Cour d'appel, 29 septembre 2014, La société civile particulière dénommée SCI A c/ La Société en Commandite Simple dénommée SCS B

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Abstract🔗

Bail commercial – Résolution (non)

Résumé🔗

Le contrat de bail souscrit le 29 janvier 2007 entre la SCI A et la SCI B dispose notamment que les locaux faisant l'objet du contrat pourront être utilisés par le preneur pour y exploiter à titre principal sous l'enseigne P un fonds de commerce de vente de prêt-à-porter hommes et femmes, avec à titre purement accessoire la vente de tous articles de luxe, de lingerie féminine, chaussures, maroquinerie, accessoires de mode, d'esthétique et articles de maison ainsi que tous articles de la griffe «V.». Aux termes du même chapitre concernant la destination des lieux, le preneur a déclaré s'interdire expressément l'exercice de toutes activités contraires à ladite clause et de toutes activités commerciales similaires exploitées dans l'immeuble Palais S. La convention des parties comprend en outre une clause résolutoire en l'état de laquelle en cas d'inexécution d'une seule des conditions du bail quant à la nature des activités exercées et 15 jours après un simple commandement de payer ou une sommation d'exécuter contenant déclaration par le bailleur de son intention d'user du bénéfice de la clause, demeuré infructueux, le bail sera résilié de plein droit si bon semble au bailleur. Il résulte des pièces produites que la SCI A a fait signifier à la SCI B sommation d'avoir, dans les 15 jours, à cesser la vente d'articles non autorisée par le bail et à se conformer strictement aux charges et conditions dudit bail après qu'il ait été constaté que cette société procédait, en violation des dispositions conventionnelles, à la vente de manteaux en fourrure et de bijoux non autorisée par le bail et faisait en outre concurrence à un autre commerce de l'immeuble, les termes de la clause résolutoire conventionnelle étant en outre rappelés dans cette sommation. En l'espèce, une opposition à ladite sommation été signifiée par la SCI B le 25 juillet 2012. Les premiers juges ont à bon droit estimé que la véracité des griefs articulés par la SCI A à l'encontre de sa locataire devait être appréciée à la date de délivrance de la sommation du 11 juillet 2012, le juge du fond devant déterminer si la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties a produit ou non ses effets, c'est-à-dire si le preneur avait manqué à ses obligations ou persistait dans ses errements pendant la période de 15 jours impartie pour régulariser la situation dénoncée. Le procès-verbal dressé par huissier le 23 juillet 2012 à la requête de la SCI B permet de constater que la boutique est garnie de très nombreux articles de confection, plus d'un millier étant exposé parmi lesquels se trouvent 23 vêtements en fourrure et de nombreux autres articles accessoires comme des chaussures, des sacs et des bijoux fantaisie. Les constats d'huissier dressés les 8 octobre et 29 novembre 2012 soit après l'expiration des effets de la sommation susvisée, permettent de constater que l'ensemble du stock mis en vente apparaît conforme à la destination des locaux loués dès lors que la boutique est exploitée par la SCI B qui vend de très nombreuses pièces de prêt à porter dont une faible quantité seulement apparaît comporter des éléments de fourrure. Tant le grand livre général pour l'exercice 2012 de la SCI B mentionnant l'achat de bijoux et articles en fourrure pour une quantité et une valeur très inférieure au nombre et au prix des vêtements achetés par ce fonds de commerce que le témoignage du directeur de la division du contrôle de l'activité des entreprises au sein de la direction de l'expansion économique attestant de ce que la vente de vêtements et d'articles en fourrure apparaît accessoire, confortent l'inanité des griefs articulés par la SCI A à l'encontre de sa locataire, laquelle n'apparaît pas avoir manqué à ses obligations. Il résulte au contraire des éléments versés à la procédure que la boutique exploitée sous l'enseigne P est une boutique de vêtements représentant des grandes marques de la confection féminine de luxe en sorte que la commercialisation de quelques vêtements revêtus de fourrure apparaît procéder de l'essence même de l'activité de prêt-à-porter de luxe et apparaît, au regard des proportions vendues, accessoire à l'activité principale de la SCI B sans que le prix des articles correspondants puisse induire une autre qualification. Il est par ailleurs établi que depuis le 11 juillet 2012, date de la sommation, aucun article de joaillerie n'a été mis à la vente au sein de la boutique «P» et ce, alors que la clause afférente à la destination des locaux loués autorisait au demeurant la locataire à vendre à titre accessoire des articles de luxe ainsi que des accessoires de mode, catégories dont relèvent incontestablement les montres W qu'il était reproché à sa locataire d'avoir commercialisées. S'agissant de la présence dans l'immeuble «S» d'un fonds de commerce de vente au détail d'horlogerie, bijoux et accessoire et joaillerie à l'enseigne « M », les premiers juges ont à bon droit relevé que la vente de bijoux et de montres par la locataire s'avérait accessoire au prêt-à-porter exploité à titre principal dans les lieux en sorte qu'il apparaît à la juridiction d'appel que le grief tiré de l'exploitation d'une activité commerciale similaire dans l'immeuble est tout autant infondé. Les premiers juges ont déduit de l'ensemble de ces circonstances que la sommation du 11 juillet 2012 ne pouvait produire effet en sorte qu'il convenait de faire droit à l'opposition formée par la SCI B à cette sommation alors qu'il suffisait de constater que la mise en œuvre de la clause résolutoire conventionnelle effectuée dans le cadre de cette sommation n'avait pu régulièrement produire ses effets, le jugement entrepris étant pour ces motifs confirmé en ce que la SCI A a été déboutée des fins de sa demande de constatation de la résiliation du bail et de l'intégralité de ses demandes subséquentes.


