Cour d'appel, 6 janvier 2014, P.A c/ Ministère public en présence de Madame M.P épouse A.U
Abstract🔗
Procédure pénale - Appel - Nullité (oui) - Effets sur appel incident
Résumé🔗
L'appel est formé, à peine de nullité, par une déclaration reçue au greffe général sur le registre à ce destiné, aux termes de l'article 411 du Code de procédure pénale. En l'espèce P.A , en méconnaissance des dispositions précitées, a formé appel suivant courrier recommandé avec accusé de réception en date du 16 mai 2013, remis le 16 et distribué le 17 mai 2013.Cette voie de recours encourt donc la nullité. La recevabilité de l'appel formé le même jour par le Ministère Public, en indiquant qu'il s'agissait d'un appel incident, est subordonnée à la régularité de l'appel principal. Ainsi la nullité de cet appel principal entraîne l'irrecevabilité de l'appel incident.
Motifs🔗
COUR D'APPEL CORRECTIONNELLE
Dossier PG n° 2013/000330
ARRÊT DU 6 JANVIER 2014
En la cause de :
P.A , né le 27 mars 1958 à MONACO, de D.C et de L.C, de nationalité française, retraité, demeurant 1X à MONACO ;
Prévenu de :
VIOLATION DU SECRET DES CORRESPONDANCES
Représenté par Maître Charles LÉCUYER, avocat, commis d'office, dûment mandaté, substitué par Maître Charles-Alexandre BOYER, avocat-stagiaire, et plaidant par ledit avocat-stagiaire ;
APPELANT/INTIMÉ
Contre :
le Ministère public ;
INTIMÉ/APPELANT
En présence de :
- Madame M.P épouse M.A, née le 9 mars 1969 à CALOOCAN CITY (Philippines), de nationalité philippine, nettoyeuse de salon, demeurant 2X à MONACO, partie civile, absente, bénéficiaire de l'assistance judiciaire par décision en date du 18 mars 2013 portant le numéro 3X, représentée à ce titre par Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur près la Cour d'appel, plaidant par ledit avocat défenseur ;
INTIMÉE
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience du 2 décembre 2013 ;
Vu le jugement contradictoirement rendu par le Tribunal de Première Instance jugeant correctionnellement le 7 mai 2013 ;
Vu les appels interjetés tant par P.A, prévenu, par courrier recommandé avec accusé de réception, que par le Ministère public à titre incident, le 17 mai 2013 ;
Vu l'ordonnance de Madame le Premier Président en date du 14 juin 2013 ;
Vu la citation suivant exploit, enregistré, de Maître NOTARI, huissier, en date du 22 juillet 2013 ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu les conclusions de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur pour M.P M.A, partie civile, en date du 4 novembre 2013 ;
Ouï Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, en son rapport ;
Ouï Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur pour M.P M.A, partie civile, en sa plaidoirie ;
Ouï le Ministère Public en ses réquisitions ;
Ouï Maître Xavier-Alexandre BOYER, avocat-stagiaire pour M.P épouse M.A, partie civile, en sa plaidoirie ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Par jugement contradictoire en date du 7 mai 2013, le Tribunal correctionnel a :
Sur l'action publique
- Déclaré P.A coupable :
« D'avoir à Monaco en tout cas sur le territoire national, courant janvier 2012 jusqu'à juillet 2012 et depuis temps non couvert par la prescription, sciemment supprimé une lettre ou un télégramme, de les avoir ouverts ou d'en avoir, par quelque autre moyen, violé le secret, en l'espèce en interceptant certains courriers destinés à M.P épouse M.A, avec laquelle il est en instance de divorce, notamment son relevé bancaire du mois de juin 2012, versé à la procédure de divorce », DÉLIT prévu et réprimé par les articles 26 chiffre 4, 341, 342 et 344 du code pénal.
En répression, faisant application des articles visés par la prévention,
- condamné P.A à la peine de SIX CENTS EUROS D'AMENDE.
Sur l'action civile
Accueilli M.P M.A en sa constitution de partie civile.
la déclarant partiellement fondée en sa demande, condamné P.A à lui payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts.
condamné P.A , en outre, aux frais qui comprendront les droits prévus par l'article 63 de l'ordonnance souveraine n° 15173 du 8 janvier 2002 et dit que l'administration en poursuivra le recouvrement comme en matière d'enregistrement, s'agissant d'une condamnation prononcée contre l'adversaire d'une assistée judiciaire.
P.A , prévenu, a interjeté appel de ce jugement le 17 mai 2013.
Le Ministère public a interjeté appel de ladite décision le même jour.
Considérant les faits suivants :
Le 5 novembre 2012 M.P M.A déposait plainte à l'encontre de son mari, P.A , du chef de violation du secret des correspondances.
