Cour d'appel, 3 février 1997, Ministère public c/ H. et L.

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Procédure pénale

Connexité - Cas prévus par l'article 27 du Code de procédure pénale - Contravention non connexe - Incompétence du tribunal correctionnel pour connaître d'une contravention non connexe commise par un autre conducteur que celui-ci poursuivi pour délit

Résumé🔗

Le Ministère public ayant poursuivi devant le Tribunal correctionnel, d'une part un conducteur pour conduite en état d'ivresse et défaut de maîtrise, alors qu'ayant perdu le contrôle de son véhicule celui-ci avait percuté les piliers d'un immeuble, d'autre part, pour contravention connexe ou défaut de maîtrise, un autre conducteur qui suivant le véhicule n'avait pu l'éviter lors de l'accident, c'est à juste titre que cette juridiction s'est déclarée d'office incompétente pour connaître d'une contravention relevant de la compétence exclusive du Tribunal de Police ainsi que le prévoit l'article 22 du Code de procédure pénale.

En effet, c'est à tort que le Ministère public a cru devoir qualifier de connexe aux poursuites intentées contre le premier la contravention reprochée au second.

L'article 27 du Code de procédure pénale admet la connexité entre plusieurs infractions :

1° - lorsqu'elles ont été commises par le même individu ;

2° - lorsqu'elles ont été commises en même temps par plusieurs personnes réunies ;

3° - lorsqu'elles ont été commises (...) par suite d'un concert préalablement formé (...) ;

4° - lorsque les inculpés ont commis certaines infractions pour se prouver les moyens de commettre les autres, en faciliter ou en consommer l'exécution ou pour s'assurer l'impunité.

En l'espèce, aucune de ces conditions n'est remplie et les prévenus, notamment, ne s'étaient pas réunis, au sens dudit article, lors de la commission des infractions qui leur étaient reprochées.


Motifs🔗

La Cour

La cour statue sur l'appel interjeté le 11 juillet 1996 par le Ministère public d'un jugement rendu le 2 juillet 1996 par le Tribunal correctionnel.

Considérant que les faits, objet de la poursuite, peuvent être relatés comme suit :

Le 24 mars 1996, vers 3 h 15, J. H. circulait boulevard Louis II en direction du port au volant d'un véhicule, de marque Porsche, immatriculé sous le [numéro] lorsqu'il en a perdu le contrôle pour venir successivement percuter les piliers placés à l'entrée de l'immeuble « Monte Carlo Star », ainsi qu'un échafaudage mobile remisé parallèlement au trottoir amont de la chaussée, puis s'immobiliser en travers de la chaussée.

S. L. qui le suivait au volant de son véhicule, de marque Opel, type Kadett, immatriculé sous le [numéro] n'a pu éviter de le heurter à l'arrière droit.

Lors de son audition par les services de la sûreté publique J. H. a déclaré avoir perdu le contrôle de son véhicule pour une raison indéterminée, tout en reconnaissant que celui-ci avait laissé 84 mètres de traces de freinage au sol.

Par ailleurs, soumis au test de l'imprégnation alcoolique, ce dernier a présenté un taux d'alcoolémie de 0,94 mg/litre, ce qu'il n'a pas contesté.

S. L., a, pour sa part, reconnu n'avoir pu éviter de heurter le véhicule Porsche qui le précédait, expliquant n'avoir pas eu la possibilité d'effectuer une manœuvre d'évitement sur la gauche de la chaussée, en partie occupée par ce véhicule.

C'est dans cet état de la procédure, qu'est intervenu le jugement entrepris, lequel, d'une part s'est déclaré incompétent pour connaître de la contravention de défaut de maîtrise reprochée à S. L., d'autre part, après avoir déclaré J. H. coupable du délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique et de la contravention connexe de défaut de maîtrise, a condamné ce dernier à la peine de 6 000 francs d'amende pour le délit et à celle de 300 francs d'amende pour la contravention.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu que les faits reprochés à H. étaient établis par les éléments de l'enquête dont ce dernier avait reconnu la matérialité.

