Cour d'appel, 20 décembre 1985, G. L. c/ Société Standard Chartered Bank et K.-M.

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Procédure civile

Opposition à taxe concernant les dépens sur la base de l'article 238 du Code de procédure civile après promulgation de la loi n° 1047 du 28 juillet 1982 sur l'exercice des professions d'avocat-défenseur et d'avocat - Application de la loi nouvelle.

Résumé🔗

L'article 27 de la loi n° 1047 du 28 juillet 1982 étant inconciliable avec l'article 238 du Code de procédure civile, il s'ensuit que la nouvelle disposition (article 27) concernant le contentieux des dépens doit se substituer à l'article 238 du Code de procédure civile lequel doit être considéré comme tacitement abrogé.


Motifs🔗

La Cour,

Considérant qu'il ressort des éléments de la cause la relation suivante des faits et de la procédure ;

A la suite de l'ouverture de la succession de A. B. D. décédé le 21 novembre 1983 à Monaco en l'état d'un testament authentique reçu le 8 août 1980 par maître L.-C. C., notaire - notifié par un codicille authentique reçu par le même notaire, le 28 janvier 1982 - par lequel il désignait la Standard Chartered Bank comme exécuteur testamentaire et fidéi commissaire, demoiselle S. G., dame veuve M. L., M. et F. G. ont en qualité d'héritiers assigné devant le juge des référés L.-C. C., la S.A. de droit anglais Standard Chartered Bank, S. G. B. ainsi que le procureur général aux fins de désignation dans cette succession d'un administrateur judiciaire après constatation préalable de l'inexistence ou pour tout le moins de la nullité du trust prétendument constitué à cause de mort et de l'absence de qualité de la Standard Chartered Bank pour agir en qualité de trustie ;

Par ordonnance du 16 mars 1984 le juge des référés rejetant le moyen de nullité qu'avait été soulevé par les défendeurs, se déclarait incompétent et condamnait les demandeurs aux dépens. Persistant dans leur demande, demoiselle S. G. et dame veuve M. L. ont par exploit d'huissier, du 28 mars 1984 relevé appel et assigné devant la Cour d'appel maître L.-C. C., la S.A. « Standard Chartered Bank », S. G. B. et le procureur général ;

De leur côté, maître C. et B. ont formé appel incident ;

Par arrêt du 29 mai 1984 la cour a réformé l'ordonnance entreprise en ordonnant la mise hors de cause de maître C. et de B. ainsi qu'ils le demandaient, a confirmé pour le surplus les dispositions de l'ordonnance entreprise, et a condamné demoiselle G. et dame L. aux dépens de l'instance et leur distraction au profit de maître K.-M., avocat-défenseur de maître C., de la S.A. Standard Chartered Bank et de B. ;

Maître K.-M. établissait le 6 juin 1984, un état de frais à son nom d'un montant de 2 067 683 francs dont les droits proportionnels représentent pour la première instance 886 000 francs et pour l'instance d'appel 1 181 333 francs ;

Pour l'établissement du droit proportionnel, prévu par l'ordonnance n° 4849 du 6 janvier 1972 fixant le tarif des émoluments des avocats-défenseurs, maître K.-M. a déterminé l'intérêt du litige à 443 000 000 francs en faisant application pour la première instance des articles 7 et 60 de l'ordonnance susvisée et pour l'instance d'appel des articles 7, 74 et 80 de ladite ordonnance ;

Cette détermination de l'intérêt du litige correspondait, d'après maître K.-M., à la valeur de la succession pour laquelle l'administration provisoire avait été demandée ; la grosse de l'arrêt portant mention de la liquidation des dépens à la somme de 2 067 683 francs était délivrée par le greffier en chef le 7 juin 1984 à maître K.-M. ; l'arrêt du 29 mai 1984 a été signifié le 14 juin 1984 par maître L.-C. C., la S.A. Standard Chartered Bank et S. G. B. à demoiselle S. G., dame veuve M. L. et au Ministère public ;

Par exploit d'huissier du 22 juin 1984, demoiselle G. et dame veuve L. estimant que le droit proportionnel qui leur était réclamé n'était pas dû, ont fait opposition et assigné la société Standard Chartered Bank, en présence du Ministère public, devant la chambre du conseil de la Cour d'appel ;

