Cour d'appel, 18 mai 2015, La Société à Responsabilité Limitée A et Ministère public c/ y. MO., g. MI. et n. CO.

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Abstract🔗

Abus de confiance - Éléments constitutifs - Condamnation

Résumé🔗

Le prévenu, employé d'un commerce, doit être condamné du chef d'abus de confiance pour avoir prélevé des espèces dans la caisse du commerce à son seul bénéfice en procédant à des paiements de tickets de jeu gagnants fictifs. Il est le seul employé ayant accès à cette caisse et il est démontré que les montants frauduleusement prélevés sont les plus importants quand le prévenu travaillait et sont au contraire très faibles lors de ses absences. Les explications qu'il a données selon lesquelles, il aurait été victime d'un complot des deux autres employés poursuivis ne sont pas établies.

Ce même prévenu, doit être condamné du chef d'abus de confiance, pour avoir, à des fins personnelles, prélevé du numéraire dans la caisse du commerce, avoir disposé à titre gratuit de plusieurs articles destinés à la vente et avoir passé des commandes importantes auprès de fournisseurs dans le but d'obtenir la fourniture de cadeaux. Les articles n'ont jamais été remis à l'employeur et ce dernier n'a pas donné d'autorisation même implicite de procéder de la sorte, ce qui conduisait à augmenter inutilement les stocks de marchandises immobilisées dès lors que les commandes étaient gonflées pour atteindre le seuil de déclenchement des gratifications consenties par les fournisseurs. Le prévenu ne démontre pas non plus d'autorisation de l'employeur de se servir en numéraires dans la caisse du commerce pour le règlement de menus achats.


Motifs🔗

Cour d'appel correctionnelle Dossier PG n° 2013/001137 JI CABII/2013/000018

ARRÊT DU 18 MAI 2015

En la cause de :

  • - La Société à Responsabilité Limitée dénommée A, exerçant sous l'enseigne « A / Le Tarot », dont le siège social est X1 à Monaco, prise en la personne de sa gérante en exercice, demeurant en cette qualité audit siège, constituée partie civile, représentée par sa gérante Madame j. NO-ME.,

représentée par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE/INTIMÉE,

et du :

  • - MINISTÈRE PUBLIC ;

APPELANT/INTIMÉ,

Contre :

  • 1) y. MO., né le 15 avril 1981 à MONACO (98000), de M. et de K. TO., de nationalité marocaine, conducteur de bus, demeurant X à CAP-D'AIL (06320) ;

  • - présent, assisté de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Alice PASTOR, avocat-stagiaire en cette même Cour ;

  • 2) g. MI., né le 28 octobre 1966 à LOUHANS (71), de S. et de G. LO., de nationalité française, demeurant X, bât. A, 69 X à NICE (06000) ;

  • - présent, assisté de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Nino PARRAVICINI, avocat au barreau de Nice ;

  • INTIMES/APPELANTS,

  • 3) n. CO., né le 22 février 1975 à MONACO (98000), de R. et de J. LOH., de nationalité française, demeurant X à ROQUEBRUNE-CAP-MARTIN (06190) ;

  • - présent, assisté de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉ,

Prévenus de :

  • - ABUS DE CONFIANCE (1, 2 & 3)

  • - INFRACTIONS À LA LÉGISLATION SUR LES STUPÉFIANTS (détention aux fins d'usage personnel, offre, mise en vente, cession, transport et importation) (1 & 3)

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience du 23 mars 2015 ;

Vu le jugement contradictoirement rendu par le Tribunal de première instance jugeant correctionnellement le 13 janvier 2015 ;

Vu les appels interjetés tant par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur de la SARL dénommée A, partie-civile, que par le Ministère public, à titre principal, le 22 janvier 2015, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur de g. MI., prévenu, le 30 janvier 2015 et par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur de y. MO., prévenu, le 2 février 2015 ;

Vu l'ordonnance présidentielle en date du 3 février 2015 ;

Vu les citations et significations, suivant exploits, enregistrés, de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 17 février 2015 ;

Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de g. MI., en date du 20 mars 2015 ;

Vu les conclusions de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la SARL A, en date du 23 mars 2015 ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï Eric SENNA, Conseiller, en son rapport ;

Ouï n. CO., prévenu, en ses réponses ;

Ouï g. MI., prévenu, en ses réponses ;

Ouï y. MO., prévenu, en ses réponses ;

Ouï Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur et celui de la SARL dénommée A, partie-civile ;

Ouï le Ministère public en ses réquisitions ;

Ouï Maître Alice PASTOR, avocat-stagiaire et celui de y. MO., prévenu, en sa plaidoirie et moyens d'appel ;

Ouï Maître Nino PARRAVICINI, avocat et celui de g. MI., prévenu, régulièrement autorisé à plaider par le Président, en sa plaidoirie et moyens d'appel ;

Ouï Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur et celui de n. CO., prévenu ;

Ouï y. MO. en dernier, en ses moyens de défense ;

Ouï g. MI. en dernier, en ses moyens de défense ;

Ouï n. CO. en dernier, en ses moyens de défense ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Par jugement contradictoire en date du 13 janvier 2015, le Tribunal correctionnel a, sous la prévention :

1) y. MO.

  • « - d'avoir à MONACO, courant 2009 à 2012, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, détourné ou dissipé au préjudice de c. NO-ME., gérante du commerce » A« et de la » SARL A «, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui avaient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou un emploi déterminé, en l'espèce dans le cadre de son activité salariée, en prélevant à des fins personnelles des sommes en espèces dans la caisse du commerce, sous prétexte de remboursements de gains de jeux fictifs à des clients »

  • DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26 et 337 du Code pénal ;

  • « - d'avoir à Monaco, courant 2011 à 2013, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, commis les infractions de détention, offre, mise en vente, cession, transport et importation de produits stupéfiants, en l'espèce de la résine de cannabis »

  • DÉLITS prévus et réprimés par les articles 1, 2, 2-1, 5, 5-3, 6, 7, 9 de la loi n° 890 du 1er juillet 1970, par les article 26, 27 du Code Pénal, par l'Arrêté ministériel n° 91-370 du 02 juillet 1991 fixant la liste des substances classées comme stupéfiants, ainsi que par l'Arrêté ministériel n° 2001-254 du 26 avril 2001 ;

2) g. MI.

