lors que sa responsabilité n'est pas visée dans le dispositif des conclusions des appelants et qu'au surplus, le demandeur doit rapporter la preuve que les parties dont la responsabilité est recherchée ont, chacune, concouru à la réalisation de l'entier dommage.

Elle rappelle qu'en l'espèce, des travaux d'étanchéité ont été réalisés par le syndicat des copropriétaires à deux reprises dans le courant de l'année 2008, puis en juillet 2010, s'agissant de travaux affectant les parties communes et que par l'effet de ces travaux, le désordre a cessé, en sorte qu'aucune demande indemnitaire ne saurait être formulée à l'encontre de la SCI qui n'a commis aucune faute dans l'usage de ses parties privatives.

Elle relève que les désordres mineurs ne pouvaient entraîner ni préjudice de jouissance, ni atteinte à la sécurité des époux RI. ; que, compte tenu du prix de vente de l'appartement, bien supérieur à celui du marché, les appelants ne peuvent alléguer aucun préjudice financier ; qu'en toute hypothèse, ils ne justifient, ni ne démontrent le moindre préjudice causé par la SCI TE.

Elle considère que le tribunal a justement qualifié d'abusive l'action en justice introduite par les époux RI., ces derniers n'ayant pas hésité à accuser la SCI et à mettre en cause la probité de son gérant, Monsieur WO., également syndic de la copropriété. Elle estime cependant qu'au regard de la faute des époux RI., ceux-ci doivent être condamnés au paiement d'une somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus visées auquel il est expressément renvoyé.

SUR CE,

1- Attendu que la recevabilité des appels, principal et incidents, régularisés dans les conditions et délai prescrits par le Code de procédure civile, n'est pas contestée ;

2- Attendu qu'aux termes de l'article 21 de la loi n° 1.329 du 8 janvier 2007, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat qu'après y avoir été autorisé par l'assemblée générale. Qu'une telle autorisation n'est cependant pas nécessaire pour les mesures conservatoires, les actions en recouvrement de créances, les demandes en référé ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat ;

Que l'autorisation, qui émane de l'assemblée générale, doit être expresse, et résulter d'un vote régulièrement intervenu sur une question inscrite à l'ordre du jour de ladite assemblée ;

Attendu qu'en l'espèce, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » prétend d'une part qu'une autorisation d'ester en justice n'était pas nécessaire, d'autre part qu'il avait obtenu de l'assemblée générale l'autorisation requise ;

Attendu que, selon exploit d'huissier en date du 12 mai 2011, le syndicat des copropriétaires « LE PANORAMA » a fait assigner Monsieur et Madame RI. devant le Tribunal de Première Instance aux fins, notamment, d'obtenir l'homologation du rapport d'expertise judiciaire établi par Monsieur FE. et la condamnation des défendeurs au paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » ne saurait invoquer l'instance en référé précédemment introduite à son encontre par les époux RI., pour prétendre échapper à la nécessité d'obtenir une autorisation de l'assemblée générale en vue de l'assignation introductive d'instance au fond qu'il a délivrée le 12 mai 2011, les deux instances étant parfaitement distinctes et obéissant, en application du texte précité, à deux régimes différents ;

Qu'en outre, la mise en demeure qui lui a été adressée le 7 avril 2011 par le conseil des époux RI. ne dispensait pas le syndicat des copropriétaires d'une autorisation d'ester en justice, le syndicat étant particulièrement mal fondé à prétendre qu'il s'agissait pour lui, suite à cette mise en demeure, de « prendre des mesures conservatoires » et que, partant, « le syndic était en droit de diligenter sans autorisation préalable » alors que l'assignation litigieuse, qui ne visait nullement à conserver un droit, avait pour seul objet l'homologation du rapport d'expertise et la condamnation des époux RI. au paiement de la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Attendu, par ailleurs, que le syndicat des copropriétaires ne justifie pas avoir obtenu de l'assemblée générale l'autorisation d'agir en justice à l'encontre des époux RI. ;

