Cour d'appel, 27 février 2004, Consorts G., S. c/ Sté Codimper SA et D. T.

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Abstract🔗

Jugements et arrêts

Exécution provisoire - Condition : urgence - Exception : cas d'effets irréparables (non)

Résumé🔗

Aux termes de l'article 202 du Code de procédure civile, l'exécution provisoire peut être ordonnée par le Tribunal, dans tous les cas d'urgence à moins qu'elle ne soit de nature à produire des effets irréparables ;

Ainsi qu'en dispose par ailleurs l'article 203 du même code si l'exécution provisoire a été ordonnée hors des cas prévus par la loi, elle peut être rapportée par la juridiction d'appel ;

En l'espèce, sans nullement contester l'urgence justifiant l'exécution provisoire critiquée, les parties appelantes ont fait valoir, par leur acte d'appel, et leurs conclusions ultérieures du 17 février 2004, que celle-ci entraînerait des effets irréparables au sens de l'article 202 du Code de procédure civile ;

Elles ont soutenu, à cet égard, qu'alors que les premiers juges avaient fondé leur décision sur des documents argués de faux, ce qui avait justifié postérieurement à leur décision une plainte avec constitution de partie civile, la délivrance ordonnée du navire litigieux entraînerait effectivement des conséquences irréparables au cas où l'instruction établirait que lesdits documents seraient des faux, tandis que, dans l'immédiat l'actuelle immobilisation de ce navire n'engendrerait en revanche aucun risque pour les sociétés intimées ;

Les époux G. et L. S. ont en outre prétendu que la délivrance du navire entraînerait également un préjudice irréparable à l'encontre de l'administration des douanes françaises et des services fiscaux monégasques, en raison de ce que L. S. n'avait pas régularisé la situation du navire R. et avait donc dû reconnaître devant les douanes françaises à Monaco ne pas avoir acquitté la TVA se rapportant à ce bâtiment demeuré sans pavillon, ce qui avait provoqué sa saisie, de sorte que, si le navire devait quitter le port de Monaco, l'administration des douanes françaises et les services fiscaux de Monaco perdraient leur garantie ;

L. S., qui précise avoir été lui-même constitué gardien du navire par les douanes françaises, en déduit que l'exécution provisoire du jugement, objet du recours des appelants entraînerait, dans ces conditions, des effets irréparables pour ceux-ci au sens de l'article 202 du Code de procédure civile ;

Toutefois, ainsi que l'ont fait plaider les sociétés D. T. et Codimper, qui ont principalement conclu, le 23 février 2004, au débouté des consorts G.-S. de leurs demandes visant à obtenir la suspension de l'exécution provisoire attachée au jugement entrepris ainsi que le sursis à statuer dans la procédure au fond, en l'attente de l'issue de la procédure pénale par ailleurs introduite mais qu'elles estiment injustifiées, il ne ressort pas des conclusions des parties appelantes telles qu'elles viennent d'être rappelées que l'exécution provisoire critiquée aurait des conséquences irréparables pour elles.

En effet, l'objet de l'exécution provisoire étant la remise du navire à la société D. T., comme celle-ci l'a rappelé, du fait de la propriété lui ayant été judiciairement reconnue par le Tribunal sur ce bâtiment, une telle remise, insusceptible de faire échec en elle-même à la conservation des droits des tiers relativement à ce bien, ne saurait pas davantage s'analyser comme faisant ultérieurement obstacle à la réparation qui serait due aux appelants, du fait de l'exécution du jugement frappé d'appel, du 30 octobre 2003, à l'initiative des sociétés intimées et sous leur responsabilité, au cas où ledit jugement viendrait à être réformé par la Cour ;

Dès lors, sans qu'il y ait lieu de se prononcer en l'état sur le surplus des demandes et moyens des parties formulés quant au fond, non plus que sur le sursis à statuer sollicité de ce chef, qui sera examiné par instance séparée, il convient de débouter les parties appelantes de leur demande tendant à ce que soit rapportée l'exécution provisoire en cause.


Motifs🔗

La Cour,

Considérant les faits suivants :

Par acte du 12 février 2003, la société anonyme suisse dénommée Codimper a saisi le Tribunal de première instance d'une action principalement dirigée contre les époux A. et M. G., tendant pour l'essentiel à l'exécution d'une convention conclue le 17 octobre 2001 par laquelle ces derniers lui avaient consenti, avec faculté de rachat avant le 17 décembre 2001, et pour le prix de 3 500 000 francs, la cession des 50 000 actions représentant l'entier capital d'une société ayant son siège social statutaire aux Îles Bahamas, dénommée Napdale SA, Maître Paul-Louis Auréglia, notaire à Monaco, étant constitué séquestre de ces titres.

