Cour d'appel, 21 juin 2011, G. G. c/ L. G.

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Propriété immobilière

Preuve du transfert : don manuel d'un père à son fils de véhicules automobiles ; fils en possession des certificats d'immatriculation et des clefs concernant les véhicules ; don manuel d'un père à son fils de véhicules automobiles ; réparations mécaniques effectuées par le fils ; don manuel d'un père à son fils de véhicules automobiles ; mandat administratif dont se prévaut le père non établi

Don manuel

Preuve : établie par divers éléments matériels prouvant que le fils est en possession des véhicules objet de la donation

Résumé🔗

G.G. soutient avoir procédé à la vente et à la mise en dépôt vente des véhicules litigieux après en être devenu propriétaire par une donation, établie par leurs documents administratifs et des éléments matériels, tels que la remise de leurs clés de contact ou les réparations effectuées sur certains d'entre eux, tandis que L.G. expose que c'est dans le cadre d'un seul mandat d'administration que son fils était en possession des véhicules et fait valoir le caractère équivoque de cette dernière.

Sur les documents administratifs, les conditions de remise des « certificats de vente ou cession » à G.G. sont attestées par un tiers, dont la partialité n'est pas établie, qui ajoute avoir participé à la rédaction de certains d'entre eux et avoir agi à l'effet de concrétiser la donation des véhicules consentie par L.G.

L'établissement de ces documents, suivi de la demande de renouvellement des immatriculations, des visites techniques des véhicules et de la rédaction des certificats de vente au profit de leurs acquéreurs effectuées par G.G. s'analysent, au plan administratif, comme des indices de nature à corroborer la présomption d'un transfert de propriété des véhicules au profit de ce dernier.

La jurisprudence française citée par l'intimé, selon laquelle le certificat d'immatriculation ne constitue pas la preuve de la propriété d'un véhicule, doit s'apprécier au regard des articles 101 et 102 du Code la route monégasque, prévoyant que le véhicule objet d'un certificat d'immatriculation doit être affecté à l'usage personnel de son propriétaire, nécessairement domicilié à MONACO, justifiant d'une carte d'identité nationale ou d'une carte de séjour en cours de validité, ou à celui des membres de sa famille, aux besoins de sa profession, de son commerce, ou de son industrie.

Il résulte de ces dispositions que les exigences posées pour l'obtention de ce document apparaissent plus strictes que celles posées pour l'obtention du document équivalent en France, où aucune d'elles n'est prévue par l'article R 111 du Code de la route, de sorte que cette jurisprudence ne peut recevoir une application aussi sévère en Principauté, au regard de la valeur probante attachée aux indices susvisés.

Sur la remise des clés de contact des véhicules : leur délivrance vaut tradition réelle, puisqu'elle a privé de leur usage L.G., qui en a été ainsi matériellement dépossédé au profit de G.G.

À cet égard, la remise des clés par un tiers, en l'occurrence le responsable du garage ayant nécessairement reçu mandat de L.G. pour agir ainsi, est sans incidence sur sa validité.

Les factures des véhicules produites par G.G. démontrent la réalité des réparations mécaniques qu'il a fait réaliser sur cinq d'entre eux et par conséquent sa volonté de se comporter comme le propriétaire de ces derniers.

Sur le mandat d'administrateur dont le caractère verbal est allégué par L.G. : le courrier expédié à ce dernier le 1er décembre 2004 par G.G., à le supposer constitutif d'une demande d'instructions formée par un mandataire à l'égard d'un mandant, n'a été suivi d'aucune réponse de L.G. Il ne peut en être tiré de conséquence utile quant à l'existence d'un rapport de cette nature entre les parties.

L'attestation du responsable du garage relative à l'entretien des véhicules, sans lien avec les faits reprochés par L.G. à G.G. qui n'y est au demeurant pas cité, ne s'avère pas davantage opérante pour rapporter l'existence d'un tel mandat entre eux.