Attendu, en effet, que seule l'assemblée générale, organe délibérant de la collectivité des copropriétaires, à laquelle le conseil syndical ne saurait se substituer, a le pouvoir d'habiliter le syndic à agir en justice, en sorte que les procès-verbaux de réunions du conseil syndical en date des 8 avril 2008, 27 avril 2010, 29 septembre 2010 et 18 mars 2011, antérieurs à la délivrance de l'assignation, ne répondent pas aux exigences de l'article 21 de la loi n° 1.329 du 8 janvier 2007 ;

Que, par ailleurs, la délibération n° 12 de l'assemblée générale du 22 décembre 2010 est relative à l'instance en référé ayant opposé les parties et ne contient aucune habilitation régulière du syndic en vue de l'introduction d'une instance au fond ;

Qu'en effet, la formule utilisée « Après débat, la solution la plus raisonnable consisterait à donner tous pouvoirs au conseil syndical pour la suite qu'il convient de donner à cette affaire, laquelle, pour les membres de l'assemblée générale, n'aurait jamais dû avoir lieu » ne peut valoir habilitation du syndic dès lors que celle-ci doit émaner de l'assemblée générale elle-même, que l'article 21 ne prévoit pas la possibilité pour l'assemblée de déléguer ses pouvoirs au conseil syndical et qu'enfin la délibération doit indiquer, avec précision, la nature de la procédure à engager et l'objet de la demande, tel n'étant pas le cas en l'espèce ;

Qu'il en résulte que le syndicat des copropriétaires ne justifie d'aucune décision de l'assemblée générale, antérieure à l'assignation introductive d'instance, l'autorisant à assigner au fond les époux RI. ;

Attendu, enfin, qu'il est admis que l'assemblée générale des copropriétaires puisse, a posteriori, donner au syndic l'autorisation d'agir en justice et ainsi ratifier l'action déjà engagée ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait ainsi référence à un procès-verbal d'assemblée générale en date du 8 janvier 2013 ;

Mais attendu qu'il sera relevé que ce procès-verbal n'est pas produit en intégralité aux débats, le syndicat se limitant à verser, en pièce numéro 29, un document comportant deux pages intitulé « Extrait du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du Panorama en date du 8 janvier 2013 - Onzième Point - Assignation de Monsieur et Madame G. RI./COPROPRIETE : évolution du dossier, décisions à prendre, frais de procédure… (10.000 euros) », se terminant par la mention suivante : « Pour copie certifiée conforme, Le Syndic » suivie d'une signature ;

Que, sur la foi de ce seul document, la Cour ne peut pas déterminer si le « Onzième Point » de l'assemblée générale du 8 janvier 2013 a fait l'objet d'un vote, aucune mention de ce chef ne figurant sur le document produit, et, donc, s'il constitue une véritable « décision » de l'assemblée générale au sens où l'entend l'article 19 de la loi du 8 janvier 2007 ;

Qu'en outre, l'extrait versé aux débats, qui informe les copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » sur l'état des procédures engagées, ne répond pas aux exigences de l'article 21 précité, comme ne contenant aucune ratification de la demande de dommages-intérêts à hauteur de 50.000 euros formée par le syndicat des copropriétaires dans l'assignation introductive d'instance qu'il a fait délivrer ;

Qu'il en résulte que les premiers juges ont, à bon droit, déclaré irrecevable l'action diligentée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » selon assignation en date du 12 mai 2011, faute, pour le syndic, d'avoir été régulièrement autorisé par l'assemblée générale des copropriétaires à ester en justice ;

3- Attendu que l'action en justice est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ;

Attendu que l'intérêt à agir s'apprécie au jour de l'introduction de la demande en justice ;

Qu'au cas d'espèce, Monsieur et Madame RI., qui ont vendu leur appartement le 26 février 2010 à Monsieur DA., ont délivré postérieurement à cette vente, le 13 mai 2011, une assignation introductive d'instance à l'encontre du syndicat des copropriétaires et de la SCI TE. ;

Qu'en dépit de cette vente, les époux RI. demeurent recevables à agir dès lors que leur action tend à l'obtention de dommages-intérêts en réparation d'une perte de jouissance, d'un préjudice moral et d'un préjudice matériel qu'ils estiment liés aux désordres survenus dans leur appartement antérieurement à la vente ;