  • « - d'avoir à MONACO, courant 2009 à 2012, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, détourné ou dissipé au préjudice de c. NO-ME., gérante du commerce » A« et de la » SARL A «, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui avaient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, en l'espèce dans le cadre de son activité salariée, d'une part en disposant à des fins personnelles, à l'insu de son employeur, de la trésorerie du commerce » A « pour effectuer des commandes d'articles surévaluées par rapport aux réels besoins d'approvisionnement du commerce aux fins de bénéficier personnellement de cadeaux remis par des fournisseurs et d'autre part, en prélevant, à l'insu de son employeur, des espèces dans la caisse du commerce pour payer des dépenses personnelles et en s'appropriant des articles à la vente sans s'acquitter du prix »

  • DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26 et 337 du Code pénal ;

  • « - d'avoir à MONACO, courant 2011 à 2013, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, détourné ou dissipé au préjudice de b. MA. et de clients de la SARL A, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui avaient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, en l'espèce, en conservant et en disposant à des fins personnelles de tickets de jeux gagnants de l'organisation de jeux de hasard B, à l'insu de leurs légitimes possesseurs, lesquels ne lui avaient été remis que pour vérifier l'existence éventuelle de gains et en informer lesdits possesseurs »

  • DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26, 337 du Code pénal ;

3) n. CO.

  • « - d'avoir à Monaco, courant 2011 à 2013, et en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, commis les infractions de détention, offre, mise en vente, cession, transport et importation de produits stupéfiants, en l'espèce de la résine de cannabis »

  • DÉLITS prévus et réprimés par les articles 1, 2, 2-1, 5, 5-3, 6, 7, 9 de la loi n° 890 du 1er juillet 1970, par les article 26, 27 du Code Pénal, par l'Arrêté ministériel n° 91-370 du 02 juillet 1991 fixant la liste des substances classées comme stupéfiants, par l'Arrêté ministériel n° 2001-254 du 26 avril 2001 ;

  • « - d'avoir à MONACO, courant 2009 à 2012, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, détourné ou dissipé au préjudice de c. NO-ME., gérante du commerce » A « et de la » SARL A «, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui avaient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, en l'espèce dans le cadre de son activité salariée, d'une part, en disposant à des fins personnelles, à l'insu de son employeur, de la trésorerie du commerce «  A »  pour effectuer des commandes d'articles surévaluées par rapport aux réels besoins d'approvisionnement du commerce aux fins de bénéficier personnellement de cadeaux remis par des fournisseurs et d'autre part, en prélevant, à l'insu de son employeur, des espèces dans la caisse du commerce pour payer des dépenses personnelles et en s'appropriant des articles à la vente sans s'acquitter du prix »

  • DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26 et 337 du Code pénal.

Sur l'action publique,

  • - déclaré y. MO., n. CO. et g. MI. coupables du délit d'abus de confiance commis au préjudice du commerce « A »,

  • - requalifié le délit d'abus de confiance reproché à g. MI. commis au préjudice de b. MA. en délit de tentative d'abus de confiance et l'en déclare coupable,

  • - relaxé g. MI. des abus de confiance commis au préjudice de clients du commerce » A ",

  • - déclaré y. MO. coupable des délits d'infractions à la législations sur les stupéfiants qui lui sont reprochés,

  • - déclaré n. CO. coupable du délit de détention de produits stupéfiants aux fins d'usage personnel et le relaxe des autres infractions prévues et réprimées par la Loi n° 890 du 1er juillet 1970 pour lesquelles il a été poursuivi,

En répression, faisant application des articles visés par les préventions, ainsi que des articles 2, 3 et 393 du Code pénal,

  • - condamné :

    • - y. MO. à la peine de SIX MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS,

    • - g. MI. à la peine de DEUX MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS,

    • - n. CO. à la peine de TROIS MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS,

les avertissements prescrits par l'article 395 du Code pénal ayant été adressés aux condamnés.

Sur l'action civile,

  • - déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la Société à Responsabilité Limitée dénommée A, dûment représentée,

  • - condamné, en outre, y. MO., g. MI. et n. CO. solidairement aux frais.

Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur pour la SARL A, partie-civile, a interjeté appel de cette décision par acte de greffe en date du 22 janvier 2015.

Le Ministère public a interjeté appel à titre principal de ladite décision le même jour.

Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur pour g. MI., prévenu, a interjeté appel de ladite décision par acte de greffe en date du 30 janvier 2015.

Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur pour y. MO., prévenu, a interjeté appel de ladite décision par acte de greffe en date du 2 février 2015.

Les appels réguliers sont recevables.

Considérant les faits suivants :

Le 4 décembre 2012, c. NO-ME., gérante et propriétaire du commerce à l'enseigne « A », sis dans la galerie commerciale D à Monaco, se présentait à la Direction de la Sûreté Publique aux fins de déposer plainte du chef d'abus de confiance.

Elle expliquait que depuis plus d'un an, elle avait constaté une baisse anormale de son chiffre d'affaires par rapport à la fréquentation de sa clientèle.

Le 16 novembre 2012, l. DA SI., directeur financier, constatait que les sommes prélevées dans la caisse au titre des remboursements de jeux de grattage étaient supérieures à celles enregistrées dans la caisse de l'organisation de jeux de hasard B et que des espèces avaient été prélevées dans celle du magasin au titre de remboursements de jeux fictifs. Il expliquait qu'il y avait deux caisses distinctes : l'une dédiée au magasin où se trouvait le numéraire et l'autre dédiée à l'organisation de jeux de hasard B, laquelle était informatisée et gérée directement par cette dernière.