Ils ont, en revanche, estimé que la contravention reprochée à S. L., en l'absence de connexité avec les faits reprochés à H., ne relevait pas de leur compétence, mais de celle du Tribunal de simple police en application de l'article 22 du Code de procédure pénale.

Considérant qu'au soutien de son appel, le Ministère public a fait successivement observer :

Qu'en ce qui concerne le prévenu J. H., il convient d'aggraver la peine prononcée à son encontre eu égard à la gravité des faits qui lui sont reprochés ;

Qu'il requiert, en conséquence, qu'à la condamnation aux peines d'amendes prononcée par les premiers juges, soit ajoutée une peine d'emprisonnement avec sursis ;

Qu'en ce qui concerne le prévenu S. L., ce dernier doit être retenu dans les liens de la prévention pour la contravention de défaut de maîtrise qui lui est reprochée, en l'état de la connexité, en sorte que le jugement d'incompétence prononcé à son égard devra être réformé, une peine d'amende de principe devant être prononcée à son encontre ;

Considérant que J. H. n'ayant pas comparu bien que régulièrement cité, a fait connaître à la Cour, par lettre du 30 décembre 1996, qu'empêché de comparaître pour raisons professionnelles, il acceptait la décision à intervenir ;

Considérant que S. L., comparaissant en personne, a reconnu les faits qui lui étaient reprochés et déclaré s'en rapporter à justice ;

Sur ce,

Considérant que le délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique et la contravention connexe de défaut de maîtrise reprochés à J. H. sont établis par l'enquête ainsi que les débats, et sont, en outre, reconnus par ce prévenu ;

Considérant que les premiers juges ont fait une juste appréciation des éléments de la cause tant sur la culpabilité de J. H. que sur les peines devant lui être appliquées, en sorte qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qui le concerne ;

Considérant que, pour sa part, S. L. a été cité directement devant le Tribunal correctionnel, à la requête du Ministère public, sous la prévention de contravention connexe de défaut de maîtrise, prévue et réprimée par les articles 10 § 1er et 207 de l'ordonnance souveraine n° 1691 du 17 décembre 1957 ;

Considérant, à cet égard, que c'est à tort, que le Ministère public a cru devoir qualifier de connexe aux poursuites intentées contre J. H., la contravention reprochée à S. L. ;

Qu'en effet, l'article 27 du Code de procédure pénale, admet la connexité entre plusieurs infractions :

  • 1° lorsqu'elles ont été commises par le même individu.

  • 2° lorsqu'elles ont été commises en même temps par plusieurs personnes réunies.

  • 3° lorsqu'elles ont été commises (...) par suite d'un concert préalablement formé (...).

  • 4° lorsque les inculpés ont commis certaines infractions pour se procurer les moyens de commettre les autres, en faciliter ou en consommer l'exécution ou pour s'assurer l'impunité.

Considérant, qu'en l'espèce, aucune de ces conditions n'est remplie et notamment que les prévenus L. et H. ne s'étaient pas réunis, au sens dudit article, lors de la commission des infractions qui leur étaient reprochées ;

Considérant que c'est donc, à juste titre, que le tribunal correctionnel s'est déclaré d'office incompétent pour connaître d'une contravention relevant de la compétence exclusive du tribunal de police ainsi que le prévoit l'article 22 du Code de procédure pénale ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Statuant en matière correctionnelle, contradictoirement à l'égard de S. L. et par défaut à l'égard de J. H.,

  • déboute le Ministère public des fins de son appel.

  • confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal correctionnel en date du 2 juillet 1996.

Composition🔗

MM. Sacotte Prem. Prés. ; Serdet Prem. Subst. Proc. Gén. ; Bardy gref. en chef ;

Note🔗

Cet arrêt confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal correctionnel en date du 2 juillet 1996.

  • Consulter le PDF