Ayant cependant obtenu postérieurement à sa demande, la remise des titres litigieux, la société Codimper a, en dernier lieu, limité son action relative à ces titres, contre les époux G., au paiement de diverses indemnités, contestées par ces derniers, eux-mêmes demandeurs reconventionnels de dommages-intérêts.

Par ailleurs, et selon assignation et réassignation respectivement des 17 juillet et 10 octobre 2002, introductive d'une instance enrôlée sur le n° 144, la société Codimper, ainsi que la société de droit britannique dénommée D. T. (Pitsea) Ltd, ont demandé au Tribunal de première instance, au contradictoire des époux G. et de L. S., intervenant volontaire, la validation provisoire d'une saisie revendication à laquelle elles avaient fait procéder, le 21 mai 2002, sur due autorisation du Président du Tribunal, portant sur un navire dénommé « la V. », immobilisé depuis lors à Monaco, sous la garde d'une employée de service de la Mairie.

Elles ont, pour justifier cette action, fait valoir essentiellement que, par convention conclue le 15 décembre 2001, R. F., agissant comme mandataire de la société Codimper, avait acquis le navire revendiqué auprès d'A. G., exerçant personnellement le commerce à Monaco sous l'enseigne « A. B. », lequel s'était trouvé représenté lors de la cession par son associé L. S., et que ce bâtiment avait été immédiatement vendu, pour immatriculation, à la société D. T.

Ces deux sociétés prétendaient, devant le Tribunal, que la cession de ce navire par G., ainsi que leur acquisition auprès de ce dernier et de son épouse des actions de la société Napdale, formaient un tout destiné à procurer du crédit à G. pour l'achat d'un yacht qu'il projetait le 6 novembre 2001 auprès d'une société Canados Group, dès lors en effet que le réméré stipulé pour la vente des actions avait également affecté la cession du navire, aux termes d'une mention imputée à L. S., figurant au dos du contrat relatif à cette cession, ainsi conçue : « acte de vente dans le cadre d'une vente en réméré et d'un prêt de 3 500 000 francs ».

Elles affirmaient dans ces conditions, la faculté de réméré n'ayant pas été exercée, que le navire était en définitive incontestablement devenu leur propriété.

En défense, cependant, les époux G. niaient avoir jamais été propriétaires du navire vendu et prétendaient ne pas connaître l'acquéreur R. F., précisant que la vente à rémunéré n'affectait que le transfert des actions de la société Napdale, et que, s'ils avaient effectivement acquis, en 2000, un navire nommé « R. » provenant d'une société Ancasta, celui-ci avait été volé à Monaco avant d'être retrouvé à Cannes par L. S. mandataire d'A. B., en sorte qu'il pourrait être fait grief à la société Codimper de s'en être emparé irrégulièrement pour le rétrocéder à la société D. T. et le faire frauduleusement immatriculer au nom de celle-ci en Grande-Bretagne, à partir de faux documents.

Les sociétés Codimper et D. T. ont toutefois précisé devant le Tribunal, pour contester cette défense, qu'A. G. avait bien acquis le navire litigieux le 24 octobre 2000 par l'intermédiaire d'une société Ancasta, ce auprès de la société Matterhorn Ltd, venderesse, et après que diverses démarches eurent été effectuées auprès d'un cabinet de financement dénommé A. et Cie, une procuration écrite ayant été, le 1er octobre 2001, donnée à L. S. à l'effet de cette acquisition, en sorte que tout droit sur le navire « la V. » également dénommé « R. », devrait être dénié à ce dernier personnellement.

L. S. prétendait le contraire, au regard notamment d'une amende qui lui avait été infligée par les douanes françaises par suite du non-paiement des droits et taxes afférents à ce navire, dont en définitive il poursuivait lui-même la revendication devant le Tribunal.