Les tickets gagnants étaient scannés sur la caisse de l'organisation de jeux de hasard B, laquelle éditait un ticket puis la somme correspondante était prélevée dans la caisse du commerce pour être remise au client.

Il n'y avait pas de connexion entre les deux opérations. Le commerce ne payait que les gains inférieurs ou égaux à 500 euros, lesquels ne faisaient pas l'objet de remboursement postérieur de l'organisation de jeux de hasard B et demeuraient à la charge du commerce.

l. DA SI. avait procédé à un rapprochement entre les sommes prélevées dans la caisse du magasin avec celles enregistrées auprès de l'organisation de jeux de hasard B sur plusieurs années. Il avait constaté un différentiel important évalué à 89.366, 96 euros sur quatre ans correspondant au préjudice subi par c. NO-ME. soit :

  • • en 2009, 8.301,96 €

  • • en 20l0, 24.514,40 €

  • • en 2011, 38.427,10 €

  • • en 2012, 18.123,50 €

l. DA SI. indiquait que jusqu'alors il n'y avait pas eu de croisement des chiffres de la caisse de l'organisation de jeux de hasard B, nécessairement justes, avec ceux de la comptabilité journalière de la caisse du magasin et que le chiffre de la caisse de l'organisation de jeux de hasard B n'apparaissait pas sur la comptabilité journalière de la caisse du magasin.

Les investigations mettaient en cause trois salariés : y. MO., n. CO. et g. MI. dans la commission du délit d'abus de confiance.

Les deux premiers étaient également impliqués dans des infractions à la législation sur les stupéfiants.

Le 6 juin 2013, une information judiciaire était ouverte à l'encontre de y. MO. des chefs d'abus de confiance et de détention, offre, mise en vente, cession, transport et importation de produits stupéfiants et contre X. du chef d'abus de confiance. Ce dernier était inculpé de ces chefs.

Concernant les infractions d'abus de confiance, l. DA SI. avait constaté que les journées à l'issue desquelles les montants prélevés dans la caisse au titre des remboursements de jeux étaient supérieurs à ceux enregistrés par l'organisation de jeux de hasard B, correspondaient systématiquement à des jours de présence de y. MO.. A contrario, lors de ses journées d'absence ou de congés, les écarts étaient minimes et pouvaient résulter d'erreurs matérielles ou de manipulations de caisse.

l. DA SI. indiquait qu'au moment où il avait découvert fortuitement ce stratagème en consultant l'écran de la caisse, y. MO. était passé derrière lui et s'en était aperçu. Depuis ce jour, plus aucune différence entre les remboursements des gains prélevés dans la caisse et les tickets de l'organisation de jeux de hasard B enregistrés n'avait été constatée.

Par ailleurs, les difficultés financières du commerce conduisaient c. NO-ME. à envisager la suppression d'un poste au mois d'octobre 2012. Elle avait demandé à son personnel si l'un d'eux était volontaire et à son étonnement, y. MO. s'était immédiatement proposé.

Le 11 juin 2013, c. NO-ME. devait décéder au cours de l'instruction.

En analysant la comptabilité du commerce de 2009 à 2012, l. DA SI. mettait en exergue les différences à partir de tableaux tenus au jour le jour entre le mois d'avril 2012 et le mois de février 2013, et il croisait ces chiffres avec les jours de présence des employés.

Sur les cinq employés de « la société F », tous travaillaient 6 jours sur 7 par binômes, il n'était donc pas possible d'en isoler un sur des tranches horaires. L'analyse des tableaux comparatifs révélait que sur les 11 mois analysés, les montants des différences variaient de 16 euros à 2.544 euros, la plus faible différence -16 euros- correspondait à un mois d'absence totale de y. MO. tandis que la différence la plus forte correspondait à un mois de présence de ce dernier.

y. MO. travaillait six mois en totalité pendant lesquels les différences étaient les plus fortes variant de 1.791 euros à 2.544 euros. Les mois au cours desquels il ne travaillait pas ou quasiment pas (août 2012, décembre 2012, janvier 2013 et février 2013) correspondaient aux mois dont les différences relevées étaient les plus faibles ne dépassant pas 379 euros.

Certaines différences de caisse de moindre importance pouvaient s'expliquer par des erreurs de saisies de montants et de frappe entre les touches de caisse « remboursements jeux » et « remboursements loto » qui étaient côte à côte.

v. MU., salariée, déclarait que le commerce « A » n'avait pas connu de baisse significative de sa fréquentation, pouvant justifier une baisse du chiffre d'affaires. Elle précisait que y. MO. effectuait des opérations de change pour les clients qui se présentaient avec des billets de 100 à 500 euros avec ses propres billets qu'il allait récupérer dans son vestiaire. Il procédait ainsi, depuis 2009 à raison de 2 ou 3 fois par semaine.

y. MO. était entendu, il indiquait que sa surface financière était de l'ordre de 100.000 euros, constituée uniquement de l'épargne issue de ses salaires perçus depuis neuf ans. Son épouse ne travaillant pas, le foyer vivait de ses revenus et des allocations. Sur son épargne, il se disait économe et avec des revenus annuels cumulés de 25.800 euros (salaires et allocations familiales), il indiquait parvenir à économiser 11.000 euros par an.

Sur les espèces dont il disposait, il les justifiait par une activité parallèle de vente de chaussures et de vêtements contrefaits provenant du Maroc, laquelle pouvait lui rapporter jusqu'à 1.000 euros mensuels. Il reconnaissait ainsi avoir fait du change pour des clients du commerce avec ses propres deniers.

S'agissant de son véhicule TMAX, acheté neuf le 13 mai 2013 pour la somme de 11.000 euros, il indiquait avoir remis la somme de 8.000 euros en espèces, provenant de cadeaux de mariage, ce qui était confirmé par le concessionnaire. y. MO. avait déjà acheté l'année précédente un scooter YAMAHA pour 4.050 euros dont 3.050 euros payés en numéraires.

