Cour d'appel, 9 janvier 2007, SCI D. c/ Z.

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Abstract🔗

Appel civil

Demande nouvelle (CPC, art. 431) - Absence de caractère nouveau de la demande

Vente

Offre d'achat - Acceptation de celle-ci ne coïncidant pas avec ses conditions - Défaut d'accord sur la base de l'offre et sur le prix - Caducité de l'offre, entraînant pour l'offrant restitution des arrhes versés et l'allocation de dommages et intérêts

Résumé🔗

Les époux Z. invoquent l'irrecevabilité des demandes formées par la SCI D. au motif qu'elles seraient nouvelles en cause d'appel ;

Aux termes de l'article 431 du Code de procédure civile : « Les parties peuvent, pour justifier les demandes qui avaient été soumises au premier juge, invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.

Elles ne peuvent former aucune demande nouvelle, à moins qu'il ne s'agisse de compensations ou que la demande nouvelle ne soit la défense à l'action principale... ».

Les époux Z. ont demandé devant le Tribunal de Première Instance la condamnation de la SCI D. à leur restituer la somme de 46 800 euros tandis que la SCI D. a conclu, d'une part, au rejet de cette demande, ce qui doit s'analyser comme une demande de conserver cette somme, et d'autre part, à titre reconventionnel, à la réalisation forcée de la vente de l'appartement litigieux ;

Il en résulte que la demande de la SCI D. tendant à la réformation du jugement qui a ordonné cette restitution de la somme de 46 800 euros, et, dès lors, à l'autorisation de conserver cette somme, n'est pas nouvelle, et alors même que la SCI D. abandonne, en cause d'appel, par l'effet d'une réduction de sa demande originaire, sa demande reconventionnelle ;

Sur le fond, par lettre du 16 décembre 2003 adressée à la SCI D. les époux Z. ont fait une offre d'achat pour le prix de 468 000 euros net de la totalité des parts sociales de la SCI D., propriétaire d'un appartement de trois pièces avec garage, sis à Roquebrune Cap Martin, en précisant que la vente devait être conclue au plus tard le 31 janvier 2004 et qu'ils lui remettaient un chèque de 46 800 euros, non encaissable, correspondant à 10 % du prix, et qui leur sera rendu le jour de la vente définitive ;

Par courrier daté du 22 décembre 2003 et adressé aux époux Z., la SCI D., représentée par son gérant, S. B., a pris acte de l'offre de ceux-ci d'acquérir la totalité des parts sociales de la SCI D., propriétaire de l'appartement de trois pièces et garage situé à Roquebrune Cap Martin, a accepté ladite offre pour le prix de 468 000 euros pour la cession de la totalité des parts sociales, a accusé réception du Chèque de 46 800 euros tiré sur la banque BNP Paribas, qu'elle a mis à l'encaissement le même jour, et les a informés qu'elle avait pris attache avec « Abbey International » pour le transfert de crédit à leur compte ainsi que pour les diverses modifications du prêt ;

Ainsi, si cette offre a été acceptée par la SCI D., elle ne l'a pas été par les associés de cette SCI, soit, selon les statuts de cette société civile immobilière, versés aux débats par les époux Z., S. B. et D. B., seuls propriétaires à concurrence respectivement de 950 et 50 parts des 1000 parts sociales, et dès lors, seuls susceptibles de les céder ;

Par ailleurs les époux Z. ont produit un document intitulé « Assemblée générale extraordinaire » daté du 22 décembre 2003, non signé mais prévoyant la signature des « différents associés présents, Z. A., Z. J., G. R., B. S., B. D. », mentionnant que l'assemblée générale réunissant les deux associés de la SCI, S. B. et D. B. décide de procéder à l'augmentation du capital social d'une somme de 13 770 euros pour le porter de 1 530 euros à 15 300 euros pour la création de parts nouvelles à souscrire et libérer par versement d'espèces à réaliser au moyen de l'émission de 9000 parts nouvelles à 1,53 euros chacune, à libérer intégralement à la souscription, les parts nouvelles étant souscrites par de nouveaux souscripteurs, Z. A., Z. J. et G. R., la répartition du capital social envisagé étant dès lors de 950 parts pour B. S., 50 parts pour B. D., 3325 parts pour A. Z., 3325 pour J. Z. et 7650 parts pour R. G. ;

Les projets d'actes de cession de parts sociales, datées du 23 décembre 2003, produites par les intimés, font état de la cession par S. B. de 500 parts à J. Z. et par D. B. de 50 parts à A. Z.