Motifs🔗

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2014

En la cause de :

  • - La société civile particulière dénommée SCI A, dont le siège social se trouve à Monaco 98000, X, prise en la personne de sa gérante en exercice, Madame r. BE., demeurant et domiciliée à ladite adresse,

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

  • - La Société en Commandite Simple dénommée SCS B, dont le siège social se trouve à Monaco 98000, X1 , exploitant le commerce sous l'enseigne P , agissant poursuites et diligences de sa gérante commanditée en exercice, demeurant en cette qualité audit siège,

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉE,

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 12 décembre 2013 (R.1643) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 20 février 2014 (enrôlé sous le numéro 2014/000119) ;

Vu les conclusions déposées les 29 avril et 24 juin 2014, par Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom de la Société en Commandite Simple dénommée SCS B ;

Vu les conclusions déposées le 4 juin 2014, par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de la SCI A ;

À l'audience du 1er juillet 2014, Ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par la SCI A, à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Première Instance du 12 décembre 2013.

Considérant les faits suivants :

Par acte sous-seing privé en date du 29 janvier 2007, la SCI A a donné à bail à la SCI B des locaux 2X à Monaco destinés à la vente de prêt-à-porter à titre principal, le preneur s'engageant par ailleurs à ne pas exercer d'activité similaire à celle des autres magasins dans l'immeuble.

Le 11 juillet 2012, la SCI B s'est vu délivrer sommation d'avoir à cesser la vente d'articles non autorisés par le bail et à se conformer strictement aux clauses, charges et conditions du contrat de location au motif qu'elle vendait des manteaux de fourrure et des bijoux.

Suivant acte d'huissier délivré le 25 juillet 2012, la SCI B a fait assigner la SCI A devant le Tribunal de première instance à l'effet de la voir condamner à lui payer la somme de 150.000 euros de dommages-intérêts sur le fondement des articles 989, 997 et suivants et 1559 du Code civil, outre 20.000 euros à titre de dommages-intérêts complémentaires et intérêts de droit jusqu'à parfait paiement sur ces sommes.