Il niait avoir commis le moindre détournement au sein de « la société F » sur la totalité de sa période d'emploi, exception faite d'un partage qui était fait avec n. CO. et g. MI. de l'argent et des gains des tickets de jeux/loto oubliés par les clients, des gains des tickets de grattage qui étaient volontairement ou non déchirés à l'occasion de leur séparation de leur souche. Il précisait que cette pratique remontait au début de son embauche et reconnaissait avoir déjà dérobé des briquets, des bonbons et du papier à rouler avec l'accord de n. CO..

Après avoir consulté l'ensemble des données comptables matérialisant les sommes prélevées dans la caisse du commerce au titre des remboursements fictifs de jeux et ses jours de présence, y. MO. répondait ne pas comprendre, tout en reconnaissant une corrélation évidente et flagrante entre ses jours de présence et les détournements corrélativement constatés.

Il insistait sur le fait qu'il n'était jamais seul en caisse et que tous les détournements constatés à l'occasion de ses jours de présence, étaient nécessairement le fait du second employé. S'agissant de l'absence de détournements constatée uniquement lorsqu'il n'était pas présent, il indiquait qu'elle résultait d'une « magouille » des véritables auteurs.

y. MO. déclarait que n. CO. et g. MI. augmentaient inutilement et régulièrement les commandes auprès de leurs fournisseurs, de tabac, de papeterie.., ceci pour obtenir des cadeaux de fidélité tels que des aspirateurs, des consoles de jeux, des écrans TV, un salon de jardin qu'ils se partageaient à trois. Ces cadeaux étaient destinés à la propriétaire du commerce mais ils avaient directement communiqué leur adresse personnelle aux fournisseurs pour être livrés à leur domicile. Il reconnaissait s'être fait livrer un aspirateur et avoir également récupéré une console de jeux vidéo.

Il indiquait que n. CO. prenait de l'argent directement dans la caisse pour acheter à manger dans la galerie commerciale en prononçant ce type de phrase : « C'est Mme NO. qui nous offre le petit-déjeuner ».

y. MO. ajoutait que lorsqu'un client oubliait de l'argent dans le commerce, il se partageait cette somme ou les gains de ticket de jeu oubliés. Par ailleurs, il déclarait : « Lorsque nous récupérions un carnet de tickets de grattages, qui ont tous une valeur de 150 euros, nous les séparions pour les mettre en vente, et lorsqu'un ou plusieurs tickets étaient déchirés à cette occasion (de leur séparation), g. MI. conservait les tickets, les passait dans le module, et récupérait dans la caisse, l'argent correspondant aux tickets gagnants. Là encore, nous procédions à un partage équitable des sommes récupérées. »

g. FI., employée du commerce « A » évoquait les doléances de plusieurs clients dont un s'était ému du fait que g. MI. ait conservé un ticket gagnant en lui prétextant qu'il était perdant. Elle ajoutait avoir reçu un appel téléphonique du Docteur b. MA., qui lui avait indiqué que s'il ne récupérait pas son ticket, il ferait appel à la Police. Ce dernier était repassé a « la société F » et avait repris possession de son ticket gagnant conservé par g. MI..

Elle ajoutait que n. CO. avait déjà récupéré de l'argent dans la caisse, en disant que c'était l'employeur qui offrait. Ce jour-là, il avait payé le repas de midi dans un fast-food. Elle avait déjà bénéficié de cadeaux offerts par les fournisseurs dont un magnétoscope en 2008 offert par n. CO..

Enfin, elle indiquait, qu'un soir de mai 2013, alors que g. MI. était parti à la banque pour amener la recette du jour, elle avait constaté la présence d'une liasse de billets de 20 euros posée sur le bureau de la réserve. Elle l'avait immédiatement rejoint pour lui en faire part, et il lui avait répondu que ce n'était pas important.

b. MA. confirmait qu'à la fin de l'année 2012, il s'était présenté à la caisse de g. MI. auquel il avait confié son ticket de jeu du loto pour la vérification de son gain éventuel. Il lui avait répondu qu'il était nul après vérification de sa part et lui avait demandé s'il pouvait le jeter. Ce dernier refusait et lui demandait que son ticket lui soit restitué. g. MI. lui rendait un ticket qui n'était pas le sien. Après avoir téléphoné au commerce, il récupérait son ticket gagnant pour la somme de 990 euros.

v. MU. indiquait que tous les employés étaient habilités à effectuer des opérations de caisse mais que seuls g. MI. et n. CO. déposaient l'argent à la banque et procédaient aux commandes de cigarettes et à l'approvisionnement des stocks. Elle confirmait qu'elle se servait très souvent du coffre-fort du commerce pour la monnaie uniquement et affirmait n'y avoir jamais constaté la présence du moindre papier ou post-it aux noms de CO. ou MI..

Ces déclarations contredisaient celles des deux inculpés sur l'existence de ces écrits pour suivre le remboursement des sommes dites empruntées dans la caisse.

b. GA., représentant de la société « E » grossiste en divers produits papiers, déclarait que sur les quatre années écoulées, il avait vendu pour 2.000 euros mensuels de confiserie a « la société F », la totalité des commandes ayant été de 20.000 euros par an.

Les commandes étaient passées auprès de sa société par n. CO. et g. MI.. Il admettait que des commandes « gonflées » avaient été passées auprès de lui par ces derniers dans le dessein d'obtenir des cadeaux plus importants, tels que salon de jardin ou transats. S'agissant du salon de jardin, il confirmait que lorsque la commande avait été passée, il s'était arrangé avec n. CO. pour qu'elle se fasse « dans le dos de la Direction ». c. BE., représentant de la société G déclarait que n. CO. et g. MI. avaient toujours préféré bénéficier de cadeaux que de gratuité sur certains produits ou de remises sur les prix de vente. Il admettait que de fortes commandes avaient été passées, sans commune mesure avec celles réalisées habituellement, pour permettre d'obtenir des cadeaux.

n. CO. était inculpé des chefs d'abus de confiance et de détention, offre, mise en vente, cession, transport et importation de produits stupéfiants.