Il résulte de l'ensemble des documents alors que les intimés avaient fait une offre d'achat de l'intégralité des parts sociales de la SCI D., dans le but de devenir propriétaire du bien immobilier possédé par cette société, les titulaires des parts sociales entendaient demeurer associés dans cette société ;

En outre les intimés ont encore produit un compromis de vente sous conditions suspensives, daté du 15 janvier 2004, établi par la SCI D., non signé, aux termes duquel la SCI D. s'engageait à vendre aux époux Z. au prix de 468 000 euros le bien immobilier de celle-ci et non plus les parts sociales ;

C'est à bon droit que les premiers juges ont dès lors retenu qu'aucun accord n'était intervenu entre les parties sur la base de l'offre d'achat du 16 décembre 2003 devenue caduque au 31 janvier 2004, aucun accord sur le prix n'étant en outre intervenu compte tenu de ce que dans leur lettre du 16 décembre 2003 les époux Z. ont offert pour l'acquisition de l'intégralité des parts sociales le prix ferme de 468 000 euros alors que dans son courrier du 22 décembre 2003 la SCI D. a fait état d'un transfert de crédit, non demandé par les acquéreurs des parts sociales, et susceptible de modifier le prix nécessairement majoré du solde du crédit restant à payer ;

Par suite, les époux Z. sont fondés à obtenir la restitution de la somme de 46 800 euros, que la SCI D. reconnaît avoir encaissée en la qualifiant d'arrhes, avec les intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2004, date de le lettre recommandée avec accusé de réception valant mise en demeure ;

C'est à juste titre que les premiers juges ont alloué aux époux Z. une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice résultant de l'indisponibilité de cette somme et des faits engagés pour la recouvrer ;


Motifs🔗

La Cour d'appel,

Considérant les faits suivants :

Par exploit du 26 mai 2004 A. Z. et J. Z. née G. ont fait assigner la société civile immobilière D. devant le Tribunal de première instance, afin que celle-ci soit condamnée à leur restituer la somme de 46 800 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2004, et à leur payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Ils ont fait valoir, à l'appui de leurs demandes, que :

par lettre du 16 décembre 2003 ils ont, d'une part, notifié à la SCI D. leur intention d'acquérir l'appartement, propriété de celle-ci, sis à Roquebrune Cap Martin, pour le prix de 468 000 euros, au besoin au travers de l'achat de la totalité des parts sociales de cette société et, d'autre part, adressé à cette société pour réserver la vente, un chèque de 46 800 euros, stipulé non encaissable,

par lettre du 22 décembre 2003, S. B., gérant de la SCI D., acceptait l'offre, procédait à l'encaissement du chèque et faisait état de démarches auprès de l'établissement Abbey National pour le transfert du crédit au compte des acheteurs, et pour diverses modifications du prêt,

l'acceptation n'était cependant pas conforme à leur offre dès lors que le chèque ne devait pas être encaissé mais restitué le jour de la signature de l'acte de vente définitif et qu'ils n'avaient pas l'intention de reprendre à leur compte le crédit en cours,

S. B. avait, contrairement aux accords passés, rédigé un procès-verbal d'assemblée générale de la SCI aux fins d'augmentation du capital, afin de demeurer associé de la société, en sorte qu'il avait demandé à acquérir directement le bien immeuble et non plus les parts sociales, avec mainlevée du privilège du prêteur de deniers et des éventuelles hypothèques grevant le bien, par affectation d'une partie du prix du remboursement des dettes de la SCI D. aux créanciers privilégiés,

le compromis de vente préparé par S. B. ne prévoyait cependant pas la purge des privilèges et hypothèques.