Par jugement du 12 décembre 2013, le Tribunal de première instance a :

  • « (…) - fait droit à l'opposition formée par la SCI B à la sommation signifiée le 11 juillet 2012,

  • - débouté la SCI A de sa demande tendant à voir constater la résiliation du bail et de l'intégralité de ses demandes subséquentes,

  • - condamné la SCI A à payer à la SCI B la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

  • - dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

  • - rejeté le surplus des demandes de la SCI B,

  • - condamné la SCI A aux dépens (…)»

Au soutien de cette décision, les premiers juges ont pour l'essentiel relevé que la réalité des griefs articulés à l'encontre du preneur doit être appréciée à la date de délivrance de la sommation, c'est-à-dire le 11 juillet 2012 d'une part, alors d'autre part que les pièces produites leur apparaissent conformes à la destination des lieux prévue au bail et établissent en tout état de cause que la SCI B a satisfait aux causes de la sommation dans le délai imparti de 15 jours, les autres griefs ne leur apparaissant pas caractérisés dans la mesure où la vente de bijoux et montres par la SCI B est accessoire au commerce de prêt-à-porter exploité à titre principal, en sorte que la sommation du 11 juillet 2012 ne peut produire effet, qu'il doit être fait droit à l'opposition formée par la société locataire à cette sommation, la SCI A devant être déboutée des fins de sa demande en constatation de résiliation du bail.

Suivant exploit du 20 février 2014, la SCI A a régulièrement interjeté appel du jugement susvisé signifié le 21 janvier 2014 à l'effet de voir réformer cette décision dans toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

  • « (…) - dire et juger que la SCI B ne respecte pas la destination du bail signé le 29 janvier 2007 avec la SCI A,

  • - dire et juger que malgré la sommation que la SCI A lui a signifiée le 11 juillet 2012, la SCI B ne s'est pas conformée strictement à la destination du bail,

  • - constater qu'en application de la clause résolutoire conventionnelle, le bail a été résilié de plein droit à l'issue du délai imparti par la sommation, soit le 27 juillet 2012,

  • et, en conséquence :

  • - dire et juger que la SCI B occupe les lieux loués sans droit ni titre depuis le 27 juillet 2012,

  • - dire et juger qu'elle devra libérer les lieux dans les 15 jours de la signification du jugement à intervenir et ordonner à défaut son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef des locaux situés 3X à Monaco, au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier sous astreinte de 150 euros par jour de retard,

  • - condamner la SCI B à lui payer une indemnité d'occupation de 589,63 euros par jour à compter du 27 juillet 2012 jusqu'au jour de son départ, déduction faite des sommes déjà perçues,

  • - condamner la SCI B à verser à la SCI A la somme de 26.902 euros correspondant à un trimestre de loyer à titre de dommages intérêts,

  • - condamner la SCI B aux dépens (…)»

Au soutien de son appel, la SCI A fait grief aux premiers juges d'avoir procédé à une appréciation inexacte des éléments de fait qui leur étaient soumis.

Elle observe que la SCI B n'a jamais contesté procéder à la vente d'articles de fourrure lorsque la société bailleresse lui a délivré la sommation du 11 juillet 2012, étant par elle rappelé que par l'exploit d'opposition du 25 juillet 2012 elle reconnaît que les pièces contenant de la fourrure sont vendues sous l'enseigne P et constituent des vêtements de prêt-à-porter en matière de fourrure, ce qui induit l'admission des griefs articulés à son encontre.

L'appelante observe que si le procès-verbal de constat établi le 8 octobre 2012 ne permet pas d'établir la réalité de la vente d'articles en fourrure au moment de la sommation, il permet en revanche de démontrer que cette sommation n'a pas été suivie d'effet dès lors que plus de 15 jours après des articles en fourrure étaient exposés dans les vitrines de la boutique P, tous éléments constatés par l'huissier qui s'est rendu sur les lieux le 12 octobre 2012.

Les nombreuses photographies communiquées permettent de constater que ces articles en fourrure sont systématiquement exposés en vitrine et ne caractérisent pas un commerce accessoire dans la mesure où ils sont vendus à plus de 35.000 euros.

S'agissant des procès-verbaux dressés à la demande de la SCI B, l'appelante estime qu'ils ne peuvent avoir de valeur probante objective dans la mesure où la locataire a certainement pris le soin de retirer les articles litigieux des présentoirs et des vitrines de la boutique, seul le procès-verbal de constat établi par Maître ESCAUT MARQUET, Huissier de justice, les 8 et 12 octobre 2012 de façon inopinée permettant de prouver la réalité de l'exploitation contraire aux clauses du bail.