Elle expliquait que de janvier à juin 2012 elle n'avait pas reçu ses relevés bancaires bien que transmis par sa banque.
Elle ajoutait que la copie du relevé de juin 2012 avait été produite par son époux dans le cadre de la procédure de divorce et qu'une tierce personne avait réceptionné le 28 juin 2012 un courrier envoyé en recommandé avec accusé de réception qui lui était destiné.
L'enquête diligentée permettait de révéler les faits suivants :
dans le courant de l'année 2012, P.A , posté à l'entrée de l'immeuble où demeure M.P M.A, se faisait remettre par la factrice en charge de la distribution du courrier dans ce secteur le courrier adressé au nom d AU à l'adresse du X,
la factrice n'était pas en mesure de donner l'identité de la personne ayant réceptionné le courrier du 28 juin 2012 adressé à l'épouse,
la comparaison de la signature sur le recommandé avec des exemplaires de signature de P.A ne s'avérait pas probante,
le conseil de P.A confirmait que le relevé bancaire communiqué dans le cadre de la procédure de divorce lui avait été transmis par son client.
Entendu, P.A contestait l'ensemble des faits.
Par le jugement dont appel, P.A a été déclaré coupable des faits de violation du secret des correspondances en l'état des témoignages circonstanciés recueillis et condamné tant pénalement que civilement.
P.A a interjeté appel du jugement du 7 mai 2013 par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 16 mai 2013, réceptionné le 17 mai 2013. Il convient d'observer que l'appel formé par P.A soulève un problème de régularité au regard des dispositions de l'article 411 du Code de procédure pénale.
Le Ministère public a interjeté appel incident le même jour.
Dans ses conclusions du 4 novembre 2013, M.P M.A a sollicité la confirmation du jugement en cause.
À l'audience de la Cour, elle a déclaré s'en rapporter sur la recevabilité de l'appel et maintenu sa demande de confirmation au fond.
Le Ministère public a indiqué que la recevabilité de l'appel lui semblait douteuse. Il a requis la confirmation de la décision.
Le conseil de P.A a déclaré s'en remettre à la Cour sur la régularité de l'appel après avoir fait observer que son client avait formalisé cette voie de recours sans l'assistance d'un avocat. Sur le fond il a indiqué que la culpabilité n'était pas contestée et que la réformation n'était sollicitée que sur la peine prononcée et le montant des dommages-intérêts alloués compte tenu de la situation financière précaire de son client.
SUR CE,
Attendu que l'appel est formé, à peine de nullité, par une déclaration reçue au greffe général sur le registre à ce destiné, aux termes de l'article 411 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'en l'espèce P.A , en méconnaissance des dispositions précitées, a formé appel suivant courrier recommandé avec accusé de réception en date du 16 mai 2013, remis le 16 et distribué le 17 mai 2013 ;
Que cette voie de recours encourt donc la nullité ;
Attendu que la recevabilité de l'appel formé le même jour par le Ministère Public en indiquant qu'il s'agissait d'un appel incident, est subordonnée à la régularité de l'appel principal ; qu'ainsi la nullité de cet appel principal entraîne l'irrecevabilité de l'appel incident ;
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,
statuant contradictoirement, conformément aux dispositions de l'article 377 du Code de procédure pénale, en matière correctionnelle,
Vu l'article 411 du Code de procédure pénale,
Déclare nul l'appel formé par P.A ,
Déclare en conséquence irrecevable l'appel incident formé par le Ministère public le 17 mai 2013,
Dit en conséquence n'y avoir lieu à statuer sur les appels,
Condamne P.A aux frais du présent arrêt ;
Composition🔗
Après débats en publique de la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le deux décembre deux mille treize qui se sont tenus devant Monsieur Gérard FORÊT-DODELIN, Vice Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Marc SALVATICO, Conseiller en présence de Monsieur Jean-Jacques IGNACIO, Substitut du Procureur général assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef adjoint ;
Après qu'il en ait été délibéré et jugé, le présent arrêt a été signé seulement par Monsieur Gérard FORÊT-DODELIN, Vice-Président et Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, Chevalier de l'ordre de Saint Charles, en l'état de l'empêchement de Monsieur Marc SALVATICO, Conseiller et ce en application des dispositions des articles 58 à 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 portant organisation judiciaire ;
Lecture étant donnée à l'audience publique du six janvier deux mille quatorze par Monsieur Gérard FORÊT-DODELIN, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assisté de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef adjoint et en présence de Monsieur Gérard DUBES, Substitut du Procureur général, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles et ce en application des dispositions des articles 58 à 62 de la loi n°1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaire.