Cour d'appel, 20 juin 1995, C. c/ M.

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Abstract🔗

Exploits

Signification d'une assignation - Défaut de mention de la réquisition prévue à l'article 15 E du Code de procédure civile - Nullité de l'exploit (non) - Application de l'article 967 du Code de procédure civile

Résumé🔗

Aux termes de l'article 967 du Code de procédure civile invoqué par l'appelant au soutien de son exception de nullité de la signification de l'acte d'assignation : « un acte de procédure ne pourra être déclaré nul pour vice de forme que s'il manque d'un élément essentiel ou si la nullité en est expressément prononcée par la loi ».

En l'espèce, la nullité n'étant pas prévue par l'article 162 dudit code, dont l'inobservation est invoquée par l'appelant, l'acte incriminé ne peut être annulé que s'il manque d'un élément essentiel ; la signification de l'assignation ayant été faite à la personne de l'intéressé, l'inobservation de la formalité prévue par l'article susvisé (défaut de mention de la réquisition prévue) ne constitue pas un élément essentiel de l'acte et ne fait pas grief à son destinataire.


Motifs🔗

La Cour,

La Cour est saisie de l'appel relevé par É. C. d'un jugement du tribunal de Première Instance en date du 24 novembre 1994 qui a déclaré exécutoire dans la Principauté les dispositions civiles d'un jugement contradictoire rendu à l'audience correctionnelle du 3 juin 1993 par la 5e chambre du Tribunal de grande instance de Nice (Alpes-Maritimes) a débouté É. C. de l'ensemble de ses prétentions, l'a condamné à payer à G. M. la somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts et l'a condamné aux dépens.

Pour statuer ainsi les premiers juges ont estimé que le jugement correctionnel avait été valablement signifié à É. C. selon les règles du droit français applicables, même en l'absence de l'indication de sa profession qui n'était pas non plus mentionnée dans ledit jugement, que ledit jugement n'avait pas été frappé d'appel dans le délai légal, qu'enfin l'inobservation éventuelle de l'article 162 du Code de procédure civile monégasque n'est pas sanctionnée par la nullité.

Au soutien de son appel tendant à la réformation du jugement et par réitération des moyens développés en première instance, É. C. fait valoir que :

  • l'assignation en exequatur ne mentionne pas la réquisition prévue par l'article 162 du Code de procédure civile monégasque, formalité substantielle selon lui qui doit entraîner la nullité de cet acte ;

  • l'acte de signification du jugement correctionnel a omis de mentionner sa profession de même que les vérifications effectuées sur son adresse alors que la signification n'a pas été effectuée à personne, l'absence de ces mentions entraînant selon l'appelant la nullité de cet exploit ;

  • que sa condamnation au paiement de dommages-intérêts n'est pas justifiée par un préjudice ;

G. M. qui relève que le formalisme prévu par l'article 162 du Code de procédure civile monégasque n'est pas prévu à peine de nullité et ne fait pas grief à l'appelant, que l'article 648 du Code de procédure civile français n'impose pas la mention de la profession du destinataire de l'exploit, que le défaut de mention des vérifications sur le domicile d'É. C. constitue un vice de forme n'entraînant la nullité que si elle occasionne un grief, sollicite la confirmation du jugement entrepris ; formant une demande reconventionnelle pour appel abusif et dilatoire il sollicite la condamnation d'É. C. au paiement d'une somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts.

En réponse, É. C. maintient sa demande en nullité de l'exploit d'assignation par application de l'article 967-1 du Code de procédure civile ; par ailleurs il soutient qu'en tout état de cause, l'article 648 du Code de procédure civile français imposait au requérant l'indication de son état civil complet ; il estime enfin que son appel n'est pas abusif.

G. M. relève dans ses dernières conclusions la confusion commise par l'appelant sur l'application de l'article 648 du Code de procédure français entre état civil du destinataire et état civil du requérant en soulignant que le défaut de mention de la profession de ce dernier ne fait pas grief à É. C.

Sur ce,

Sur la nullité de l'exploit du 10 mai 1994 :

Considérant qu'aux termes de l'article 967 du Code de procédure civile monégasque invoqué par l'appelant au soutien de son moyen, « un acte de procédure ne pourra être déclaré nul pour vice de forme que s'il manque d'un élément essentiel ou si la nullité en est expressément prononcée par la loi » ;

Qu'en l'espère la nullité n'étant pas prévue par l'article 162 dudit code dont l'inobservation est invoquée par l'appelant, l'acte incriminé ne peut être annulé que s'il manque d'un élément essentiel ;

Considérant que la signification de l'assignation du 10 mai 1994 ayant été faite à la personne d'É. C., l'inobservation de la formalité prévue par l'article 162 précité ne constitue pas un élément essentiel de l'acte et ne fait pas grief à son destinataire ;

Considérant dès lors que ce moyen doit être rejeté ;

Sur la nullité de la signification du jugement étranger :

Considérant que la procédure d'exécution simplifiée instituée par la Convention franco-monégasque du 2 décembre 1949 relative à l'aide mutuelle judiciaire entre la France et la Principauté de Monaco qui s'applique aux dispositions civiles des jugements correctionnels a pour but de réduire les vérifications auxquelles le tribunal saisi d'une demande en exequatur est tenu à l'examen de la régularité des points limitativement énumérés par l'article 18 de ladite Convention ;

Considérant qu'É. C. ne conteste pas la régularité des trois premiers points prévus par cet article ;

Considérant en ce qui concerne la quatrième vérification à laquelle le tribunal doit procéder, que le jugement dont l'exequatur est sollicitée est bien passé en force de chose jugée en France dès lors qu'il résulte d'un certificat de non-appel délivré le 24 mars 1994 par le Greffier en Chef du Tribunal de grande instance de Nice dont émane la décision que le jugement rendu le 3 juin 1993 n'a pas été frappé d'appel ;

Qu'en conséquence les contestations de C. portant sur la validité de la signification dudit jugement n'ont pas à être examinées ;

Considérant qu'il y a donc lieu de débouter É. C. de son appel et de confirmer le jugement entrepris ;

Considérant sur la demande reconventionnelle de G. M. que la procédure d'appel instaurée témérairement par É. C. revêt un caractère abusif et dilatoire ayant occasionné un préjudice certain à l'intimé à qui il y a lieu d'allouer en réparation une somme de 20 000 francs à titre de dommages-intérêts compte tenu des éléments d'appréciation dont la Cour dispose, au paiement de laquelle É. C. doit être condamné ;

Considérant que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS, partiellement substitués à ceux des premiers juges,

La Cour d'appel de la principauté de Monaco,

Confirme le jugement du tribunal de première instance en date du 24 novembre 1994 ;

Déboute É. C. des fins de son appel ;

Le condamne à payer à G. M. la somme de 20 000 francs à titre de dommages-intérêts.

Composition🔗

MM. Sacotte prem. prés. ; Serdet prem. subst. proc. gén. - Mes Blot, Escaut av. déf. ; Michel, Boisbouvier av.

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