Aux termes d'un jugement réputé contradictoire, rendu le 30 octobre 2003 sur les demandes et moyens ainsi rappelés pour l'essentiel, le Tribunal de première instance a

- ordonné la fonction des deux instances dont il était saisi,

- constaté que la société Codimper SA avait renoncé à ses demandes formées contre la société Napdale SA et son représentant permanent A. I.,

- dit que le navire dénommé « la V. » également connu sous le nom « R. », puis rebaptisé « La D. » lors de son enregistrement par les autorités britanniques, avait pour propriétaire depuis le 18 décembre 2001 la société D. T. (Pitsea) Ltd,

- débouté L. S. de sa demande en revendication concernant ce bateau,

- validé en conséquence la saisie-revendication en cause, signifiée le 21 mai 2002 par le ministère de Maître Escaut-Marquet, huissier,

- ordonné à A. G., sous peine d'une astreinte définitive de 2 500 euros par jour de retard pendant une période limitée à trois mois, de remettre le navire, dans les huit jours de la signification du jugement, à tout représentant dûment mandaté de la société D. T. (Pitsea) Ltd,

- à défaut de remise volontaire, passé ce délai de trois mois, autorisé cette sociétés à procéder à l'appréhension forcée du navire, avec le concours d'un huissier et au besoin celui de la force publique et d'un serrurier, et ordonné à l'avance l'expulsion d'A. G. et celle de tout occupant de son chef,

- ordonné de ces différents chefs, l'exécution provisoire du présent jugement,

- condamné A. G. à payer à la société D. T. (Pitsea) Ltd, en réparation de la privation de jouissance relative à ce navire, une indemnité égale à 7 500 euros par mois, à calculer sur la période échue ou à échoir depuis le 15 janvier 2002 jusqu'à la date de remise effective du navire à cette société,

- dit que cette indemnité portera intérêt au taux légal à compter du jugement,

- ordonné à l'avance la capitalisation de ces intérêts et dit que cette capitalisation interviendra, le cas échéant, chaque année à la date anniversaire du jugement,

- condamné solidairement les époux A. G. et M. S. à payer :

la société Codimper SA la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par leur résistance à lui faire remettre les certificats d'actions relatifs à la société Napdale SA,

la société Codimper SA et à la société D. T. (Pitsea) Ltd, créanciers indivisibles, la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par leur résistance abusive à la restitution du navire,

- condamné L. S. à payer à la société Codimper SA et à la société D. T. (Pitsea) Ltd, créanciers indivisibles, la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par son intervention volontaire abusive,

- débouté les sociétés Codimper SA et D. T. (Pitsea) Ltd du surplus de leurs demandes,

- débouté les époux G. et L. S. de l'ensemble de leurs demandes,

- condamne les époux G., solidairement, aux dépens liés à l'instance n° 367 du rôle de l'année judiciaire 2001-2002, avec distraction au profit de Maître Pasquier-Ciulla, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

- et condamné solidairement les époux G. et L. S. aux dépens liés à l'instance n° 146 du rôle de l'année 2001-2002, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

En l'état de cette décision dont ils critiquent les termes tant quant au fond que du chef de son exécution provisoire, les époux G. et L. S., demandent désormais qu'il plaise à la Cour, aux termes de leur acte d'appel et d'assignation susvisé du 24 décembre 2003,

- les recevoir en leur appel comme régulier en la forme et y déclarant bien fondés,

Venir en conséquence la société D. T. (Pitsea) Ltd entendre tout d'abord faire droit aux défenses à l'exécution provisoire formée par les parties appelantes à l'encontre du jugement intervenu le 30 octobre 2003 et signifié le 5 décembre 2003,

Mettre à néant le jugement du Tribunal de première instance contradictoirement rendu le 30 octobre 2003, signifié le 5 décembre 2003,

Et, statuant à nouveau,

- débouter la société Codimper SA de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions ;

- débouter la société D. T. Pitsea Ltd de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner les sociétés susvisées solidairement à payer à ces appelants la somme de 500 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, ledit préjudice résultant d'une action abusive fondée sur des éléments frauduleux.

- condamner enfin les sociétés susvisées solidairement à leur payer également la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts au titre dès la confirmation frais ;

Par conclusions déposées le 10 février 2004 les sociétés D. T. (Pitsea) Ltd, et Codimper SA qui poursuivent pour l'essentiel la confirmation de ce même jugement ont liminairement, relevé que les parties appelantes n'avaient pas alors satisfait audit jugement, pourtant assorti de l'exécution provisoire, qui avait ordonné la restitution du bateau, et qu'elles s'étaient par ailleurs abstenues de conclure dans le cadre de cette exécution provisoire.