Sur le caractère équivoque de la possession des véhicules : les reçus de dépôt-vente signés par le responsable du garage RM A., mentionnant que le compte rendu du mandat doit être effectué à G.G., n'apparaissent pas de nature à combattre la présomption dont se prévaut ce dernier au seul motif qu'ils ne comporteraient pas sa signature, étant observé que ces pièces ne mentionnent pas davantage celle de L.G.

Les courriers adressés à L.G., invitant ce dernier à s'acquitter du montant des primes d'assurance des véhicules, s'avèrent sans incidence sur la propriété de ces derniers au regard de la législation n'exigeant pas que le souscripteur soit le propriétaire du véhicule, étant également observé que les autres documents d'assurance produits dans le même temps par L.G. ne sont pas au nom de ce dernier, mais à celui de sa fille M.

Les factures d'entretien des véhicules produites par L.G. ne mentionnent pas avoir été établies au nom de ce dernier.

En conséquence, il convient de constater que le transfert de propriété des véhicules au profit de G.G. est établi, qu'il est constitutif d'un don manuel puisqu' effectué sans contrepartie financière et que L.G., qui ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un mandat, ne rapporte pas davantage la preuve de l'absence de ce don, ni celle d'une possession équivoque des véhicules.

Il convient dès lors d'infirmer le jugement entrepris et de débouter les époux L.G. de l'ensemble de leurs demandes.


Motifs🔗

(en matière civile)

LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

La cour statue sur l'appel relevé par G. G., à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Première Instance du 2 juillet 2009.

Considérant les faits suivants :

Reprochant à G. G. d'avoir vendu cinq véhicules de collection et mis cinq autres en dépôt-vente, sur les douze qu'il lui avait remis courant 2002, L. G. et son épouse ont assigné leur fils le 5 décembre 2006 en remboursement du produit de la vente et en restitution des véhicules encore en sa possession, ainsi que M., exploitant du dépôt où se trouvaient les véhicules.

Par le jugement entrepris auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, le Tribunal de Première Instance a déclaré recevable l'intervention volontaire de M. G. en sa qualité d'administrateur judiciaire de L. G., dit qu'il n'y a pas eu de désistement accepté, déclaré R. épouse G. irrecevable à agir faute d'intérêt, débouté M. de sa demande de nullité de l'assignation, dit que le don manuel portant sur les véhicules de collection appartenant à L. G. est fondé sur une possession équivoque et, avant dire droit sur les comptes à faire entre les parties, enjoint à G. G. et à M. de produire les pièces justificatives du montant des ventes.

Par son exploit d'appel du 15 octobre 2009, G. G. demande à la cour d'infirmer ce jugement en toutes ses dispositions, de constater le désistement d'instance de M. G., de dire nulle et de nul effet l'action de L. G., incapable majeur, dès lors que ce dernier ne justifie pas d'une mainlevée de la mesure de protection dont il a été l'objet, subsidiairement de constater que les véhicules dont s'agit ont fait l'objet d'un don manuel consenti en 2002 par L. G. à son fils G. G., de débouter les époux L. G. de leur action et de les condamner à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre celle de 10.000 euros compensatoire du préjudice subi depuis le jugement de première instance.

Il expose que l'administrateur judiciaire de son père, désigné par ordonnance du juge tutélaire italien le 1er février 2007, est intervenu volontairement aux débats le 12 décembre 2007, a indiqué dans ses écritures judiciaires du 4 décembre 2008 ne plus l'assister et soutenu n'y avoir lieu à statuer sur sa demande d'intervention volontaire, avant de maintenir celle-ci par d'autres écritures datées du même jour, selon courrier du conseil des intimés du 21 janvier 2009.

Il fait grief aux premiers juges d'avoir, d'une part, ajouté aux dispositions de l'article 412 du Code de procédure civile en imposant que l'acceptation du désistement ait lieu « en temps utile », d'autre part, maintenu l'intervention de l'administrateur alors que lui même avait accepté le désistement de celui-ci.

Il soutient que la procédure est entachée de nullité puisque l'ordonnance susvisée n'autorisait L. G. à ester en justice qu'avec l'assistance de son administrateur de tutelle.