Qu'il sera en outre rappelé, à supposer même que les époux RI. soient défaillants à administrer la preuve de leur préjudice, que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action et que l'existence du préjudice invoqué n'est pas une condition de recevabilité de leur action mais de son succès ;

Attendu, en conséquence, que les premiers juges ont, à bon droit, déclaré les époux RI. recevables en leur action ;

4- Attendu, sur l'homologation du rapport d'expertise, que la Cour relève d'une part que l'expert a répondu à l'intégralité des chefs de mission qui lui étaient impartis, aux termes, notamment, de quatre réunions d'expertise sur les lieux, les 12 septembre 2008, 22 mai 2009, 23 octobre 2009 et 24 novembre 2010, la visite technique du 23 octobre 2009 ayant eu lieu suite à la survenance de fortes précipitations, d'autre part que les critiques émises par les appelants à l'encontre du rapport d'expertise ont fait l'objet de dires auxquels il a été répondu par l'expert ;

Qu'ensuite, les appelants ne démontrent pas en quoi l'expert aurait fait preuve de partialité et orienté la rédaction de son rapport « dans un sens favorable à Monsieur WO. » ;

Qu'en outre, les critiques portant sur la qualification, privative ou commune, retenue par l'expert, du revêtement de sol en carrelage de la terrasse sont sans incidence aucune sur la réalité, l'origine technique et l'importance des infiltrations déplorées par les époux RI. ;

Que, d'ailleurs, les seuls désordres relevés par l'expert judiciaire sont, outre des traces d'infiltrations dans une chambre de l'appartement, au droit du joint de dilatation, une fissuration constatée au plafond de la loggia, laquelle « n'a pas subi d'évolution », qualifiée de « fissure de construction communément appelée, dans la profession, joint sec » ;

Attendu que l'expert ne saurait être contredit lorsqu'il affirme que les infiltrations déplorées sont dues à un défaut d'étanchéité du joint de dilatation, les constatations opérées ayant permis de situer précisément les désordres au droit de ce joint ;

Que d'ailleurs depuis la réfection complète du joint de dilatation entre les bâtiments AB et CD, en juillet 2010, il n'a pas été signalé de nouvelles infiltrations ;

Qu'il n'est pas démontré en quoi le fait que trois réparations du joint de dilatation aient été nécessaires à la résolution du problème pourrait être imputable à l'expert judiciaire ;

Qu'en outre, il ne résulte pas du rapport d'expertise que les infiltrations auraient cessé après les réparations effectuées par la copropriété en mai 2008, dès lors que l'expert a bien relevé, à la suite d'une visite sur site le 23 octobre 2009 après de fortes précipitations, la présence d'humidité dans le fond de la cueillie de la chambre et constaté des « écoulements au droit du joint de dilatation au plafond de la loggia. » ;

Qu'il n'en demeure pas moins, et les appelants ne le contestent pas, que la réfection complète du joint de dilatation effectuée en 2010 a mis fin aux désordres constatés dans leur appartement. Qu'en effet lors de la réunion d'expertise ayant eu lieu, le 24 novembre 2010 sur les lieux litigieux, aux contradictoires des parties, il a été constaté que « malgré les très fortes pluies des jours précédents, plus aucune trace d'infiltration ne se manifeste dans la cueillie, entre murs et plafonds, de l'ex chambre de l'appartement RI. » ;

Que Monsieur et Madame RI. ne pas démontrent pas d'autres désordres ayant affecté leur lot privatif ;

Attendu, par ailleurs, que les conclusions de l'expert selon lesquelles les infiltrations « ne sont pas consécutives aux utilisations de la toiture terrasse » ne peuvent être sérieusement contestées au regard des développements ci-dessus, sachant, en outre, que l'avis émis par Monsieur SE., conseil technique de Monsieur RI., établissant un lien possible entre la manipulation des bacs jardinières et les infiltrations, ne peut, pour avoir été rédigé le 28 avril 2008, soit antérieurement à la réfection complète du joint de dilatation et à la cessation consécutive des désordres, être retenu comme pertinent ;