Ces deux sociétés, se référant en outre à la vente par A. B. du navire litigieux, ce au profit de R. F. ainsi qu'à la cession de ce navire à la société Codimper, l'ayant elle-même cédé à la société D. T. le 18 décembre 2001, ont en définitive, et quant au fond, demandé à la Cour de :

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

- dit que le navire dénommé « La V. » également connu sous le nom de « R. », puis rebaptisé « La D. », lors de son enregistrement par les autorités britanniques, a pour propriétaire depuis le 18 décembre 2001, la société D. T. (Pitsea) Ldt ;

- débouté en conséquence L. S. de sa demande en revendication concernant ce bateau ;

- validé en conséquence la saisie revendication réalisée par Maître Escaut-Marquet le 21 mai 2002 sur le navire construit par Fairline Boats, modèle Fairline Squadron 62 (Flying Bridge) de 18,93 mètres de long et de 5,24 mètres de large dont le numéro est 724383, un temps dénommé « La V. », enregistré sous pavillon britannique ;

- ordonné à A. G., sous astreinte définitive de 2 500 € par jour de retard devant courir pendant une période limitée à trois mois, de remettre le navire dans les huit jours qui suivront la signification du jugement, à tout représentant dûment mandaté de la société D. T. ;

- dit qu'à défaut de remise volontaire, passé le délai de trois mois, la société D. T. serait autorisée à procéder à l'appréhension forcée du navire avec le concours d'un huissier, et au besoin celui de la force publique et d'un serrurier et ordonné à l'avance l'expulsion d'A. G. et celle de tout occupant de son chef ;

- condamner les époux G. à payer à la société D. T. (Pitsea) Ltd, en réparation de la privation de jouissance relative à ce navire, une indemnité égale à 7 500 € par mois, à calculer sur la période échue ou à échoir depuis le 15 janvier 2002, jusqu'à la date à laquelle le navire sera effectivement remis à cette société ;

- dire et juger que cette indemnité portera intérêts au taux légal à compter du jugement rendu le 30 octobre 2003 ;

- ordonner la capitalisation de ces intérêts et dire que cette capitalisation interviendra, le cas échéant, chaque année à la date anniversaire du jugement de première instance, soit le 30 octobre 2003 ;

- condamner solidairement Monsieur et Madame G. A. à payer à la Société Codimper Sa la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de leur résistance et lui faire remettre les certificats d'actions relatifs à la société Napdale SA ;

- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné les époux G. à payer à la société Codimper SA et à la société D. T. (Pitsea) Ltd, créanciers indivisibles, une somme à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par leur résistance abusive à la restitution du navire ;

Ajoutant au jugement de première instance qui avait fixé ces dommages et intérêts à la somme de 10 000 €, les augmenter à la somme de 50 000 €, compte tenu du fait qu'ils ont poursuivi dans leur résistance abusive à la restitution du navire, malgré l'exécution provisoire attachée au jugement querellé ;

- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné les époux S. à payer aux sociétés Codimper SA et D. T. (Pitsea) Ltd, créanciers indivisibles, des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par son intervention volontaire abusive, lesquels fixés à la somme de 10 000 € en première instance, devront être augmentés à la somme de 30 000 €, compte tenu de la poursuite de cette intervention abusive devant la Cour d'appel ;

- confirmer pour le surplus le jugement entrepris quant aux dépens.

En cet état de la procédure d'appel et par « conclusions de défenses à exécution provisoire et de sursis » déposées devant la Cour le 17 février 2004, A. G., M. S. épouse G. et L. S. sollicitent que soit rapportée l'exécution provisoire ordonnée par le jugement susvisé, du 30 octobre 2003, et qu'il soit par ailleurs sursis à statuer au fond en l'état d'une plainte avec constitution de partie civile formulée le 23 décembre 2003, postérieurement donc à cette décision, auprès du juge d'instruction.

Répliquant, notamment du chef de l'exécution provisoire, les sociétés intimées D. T. et Codimper ont, à l'audience du 24 février 2004, conclu au maintien de cette mesure et quant au fond, au rejet de la demande du sursis à statuer, formulé en cause d'appel.

cette même audience les parties ont plaidé sur l'exécution ainsi que sur le sursis à statuer litigieux afférent à la procédure provisoire au fond devant faire l'objet d'un examen séparé par la Cour.

Sur quoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 202 du Code de procédure civile, l'exécution provisoire peut être ordonnée par le Tribunal, dans tous les cas d'urgence à moins qu'elle ne soit de nature à produire des effets irréparables ;

Qu'ainsi qu'en dispose par ailleurs l'article 203 du même code si l'exécution provisoire a été ordonnée hors des cas prévus par la loi, elle peut être rapportée par la juridiction d'appel ;

Considérant qu'en l'espèce, sans nullement contester l'urgence justifiant l'exécution provisoire critiquée, les parties appelantes ont fait valoir, par leur acte d'appel, et leurs conclusions ultérieures du 17 février 2004, que celle-ci entraînerait des effets irréparables au sens de l'article 202 du Code de procédure civile ;