Il confirmait qu'il partageait avec y. MO. et g. MI. l'argent oublié par des clients dans le magasin et s'être servi gratuitement en paquets de cigarettes et friandises. Il avait même prélevé de l'argent oublié dans une bourse par un client. Il admettait avoir prélevé de l'argent en espèces dans la caisse ou dans le coffre fort sans réellement tenir de comptabilité, sans justifier de l'accord de son employeur et du remboursement desdites sommes pouvant aller de 20 à 200 euros. Il justifiait ces prélèvements par des blocages récurrents de sa carte bancaire, ce que démentait son gestionnaire de compte.

Il reconnaissait avoir prélevé à de nombreuses reprises, une à deux fois par semaine, des espèces dans la caisse du magasin pour s'offrir un café. Il ajoutait que s'il avait effectué une seule fois une erreur de remboursement de jeux de grattage, plusieurs clients s'était plaint de l'attitude suspecte de g. MI..

n. CO. contestait avoir bénéficié de gains de ticket de grattage abîmés malgré les déclarations de g. MI. et de y. MO.. Il admettait avoir déjà passé des commandes auprès de fournisseurs, uniquement pour bénéficier de cadeaux.

La perquisition menée au domicile de n. CO. permettait la découverte d'une console Nintendo Wii, d'un lecteur DVD, d'un Iphone 4S, d'un caméscope, d'un accessoire Wii (balance), d'une mallette à vin, d'une fontaine à chocolat, d'un stylo ZIPPO, de deux montres ZIPPO... et d'une petite boîte sentant la résine de cannabis avec un paquet de feuille à rouler OCB.

g. MI. était inculpé du chef d'abus de confiance.

Il confirmait avoir conservé des gains partagés avec d'autres employés résultant de la validation de tickets de jeux de grattage impropres à la vente et dont les gains étaient prélevés dans la caisse du magasin. Il admettait aussi avoir partagé les espèces oubliées par les clients et s'être servi gratuitement en paquets de cigarettes ou autres denrées. Il admettait même avoir partagé avec y. MO. et n. CO. des espèces se trouvant dans deux ou trois portefeuilles, lesquels étaient ensuite jetés à la poubelle.

Il admettait avoir bénéficié personnellement, sans l'accord de son employeur, de cadeaux donnés par les fournisseurs en fonction des commandes réalisées. Ainsi, il bénéficiait de bons d'essence, d'un salon de jardin complet livré à son domicile, d'une friteuse, d'un GPS, d'un lecteur MP3, d'un IPAD et avoir augmenté le volume de certaines commandes de manière importante pour franchir le nombre de points de fidélité permettant de bénéficier de plus beaux cadeaux sans que le commerce en ait besoin.

Il s'accordait aussi des avances prélevées dans la caisse, sans accord préalable, pour (soit 1.000 euros par an environ) payer des dépenses personnelles.

Concernant les cadeaux obtenus par les employés, il précisait que c. NO-ME. n'avait jamais donné la moindre autorisation, pour gonfler même légèrement une commande, en vue d'obtenir un cadeau plus intéressant. Concernant les cigarettes, il indiquait qu'il était tout à fait impossible que son employeur leur ait donné l'autorisation d'en récupérer sans les payer.

j. NO-ME., fille de feue c. NO-ME. confirmait que les commandes réalisées ne reposaient sur aucune nécessité économique.

Concernant les infractions à la législation sur les stupéfiants

n. CO. déclarait que y. MO. avait de l'argent grâce au trafic de stupéfiants. Il reconnaissait lui avoir déjà acheté de la résine de cannabis à plusieurs reprises. g. MI. déclarait que y. MO. lui avait confié qu'il jouait le rôle de « banquier » dans un trafic de cannabis et qu'il servait d'intermédiaire pour blanchir de l'argent.

y. MO. reconnaissait avoir déjà vendu des olives de 10 grammes de résine de cannabis à n. CO., après que ce dernier lui en ait commandé courant 2012 ; une olive était vendue 100 euros. Il précisait qu'il ne vendait pas lui-même de la résine, mais qu'il faisait office d'intermédiaire entre son revendeur personnel situé en France dont il souhaitait taire l'identité. Il ajoutait qu'à plusieurs reprises, ce dernier lui avait réglé la résine qu'il lui apportait a « la société F », en prenant directement l'argent dans le coffre-fort du commerce ou dans la caisse. S'il reconnaissait avoir déjà revendu du cannabis par le passé, il maintenait qu'il ne lui avait livré que de petites quantités de cannabis et qu'il ne percevait pas de commission. Il évaluait à 7 ou 8 fois les transactions effectuées avec n. CO..

Lors de la perquisition effectuée à son domicile à Cap d'Ail, il était découvert 59 grammes de résine de cannabis.

y. MO. précisait qu'il fumait un à deux joints de résine de cannabis par soir. Il fumait régulièrement avec n. CO. dans la réserve de la société F ou dans le parking du centre commercial pendant leurs heures de travail. Il achetait environ 50 grammes de résine pour une consommation sur huit mois. Il ajoutait que n. CO. avait acheté une plaquette de 100 grammes de résine de cannabis à un homme travaillant au sein de la galerie commerciale D Monaco dont il souhaitait taire l'identité.

Cette plaquette lui avait été apportée a « la société F ». Ce dernier avait également acheté de l'herbe à une femme employée dans un magasin de montres de la même galerie.

n. CO. admettait avoir déjà fumé des joints en Principauté de Monaco avec y. MO. auquel il achetait de la résine de cannabis. Il déclarait avoir acheté a « la société F » à plusieurs reprises de la résine de cannabis, généralement pour 50 euros et y. MO. prélevait l'argent directement dans le coffre fort du commerce.