La SCI D. s'est quant à elle, opposée à ces demandes, et a conclu, à titre reconventionnel, à la condamnation des époux Z., sous astreinte, à comparaître en l'étude d'un notaire, dans le délai d'un mois du jugement, pour, d'une part, procéder à la remise de divers documents nécessaires à la préparation de l'acte de vente et, d'autre part, signer ledit acte de vente dans le délai d'un mois de leur convocation, le jugement rendu par le Tribunal de Monaco devant faire l'objet d'une homologation par le Tribunal de Nice et, à défaut, devant valoir acte de vente et publié comme tel au bureau des hypothèques de Nice.

La SCI D. a demandé en outre au Tribunal de condamner les époux Z. au paiement du solde du prix de vente, soit 421 200 euros (468 000 euros 46 800 euros) ainsi qu'une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

La SCI D. a soutenu que :

le chèque litigieux supposait la liquidité suffisante sur le compte bancaire pour procéder à son encaissement, les chèques de garantie n'ayant aucune valeur légale,

elle n'avait jamais eu l'intention d'augmenter le prix de vente du bien par la reprise du crédit,

le notaire choisi par les acquéreurs ne pourra que purger les privilèges et hypothèques existants et procéder au règlement du solde du crédit,

il y avait en l'espèce un accord parfait sur la chose et le prix concrétisé par le versement d'un acompte de 10 % du prix de vente.

Les époux Z. ont contesté tout accord sur le prix, compte tenu de la reprise du crédit imposé par la SCI D. et tout accord sur les modalités de paiement du prix, la vente ne pouvant être parfaite en l'absence d'acceptation de leur offre par les propriétaires des parts.

Par le jugement entrepris le Tribunal a constaté l'absence d'accord de volontés en suite de l'offre d'achat formulée le 16 décembre 2003 par A. Z. et J. Z. née G., condamné la société civile immobilière D. à restituer aux époux Z. la somme de 46 800 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2004, montant des causes sus-énoncées, et à leur payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, débouté la société D. de l'ensemble de ses prétentions, dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement et condamné la SCI D. aux dépens.

La SCI D. conclut à l'infirmation du jugement entrepris, et demande à la cour de dire et juger, d'une part, que la vente était parfaite, en l'état de l'accord sur la chose et sur le prix, d'autre part, que les époux Z. ont engagé leur responsabilité contractuelle à l'égard de la SCI D. en ne réitérant pas la vente et ont une attitude fautive, et enfin, qu'elle est fondée à conserver la somme de 46 800 euros à titre d'arrhes conformément à leur accord.

La SCI D. demande en outre à la cour de condamner les époux Z. à leur verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Elle fait essentiellement valoir que le Tribunal a procédé à une mauvaise appréciation des faits de la cause en retenant qu'en l'état de l'ensemble des courriers et documents, l'offre du 16 décembre 2003 avait bien été acceptée le 22 décembre 2003 par la partie venderesse mais que cette offre avait été modifiée dans son objet ;

Qu'il y a eu, en l'espèce, accord sur la chose et sur le prix conformément à l'article 1426 du Code civil ;

Qu'en effet, l'offre que lui ont adressé les époux Z. le 16 décembre 2003 pour un montant net de 468 000 euros a été acceptée par elle le 22 décembre 2003, en sorte qu'elle a transmis le même jour à la société Abbey International, organisme prêteur de deniers, auprès duquel elle remboursait le prêt pour l'acquisition du bien immobilier, un courrier relatif à la reprise du prêt par les époux Z. ainsi qu'une lettre de ceux-ci relative à la modification de la durée du crédit et des modalités du taux ;

Qu'en outre par télécopie du 23 décembre 2003, J. Z. avait donné son accord pour l'encaissement du chèque, nonobstant le libellé de leur offre ;

Que si les époux Z. ont pu penser qu'en reprenant le crédit, le prix de vente de 468 000 euros serait majoré de sommes encore dues au titre du crédit, elle avait adressé le 3 février 2004, à leur conseil, un courrier ainsi qu'une télécopie précisant que la reprise de crédit ne majorait pas le prix du bien dès lors que le montant du crédit serait déduit lors de la vente, par le notaire, pour payer la banque, elle-même ayant prévenu la banque que les acquéreurs ne reprendraient pas le prêt en cours ;

Que le prix initialement convenu de 468 000 euros avec ou sans imputation du reliquat du prêt en cours étant ferme et définitif, et la reprise du crédit et l'augmentation du capital des parts de la SCI ne pouvant être considérés comme étant de nature à dénaturer l'accord initial, la vente était parfaite.