Au fond, il indique avoir été mis en possession des douze véhicules par son père, lequel a matérialisé la donation par la remise des certificats de vente ou de cession aux fins d'immatriculation à son nom, de sorte qu'aux termes de cette donation irrévocable, il était fondé à en disposer comme il l'entendait et qu'il ne peut donc lui être fait grief de les avoir vendus ou placés en dépôt vente.

Il expose que cette transmission de propriété est établie par les actes de cession des véhicules signés par L. G. antérieurement à la procédure de tutelle engagée en 2005, conformément aux dispositions administratives sur les véhicules automobiles, ainsi que par la remise des véhicules et de leurs clés.

Que c'est lui qui s'est ensuite conformé à la réglementation applicable aux propriétaires de véhicules de plus de quatre ans d'âge, dans laquelle ces derniers avaient été classés pour éviter le retrait des certificats d'immatriculation, dès lors qu'il n'était pas spécifié qu'il s'agissait de véhicules de collection.

Que c'est lui qui a fait procéder au renouvellement des immatriculations en décembre 2003 et décembre 2004, a fait procéder à leur remise en état et a donné mandat de les vendre à un professionnel qui a vérifié qu'il en était bien propriétaire.

G. G. fait donc grief au jugement d'avoir, en déclarant qu'une possession est équivoque si les actes de possession du détenteur ne révèlent pas son intention de se conduire en propriétaire du bien, conclu à ce caractère équivoque en l'espèce, aux motifs qu'il aurait rendu compte de son mandat d'administration le 1er décembre 2004 à son père, que celui-ci aurait continué à s'acquitter des cotisations d'assurance des véhicules et que le fait d'avoir procédé à des visites techniques et au renouvellement des immatriculations ne serait pas de nature à faire perdre à la possession son caractère équivoque.

Il fait valoir au contraire que son courrier du 1er décembre 2004 était seulement destiné à demander conseil à son père, qu'aucune disposition légale n'exige que le souscripteur d'une assurance soit le propriétaire du véhicule et que c'est par des signes ostensibles caractérisant une possession publique, qu'il a manifesté ses droits de propriétaire.

Il reproche enfin aux premiers juges d'avoir dit que l'existence d'un mandat d'administration donné verbalement a été suivi d'un mandat salarié de vente des mêmes véhicules, contrairement aux documents produits aux débats.

Par conclusions enregistrées le 15 juin 2010, M. demande à la cour de prendre acte de ce qu'il fait toutes protestations et réserves concernant les demandes faites et de condamner les époux G. à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en l'état de la procédure abusive diligentée à son encontre.

Il soutient n'être concerné que par quatre véhicules et avoir agi de bonne foi au vu des titres de circulation présentés par G. G.

Par conclusions enregistrées le 26 octobre 2010, les époux G. et L. demandent à la cour de débouter G. G. de son appel, de débouter M. de ses demandes, de les recevoir en leur appel incident, de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a considéré que L. G. avait confié à son fils un mandat salarié de vente des véhicules cédés, de dire et juger que ce mandat était un simple mandat d'administration.

Sur la recevabilité de l'action de L. G., ils soutiennent que les conclusions déposées le 4 décembre 2008 par ce dernier et son épouse, selon lesquelles ils invitent le tribunal à constater qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande d'intervention volontaire de M. G., ne valent pas désistement de ce dernier, puisqu'un tel désistement ne peut être sollicité pour le compte d'une autre partie et que l'article 410 du Code de procédure civile requiert une procuration spéciale de la partie auteur du désistement, ce que L. n'a jamais fourni.

Qu'aux termes de l'article 412 du Code de procédure civile, un désistement n'emporte extinction de l'instance que lorsqu'il a été accepté, de sorte que la partie qui s'est désistée reste libre de retirer son désistement tant que les autres ne l'ont pas accepté.

Que le désistement, à supposer qu'il ressorte des conclusions du 4 décembre 2008, a ainsi été retiré par conclusions du 22 janvier 2009 alors que G. G. l'a accepté le 16 février 2009.

Que même si le désistement de L. G. avait été régulièrement formé et accepté, il aurait éteint le lien d'instance entre les parties, sans éteindre le droit d'action de l'intéressé, qui pouvait à tout moment rétablir le lien par une intervention volontaire formée par dépôt de conclusions.

Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention volontaire de M. G.

Sur la qualification du mandat d'administration, il fait valoir que le certificat d'immatriculation ne constitue pas le titre de propriété d'un véhicule, mais un simple document administratif assimilé à la carte d'identité du véhicule.

Qu'il n'y a donc pas eu vente entre les parties aux termes des articles 1425 et 1426 du Code civil qui prévoit un prix déterminé, lequel ne ressort pas dudit document.

Que G. G. ne peut opposer à son père le renouvellement des immatriculations des véhicules, sans incidence quant à leur propriété.

Que les réparations qu'il a fait effectuer ne sont pas caractéristiques d'une possession à titre de propriétaire puisqu'elles incombent également à d'autres possesseurs tels que le dépositaire ou le mandataire et que L. G. a lui même supporté la charge de l'entretien des véhicules.

Que G. G. ne peut se prévaloir des déclarations de M. qui a tout intérêt à soutenir la cause de l'appelant, lequel lui a remis les véhicules litigieux aux fins de vente, accompagnés des certificats d'immatriculation, en lui faisant les déclarations qu'il souhaitait.

Que les seuls éléments susceptibles de démontrer le caractère non équivoque de la possession seraient les mandats confiés à la société BONHAMS et à M., mais ces documents ne peuvent en eux mêmes démontrer quoique ce soit puisqu'ils sont précisément mis en cause par le véritable propriétaire, savoir L. G.

Que le mandat confié à G. G., qui a reçu les véhicules des mains du garage D. à BEAUSOLEIL et non pas de L. G. était uniquement un mandat d'administration.

S'agissant de M., ils font valoir que celui-ci ne peut prétendre avoir été attrait dans une procédure qui ne le concerne pas, faute pour lui de critiquer valablement les motifs du jugement entrepris qui a, au contraire, retenu que cette procédure ne présentait aucun caractère abusif et que sa présence était nécessaire aux débats.

Sur l'appel incident, ils font valoir qu'aux termes de l'article 428 du Code de procédure civile prévoyant qu'il peut être interjeté par de simples conclusions écrites à l'audience, sans délai particulier, leur appel doit être déclaré recevable.

Que G. G. confond la défense opposée à sa propre demande de dommages et intérêts pour procédure prétendument abusive avec leur demande de dommages et intérêts pour laquelle le tribunal a sursis à statuer en l'attente de la communication ordonnée, pour laquelle ils n'ont pas relevé appel.

Qu'à défaut de mandat exprès donné par L. G. à son fils aux fins de vendre les véhicules, la mission de ce dernier ne pouvait être limitée qu'à un mandat d'administration.

Que le courrier de L. G. adressé à son fils le 28 janvier 2006, soit plus d'un an après la vente des véhicules, ne permet pas de retenir a posteriori la qualification de mandat de vente.

Que le tribunal ne pouvait donc juger, sur la seule base de ce courrier, qu'au mandat d'administration serait venu s'adjoindre un second mandat de vente, alors que L. G. avait exprimé sa volonté le 21 avril 2005 de ne pas vendre les véhicules.

G. G. explique par conclusions du 21 février 2011 l'action engagée par son père par le fait que son frère Ricardo et lui l'ont fait placer sous tutelle par suite de l'affaiblissement de ses facultés mentales.

Que le secrétaire de son père C. a attesté que ce dernier lui avait bien fait donation des véhicules et que la législation monégasque prévoit que le certificat d'immatriculation ne peut être demandé que par le propriétaire du véhicule.

Par conclusions enregistrées le 12 avril 2011, L. G. s'étonne de la production en cause d'appel de l'attestation de C., laquelle n'établit en tout état de cause que le fait que L. G. a effectivement signé des imprimés de « certificats de vente ou de cessions d'un véhicule d'occasion » libellés au profit de son fils sans que ceux ci ne permettent d'établir un transfert de propriété desdits véhicules.