Il estimait lui en avoir ainsi acheté entre 10 et 20 fois ainsi qu'une plaquette de 100 grammes de résine de cannabis à un employé de la galerie commerciale D. Il avait servi également une fois d'intermédiaire entre un revendeur de cannabis et un ami qui en désirait et en avait cédé une fois à y. MO..

Au cours de la confrontation entre les trois inculpés, n. CO. maintenait avoir acheté une vingtaine de fois des stupéfiants à y. MO., ce dernier contestant le nombre de transactions. y. MO. l'accusait de se fournir auprès d'autres personnes et de revendre des stupéfiants.

Le casier judiciaire en Principauté de n. CO., y. MO. et g. MI. ne porte pas mention de condamnation.

Le casier judiciaire en France de n. CO. ne porte pas mention de condamnation.

Le casier judiciaire en France de g. MI. mentionne une condamnation par le Tribunal correctionnel de Nice le 23 septembre 2011 à 400 euros d'amende pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique.

Le casier judiciaire en France de y. MO. mentionne une condamnation par le Tribunal correctionnel de Nice le 13 novembre 2011 à la peine de 18 mois d'emprisonnement dont 14 mois avec sursis mise à l'épreuve pendant un délai de 3 ans pour des faits de vols aggravés et subornation de témoins.

Par jugement prononcé le 6 janvier 2015, le Tribunal correctionnel déclarait les trois prévenus coupables du délit d'abus de confiance commis au préjudice de la société F, requalifiait les faits commis au préjudice de b. MA. en tentative d'abus de confiance, déclarait y. MO. coupable d'infractions à la législation sur les stupéfiants, n. CO. du délit de détention de stupéfiants et le relaxait des autres infractions à la législation sur les stupéfiants et relaxait g. MI. des faits d'abus de confiance commis au préjudice des clients de la société F et les condamnaient respectivement à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis, trois d'emprisonnement avec sursis et deux mois d'emprisonnement avec sursis et déclarait la constitution de partie civile de la SARL A irrecevable au motif que seuls les héritiers de c. NO-ME. pouvaient réclamer une indemnisation de son préjudice personnel et qu'elle n'était pas un ayant droit.

Lors de l'audience devant la Cour, le conseil de la partie civile a déposé des conclusions aux termes desquelles, j. NO-ME. intervient volontairement en cause d'appel ès-qualités d'héritière de c. NO-ME. et de représentante légale de la SARL A et sollicite la réformation du jugement sur les dispositions civiles en ces termes :

  • - recevoir la SARL A en son appel,

  • - réformer le jugement du 13 janvier 2015,

  • - constater que la SARL A vient aux droits de c. NO-ME. pour ce qui concerne le fonds de commerce A,

  • - recevoir la SARL A en sa constitution de partie civile,

  • - déclarer les prévenus solidairement tenus de réparer le préjudice subi par c. NO-ME. aux droits de laquelle vient la SARL A.

À titre principal,

  • - ordonner une mesure d'expertise comptable à l'effet de déterminer le préjudice subi par le fonds de commerce A, et partant la SARL A, du fait des agissements de Messieurs MO., CO. et MI. ;

À titre subsidiaire,

  • - condamner solidairement y. MO., g. MI. et n. CO. à payer à la SARL A la somme de 400.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Subsidiairement, sur la constitution de partie civile,

  • - accueillir j. NO-ME., intervenante volontaire, en sa constitution de partie civile ;

À titre principal,

  • - ordonner une mesure d'expertise comptable à l'effet de déterminer le préjudice subi par c. NO-ME. exploitant le fonds de commerce A, et partant sa légataire universelle, j. NO-ME., du fait des agissements de Messieurs MO., CO. et MI. ;

À titre subsidiaire,

  • - condamner solidairement y. MO., g. MI. et n. CO. à lui payer la somme de 400.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

  • - les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur sous sa due affirmation.

Elles font valoir notamment que la créance de c. NO-ME. a été conventionnellement transmise par l'apport en nature du fonds de commerce à la SARL A et en indiquant à titre subsidiaire, que la constitution de partie civile de l'héritière de feue c. NO-ME. en appel régularise la situation.

Le Ministère public a requis la réformation de la décision dans les limites suivantes :

  • * sur la culpabilité,

    • - pour g. MI., la requalification des faits d'abus de confiance en tentative d'escroquerie,

    • - pour n. CO., sa condamnation pour les faits de cession de stupéfiants ;

  • * sur les peines à leur infliger,

    • - pour g. MI. et n. CO. une peine de huit mois d'emprisonnement avec liberté d'épreuve pendant 5 ans et obligation d'indemniser la victime,

    • - pour y. MO. une peine de douze mois d'emprisonnement avec liberté d'épreuve pendant 5 ans et obligation d'indemniser la victime ;

  • * sur les cautionnements versés au titre du contrôle judiciaire,

    • - pour g. MI. et n. CO., restitution de la somme de 1.000 euros à chacun et application de l'article 184-2° du Code de procédure pénale pour le solde,

    • - pour y. MO. restitution de la somme de 10.000 euros et application de l'article 184-2° du Code de procédure pénale pour le solde ;

  • * sur les scellés,

    • - Fiche cotée AI2

      • CR2 et CR3 ; scellés 1 à 9 restitution au commerce A,

      • TPH 1 restitution à n. CO.,

      • TPH 2 restitution à g. MI.,

      • CR1 confiscation requise,

    • - Fiche cotée AI1

      • scellés n° UN, scellés n° DEUX, 2/scellé, 3/scellé, 4/scellé, 5/scellé et 6/scellé : restitution à y. MO.,