Par conclusions déposées le 17 janvier 2006 les époux Z. demandent à la cour de déclarer les demandes de la SCI D. irrecevables car nouvelles en cause d'appel, de débouter la SCI D. des fins de son appel, de confirmer le jugement entrepris, et de condamner la SCI D. à leur payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Ils font essentiellement valoir que tout en maintenant que la vente était parfaite, la SCI D. ne demande plus que l'acte définitif de vente soit passé, comme elle l'avait fait devant le Tribunal, mais sollicite en cause d'appel, d'une part, qu'elle soit déclarée fondée à conserver la somme de 46 800 euros à titre d'arrhes, ladite somme n'ayant jamais été qualifiée par les parties, et d'autre part, qu'ils soient condamnés à lui payer la somme de 10 000 euros pour « préjudice » ;

Qu'il s'agit de demandes nouvelles en cause d'appel qui doivent dès lors être déclarées irrecevables, conformément à l'article 431 alinéa 2 du Code de procédure civile ;

Qu'au fond, subsidiairement, il n'y a pas eu accord entre les parties ;

Que s'agissant de l'accord sur le prix, ils n'ont jamais demandé à reprendre le crédit, cette reprise de crédit ayant une influence directe sur le montant du prix de vente dès lors que cela aurait entraîné soit une majoration du prix de 468 000 euros du solde restant à payer sur le crédit, soit le paiement d'intérêts pour le remboursement du crédit ;

Que pour ce qui concerne l'accord sur les modalités de paiement du prix, la SCI D. a procédé à l'encaissement du chèque de 46 800 euros alors qu'ils avaient expressément indiqué dans leur lettre du 16 décembre 2003 qu'il ne devait pas être encaissé ;

Qu'il ne s'agissait que d'un chèque de garantie qui a bien une valeur légale dès lors qu'il est provisionné, les parties pouvant stipuler qu'il ne sera pas présenté au paiement ou qu'il ne le sera que si une condition déterminée se réalise ;

Qu'en outre, la vente des parts de la SCI D. ne peut être considérée comme parfaite dès lors que l'offre aurait été acceptée par la SCI D. et non par les propriétaires des parts, les sociétés n'étant pas propriétaires de parts qui composent leur capital social mais les associés ;

Que la lettre du 22 décembre 2003 est signée par S. B. en qualité de gérant de la SCI D. et non en son nom personnel en sorte que c'est la SCI D. et non ses associés qui a répondu à l'offre du 16 décembre 2003 ;

Qu'en outre, même s'il avait signé à titre personnel, S. B. n'est pas propriétaire de la totalité des parts de la SCI et ne peut dès lors avoir engagé son ou ses associés ;

Qu'ayant fait part de leur souhait, eu égard à ces difficultés, d'acquérir non les parts sociales mais l'immeuble lui-même, propriété de la SCI D., ils n'avaient cependant pas signé le compromis de vente préparé par S. B., car ce projet de compromis n'évoquait pas la nécessité de purger les privilèges et hypothèques, alors que cela constituait une donnée capitale pour eux ;

Que l'appel étant abusif, la SCI D. doit être condamnée à leur payer la somme de 15 000 euros ;

Par conclusions déposées le 23 mars 2006 la SCI D. fait encore valoir que dès lors que la demande principale des époux Z. tend à sa condamnation à leur payer la somme de 46 800 euros, sa propre demande n'est qu'une défense à l'action principale, au regard de l'article 431-2 du Code de procédure civile ;

Qu'eu égard à la télécopie de J. Z. du 23 décembre 2003, il y a eu accord sur l'encaissement du chèque ;

Que l'argumentation selon laquelle elle aurait tenté de faire supporter aux époux Z. le solde d'un crédit toujours en cours correspond à une allégation non fondée, impossible à retenir, car à la passation de l'acte de vente définitif, eux-mêmes, leur conseil ou leur notaire auraient vérifié que le prix de vente corresponde à leurs accords ;

Que S. B. avait tous pouvoirs pour mener les négociations et accepter une offre d'achat, étant mandataire de l'ensemble des associés.