La SCI A estime que l'expulsion de la SCI B s'impose et qu'en l'état de la clause résolutoire insérée au contrat de bail celui-ci se trouve résilié depuis le 27 juillet 2012 en sorte qu'une indemnité d'occupation lui est due et doit être calculée de la manière suivante : 107.608,34 euros x 2/ 365 = 589,63 euros.

Par application de la clause résolutoire insérée au contrat, une indemnité forfaitaire d'un trimestre de loyer sera également due à titre de clause pénale forfaitaire, c'est-à-dire la somme de 26.902 euros pour réparer le préjudice causé par le comportement de la locataire.

La SCI B, intimée, entend pour sa part voir :

  • « (…) -confirmer le jugement rendu le 12 décembre 2013 par le Tribunal de première instance en ce qu'il a fait droit à l'opposition formée par la SCI B à la sommation signifiée le 11 juillet 2012 et a débouté la SCI A de sa demande tendant à voir constater la résiliation du bail et de l'intégralité de ses demandes subséquentes.

  • Et, relevant appel incident elle entend voir réformer le jugement entrepris en ce qu'il a sous-évalué le montant des condamnations dues par la SCI A au titre de l'ensemble de ses préjudices,

  • et, statuant à nouveau, entend voir la Cour :

    • - condamner la SCI A à lui payer la somme de 150.000 euros à titre de dommages-intérêts en vertu des dispositions des articles 989, 997 et suivants et 1559 du Code civil,

    • - condamner la SCI A à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages intérêts complémentaires pour les frais de justice engagés,

    • - outre 20.000 euros à titre de dommages intérêts complémentaires pour les moyens exposés et les pièces produites aux débats destinés à tromper la religion des juges,

    • - 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive en application des dispositions de l'article 431 alinéa 3 du Code de procédure civile,

  • toutes ces sommes produisant intérêts de droit jusqu'à parfait paiement et la SCI A devant être déboutée de l'ensemble ses prétentions contraires ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel (…)»

La SCI B soutient pour l'essentiel que par un procès-verbal de constat du 23 juillet 2012 postérieur à la sommation du 11 juillet, elle a parfaitement démontré que les articles contenant de la fourrure sous l'enseigne P sont vendus à titre accessoire compte tenu de la faible proportion qu'ils représentent dans le stock de cette enseigne, c'est-à-dire 2,82% de la valeur totale du stock.

La locataire précise également que le bail prévoit au titre de la destination des locaux la vente d'accessoires de mode et d'articles de luxe à titre accessoire, en sorte qu'elle n'a commis aucune violation des clauses du contrat en mettant en vente des montres de la marque W qu'elle a cependant retirées de sa boutique dans un souci d'apaisement tout comme les lambrequins des stores indiquant les différentes marques présentes en magasin.

La SCI B observe en outre que durant une période de cinq années correspondant à la durée du bail, la bailleresse lui a notifié quatre sommations, deux mises en demeure, deux congés avec offre de renouvellement sous condition d'augmentation importante de loyer et de convocation par devant la Commission arbitrale des loyers commerciaux, toutes procédures qui se sont avérées injustifiées et même malveillantes.

À cet égard, la SCI A a fait preuve de mauvaise foi en produisant des photographies correspondant aux vitrines d'autres boutiques de la SCI B en Principauté de Monaco et fait preuve d'acharnement à son encontre pour récupérer vraisemblablement un local de valeur en contournant les obligations légales imposées par la loi n°490 inhérentes notamment au versement de l'indemnité d'éviction.

La SCI B estime avoir subi un préjudice du fait de tels agissements animés selon elle par des intentions malicieuses de la bailleresse et à l'origine d'une atteinte à sa jouissance paisible et entend en conséquence voir réparer le préjudice qui en est résulté par l'octroi des diverses sommes susvisées réclamées à titre de dommages-intérêts.

L'appelante, SCI A, réitérant les termes de son appel et sa demande de réformation du jugement entrepris entend par ailleurs voir débouter la SCI B des fins de son appel incident.

Elle fait à cet égard valoir qu'elle n'a jamais fait preuve d'un quelconque acharnement procédural à l'encontre de sa locataire qui ne respectait pas ses obligations contractuelles.