Que si cette attestation démontre que le témoin aurait lui même rempli 15 des imprimés des certificats et que G. G. aurait rempli les autres, cela démontre que L. G. n'y voyait là qu'une mesure administrative destinée à faciliter le mandat général donné à son fils.

Que l'affirmation de C. selon laquelle L. G. a concrétisé la donation des voitures à G. G. par le biais des certificats de cession n'est étayée par aucun autre élément.

Que l'intervention de C. est sujette à caution dans la mesure où ce dernier a été opposé à L. G. dans le cadre d'une procédure au terme de laquelle le tribunal du travail l'a débouté de ses demandes d'indemnités.

Que leur appel incident formé n'a pour objet que de voir requalifier le mandat de G. G. en mandat général d'administration et non en mandat de vente.

SUR CE,

Sur le désistement de M. G. et la validité de la procédure engagée par L. G.

Attendu qu'aux termes des articles 171 et 410 du Code de procédure civile, le désistement d'instance doit être effectué par l'avocat-défenseur muni d'une procuration spéciale ;

Attendu que les écrits judiciaires du 4 décembre 2008 des époux L. G., à les supposer constitutifs d'un désistement de M. G. susceptible d'avoir été accepté par G. G. le 11 février 2009 dans leur formulation antérieure au courrier de leur conseil en date du 21 janvier 2009, ne sont accompagnés d'aucune procuration en ce sens ;

Attendu qu'il s'ensuit que le désistement de M. G., administrateur judiciaire de L. G., n'est pas établi, qu'il y a lieu de constater la validité de son intervention volontaire et par suite, de la procédure engagée ;

Au fond,

Attendu que G. G. soutient avoir procédé à la vente et à la mise en dépôt vente des véhicules litigieux après en être devenu propriétaire par une donation, établie par leurs documents administratifs et des éléments matériels, tels que la remise de leurs clés de contact ou les réparations effectuées sur certains d'entre eux, tandis que L. G. expose que c'est dans le cadre d'un seul mandat d'administration que son fils était en possession des véhicules et fait valoir le caractère équivoque de cette dernière ;

Attendu, sur les documents administratifs, que les conditions de remise des « certificats de vente ou cession » à G. G. sont attestées par un tiers, dont la partialité n'est pas établie, qui ajoute avoir participé à la rédaction de certains d'entre eux et avoir agi à l'effet de concrétiser la donation des véhicules consentie par L. G. ;

Attendu que l'établissement de ces documents, suivi de la demande de renouvellement des immatriculations, des visites techniques des véhicules et de la rédaction des certificats de vente au profit de leurs acquéreurs effectuées par G. G. s'analysent, au plan administratif, comme des indices de nature à corroborer la présomption d'un transfert de propriété des véhicules au profit de ce dernier ;

Attendu que la jurisprudence française citée par l'intimé, selon laquelle le certificat d'immatriculation ne constitue pas la preuve de la propriété d'un véhicule, doit s'apprécier au regard des articles 101 et 102 du Code la route monégasque, prévoyant que le véhicule objet d'un certificat d'immatriculation doit être affecté à l'usage personnel de son propriétaire, nécessairement domicilié à Monaco, justifiant d'une carte d'identité nationale ou d'une carte de séjour en cours de validité, ou à celui des membres de sa famille, aux besoins de sa profession, de son commerce, ou de son industrie ;

Qu'il résulte de ces dispositions que les exigences posées pour l'obtention de ce document apparaissent plus strictes que celles posées pour l'obtention du document équivalent en France, où aucune d'elles n'est prévue par l'article R 111 du Code de la route, de sorte que cette jurisprudence ne peut recevoir une application aussi sévère en Principauté, au regard de la valeur probante attachée aux indices susvisés ;

Attendu, sur la remise des clés de contact des véhicules, que leur délivrance vaut tradition réelle, puisqu'elle a privé de leur usage L. G., qui en a été ainsi matériellement dépossédé au profit de G. G. ;

Attendu à cet égard que la remise des clés par un tiers, en l'occurrence le responsable du garage ayant nécessairement reçu mandat de L. G. pour agir ainsi, est sans incidence sur sa validité ;