Par conclusions déposées le 8 juin 2006, les époux Z. font encore valoir que si la SCI fait état d'une télécopie en date du 23 décembre 2003 de J. Z. faisant état de l'encaissement du chèque, elle n'a pas produit ce document, la SCI D. ayant en tout état de cause décidé unilatéralement d'encaisser le chèque ;

Que les demandes formulées en cause d'appel par la SCI D. ne correspondent pas aux demandes reconventionnelles qu'elle a formées en première instance, en sorte qu'il s'agit bien de demandes nouvelles, irrecevables, et non d'une défense à l'action principale ;

Que le chèque litigieux était un chèque de garantie.

Par d'ultimes conclusions déposées le 3 octobre 2006 la SCI D. conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Sur ce,

Considérant que les époux Z. invoquent l'irrecevabilité des demandes formées par la SCI D. au motif qu'elles seraient nouvelles en cause d'appel ;

Considérant qu'aux termes de l'article 431 du Code de procédure civile : « Les parties peuvent, pour justifier les demandes qui avaient été soumises au premier juge, invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.

Elles ne peuvent former aucune demande nouvelle, à moins qu'il ne s'agisse de compensations ou que la demande nouvelle ne soit la défense à l'action principale... » ;

Considérant que les époux Z. ont demandé devant le Tribunal de première instance la condamnation de la SCI D. à leur restituer la somme de 46 800 euros tandis que la SCI D. a conclu, d'une part, au rejet de cette demande, ce qui doit s'analyser comme une demande de conserver cette somme, et d'autre part, à titre reconventionnel, à la réalisation forcée de la vente de l'appartement litigieux ;

Considérant qu'il en résulte que la demande de la SCI D. tendant à la réformation du jugement qui a ordonné cette restitution de la somme de 46 800 euros, et, dès lors, à l'autorisation de conserver cette somme, n'est pas nouvelle, et alors même que la SCI D. abandonne, en cause d'appel, par l'effet d'une réduction de sa demande originaire, sa demande reconventionnelle ;

Considérant, sur le fond, que par lettre du 16 décembre 2003 adressée à la SCI D. les époux Z. ont fait une offre d'achat pour le prix de 468 000 euros net de la totalité des parts sociales de la SCI D., propriétaire d'un appartement de trois pièces avec garage, sis à Roquebrune Cap Martin, en précisant que la vente devait être conclue au plus tard le 31 janvier 2004 et qu'ils lui remettaient un chèque de 46 800 euros, non encaissable, correspondant à 10 % du prix, et qui leur sera rendu le jour de la vente définitive ;

Que par courrier daté du 22 décembre 2003 et adressé aux époux Z., la SCI D., représentée par son gérant, S. B., a pris acte de l'offre de ceux-ci d'acquérir la totalité des parts sociales de la SCI D., propriétaire de l'appartement de trois pièces et garage situé à Roquebrune Cap Martin, a accepté ladite offre pour le prix de 468 000 euros pour la cession de la totalité des parts sociales, a accusé réception du chèque de 46 800 euros tiré sur la banque BNP Paribas, qu'elle a mis à l'encaissement le même jour, et les a informés qu'elle avait pris attache avec « Abbey International » pour le transfert du crédit à leur compte ainsi que pour les diverses modifications du prêt ;

Considérant ainsi, que si cette offre a été acceptée par la SCI D., elle ne l'a pas été par les associés de cette SCI, soit, selon les statuts de cette société civile immobilière, versés aux débats par les époux Z., S. B. et D. B., seuls propriétaires à concurrence respectivement de 950 et 50 parts des 1000 parts sociales, et dès lors, seuls susceptibles de les céder ;