      • 1/scellé : confiscation requise,

y. MO. et son conseil ont été entendus en leurs observations aux termes desquelles, il sollicite la réformation de la décision par le prononcé d'une relaxe de l'ensemble des chefs de poursuite au motif que les éléments à charge ne sont pas suffisants pour entrer en voie de condamnation, que le doute doit profiter au prévenu et que le préjudice exact de la SARL A n'a pas été déterminé.

g. MI. assisté de son conseil ont été entendus en leurs observations aux termes desquelles, il indique ne pas contester sa responsabilité pénale, ni la peine prononcée et sollicite la confirmation de la décision en toutes ses dispositions pénales et civiles.

n. CO. et son conseil ont été entendus en leurs observations aux termes desquelles, il sollicite la confirmation du jugement en ses dispositions civiles, il fait valoir au soutien de la relaxe du chef d'abus de confiance qu'il avait le sentiment que son employeur n'était pas opposé à ces détournements et à défaut, demande la confirmation du jugement sur la peine qu'il considère comme adaptée pour les autres infractions commises qu'il ne conteste pas.

SUR CE,

Sur l'action publique

y. MO.

Attendu en premier lieu qu'il convient de relever que si le prévenu soutient sa relaxe pour l'ensemble des chefs de poursuite, il est constant que ce dernier a reconnu avoir vendu à plusieurs reprises, des olives de 10 grammes de résine de cannabis à n. CO., après que ce dernier lui en ait commandé en 2012 en faisant office d'intermédiaire entre son revendeur personnel situé en France et n. CO. et que lors de la perquisition effectuée à son domicile, les enquêteurs y ont découvert 59 grammes de résine de cannabis ;

Que ses déclarations sont conformes à celles de n. CO. qui le décrivait comme son revendeur de résine de cannabis ;

Attendu en second lieu, que le prévenu qui, par ses déclarations circonstanciées, a permis de mettre au jour des détournements commis par deux autres employés du commerce sur lesquels il sera revenu ci-après, a reconnu en avoir tiré des bénéfices illicites même s'il est constant qu'il n'a pas été renvoyé devant le Tribunal correctionnel pour répondre de ces agissements ;

Que néanmoins, il apparaît qu'il existait entre ces trois employés une collusion pour obtenir des profits illicites par divers stratagèmes utilisés par chacun d'eux ceci en l'absence de contrôle réel exercé sur place par leur employeur ;

Qu'ainsi, il est reproché à y. MO. d'avoir prélevé des espèces dans la caisse du commerce à son seul bénéfice en procédant à des paiements de tickets de jeu gagnants fictifs ;

Que les premiers juges ont relevé à cet égard, que le prévenu avait disposé d'autres ressources personnelles que le paiement de son salaire au cours de la période d'avril 2012 à février 2013 afin de pouvoir faire face à ses charges mensuelles importantes sans que les explications fournies par l'intéressé sur l'origine de ses autres ressources ne soient crédibles et surtout justifiées par une activité licite ;

Qu'en outre, il apparaît que sur cette période, il est le seul employé qui avait accès à cette caisse dont la présence ou l'absence sur le lieu de travail est significative pour la détermination du différentiel entre les sommes réellement enregistrées par le terminal de l'organisation de jeux de hasard B et celles correspondantes qui ont été payées par la caisse du commerce ;

Qu'ainsi, il est démontré que les montants de ce différentiel sont les plus importants quand le prévenu travaillait et sont au contraire très faibles lors de ses absences, que les explications qu'il a données selon lesquelles, il aurait été victime d'un complot des deux autres employés, sont battues en brèche par ces corrélations statistiques alors que ces derniers ne l'ont jamais incriminé comme étant l'auteur par ce moyen de ces détournements de numéraires ;

Que nonobstant les dénégations du prévenu et même si le montant total des sommes détournées par ce biais n'a pas été déterminé exactement, il apparaît donc qu'il existe des éléments suffisants et sérieux pour le déclarer coupable de ce chef ;

Attendu que c'est à juste titre, que le tribunal, tirant des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s'imposaient, a donc retenu la culpabilité de y. MO. sur l'ensemble des faits reprochés et lui a fait une juste application de la loi pénale en le condamnant à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis ;

g. MI.

Attendu que les faits visés dans la poursuite à l'encontre de ce dernier sont parfaitement établis par les éléments de l'information sauf en ce qui concerne les faits au préjudice de b. MA. dès lors qu'il est constant que ce dernier a bien obtenu le paiement de son ticket de jeu après l'avoir réclamé au prévenu, lequel a déclaré avoir agi par erreur et s'est ravisé, à tout le moins, lorsque ce client a exigé la remise de son ticket gagnant et surtout n'a pas encaissé cette somme en ses lieu et place ;

Que c'est donc à juste titre, que le tribunal, tirant des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s'imposaient, a retenu la culpabilité du prévenu pour les autres faits qu'il n'a jamais contestés, ni d'ailleurs sa responsabilité pénale ;

Que la décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu'elle a retenu g. MI. dans les liens de la prévention, sauf à le relaxer du chef d'abus de confiance au préjudice de b. MA., ainsi que sur la peine qui lui a été infligée qui, en présence d'un antécédent judiciaire ancien, apparaît adaptée à sa personnalité et à la nature des infractions commises ;

n. CO.

