Cour d'appel, 15 juillet 1997, Ministère public c/ F.

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Abstract🔗

Procédure pénale

Flagrant délit : article 399 du Code de procédure pénale - Citation verbale pour comparaître à l'audience de flagrants délits - Non-dépassement du délai franc de trois jours - Régularité de saisine du Tribunal correctionnel

Résumé🔗

Interrogée le 11 avril 1997 par le procureur général qui a dressé un procès-verbal d'interrogatoire de flagrant délit et décerné contre elle un mandat d'arrêt en lui notifiant d'avoir à comparaître à l'audience du Tribunal correctionnel du 15 avril 1997 sous la prévention de détention d'une arme de catégorie C, la prévenue a soulevé l'irrégularité de la procédure en soutenant que le délai de trois jours prévu pour le jugement des flagrants délits pour l'article 399 du Code procédure pénale était expiré, ledit article disposant que le procureur général, devant lequel est conduite la personne arrêtée en flagrant délit, doit la traduire devant le Tribunal correctionnel à l'une de ses prochaines audiences, sans néanmoins pouvoir dépasser le délai de trois jours francs.

Or, un délai de procédure est qualifié de franc lorsque ne sont compris dans son calcul, ni le jour du point de départ (dies a quo), ni le jour de l'échéance (dies ad quem).

En l'espèce, le délai imparti au Procureur général pour traduire la procédure devant le tribunal correctionnel a commencé à courir le lendemain du jour de son interrogatoire, soit le 12 avril 1997 pour venir à expiration, s'agissant d'un délai franc, le lendemain du troisième jour suivant le 12 avril 1997, soit le 15 avril 1997 à vingt-quatre heures.

Le délai de trois jours francs prévu par l'article 399 du Code de procédure pénale ayant été ainsi respecté, il convient de constater que le Tribunal correctionnel a été valablement saisi par le Procureur général de la procédure du flagrant délit diligentée et de réformer le jugement entrepris qui avait constaté l'irrégularité de la saisine du Tribunal correctionnel et la caducité du mandat décerné le 11 avril 1997.


Motifs🔗

La Cour

La Cour statue sur l'appel interjeté le 16 avril 1997 par le Ministère public d'un jugement du Tribunal correctionnel en date du 15 avril 1997 ;

Considérant que les faits, objet de la poursuite, peuvent être relatés comme suit :

Agissant en exécution d'une commission rogatoire délivrée le 18 février 1997 par le Juge d'instruction de Monaco relativement à une procédure suivie contre X... du chef de proxénétisme, les services de la sûreté publique procédait à l'interpellation de la nommée O. F., laquelle était trouvée en possession d'une bombe à gaz lacrymogène, découverte lors de la fouille de son sac à main. Interrogée, à ce sujet, l'intéressée reconnaissait que cet objet lui appartenait et qu'elle l'avait placé dans son sac pour faire face à une éventuelle agression.

Déférée devant le procureur général, selon la procédure de flagrant délit, sous la prévention du délit de transport d'une arme de la catégorie « C », prévu et réprimé par les articles 14 et 24 de la loi n° 913 du 18 juin 1971 ainsi que par l'article 4 de l'Ordonnance souveraine n° 6497 du 16 octobre 1980, O. F. a reconnu les faits qui lui étaient reprochés.

À l'audience du Tribunal correctionnel du 15 avril 1997, O. F. a, in limine litis, conclu à l'irrégularité de la procédure de flagrant délit diligentée à son encontre, du fait de l'expiration du délai prévu par l'article 399 du Code de procédure pénale pour sa comparution devant cette juridiction.

Elle a fait observer, à cet égard, qu'ayant été interrogée le 11 avril 1997 par le procureur général, elle devait comparaître devant le Tribunal correctionnel dans les 3 jours francs suivant cet interrogatoire, c'est-à-dire, au plus tard le 14 avril 1997, alors qu'elle n'a été traduite devant cette juridiction que le lendemain 15 avril 1997.

C'est dans cet état de la procédure qu'est intervenu le jugement entrepris, aux termes duquel les premiers juges, après avoir relevé que le délai de trois jours francs imparti au Ministère public pour faire comparaître la prévenue devant le Tribunal correctionnel était expiré, lors de l'ouverture des débats à l'audience du 15 avril 1997, a constaté l'irrégularité de la procédure de flagrant délit suivie contre O. F. ainsi que la caducité du mandat d'arrêt délivré à son encontre.

Ce même jugement constatant qu'O. F. acceptait de comparaître volontairement pour répondre du délit qui lui était reproché et dont elle a reconnu être l'auteur, a condamné celle-ci à la peine de 1 500 F d'amende.