Considérant par ailleurs que les époux Z. ont produit un document intitulé « Assemblée générale extraordinaire » daté du 22 décembre 2003, non signé mais prévoyant la signature des « différents associés présents, Z. A., Z. J., G. R., B. S., B. D. », mentionnant que l'assemblée générale réunissant les deux associés de la SCI, S. B. et D. B. décide de procéder à l'augmentation du capital social d'une somme de 13 770 euros pour le porter de 1 530 euros à 15 300 euros pour la création de parts nouvelles à souscrire et libérer par versement d'espèces à réaliser au fur et à mesure des besoins et que cette augmentation de capital est réalisée au moyen de l'émission de 9000 parts nouvelles à 1,53 euros chacune, à libérer intégralement à la souscription, les parts nouvelles étant souscrites par de nouveaux souscripteurs, A. Z., J. Z. et R. G., la répartition du capital social envisagé étant dès lors de 950 parts pour S. B., 50 parts pour D. B., 3325 parts pour A. Z., 3325 pour J. Z. et 7650 parts pour R. G. ;

Que les projets d'actes de cession de parts sociales, datées du 23 décembre 2003, produites par les intimés, font état de la cession par S. B. de 500 parts à J. Z. et par D. B. de 50 parts à A. Z. ;

Considérant qu'il résulte ainsi de l'ensemble de ces documents qu'alors que les intimés avaient fait une offre d'achat de l'intégralité des parts sociales de la SCI D., dans le but de devenir propriétaire du bien immobilier possédé par cette société, les titulaires des parts sociales entendaient demeurer associés dans cette société ;

Considérant en outre que les intimés ont encore produit un compromis de vente sous conditions suspensives, daté du 15 janvier 2004, établi par la SCI D., non signé, aux termes duquel la SCI D. s'engageait à vendre aux époux Z. au prix de 468 000 euros le bien immobilier de celle-ci et non plus les parts sociales ;

Considérant que c'est à bon droit que les premiers juges ont dès lors retenu qu'aucun accord n'était intervenu entre les parties sur la base de l'offre d'achat du 16 décembre 2003 devenue caduque au 31 janvier 2004, aucun accord sur le prix n'étant en outre intervenu compte tenu de ce que dans leur lettre du 16 décembre 2003 les époux Z. ont offert pour l'acquisition de l'intégralité des parts sociales le prix ferme de 468 000 euros alors que dans son courrier du 22 décembre 2003 la SCI D. a fait état d'un transfert de crédit, non demandé par les acquéreurs des parts sociales, et susceptible de modifier le prix nécessairement majoré du solde du crédit restant à payer ;

Considérant par suite, que les époux Z. sont fondés à obtenir la restitution de la somme de 46 800 euros, que la SCI D. reconnaît avoir encaissé en la qualifiant d'arrhes, avec les intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2004, date de la lettre recommandée avec accusé de réception valant mise en demeure ;

Que c'est à juste titre que les premiers juges ont alloué aux époux Z. une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice résultant de l'indisponibilité de cette somme et des frais engagés pour la recouvrer ;

Considérant que la procédure instaurée témérairement devant la cour par la SCI D. revêt un caractère abusif ayant occasionné aux époux Z. un préjudice certain qui sera réparé par l'allocation au profit des époux Z. de dommages-intérêts que la cour a les éléments suffisants d'appréciation pour fixer à la somme de 4 000 euros au paiement de laquelle il y a lieu de condamner la SCI D. ;

Considérant qu'eu égard à l'issue du litige, la SCI D. qui succombe supportera les dépens d'appel ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

Écarte le moyen d'irrecevabilité des demandes de l'appelante,

Dit l'appel recevable mais mal fondé,

Confirme en toutes ces dispositions le jugement du Tribunal de première instance du 6 octobre 2005,

Condamne la SCI D. à payer aux époux Z. la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif,

Condamne la SCI D. aux dépens d'appel, distraits au profit de Maître Jean-Pierre Licari, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition🔗

M. Adam, v-prés. ; Mme Brunet-Fuster, proc. gén. ; Mes Mullot et Licari, av. déf. ; Bertolotto, av. bar. de Nice.

Note🔗

Cet arrêt confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de Première Instance du 6 octobre 2005.

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