Cour d'appel, 15 juillet 1997, H. c/ H., en présence du Ministère public

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Abstract🔗

Action civile

Accident du travail : violences exercées par un employé sur un autre - Irrecevabilité de l'action en réparation de la victime contre l'auteur

Accident du travail

Victime de violences de la part d'un collègue de travail - Action civile contre l'auteur irrecevable

Résumé🔗

Aux termes de l'article 13 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958, la victime d'un accident du travail est en droit de réclamer la réparation de son préjudice contre l'auteur de l'accident « autre que l'employeur ou ses salariés ou préposés ».

La victime de coups et blessures volontaires qui lui ont été portés par son collègue de travail, sur les lieux de celui-ci, ne dispose pas d'une action civile à rencontre de l'auteur de cet accident en l'état de la législation susvisée, qui impose dans ce cas particulier un mode de réparation spécifique.

Il s'ensuit que le Tribunal correctionnel a fait une exacte application de la loi, en déclarant irrecevable l'action de la victime contre l'auteur des coups et blessures.


Motifs🔗

La Cour

La Cour statue sur l'appel relevé le 22 avril 1997 par F. H., partie civile d'un jugement du Tribunal correctionnel en date du 15 avril 1997 qui l'a déclaré irrecevable en sa constitution de partie civile ;

Considérant que les faits de la procédure peuvent être résumés comme suit ;

À la suite d'un différend les ayant opposés le 25 octobre 1996 sur les lieux de leur travail à propos d'un ordre donné par M. H. et non exécuté par F. H., H. a porté un violent coup de poing à la face à son collègue de travail H. lui occasionnant des blessures ayant entraîné une hospitalisation de cinq jours et une ITT de 10 jours ;

H. a été déclaré coupable du délit de coups et blessures volontaires et condamné à la peine d'un mois d'emprisonnement avec sursis ;

Sur la constitution de partie civile de F. H., le Tribunal correctionnel faisant application de l'article 13 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 a déclaré H. irrecevable en son action civile ;

Considérant que l'appelant demande que sa constitution de partie civile soit déclarée recevable, en dépit de la rédaction de l'article 13 de la loi n° 636 qui aboutirait selon lui à une iniquité ;

Considérant que le Ministère public déclare s'en rapporter à justice ;

Considérant que le prévenu sollicite la confirmation du jugement qui n'a fait qu'appliquer la loi ;

Sur ce,

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958, la victime d'un accident du travail est en droit de réclamer la réparation de son préjudice contre l'auteur de l'accident « autre que l'employeur ou ses salariés ou préposés » ;

Considérant qu'il résulte de ce texte que la victime d'un accident du travail ne dispose pas de l'action civile contre son employeur et les préposés de l'entreprise ;

Qu'en effet, la loi impose dans ce cas particulier un mode de réparation spécifique ;

Que le Tribunal correctionnel a fait une exacte appréciation du texte ;

Que sa décision doit donc être confirmée ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Statuant en matière correctionnelle,

Confirme le jugement du Tribunal correctionnel du 15 avril 1997 ;

_________________________

Tribunal correctionnel

Audience du 15 avril 1997

Attendu qu'aux termes d'un procès-verbal d'interrogatoire aux fins de comparution sur notification dressé par Monsieur le procureur général en date du 28 octobre 1996, M. H. est prévenu :

« D'avoir à Monaco, le 25 octobre 1996,

volontairement porté des coups, fait des blessures, exercé des violences ou voies de fait sur la personne de F. H., desquels il est résulté une maladie ou incapacité de travail personnel de plus de 20 jours,

Délit prévu et réprimé par l'article 236, alinéa 1, du Code pénal » ;

Sur l'action publique :

Attendu qu'il résulte de l'enquête et des débats qu'à la suite d'un différend les ayant opposés le 25 octobre 1996 sur les lieux de leur travail à propos d'une tâche particulière que le prévenu demandait sans succès à son collègue de travail d'accomplir, M. H. a porté un violent coup de poing à la face de F. H., lui occasionnant de sérieuses blessures ayant entraîné une hospitalisation de 5 jours avec une incapacité temporaire de travail de 10 jours selon certificat du Docteur L., oto-rhino-laryngologiste, en date du 31 octobre 1996 ;

Attendu que ces faits établissent que le prévenu s'est rendu coupable, non du délit poursuivi qui suppose l'existence d'une incapacité de travail excédant 20 jours, mais de l'infraction de coups et blessures volontaires prévue et punie par l'article 238 du Code pénal au regard de la durée d'incapacité qui résulte des éléments de la procédure ;

Qu'il y a donc lieu de requalifier la poursuite en ce sens ;

Attendu que M. H. doit être déclaré coupable de ce délit et qu'il y a lieu de lui faire application de la loi pénale en tenant compte, cependant, des circonstances atténuantes existant en la cause et de sa qualité de délinquant primaire en Principauté qui lui permet de bénéficier du sursis simple ;

Sur l'action civile :

Attendu que les faits dont F. H. a été victime ayant revêtu le caractère d'un accident du travail au sens de la loi n° 636 du 11 janvier 1958, cette victime, qui s'est constituée partie civile à l'encontre du prévenu à l'effet d'être indemnisée de son préjudice à déterminer par voie d'expertise médicale, a appelé en cause la compagnie d'assurances La Zurich Assurances, assureur-loi de son employeur, la société Mi Monaco, en déclaration de jugement commun ;

Attendu que cette compagnie d'assurances sollicite sa mise hors de cause aux motifs que l'accident de travail dont s'agit n'aurait pas été déclaré et que la faute commise par le prévenu a engagé la responsabilité de la société Mi sur le fondement de l'article 1231 du Code civil ;

Attendu qu'aux termes de l'article 13 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958, la victime d'un accident du travail est en droit de réclamer la réparation de son préjudice contre l'auteur de l'accident « autre que l'employeur ou ses salariés ou préposés » ; qu'il résulte de ce texte qu'elle ne peut prétendre à une autre indemnisation que celle résultant de la loi n° 636 précitée lorsque, comme en l'espèce, l'auteur de l'accident est également un salarié de son propre employeur ;

Attendu que F. H. n'est donc pas fondé à rechercher la responsabilité, dans les termes du droit commun, du prévenu M. H., comme lui employé par la société Mi Monaco ; que sa demande d'expertise, sollicitée avant dire droit au fond, doit donc être déclarée irrecevable ;

Attendu qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de faire droit, pour les motifs sus-énoncés à la demande de mise hors de cause formée par la compagnie La Zurich Assurances, les dispositions de l'article 13 alinéa 6 de la loi n° 636 n'étant pas applicables en la cause ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Sur l'action publique :

Requalifiant la poursuite,

Déclare M. H. coupable du délit de coups et blessures volontaires prévu et puni par l'article 238 du Code pénal ;

En répression, faisant application des articles 238, 392 et 393 du Code pénal,

Le condamne à la peine de un mois d'emprisonnement avec sursis, l'avertissement prescrit par l'article 395 du Code pénal ayant été adressé au condamné ;

Sur l'action civile :

Déclare F. H. irrecevable en son action civile dirigée contre M. H. ;

Ordonne la mise hors de cause de la compagnie d'assurances La Zurich Assurances, assureur-loi ;

Condamne, en outre, M. H. aux frais ;

Fixe au minimum la durée de la contrainte par corps ;

Composition🔗

MM. Narmino, prem. vice prés. ; Baudoin, subst. proc. gén. ; Mes Rey, Michel, Gardelto, av.

Note🔗

Cet arrêt confirme le jugement du tribunal correctionnel du 15 avril 1997 publié à la suite.

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