Attendu que les factures des véhicules produites par G. G. démontrent la réalité des réparations mécaniques qu'il a fait réaliser sur cinq d'entre eux et par conséquent sa volonté de se comporter comme le propriétaire de ces derniers ;

Attendu, sur le mandat d'administrateur dont le caractère verbal est allégué par L. G., que le courrier expédié à ce dernier le 1er décembre 2004 par G. G., à le supposer constitutif d'une demande d'instructions formée par un mandataire à l'égard d'un mandant, n'a été suivi d'aucune réponse de L. G. et qu'il ne peut en être tiré de conséquence utile quant à l'existence d'un rapport de cette nature entre les parties ;

Que l'attestation du responsable du garage relative à l'entretien des véhicules, sans lien avec les faits reprochés par L. G. à G. G. qui n'y est au demeurant pas cité, ne s'avère pas davantage opérante pour rapporter l'existence d'un tel mandat entre eux ;

Attendu, sur le caractère équivoque de la possession des véhicules, que les reçus de dépôt-vente signés par le responsable du garage RM A., mentionnant que le compte rendu du mandat doit être effectué à G. G., n'apparaissent pas de nature à combattre la présomption dont se prévaut ce dernier au seul motif qu'ils ne comporteraient pas sa signature, étant observé que ces pièces ne mentionnent pas davantage celle de L. G. ;

Attendu que les courriers adressés à L. G., invitant ce dernier à s'acquitter du montant des primes d'assurance des véhicules, s'avèrent sans incidence sur la propriété de ces derniers au regard de la législation n'exigeant pas que le souscripteur soit le propriétaire du véhicule, étant également observé que les autres documents d'assurance produits dans le même temps par L. G. ne sont pas au nom de ce dernier, mais à celui de sa fille M. ;

Attendu que les factures d'entretien des véhicules produites par L. G. ne mentionnent pas avoir été établies au nom de ce dernier ;

Attendu en conséquence qu'il convient de constater que le transfert de propriété des véhicules au profit de G. G. est établi, qu'il est constitutif d'un don manuel puisqu' effectué sans contrepartie financière et que L. G., qui ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un mandat, ne rapporte pas davantage la preuve de l'absence de ce don, ni celle d'une possession équivoque des véhicules ;

Attendu qu'il convient dès lors d'infirmer le jugement entrepris et de débouter les époux L. G. de l'ensemble de leurs demandes ;

Attendu, sur les dommages et intérêts, qu'il n'est pas démontré que les époux L. G. aient abusé de leur droit d'agir en justice dans des conditions de nature à constituer un préjudice pour G. G., de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande formée par ce dernier ;

Attendu que M., dont la présence n'apparaissait pas nécessaire aux débats, a été attrait en justice de manière abusive et qu'il y a lieu en conséquence de lui accorder une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'indemniser du préjudice subi de ce chef ;

Attendu que les époux L. G. et M. G., es qualité d'administrateur de L. G., qui succombent seront condamnés aux entiers dépens, y compris ceux de première instance ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco, statuant contradictoirement,

– Infirme le jugement du Tribunal de Première Instance du 2 juillet 2009,

– Constate que les véhicules dont s'agit ont fait l'objet d'un don manuel consenti par L. G. à son fils G. G.,

– Condamne les époux L. G. et M. G., ès-qualités d'administrateur de L. G. à payer une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts à M.,

– Rejette le surplus des demandes des parties ;

– Condamne les époux L. G. et M. G., es qualité d'administrateur de L. G.I aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, dont distraction au profit de Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

– Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition🔗

Mr CORDAS prom. pres ; Mme MABRUT V. pres ; Mr PERRIQUET cons. ;

Mr DUBES subst. proc. gen ; Mme BARDY gref. en chef ;

Mes ESCAUT et PASQUIER-CIULLA av. def ; Me CARRASCO av. bar. de Nice

Note🔗

Cet arrêt infirme le jugement du tribunal de première instance du 2 juillet 2009 en constatant que les véhicules litigieux ont fait l'objet d'un don manuel consenti par L. G. à son fils G. G.

  • Consulter le PDF