Elle relève par ailleurs que la faculté de diligenter plusieurs procédures aux fins d'augmentation de loyer par-devant la Commission des loyers commerciaux est autorisée par la loi 490 du 24 novembre 1948, en sorte qu'il n'en résulte aucun abus de droit.

Elle entend en conséquence voir débouter la SCI B de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé ;

SUR CE,

Attendu que le contrat de bail souscrit le 29 janvier 2007 entre la SCI A et la SCI B dispose notamment que les locaux faisant l'objet du contrat pourront être utilisés par le preneur pour y exploiter à titre principal sous l'enseigne P un fonds de commerce de vente de prêt-à-porter hommes et femmes, avec à titre purement accessoire la vente de tous articles de luxe, de lingerie féminine, chaussures, maroquinerie, accessoires de mode, d'esthétique et articles de maison ainsi que tous articles de la griffe «V.»,

Qu'il est non moins constant qu'aux termes du même chapitre concernant la destination des lieux, le preneur a déclaré s'interdire expressément l'exercice de toutes activités contraires à ladite clause et de toutes activités commerciales similaires exploitées dans l'immeuble Palais S ;

Attendu que la convention des parties comprend en outre une clause résolutoire en l'état de laquelle en cas d'inexécution d'une seule des conditions du bail quant à la nature des activités exercées et 15 jours après un simple commandement de payer ou une sommation d'exécuter contenant déclaration par le bailleur de son intention d'user du bénéfice de la clause, demeuré infructueux, le bail sera résilié de plein droit si bon semble au bailleur ;

Attendu qu'il résulte des pièces produites que la SCI A a fait signifier à la SCI B sommation d'avoir, dans les 15 jours, à cesser la vente d'articles non autorisée par le bail et à se conformer strictement aux charges et conditions dudit bail après qu'il ait été constaté que cette société procédait, en violation des dispositions conventionnelles, à la vente de manteaux en fourrure et de bijoux non autorisée par le bail et faisait en outre concurrence à un autre commerce de l'immeuble, les termes de la clause résolutoire conventionnelle étant en outre rappelés dans cette sommation ;

Attendu qu'une opposition à ladite sommation été signifiée par la SCI B le 25 juillet 2012 ;

Attendu que les premiers juges ont à bon droit estimé que la véracité des griefs articulés par la SCI A à l'encontre de sa locataire devait être appréciée à la date de délivrance de la sommation du 11 juillet 2012, le juge du fond devant déterminer si la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties a produit ou non ses effets, c'est-à-dire si le preneur avait manqué à ses obligations ou persistait dans ses errements pendant la période de 15 jours impartie pour régulariser la situation dénoncée ;

Attendu que le procès-verbal dressé par huissier le 23 juillet 2012 à la requête de la SCI B permet de constater que la boutique est garnie de très nombreux articles de confection, plus d'un millier étant exposé parmi lesquels se trouvent 23 vêtements en fourrure et de nombreux autres articles accessoires comme des chaussures, des sacs et des bijoux fantaisie.

Que les constats d'huissier dressés les 8 octobre et 29 novembre 2012 soit après l'expiration des effets de la sommation susvisée, permettent de constater que l'ensemble du stock mis en vente apparaît conforme à la destination des locaux loués dès lors que la boutique est exploitée par la SCI B qui vend de très nombreuses pièces de prêt à porter dont une faible quantité seulement apparaît comporter des éléments de fourrure ;

Que tant le grand livre général pour l'exercice 2012 de la SCI B mentionnant l'achat de bijoux et articles en fourrure pour une quantité et une valeur très inférieure au nombre et au prix des vêtements achetés par ce fonds de commerce que le témoignage du directeur de la division du contrôle de l'activité des entreprises au sein de la direction de l'expansion économique attestant de ce que la vente de vêtements et d'articles en fourrure apparaît accessoire, confortent l'inanité des griefs articulés par la SCI A à l'encontre de sa locataire, laquelle n'apparaît pas avoir manqué à ses obligations ;

Qu'il résulte au contraire des éléments versés à la procédure que la boutique exploitée sous l'enseigne P est une boutique de vêtements représentant des grandes marques de la confection féminine de luxe en sorte que la commercialisation de quelques vêtements revêtus de fourrure apparaît procéder de l'essence même de l'activité de prêt-à-porter de luxe et apparaît, au regard des proportions vendues, accessoire à l'activité principale de la SCI B sans que le prix des articles correspondants puisse induire une autre qualification ;

Attendu qu'il est par ailleurs établi que depuis le 11 juillet 2012, date de la sommation, aucun article de joaillerie n'a été mis à la vente au sein de la boutique «P» et ce, alors que la clause afférente à la destination des locaux loués autorisait au demeurant la locataire à vendre à titre accessoire des articles de luxe ainsi que des accessoires de mode, catégories dont relèvent incontestablement les montres W qu'il était reproché à sa locataire d'avoir commercialisées ;

Que s'agissant de la présence dans l'immeuble «S» d'un fonds de commerce de vente au détail d'horlogerie, bijoux et accessoire et joaillerie à l'enseigne «M », les premiers juges ont à bon droit relevé que la vente de bijoux et de montres par la locataire s'avérait accessoire au prêt-à-porter exploité à titre principal dans les lieux en sorte qu'il apparaît à la juridiction d'appel que le grief tiré de l'exploitation d'une activité commerciale similaire dans l'immeuble est tout autant infondé ;

Attendu que les premiers juges ont déduit de l'ensemble de ces circonstances que la sommation du 11 juillet 2012 ne pouvait produire effet en sorte qu'il convenait de faire droit à l'opposition formée par la SCI B à cette sommation alors qu'il suffisait de constater que la mise en œuvre de la clause résolutoire conventionnelle effectuée dans le cadre de cette sommation n'avait pu régulièrement produire ses effets, le jugement entrepris étant pour ces motifs confirmé en ce que la SCI A a été déboutée des fins de sa demande de constatation de la résiliation du bail et de l'intégralité de ses demandes subséquentes ;

Attendu s'agissant des différentes demandes d'indemnisation formées par la SCI B dans le cadre de son appel incident que la preuve d'un acharnement procédural ou d'une intention de nuire de la bailleresse n'apparaît pas établie ;

Qu'en effet, les premiers juges ont légitimement observé que tout propriétaire dispose du droit prévu par la loi n° 490 du 24 novembre 1948 de solliciter une augmentation du loyer à l'échéance du bail, d'une part, alors, d'autre part, que le retrait de certains articles des vitrines de la boutique est de nature à caractériser l'incertitude du preneur inhérente à l'interprétation des clauses du bail relatives à la destination des lieux, en sorte que la bailleresse a pu légitimement se méprendre sur la portée de ses propres droits et qu'aucune atteinte à la jouissance paisible du preneur n'a pu résulter de procédures qui ne traduisent aucune mauvaise foi dans l'exécution du contrat ;

Attendu qu'il y a dès lors lieu de débouter la SCI B de l'ensemble ses demandes d'indemnisation supplémentaires réitérées en cause d'appel et de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Attendu enfin sur la demande de dommages-intérêts formée au titre d'un recours abusif, que la preuve n'est pas davantage rapportée de ce que la SCI A aurait fait dégénérer en abus son droit d'appel en sorte qu'il y a lieu de débouter la SCI B des fins de sa demande de ce chef ;

Attendu que les dépens d'appel demeureront à la charge de la SCI A.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit la SCI A en son appel principal et la SCI B en son appel incident,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 décembre 2013 par le Tribunal de première instance,

Déboute la SCI A et la SCI B de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Condamne la SCI A aux dépens d'appel distraits au profit de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Vu les articles 58 à 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,

Composition🔗

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA GAMBARINI, Premier Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Mademoiselle Magali GHENASSIA, Juge de Paix, complétant la Cour et remplissant les fonctions de conseiller en vertu de l'article 22 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires, assistés de Madame Laura SPARACIA-SIOLI, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 29 septembre 2014, par Madame Brigitte GRINDA GAMBARINI, Premier Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Laura SPARACIA-SIOLI, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Mademoiselle Cyrielle COLLE, substitut du Procureur Général.

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