Par ailleurs dans cette instance demoiselle G. et dame veuve L. ont le 22 avril 1985 assigné en intervention forcée Maître E. K.-M. ; la Cour de révision a par arrêt du 17 décembre 1984 rejeté le pourvoi en révision formé par demoiselle G. et dame veuve L. reprochant à l'arrêt du 29 mai 1984 de les avoir condamnées aux dépens alors que la déclaration d'incompétence ne mettait pas fin au litige, au motif que le juge des référés qui, aux termes de l'article 421 du Code de procédure civile doit statuer sur les dépens à moins qu'il n'y ait lieu de les réserver, dispose d'un pouvoir discrétionnaire en la matière ;

La position des parties s'établit comme suit :

  • demoiselle G. et dame L. font valoir dans l'acte opposition-assignation du 22 juin 1984, et leurs conclusions des 23 avril, 11 juin 1985 que la prétention d'un droit proportionnel basé sur les articles 7 et 60 de l'ordonnance souveraine n° 4849 du 6 janvier 1972 se trouve infondée car elle est liée nécessairement au fond alors que le magistrat des référés s'est interdit d'y préjuger en se déclarant incompétent et que l'intérêt est encore indéterminable ; que le juge statuant en matière de référé sur une demande aux fins de désignation d'administrateur judiciaire n'a pas connu des questions relatives à la valeur des biens de la succession ; que la demande de désignation d'un administrateur judiciaire ne portait pas à proprement parler sur un intérêt pécuniaire ; que seuls sont dus les débours et le droit fixe dont ils offrent le paiement ; que les dispositions de l'article 238 du Code de procédure civile instituant une voie de recours leur permet de contester les dépens lesquels n'ont pas été liquidés au contradictoire des parties puisque la liquidation a été faite unilatéralement par maître K.-M. le 6 juin 1984 postérieurement au prononcé de l'arrêt ; qu'aucun acte de procédure ne permet de soupçonner que la somme de 443 000 000 francs a été réclamée de part ou d'autre ; qu'à supposer que le droit proportionnel puisse être calculé sur la base d'une estimation des biens de la succession, le banquier serait seul qualifié pour fournir des éléments d'appréciation de l'actif net de la succession, ce qui justifie l'opportunité d'attraire la société Standard Chartered Bank laquelle a soulevé l'irrecevabilité de l'action à son égard ; que l'intérêt pécuniaire du litige ne peut être établi d'après les bases indiquées aux articles 7, 8, voire 9 ou 10 de l'ordonnance n° 4849, ledit intérêt étant indéterminé mais d'après l'article 11 de cette ordonnance ;

Que cependant, sans préjudice des dispositions de l'article 86 de l'ordonnance susvisée, l'avocat-défenseur, dont l'état de frais est querellé, n'a pas cru devoir saisir le Conseil de l'Ordre ni le bâtonnier pour arbitrer le montant du droit proportionnel ou soumettre l'état de frais à la taxation du juge ;

Qu'il appartient à l'avocat-défenseur, avant toute nouvelle réclamation contentieuse en paiement, de soumettre le différend au Conseil de l'Ordre ou au bâtonnier et à la taxation, qu'il y a lieu d'enjoindre à maître K.-M. tel délai qu'il plaira aux fins de saisine du Conseil de l'Ordre ;

Que le point de vue exprimé par la société Standard Chartered Bank selon lequel l'article 27 de la loi n° 1047 du 28 juillet 1982 serait inapplicable dès lors que la décision emportant condamnation aux dépens aurait été signifiée, n'est pas soutenable ; qu'en effet, les dépens constituent une créance répondant obligatoirement aux conditions habituelles de certitude, de liquidité et d'exigibilité, que ces deux dernières conditions ne peuvent exister qu'après contrôle du magistrat compétent et délivrance de la force exécutoire, c'est-à-dire d'une ordonnance de taxe ;

  • La S.A. Standard Chartered Bank dans ses conclusions du 22 janvier 1985 a soulevé l'irrecevabilité de la demande en observant que la citation portant sur les émoluments de l'avocat-défenseur aurait dû être dirigée contre celui-ci ; elle-même n'étant pas concernée par cette action ; que la demanderesse aux termes de l'article 238 du Code de procédure civile aurait dû saisir le Tribunal de première instance et non point la Cour d'appel ;

A titre subsidiaire, elle soutient que la condamnation aux dépens a entraîné l'application des articles 7 et 60 de l'ordonnance souveraine n° 4849 ; qu'il y a lieu de supposer que les appelantes tentent d'invoquer implicitement l'article 27 de la loi n° 1047 du 28 juillet 1982 sur l'exercice des professions d'avocat-défenseur et d'avocat qui dispose :

« En cas de contestation sur l'application des tarifs des frais et émoluments, sur le montant des honoraires ou sur l'application des dispositions de l'article 26, une tentative de conciliation a lieu devant le Bâtonnier de l'Ordre, saisi par simple lettre missive.