Que, pour les mêmes motifs, et à supposer, ainsi que le soutiennent les appelants, que les calculs de l'expert sur la surcharge d'exploitation de la terrasse au regard des emplacements des bacs jardinières comportent quelques erreurs, celles-ci ne sont pas de nature à invalider les conclusions de l'expert sur l'origine des infiltrations ainsi que le démontrent les développements précédents ;

Attendu, en revanche, que les premiers juges ont, à bon droit, refusé partiellement d'homologuer le rapport de l'expert judiciaire, dans sa conclusion relative au respect des prescriptions légales durant le Grand prix automobile 2009, dès lors que l'expert n'a pas pris en considération les dispositions prévues par l'arrêté ministériel n° 2005-238 du 9 mai 2005 en vigueur lors du Grand prix de 2009, prescrivant notamment la nécessité d'obtenir un accord du département de l'intérieur, ledit accord n'ayant pas été produit, ni en cours d'expertise ni durant les débats ;

Que les pièces remises par la SCI TE. à l'expert judiciaire, à savoir l'attestation délivrée le 4 septembre 2009 par la Sûreté Publique et le courrier, en date du 28 mai 2009, émanant de la Direction de l'équipement, de l'environnement et de l'urbanisme, qui ne sauraient se substituer à l'accord exigé, ne répondent pas aux prescriptions du texte susvisé ;

Qu'il s'ensuit que le jugement entrepris sera confirmé dans ses dispositions relatives à l'homologation du rapport de l'expert judiciaire ;

5- Attendu que pour débouter les époux RI. des demandes formées contre le syndicat des copropriétaires, les premiers juges ont considéré qu'ils ne justifiaient pas « d'un préjudice trouvant son origine dans l'attitude fautive du syndicat des copropriétaires » ;

Attendu qu'aux termes de l'article 5 de la loi n° 1.329 du 8 janvier 2007, le syndicat des copropriétaires est chargé de la conservation de l'immeuble et de l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires et aux tiers par le vice de construction des parties communes ou par leur défaut d'entretien, sans préjudice de toutes actions récursoires ;

Attendu que l'article 5 est rédigé à l'identique du dernier alinéa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, en vigueur en droit français, ainsi libellé : « Il (le syndicat des copropriétaires) a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires » ;

Que la jurisprudence française a tiré de ce texte une responsabilité de plein droit du syndicat des copropriétaires, dont la transposition en droit monégasque est discutée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » ;

Mais attendu que le syndicat des copropriétaires tient de l'article 5 précité, l'obligation légale de conserver l'immeuble et d'administrer les parties communes ;

Que, dès lors, tout manquement à l'entretien des parties communes, générateur d'un dommage, entraîne la responsabilité du syndicat des copropriétaires, sans que le demandeur à l'action en responsabilité ait à rapporter la preuve d'une faute. Que d'ailleurs, ce texte consacre aussi la responsabilité du syndicat dans les dommages résultant d'un vice de construction affectant l'immeuble, dont il n'est, pourtant, ni le constructeur, ni le propriétaire ;

Qu'ainsi, il se déduit de l'article 5 que :

  • le demandeur à l'action en responsabilité doit seulement rapporter la triple démonstration de l'existence d'un vice de construction ou d'un défaut d'entretien des parties communes, de l'existence d'un dommage et du lien de causalité directe existant entre eux,

  • le syndicat des copropriétaires ne peut pas s'exonérer de sa responsabilité en prouvant qu'il n'a pas commis de faute,

  • il peut, en revanche, échapper à sa responsabilité en rapportant la preuve de l'absence de lien de causalité entre l'état de l'immeuble et le préjudice invoqué ;

Attendu, qu'en l'espèce, il n'est pas contesté, bien que le règlement de copropriété de l'immeuble ne soit pas produit aux débats dans son intégralité, que le joint de dilatation litigieux, situé entre les bâtiments AB et CD de l'immeuble « LE PANORAMA », est une partie commune, dont l'entretien et la conservation incombent au syndicat des copropriétaires, en application de l'article 5 précité ;

