Cour d'appel, 11 mars 1996, B. c/ Ministère public

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Procédure pénale

Enquête préliminaire - Procès-verbaux établis par l'officier de police judiciaire non signés - Nullité de ceux-ci

Enquête préliminaire - Preuve de la culpabilité reposant sur d'autres éléments

Résumé🔗

Le Code de procédure pénale n'a pas édicté, pour la phase de l'enquête préliminaire, de nullités formelles, comme pour celle de l'instruction.

Des procès-verbaux non signés par l'officier de police judiciaire, au nom duquel ils ont été établis, sont nuls.

Cependant le dossier de la procédure contient suffisamment d'éléments permettant d'appréhender la réalité des faits de conduite sous l'empire d'un état alcoolique, à savoir : la notice de dépistage signée par l'agent de police judiciaire et le prévenu, conformément à l'ordonnance n° 6782 du 4 mars 1980 ; le procès-verbal d'interrogation établi par le procureur général.


Motifs🔗

La Cour

La Cour statue sur l'appel interjeté par le Ministère public le 19 décembre 1995 contre un jugement du Tribunal correctionnel du 12 décembre 1995 ayant relaxé F. B. prévenu de conduite sous l'empire d'un état alcoolique.

Considérant que les faits, objet de la poursuite, peuvent être résumés ainsi qu'il suit :

Le 4 novembre 1995, à 0 heure 45, le véhicule automobile immatriculé [numéro] conduit par F. B. était interpellé à hauteur de l'établissement Stars and Bar.

Le contrôle d'alcoolémie pratiqué sur le conducteur laissait apparaître un taux d'alcool égal à 0,8 g par litre.

Devant les policiers F. B. reconnaissait les faits qui lui étaient reprochés et confirmait, par ailleurs sa position lors de son audition du 4 novembre 1995 par le Ministère public.

Considérant que le Tribunal correctionnel a relevé que les procès-verbaux d'audition de l'agent de police P. et de F. B., établis le 4 novembre 1995 n'étaient pas signés par l'officier de police judiciaire au nom duquel ils avaient été dressés et que, conséquemment, cette irrégularité enlevait toute valeur probante auxdits procès-verbaux et était de nature à vicier la procédure ;

Considérant que le Ministère public estime que, même si les deux procès-verbaux incriminés sont nuls, faute d'avoir été signés par l'officier de police judiciaire, ceux-ci ont valeur de renseignements et permettaient l'instruction de l'affaire par le Tribunal ;

Considérant que, par ailleurs, la partie poursuivante indique que les agents de police judiciaire disposent des mêmes pouvoirs que les officiers de police judiciaire en matière de conduite sous l'empire d'un état alcoolique conformément à l'ordonnance souveraine du 4 mars 1980 ;

Qu'en définitive le Ministère public requiert l'infirmation du jugement et la condamnation du prévenu à une peine d'amende ;

Considérant que F. B. fait plaider, à titre principal, sa relaxe en précisant notamment que l'ordonnance susmentionnée vise seulement la constatation de l'état alcoolique et non l'audition de l'auteur de l'infraction qui nécessite toujours la présence d'un officier de police judiciaire ;

Qu'en l'occurrence les procès-verbaux établis par l'officier de police judiciaire n'ont pas été signés par lui et sont donc nuls ;

Qu'à titre subsidiaire, il sollicite l'indulgence de la Cour ;

Sur ce,

Considérant que le Code de procédure pénale n'a pas édicté, pour la phase de l'enquête préliminaire, de nullités formelles, comme pour celle de l'instruction ;

Qu'en conséquence, la question est de savoir si l'irrégularité commise est particulièrement grave au point d'altérer fondamentalement la recherche et l'établissement de la vérité ;

Considérant que des procès-verbaux non signés par l'officier de police judiciaire au nom duquel ils ont été établis sont nuls ;

Que cependant, le dossier de la procédure contient suffisamment d'éléments permettant d'appréhender la réalité des faits en l'occurrence :

  • la notice de dépistage en date du 4 novembre 1995 signée par l'agent de police judiciaire et F. B., conformément à l'ordonnance n° 6782 du 4 mars 1980.

  • le procès-verbal d'interrogatoire établi par le Parquet général le 4 novembre 1995.

Considérant qu'il y a donc lieu de déclarer F. B. coupable du délit qui lui est reproché et d'infirmer le jugement déféré ;

Considérant sur la pénalité, qu'il y a lieu de faire application des circonstances atténuantes existant en la cause ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Statuant en matière correctionnelle,

Vu l'article 392 du Code pénal ;

Annule les procès-verbaux d'audition du 4 novembre 1995 de Messieurs P. et B.

Ordonne le retrait desdits procès-verbaux de la procédure.

Infirme le jugement du 12 décembre 1995 ;

Déclare F. B. coupable du délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique ;

Le condamne à la peine de mille francs d'amende.

Le condamne aux frais.

Composition🔗

MM. Sacotte, prem. prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. Me Karczag-Mencarelli, av. déf.

  • Consulter le PDF