En cas de non-conciliation, il est statué par le Président de la juridiction devant laquelle l'affaire a été appelée » ;

Que l'article 27, outre son caractère général, se trouve inapplicable dès lors qu'il a été statué sur la liquidation des dépens ainsi qu'il en a été décidé dans une précédente affaire par jugement du 24 mai 1984 du Tribunal de première instance, les dépens étant dus dès leur liquidation, c'est-à-dire dès la signification de la grosse comportant lesdits dépens ; qu'il n'existe donc aucune contradiction entre les textes de loi, l'article 27 s'appliquant lorsqu'il n'y a pas eu de liquidation de dépens et l'article 238 du Code de procédure civile recevant application lorsque les dépens liquidés sont signifiés ; que les appelantes se sont abstenues de faire application de l'article 27 de la loi n° 1047 étant donné qu'elles n'ont pas saisi le Bâtonnier de l'Ordre avant de relever opposition de la décision rendue le 29 mai 1984 et signifiée le 14 juin 1984 ;

A l'audience du 26 novembre 1985 les parties ont développé leurs moyens en présence du Ministère Public auquel la procédure a été communiquée ;

Puis les parties ayant été invitées par la Cour, à s'expliquer sur la recevabilité de l'action engagée en vertu de l'article 238 du Code de procédure civile, au regard de l'article 27 de la loi n° 1047 du 28 juillet 1982 et de l'article 88 de l'ordonnance souveraine n° 8361 du 29 juillet 1985, celle-ci ayant été promulguée pendant le délibéré les débats ont été à cet effet réouverts le 26 novembre 1985 après que les parties aient déposées de nouvelles conclusions et ce en présence du Ministère public ;

Demoiselle G. et dame L. ont repris le moyen selon lequel s'agissant d'une contestation de calcul d'un état de frais et dépens, il appartient à l'avocat-défenseur distractionnaire et demandeur au paiement de soumettre ce différend aux organes prévus par l'article 27 de la loi du 28 juillet 1982 ; que l'article 88 de l'ordonnance souveraine du 29 juillet 1985 se trouve immédiatement applicable ; qu'il convient en conséquence de renvoyer l'avocat-défenseur distractionnaire à mieux se pourvoir ;

La S.A. Standard Chartered Bank s'en tient à ses précédentes écritures en observant à titre tout à fait subsidiaire que l'action intentée à son encontre se trouve irrecevable, s'agissant d'un litige afférent à un état de frais et dépens dû à un avocat-défenseur dont elle n'est pas créancière ; que l'article 27 de la loi du 28 juillet 1982 ne peut s'appliquer qu'aux dépens non encore liquidés que l'ordonnance souveraine du 25 juillet 1985 ne peut concerner les faits de la cause, s'agissant d'une contestation de dépens liquidés au 17 décembre 1984 par arrêt de la Cour de révision, donc avant la promulgation de ladite ordonnance souveraine ;

Que les dépens dont s'agit ne peuvent se rapporter au tarif fixé par celle-ci puisqu'ils ont été régulièrement calculés selon l'ordonnance n° 4849 du 6 janvier 1972, maître K.-M. soutient que la liquidation des dépens qui lui sont dus est à son égard devenue définitive, demoiselle G. et dame L. l'ayant assignée en intervention forcée, hors du délai de 8 jours prévu par l'article 238 du Code de procédure civile, que son état de frais a été calculé en vertu de l'article 7 du tarif instituant un droit proportionnel ; que toute référence aux dispositions de l'article 27 de la loi du 28 juillet 1982 sur l'exercice des professions d'avocat-défenseur et avocat est vaine en l'espèce, puisque les frais et dépens ont été liquidés et annexés aux grosses signifiées des décisions ;

Que l'article 27 a un caractère extrêmement général, qu'il n'a pas pour autant abrogé les dispositions claires, précises, impératives du Code de procédure civile que l'article 238 demeure applicable ; que les demanderesses se sont elles-mêmes exclues des dispositions de l'article 27 - d'ailleurs inapplicables - puisqu'elles n'ont jamais saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats comme le prescrit ledit article ;

Dans une note en délibéré du 3 décembre 1985, laquelle a été portée au contradictoire des autres parties, demoiselle G. et dame L. font valoir que le présent litige s'analyse en une contestation sur le principe même et à titre subsidiaire sur le quantum du droit proportionnel c'est-à-dire sur les frais et émoluments dus à un avocat-défenseur selon les termes de l'article 27 de la loi du 28 juillet 1982 ; que toutes les dispositions contraires à cette loi ont été abrogées ; qu'il en est ainsi de l'article 238 du Code de procédure civile ;