Qu'il s'évince des développements qui précèdent (paragraphe 4 de l'arrêt) que l'origine des infiltrations constatées dans la chambre de l'appartement dont étaient propriétaires les époux RI. provient d'une défectuosité de l'étanchéité du joint de dilatation ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires, qui conclut à l'homologation du rapport d'expertise, ne conteste pas ce lien de causalité ;

Que le rapport d'expertise évoque, en outre, l'étanchéité « ancienne » de l'immeuble, la « défaillance du traitement d'étanchéité du joint », ainsi que le fait que « les étanchéités de joints sont plus exposées que les autres parties aux sollicitations des intempéries et des mouvements entre blocs d'immeubles sous les effets thermiques », les observations émises par l'expert à ce titre n'étant pas contredites ;

Que l'expert rappelle, à juste titre, que « ce type de désordres et d'intervention relève de l'entretien courant des ouvrages la copropriété » ;

Que le fait que la réfection complète du joint de dilatation ait été nécessaire à la cessation des désordres, en sus des nombreuses réparations pourtant intervenues depuis 2008, démontre de plus fort la défectuosité de ce joint et l'absence d'entretien ;

Qu'il résulte donc à suffisance du rapport d'expertise un défaut d'entretien du joint de dilatation, partie commune, à l'origine des désordres déplorés par les appelants, dont le syndicat des copropriétaires doit être déclaré responsable sur le fondement du texte précité ;

Que le fait qu'informé des désordres, le syndicat des copropriétaires allègue avoir immédiatement fait diligence pour y remédier est sans incidence sur la responsabilité qu'il tient de l'article 5 ;

Attendu, au surplus, que prétendant s'exonérer de sa responsabilité, le syndicat des copropriétaires invoque la faute de la victime ;

Or attendu qu'en l'espèce, il ne résulte ni du rapport d'expertise judiciaire, ni de l'ensemble des autres pièces versées aux débats que le report, à la demande des époux RI., du rendez-vous avec l'expert de la compagnie d'assurance soit à l'origine du dommage, ou de son aggravation, en sorte que la faute de la victime, qui aurait contribué à son propre dommage, n'est pas caractérisée. Qu'il est, au demeurant, acquis aux débats que les réparations successives du joint de dilatation n'ont pas été satisfaisantes, générant ainsi la persistance des désordres ;

Attendu, par ailleurs, que les époux RI. sollicitent que le syndicat des copropriétaires et la SCI TE. soient condamnés in solidum à réparer les dommages qu'ils ont subis ;

Attendu qu'en droit monégasque, la Cour d'appel n'est pas liée par le seul dispositif des conclusions des parties en sorte que le moyen, soutenu par la SCI TE., selon lequel la responsabilité de celle-ci ne saurait être retenue parce que non « visée dans le dispositif des conclusions des appelants » n'est pas opérant ;

Qu'en revanche, il incombe aux appelants de démontrer en quoi la SCI TE. aurait concouru au dommage qu'ils ont subi ;

Attendu qu'il ressort du rapport d'expertise judiciaire que l'utilisation faite par la SCI TE. de la terrasse dont elle a la jouissance privative, lors des manifestations du Grand prix automobile, n'était pas à l'origine des désordres subis par les appelants, et ce, en dépit de l'infraction qui a pu être relevée à l'arrêté ministériel n° 2005-238 du 9 mai 2005, en sorte que la responsabilité de la société intimée ne saurait être retenue, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef ;

Qu'il s'ensuit que le syndicat des copropriétaires sera déclaré seul responsable des désordres subis par les époux RI. ;

6- Attendu, sur les préjudices, que la Cour observe que :

  • l'expert judiciaire rappelle que le désordre déploré, qui a consisté en une « très légère infiltration », a été « perturbant pour l'occupant de l'appartement et a provoqué une dégradation de l'embellissement privatif de cette pièce de l'appartement »,

  • il évoque un désordre « très minime », consistant en une « trace d'humidité dans la cueillie de la chambre, sur une longueur de 25 centimètres »,