Attendu que le Tribunal a justement relevé que ce dernier avait, à des fins personnelles, prélevé et emprunté du numéraire dans la caisse du commerce dont il faut rappeler qu'il en était le responsable, avait disposé à titre gratuit de plusieurs articles destinés à la vente et avait passé plusieurs commandes importantes auprès des fournisseurs dans le but d'obtenir la fourniture de cadeaux personnels ;

Qu'il est constant que ces articles n'ont jamais été remis à l'employeur, ni que celui-ci leur ait donné une autorisation même implicite de procéder de la sorte, ce qui conduisait à augmenter inutilement les stocks de marchandises immobilisées dès lors que les commandes étaient gonflées pour atteindre le seuil de déclenchement des gratifications consenties par les fournisseurs ;

Que par ailleurs venir invoquer devant la Cour une permission de l'employeur de se servir en numéraires dans la caisse du commerce pour le règlement de menus achats apparaît pour le moins incongru et en aucun cas, il n'est justifié d'une quelconque information de ce dernier et encore moins d'un accord tacite sur cette pratique préjudiciable à ses intérêts ;

Qu'en conséquence, les faits d'abus de confiance au préjudice du commerce A sont donc parfaitement constitués ;

Qu'en revanche, contrairement à ce que les premiers juges ont indiqué, il résulte des déclarations concordantes de y. MO. et du prévenu, qu'au moins, à deux reprises, ce dernier a également cédé de la résine de cannabis ;

Que le jugement sera donc réformé de ce chef et n. CO. sera déclaré coupable des faits d'offres et de cession de produits stupéfiants ;

Que la décision des premiers juges sera néanmoins confirmée sur la peine qui a été prononcée qui, en l'absence d'antécédents judiciaires du prévenu, apparaît adaptée à sa personnalité et à la nature des infractions ;

Attendu qu'il convient d'ordonner la restitution des sommes versées au titre de la première partie du cautionnement dans le cadre des mesures de contrôle judiciaire prononcées à l'égard des trois prévenus dans la limite d'un montant de 1.000 euros à chacun pour n. CO. et g. MI. et d'un montant de 10.000 euros pour y. MO. par application des dispositions de l'article 186 du Code de procédure pénale, étant rappelé que la seconde partie reste affectée au paiement des causes visées par l'article 184-2° du Code de procédure pénale ;

Qu'il convient en outre, d'ordonner la confiscation du scellé CR1 de la fiche cotée AI2 et du 1/scellé de la fiche cotée AI1 ; d'ordonner la restitution à j. NO-ME., ès-qualités d'héritière de c. NO-ME., des scellés 1 à 9, CR2 et CR3 de la fiche cotée AI2 ; restitution à g. MI. du scellé TPH 2 de la fiche cotée AI2 ; restitution à n. CO. du scellé TPH 1 de la fiche cotée AI2 ; restitution à y. MO. des scellés n° UN, scellés n° DEUX, 2/scellé, 3/scellé, 4/scellé, 5/scellé et 6/scellé de la fiche cotée AI1 ;

Sur l'action civile

Attendu que l'intervention en cause d'appel de j. NO-ME. ès-qualités d'héritière de c. NO-ME. pour se constituer partie civile en cette qualité doit être déclarée irrecevable dès lors que la constitution de partie civile doit intervenir au plus tard après les premières réquisitions du Ministère public ;

Attendu que pour critiquer le jugement qui a déclaré sa constitution de partie civile irrecevable, la SARL A soutient que la créance indemnitaire de c. NO-ME. en sa qualité d'exploitante du fonds de commerce A lui aurait été transmise par l'apport du fonds de commerce ;

Que cependant, le Tribunal après avoir rappelé que seul un préjudice direct et personnel de la victime était indemnisable, a justement constaté que cette créance indemnitaire se trouvait dans le patrimoine de la défunte c. NO-ME. ;

Que cette action indemnitaire du préjudice subi par c. NO-ME. étant transmissible à ses héritiers, seuls ses ayants-droits peuvent donc en obtenir réparation devant les juridictions compétentes ;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions civiles ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

Statuant contradictoirement à l'égard des prévenus et conformément aux dispositions de l'article 377 du Code de procédure pénale à l'égard de j. NO. ME. ès-qualités d'héritière de c. NO-ME. et ès-qualités de représentante légale de la SARL A,

Reçoit les appels,

Sur l'action publique

Réforme le jugement du Tribunal correctionnel du 13 janvier 2015 en ce qu'il a déclaré g. MI. coupable d'abus de confiance au préjudice de b. MA. et en ce qu'il a relaxé n. CO. d'offres et de cession de produits stupéfiants ;

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Relaxe g. MI. des faits d'abus de confiance au préjudice de b. MA. ;

Déclare coupable n. CO. d'offres et de cession de produits stupéfiants ;

Confirme le jugement en ses autres dispositions pénales ;

Ordonne la confiscation du scellé CR1 de la fiche cotée AI2 et du 1/scellé de la fiche cotée AI1 ;

Ordonne la restitution de la somme de 1.000 euros à g. MI. versée au titre de la première partie du cautionnement du contrôle judiciaire ;

Ordonne la restitution de la somme de 1.000 euros à n. CO. versée au titre de la première partie du cautionnement du contrôle judiciaire ;

Ordonne la restitution de la somme de 10.000 euros à y. MO. versée au titre de la première partie du cautionnement du contrôle judiciaire ;

Ordonne la restitution à j. NO-ME., ès-qualités d'héritière de c. NO-ME., des scellés 1 à 9, CR2 et CR3 de la fiche cotée AI2 ;

Ordonne la restitution à n. CO. du scellé TPH 1 de la fiche cotée AI2 ;

Ordonne la restitution à g. MI. du scellé TPH 2 de la fiche cotée AI2 ;

Ordonne la restitution à y. MO. des scellés n° UN, scellés n° DEUX, 2/scellé, 3/scellé, 4/scellé, 5/scellé et 6/scellé de la fiche cotée AI1 ;

Sur l'action civile

Déclare irrecevable l'intervention en cause d'appel de j. NO-ME. ès-qualités d'héritière de c. NO-ME. afin de se constituer partie civile en cette qualité ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions civiles ;

Condamne solidairement y. MO., n. CO. et g. MI. aux frais du présent arrêt ;

Composition🔗

Ainsi jugé et prononcé en audience publique de la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le dix-huit mai deux mille quinze, par Monsieur Eric SENNA, Conseiller faisant fonction de Président, Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, en présence de Monsieur Michael BONNET, Premier substitut du Procureur général, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier.

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