Elles demandent de constater qu'elles viennent de saisir le Bâtonnier de l'Ordre des avocats-défenseurs et avocats de Monaco conformément aux dispositions légales applicables au cas d'espèce ; de se déclarer incompétent de renvoyer les parties à développer leurs moyens dans le cadre de cette dernière procédure ;

Dans une note en délibéré du 10 décembre 1985, la société Standard Chartered Bank tenant pour répétées ses précédentes écritures sollicite sa mise hors de cause en observant qu'il s'agit d'une contestation relative à un état de frais dont l'avocat-défenseur se trouve créancier personnellement ; qu'il est paradoxal que les appelantes qui ont engagé l'action sur la base de l'article 238 du Code de procédure civile soulèvent maintenant l'incompétence ; que l'article 238 du Code de procédure civile n'a été abrogé ni implicitement ni explicitement ; que son abrogation aurait entraîné toute la section du Code de procédure civile relative aux dépens ;

Dans une note du 10 décembre 1985 maître K.-M. observe qu'accueillir la thèse des demanderesses reviendrait à permettre sans délai de forclusion autre que les prescriptions légales une contestation des états de frais liquidés et déstabiliser la fonction d'avocat-défenseur ;

Que la loi du 29 juillet 1985 renvoyant à l'article 27 de la loi du 28 juillet 1982 n'a abrogé que l'ordonnance du 6 janvier 1972 et non pas les dispositions contraires ce qui signifie que les dispositions de l'article 238 du Code de procédure civile sont toujours à respecter ;

Qu'il y a donc deux domaines distincts non contradictoires à considérer savoir :

  • l'hypothèse où il n'y a aucune grosse de levée et signifiée auquel cas s'applique l'article 27,

  • l'hypothèse où les dépens ont été liquidés et joints à la grosse signifiée auquel cas l'article 238 du Code de procédure civile est applicable ;

Que toute contestation doit être élevée, au sens des ordonnances souveraines des 7 janvier 1972 et 24 juillet 1985 contre l'avocat-défenseur et non pas contre son client, de telle sorte que la procédure introduite contre la société Standard Chartered Bank doit être déclarée irrecevable, cette irrecevabilité ne pouvant être couverte par l'assignation en intervention forcée laquelle est elle-même irrecevable ;

Que la thèse des demandeurs qui consiste à soulever en fin de compte un déclinatoire de compétence après avoir saisi la juridiction de céans traduit en réalité une confusion ;

Sur ce,

Sur la jonction des procédures introduites par exploits des 22 juin 1984 et 22 avril 1985

Considérant que l'opposition formée le 22 juin 1984 par demoiselle G. et dame L. sur le fondement de l'article 238 du Code de procédure civile a été suivie d'une assignation en intervention forcée de maître K.-M., avocat-défenseur laquelle est distractionnaire des dépens dont l'état contesté a été établi par ledit avocat-défenseur, qu'ainsi la mise en cause de maître K.-M. directement intéressée au litige, se trouvant justifiée, il importe d'ordonner la jonction de ces deux procédures ;

Sur la recevabilité de l'action intentée sur la base de l'article 238 du Code de procédure civile

Considérant que l'article 238 du Code de procédure civile dispose :

« Le jugement au chef de liquidation sera susceptible d'opposition. L'opposition sera formée dans les huit jours de la signification, par assignation devant le Tribunal de première instance, il y sera statué d'urgence, et le recours en révision ne sera recevable contre cette décision que lorsqu'il y aura pourvoi contre quelque disposition sur le fonds » ;

Considérant que la loi du 28 juillet 1982, promulguée postérieurement à l'article susvisé, contient un article 27 ainsi libellé : « En cas de contestation sur l'application du tarif des frais et émoluments, sur le montant des honoraires ou sur l'application des dispositions de l'article 26, une tentative de conciliation a lieu devant le Bâtonnier de l'Ordre saisi par simple lettre missive... » ;

Considérant qu'il est constant que le tarif des frais et émoluments constituent au sens de l'article 234 du Code de procédure civile des éléments compris dans les dépens ;

Considérant que la loi n° 1047 du 28 juillet 1982 a dans son article 42 abrogé l'ordonnance du 9 décembre 1913 sur l'exercice et la discipline de la profession d'avocat-défenseur et de la profession d'avocat laquelle prévoyait dans son article 25 modifié par l'ordonnance n° 3012 du 12 juillet 1973 :

« Les frais et dépens seront perçus, tels qu'ils résultent des tarifs en vigueur...