  • plusieurs réparations, allant finalement jusqu'à la réfection complète du joint défectueux, ont été nécessaires à la cessation des désordres,

  • eu égard à la nature des désordres déplorés et à leur localisation, les appelants ne démontrent pas qu'ils ont été totalement privés de la jouissance de leur chambre, seul un trouble modéré pouvant être retenu,

  • il doit être tenu compte du standing de l'immeuble, mais aussi du fait que la sécurité de l'immeuble n'a jamais été compromise,

  • les époux RI., qui ont revendu, en 2010, l'appartement qu'ils avaient acquis en décembre 1998, en réalisant une plus-value de plus de 10.000.000 euros, n'établissent nullement un manque à gagner lié aux désordres allégués,

  • Monsieur et Madame RI. ne justifient pas non plus de ce que leur décision de vendre l'appartement et de déménager ait été la conséquence des relations conflictuelles entretenues avec le syndic de l'immeuble,

  • les « vexations » et « injustices » dénoncées par les époux RI. et reprochées au syndic ne peuvent pas être imputées au syndicat des copropriétaires,

  • la résistance abusive du syndicat des copropriétaires, pas plus que celle de la SCI TE., ne sont démontrées,

  • il n'est pas contesté que les appelants n'ont pas déclaré le sinistre à leur propre compagnie d'assurances ;

Qu'il s'ensuit que seul le préjudice de jouissance est caractérisé et sera, en considération des éléments ci-dessus, entièrement réparé par l'allocation, à la charge du syndicat des copropriétaires, de la somme de 15.000 euros de dommages-intérêts, ladite somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

7- Attendu que l'action introduite par les époux RI., qui triomphent partiellement en leur appel, ne saurait être considérée comme abusive à l'égard du syndicat des copropriétaires ;

Qu'en outre, l'action en justice, comme le recours au juge d'appel, représentent l'exercice d'un droit et que l'appréciation erronée qu'une partie fait de ses droits n'est pas, sauf les cas de malveillance, d'intention de nuire ou d'erreur équipollente au dol non caractérisés au cas d'espèce, constitutive d'un abus ;

Qu'ainsi, le jugement sera réformé en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame RI. au paiement de dommages-intérêts ;

8- Attendu que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » supportera la charge des dépens de première instance et d'appel liés à l'assignation introductive d'instance qu'il a fait délivrer le 12 mai 2011 ;

Attendu que les dépens de première instance et d'appel liés à l'assignation délivrée le 13 mai 2011 seront supportés, à concurrence de moitié chacun, par les époux RI. d'une part, et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA », d'autre part, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire, lesdits dépens étant distraits au profit de Maître PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit les appels,

Infirme le jugement rendu le 5 juin 2014 par le Tribunal de Première Instance en ce qu'il a débouté les époux RI. de leurs demandes de dommages-intérêts à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA », en ce qu'il les a condamnés à payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts au syndicat des copropriétaires et à la SCI TE. et en ce qu'il les a condamnés aux entiers dépens,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs réformés,

Déclare le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » responsable des dommages subis par les époux RI.,

En conséquence, condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » à payer à Monsieur et Madame RI., ensemble, la somme totale de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,

Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Déboute les appelants du surplus de leurs demandes de dommages-intérêts à l'encontre du syndicat des copropriétaires et de la SCI TE.,

Déboute le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » de sa demande de dommages-intérêts,

Déboute la SCI TE. de sa demande de dommages-intérêts,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA » aux dépens liés à l'assignation introductive d'instance qu'il a fait délivrer le 12 mai 2011, distraits au profit de Maître Patricia Rey, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Dit que les dépens de première instance et d'appel liés à l'assignation délivrée le 13 mai 2011 seront supportés, à concurrence de moitié chacun, par les époux RI. d'une part, et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « LE PANORAMA », d'autre part, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire, lesdits dépens étant distraits au profit de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, Monsieur Eric SENNA, Conseiller, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 10 NOVEMBRE 2015, par Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Michaël BONNET, Premier substitut du Procureur Général.

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