Considérant, qu'au soutien de son appel, le Ministère public fait valoir que c'est par une inexacte appréciation des termes de l'article 399 du Code de procédure pénale, que les premiers juges ont cru devoir déclarer irrégulière la procédure de flagrant délit diligentée à l'encontre de la prévenue, le délai de trois jours francs prévu par ce texte, lequel ne comprend ni le jour de son point de départ, ni le jour de son échéance, ayant été respecté, en l'espèce ;

Il requiert en conséquence, la réformation du jugement déféré, de ce chef ;

Considérant qu'O. F., bien que régulièrement citée pour l'audience de ce jour, n'a pas comparu ;

Sur ce,

Considérant qu'il convient de statuer par défaut à l'encontre d'O. F. ;

Quant à la nullité de la procédure :

Considérant qu'il est constant, qu'à la suite de son interpellation sur la voie publique, le 10 avril 1997 vers 16 heures 30, et de la découverte dans son sac à main d'une bombe à gaz lacrymogène, O. F. a été déférée le 11 avril 1997 devant le Procureur général, lequel, après l'avoir inculpée de délit de transport hors de son domicile, sans motif légitime, d'une arme de la catégorie C, l'a informée qu'elle comparaîtrait, selon la procédure de flagrant délit, à l'audience du Tribunal correctionnel du 15 avril 1997 à 11 heures ;

Considérant que l'article 399 du Code de procédure pénale dispose que le procureur général, devant lequel est conduite la personne arrêtée en flagrant délit, doit la traduire devant le Tribunal correctionnel à l'une de ses prochaines audiences, sans néanmoins pouvoir dépasser le délai de trois jours francs ;

Considérant qu'un délai de procédure est qualifié de franc lorsque ne sont compris dans son calcul, ni le jour du point de départ (dies a quo), ni le jour de l'échéance (dies ad quem) ;

Considérant que l'article 399 du Code de procédure pénale ayant reproduit le texte de l'article 271 de l'ancien Code de procédure pénale résultant de l'Ordonnance souveraine du 25 octobre 1904, il convient de se reporter à l'exposé des motifs élaboré par le Baron de R. concernant la rédaction de l'article 271 susvisé relatif à la procédure spéciale au délit flagrant qui avait étendu le délai dans lequel l'inculpé en état d'arrestation devait être traduit devant le Tribunal correctionnel en le portant de trois jours à trois jours francs ;

Qu'à cet égard, M. de R. a précisé que « l'intervalle de trois jours rigoureusement calculé, peut être insuffisant même en dehors des périodes de vacations, pour conduire d'une audience à l'autre, et il a pour inutile d'obliger le Ministère public à saisir le juge d'instruction dans l'unique but d'avoir un mandat d'arrêt contre l'inculpé alors qu'en lui permettant à lui-même d'en décerner un pour cinq jours, on évite un réquisitoire d'information de pure forme et une perte de temps pour les deux magistrats » ;

Considérant qu'en l'espèce, le délai imparti au procureur général pour traduire la prévenue devant le Tribunal correctionnel a commencé à courir le lendemain du jour de son interrogatoire, soit le 12 avril 1997 ;

Que s'agissant d'un délai franc, celui-ci venait à expiration le lendemain du troisième jour suivant le 12 avril 1997, soit le 15 avril 1997 à vingt quatre heures ;

Considérant que le délai de trois jours francs prévu par l'article 399 du Code de procédure pénale ayant été respecté, il convient de constater que le Tribunal correctionnel a été valablement saisi par le procureur général de la procédure de flagrant délit diligentée à l'encontre d'O. F. ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté successivement l'irrégularité de la saisine du Tribunal correctionnel et la caducité du mandat d'arrêt décerné le 11 avril 1997 ;

Quant à l'action publique :

Considérant, en revanche, que le délit reproché à O. F. étant constitué, ainsi qu'elle l'a reconnu, sur sa comparution volontaire, il convient de confirmer le jugement querellé, tant sur la culpabilité que sur la pénalité, les premiers juges ayant fait, à cet égard, une exacte appréciation des faits de la cause ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Statuant en matière correctionnelle par défaut à l'encontre d'O. F.,

Réforme le jugement du Tribunal correctionnel en date du 15 avril 1997, en ce qu'il a constaté l'irrégularité de la citation résultant du procès-verbal d'interrogatoire du 11 avril 1997 délivrée le même jour pour l'audience du 15 avril 1997, ainsi que la caducité depuis le 15 avril 1997 du mandat d'arrêt décerné le 11 avril 1997.

Statuant à nouveau de ces chefs,

Déclare régulière la citation résultant du procès-verbal d'interrogatoire du 11 avril 1997, délivrée pour l'audience du 15 avril 1997 ainsi que le mandat d'arrêt décerné le 11 avril 1997.

Confirme ce même jugement en toutes ses autres dispositions.

Composition🔗

MM. Sacotte, prem. prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén.

Note🔗

Cet arrêt qui infirme le jugement rendu par le Tribunal correctionnel le 15 avril 1997, se réfère dans sa motivation à l'exposé des motifs élaboré par M. de R. concernant l'article 271 de l'ancien Code de procédure pénale issu de l'Ordonnance souveraine du 25 octobre 1904, qu'a reproduit l'article 399 du Code de procédure pénale.

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