Il sera loisible à l'avocat-défenseur, qui aura obtenu la distraction des dépens, de se faire délivrer un extrait en forme exécutoire de la décision pour ce qui concerne la distraction et la liquidation desdits dépens et ce, en ce qui concerne la liquidation, tant à l'encontre de la partie adverse qu'à l'encontre de son propre client, si c'est ce dernier qui a été condamné »

et, dans son article 27 :

« Les taxes des juges ou les sentences rendues du chef de la liquidation des dépens seront susceptibles d'opposition dans les huit jours à compter du jour de la signification, délai imparti par l'article 238 du Code de procédure civile ;

L'opposition sera formée par assignation devant juridiction compétente ;

Il sera statué sommairement et sans frais en la Chambre du Conseil, parties avisées, soit par jugement du Tribunal, soit par arrêt de la Cour, suivant le cas » ;

Considérant que la suppression de ces dispositions trouve sa raison d'être dans l'instruction de l'article 27 de la loi du 25 juillet 1982 ci-dessus relaté ;

Considérant que les dispositions contenues, d'une part, dans l'article 238 du Code de procédure civile, d'autre part, dans l'article 27 de la loi du 28 juillet 1982 prévoient ainsi deux procédures différentes pour une même contestation celle concernant la liquidation des dépens que celle-ci résulte d'un jugement ou arrêt ou bien d'une ordonnance de taxe que prévoit l'article 143 de l'ordonnance du 2 juillet 1866 qu'une distinction jurisprudentielle qui consisterait à appliquer l'article 238 du Code de procédure civile aux dépens liquidés par jugements et l'article 27 de la loi de 1982 aux frais de justice non liquidés par jugement apparaît artificielle et inopérante, en l'état de la généralité du contentieux que recouvre ledit article 27 excluant de même un distinguo entre grosse levée et non levée ;

Considérant que ces dispositions étant inconciliables il est de principe en la matière que la loi nouvelle, laquelle revêt un caractère procédural l'emporte sur la loi ancienne et ce d'autant que l'article 27 figurant dans un texte spécial concernant la profession d'avocat-défenseur et d'avocat, la règle « spéciala généralibus » dérogeant conforte la prééminance susvisée ; qu'ainsi l'article 27 de la loi du 25 juillet 1982 a eu pour effet de provoquer l'abrogation tacite de l'article 238 du Code de procédure civile ;

Considérant que la procédure instituée par l'article 27 doit également pour les mêmes motifs l'emporter sur celle prévue au dernier alinéa de l'article 11 de l'ordonnance n° 4849 du 6 janvier 1972 fixant le tarif des émoluments des avocats-défenseurs, que cet alinéa a d'ailleurs été supprimé dans l'ordonnance souveraine n° 8361 du 29 juillet 1985 qui a abrogé l'ordonnance n° 4849 ;

Considérant, sans qu'il soit besoin d'avoir égard à l'application aux faits de la cause de l'article 88 de l'ordonnance souveraine susvisée du 29 juillet 1985, qu'il y a lieu de constater que le législateur a entendu soumettre toutes les contestations relatives au nouveau tarif à la procédure instituée par l'article 27 de la loi du 25 juillet 1982 ;

Confirmant de la sorte dans un but d'uniformité la compétence attribuée aux présidents des juridictions concernées après tentative de conciliation devant le Bâtonnier de l'Ordre toutes les difficultés que sont susceptibles de susciter les dépens ou les honoraires ;

Considérant que l'action introduite sur le fondement de l'article 238 du Code de procédure civile et l'assignation subséquente, n'étant pas recevables, il y a lieu de renvoyer les parties à se mieux pourvoir et de condamner demoiselle G. et dame L. aux dépens de la présente instance dont distraction au profit de maître K.-M. et maître L. sous leur due affirmation ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Statuant en audience publique,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Ordonne la jonction des procédures enrôlées sous les n° 84-5 et 85-91 ;

Se déclare incompétente ;

Donne acte en tant que de besoin à demoiselle G. et dame L. de ce qu'elles ont saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats-défenseurs et avocats de Monaco, du présent litige en l'application de l'article 27 ;

Renvoie les parties à se pourvoir comme il leur appartiendra ;

Composition🔗

MM. Vialatte, prem. prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Marquet, Sbarrato, K.-M., av. déf.

  • Consulter le PDF