Qu'elles ont soutenu, à cet égard, qu'alors que les premiers juges avaient fondé leur décision sur des documents argués de faux, ce qui avait justifié postérieurement à leur décision une plainte avec constitution de partie-civile, la délivrance ordonnée du navire litigieux entraînerait effectivement des conséquences irréparables au cas où l'instruction établirait que lesdits documents seraient des faux, tandis que, dans l'immédiat l'actuelle immobilisation de ce navire n'engendrerait en revanche aucun risque pour les sociétés intimées ;

Considérant que les époux G. et L. S. ont en outre prétendu que la délivrance du navire entraînerait également un préjudice irréparable à l'encontre de l'administration des douanes françaises et des services fiscaux monégasques, en raison de ce que L. S. n'avait pas régularisé la situation du navire R. et avait donc dû reconnaître devant les douanes françaises à Monaco ne pas avoir acquitté la TVA se rapportant à ce bâtiment demeuré sans pavillon, ce qui avait provoqué sa saisie, de sorte que, si le navire devait quitter le port de Monaco, l'administration des douanes françaises et les services fiscaux de Monaco perdraient leur garantie ;

Que L. S., qui précise avoir été lui-même constitué gardien du navire par les douanes françaises, en déduit que l'exécution provisoire du jugement, objet du recours des appelants entraînerait, dans ces conditions, des effets irréparables pour ceux-ci au sens de l'article 202 du Code de procédure civile ;

Considérant, toutefois, qu'ainsi que l'ont fait plaider les sociétés D. T. et Codimper, qui ont principalement conclu, le 23 février 2004, au débouté des consorts G.-S. de leurs demandes visant à obtenir la suspension de l'exécution provisoire attachée au jugement entrepris ainsi que le sursis à statuer dans la procédure au fond, en l'attente de l'issue de la procédure pénale par ailleurs introduite mais qu'elles estiment injustifiée, il ne ressort pas des conclusions des parties appelantes telles qu'elles viennent d'être rappelées que l'exécution provisoire critiquée aurait des conséquences irréparables pour elles ;

Qu'en effet, l'objet de l'exécution provisoire étant la remise du navire à la société D. T., comme celle-ci l'a rappelé, du fait de la propriété lui ayant été judiciairement reconnue par le Tribunal sur ce bâtiment, une telle remise, insusceptible de faire échec en elle-même à la conservation des droits des tiers relativement à ce bien, ne saurait pas davantage s'analyser comme faisant ultérieurement obstacle à la réparation qui serait due aux appelants, du fait de l'exécution du jugement frappé d'appel, du 30 octobre 2003, à l'initiative des sociétés intimées et sous leur responsabilité, au cas où ledit jugement viendrait à être réformé par la Cour ;

Que, dès lors, sans qu'il y ait lieu de se prononcer en l'état sur le surplus des demandes et moyens des parties formulés quand au fond, non plus que sur le sursis à statuer sollicité de ce chef, qui sera examiné par instance séparée, il convient de débouter les parties appelantes de leur demande tendant à ce que soit rapportée l'exécution provisoire en cause ;

Considérant, par ailleurs, que dans la présente instance, ces mêmes parties étaient légalement fondées à solliciter la suspension de cette mesure, pour la défense de leurs droits ;

Qu'ayant pu légitimement se méprendre sur la portée de ceux-ci, au titre de l'exécution provisoire contestée, eu égard aux saisies visant le navire litigieux, il convient de rejeter la demande indemnitaire accessoirement formulée par les sociétés D. T. et Codimper en leurs conclusions susvisées du 23 février 2004 ;

Considérant, en revanche, que les parties appelantes qui succombent pour l'essentiel, relativement à l'exécution provisoire, devront en conséquence supporter les dépens du présent arrêt ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Statuant contradictoirement du chef de l'exécution provisoire ordonnée par le jugement susvisé du 30 octobre 2003,

Déboute les appelants A. G., M. G. née S. et L. S. de leurs demandes tendant à ce que soit rapportée cette exécution provisoire ;

Déboute les sociétés Codimper SA et D. T. (Pitsea) Ltd de leur demande indemnitaire.

Composition🔗

M. Landwerlin, prem. prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Blot, Pasquier-Ciulla, av. déf. ; Lebreton, av. bar. de Nice ; Valette, av. bar. de Grasse.

Note🔗

Cet arrêt déboute les appelants de leur demande tendant à ce que soit rapportée l'exécution provisoire ordonnée par le jugement du Tribunal de première instance du 30 octobre 2003.

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