Cour d'appel, 19 août 1985, sociétés Palmerston Financial Corporation, Sulcis Shipping Corporation, Trevone Shipping Corporation et Yuma Shipping Corporation c/ société Continental Illinois National Bank and Trust Company of Chicago

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Abstract🔗

Procédure civile

Défenses à exécution provisoire - Promesse reconnue donnant lieu à exécution provisoire

Résumé🔗

Dès lors que l'exécution provisoire a été obligatoirement ordonnée par le Tribunal en l'état de promesses reconnues, les défenses à exécution provisoire ne sauraient être recevables en application des articles 11 et 13 combinés de l'Ordonnance du 21 mai 1909 sur l'appel.


Motifs🔗

La Cour,

Considérant que par jugement du 13 juin 1985 le Tribunal de grande instance de Monaco, statuant sur l'opposition formée par les sociétés Palmerston Financial Corporation, Sulcis Shipping Corporation, Trevone Shipping Corporation et Yuma Shipping Corporation (ci-après : les sociétés) à un jugement du 6 décembre 1984 a, après avoir débouté lesdites sociétés de leur demande reconventionnelle, maintenu le jugement du 6 décembre 1984 en ce qu'il avait :

  • condamné solidairement les sociétés opposantes à payer à la société Continental Illinois National Bank and Trust Company of Chicago (ci-après : la Banque) les sommes visées au dispositif dudit jugement,

  • déclaré régulière et valable la saisie-conservatoire du navire Eretria II à concurrence de l'équivalent en francs français de la somme de 9 243 510,60 dollars U.S.,

  • ordonné la conversion de cette saisie en saisie exécution et la vente aux enchères dudit navire devant Maître Jean-Charles Rey, notaire,

  • jugé que la société créancière pourrait recouvrer le montant de sa créance et des accessoires sur le produit de la vente et, en outre, a :

  • fixé la date de la vente au 3 octobre 1985, sur la mise à prix de 30 millions de francs, après accomplissement des formalités et de la publicité légales,

  • ordonné des mesures de publicité supplémentaires, ainsi que l'exécution provisoire du jugement intervenu, nonobstant appel et sans caution,

  • considérant que pour statuer ainsi qu'ils l'ont fait sur l'exécution provisoire les premiers juges, après avoir rappelé qu'une telle mesure pouvait être ordonnée dans tous les cas d'urgence et devait l'être, aux termes de l'article 11 de l'ordonnance du 21 mai 1909, s'il y avait titre authentique ou promesse reconnue, ont estimé :

  • que la « convention de crédit » en date du 14 décembre 1982, signée par les parties pardevant un notaire de la cité de Londres qui en avait authentifié la teneur pouvait être assimilée, à tout le moins, à la promesse reconnue de l'article 11 précité en ce qu'elle constatait la reconnaissance par les sociétés opposantes de leur dette à l'égard de la Banque,

  • qu'en outre, les circonstances de l'espèce caractérisaient une situation d'urgence tenant notamment au fait non contesté et résultant du rapport officieux d'expertise établi le 28 mars 1985 par E. R., qu'un équipage de huit hommes, en plus du capitaine, assurait le bon entretien du navire aux frais avancés de la Banque, ce qui entraînait des dépenses importantes ;

Considérant que par exploit du 25 juillet 1985, les sociétés, autorisées à cette fin par ordonnance du 19 juillet 1985 de M. le Premier Président de la Cour d'appel, ont assigné la banque pour l'audience du 8 août suivant, afin de voir accorder des défenses à l'exécution provisoire ;

Qu'à l'appui de leur demande elles soutiennent que la vente du navire Eretria II serait de nature à produire des effets irréparables et que l'exécution provisoire qui en a été ordonnée est ainsi contraire de l'article 11 alinéa 2 de l'ordonnance du 21 mai 1909 qui stipule : « l'exécution provisoire pourra être ordonnée, avec ou sans caution, dans tous les cas d'urgence, à moins qu'elle ne soit de nature à produire des effets irréparables » ;

Considérant que de son côté la banque fait valoir que sa créance ainsi que l'hypothèque maritime la garantissant se fondent l'une et l'autre sur des actes authentiques contenant, le premier, une reconnaissance de dette et une promesse de remboursement du crédit consenti, en principal et intérêts, aux échéances convenues, le second la promesse de conférer un droit réel sur le navire « Eretria » et que, dès lors, l'exécution provisoire devait être nécessairement ordonnée aux termes de l'alinéa 1e de l'article 11 de l'ordonnance du 21 mai 1909 ;

Qu'au surplus, ainsi que le Tribunal l'a retenu à titre subsidiaire, l'exécution provisoire s'imposait aux termes de l'alinéa 2 de l'article 11 précité en raison de l'urgence résultant des frais considérables d'entretien du navire, entièrement à la charge du créancier hypothécaire, la vente ordonnée ne pouvant par ailleurs entraîner des effets irréparables puisque, même à la juger critiquable, le préjudice en résultant serait « réparable » sous forme de dommages et intérêts venant s'imputer sur la dette des sociétés dont le principe n'est pas contesté ;

Qu'elle conclut ainsi au rejet de la demande desdites sociétés tendant à se voir accorder des défenses à l'exécution provisoire ;

Sur ce,

Considérant que les faits de la cause sont exactement rapportés aux jugements des 6 décembre 1984 et 13 juin 1985 auquel le présent arrêt, en tant que de besoin, se réfère expressément ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 alinéa 1er de l'ordonnance du 21 mai 1909 « l'exécution provisoire sera ordonnée sans caution par le Tribunal, à la demande des parties, s'il y a titre authentique, promesse reconnue ou condamnation précédente par un jugement dont il n'y a point appel » ;

Considérant que sans même qu'il y ait lieu de rechercher si les actes des 14 et 16 décembre 1982 produits par la Banque à l'appui de sa demande constituent des actes authentiques aux yeux de la loi monégasque, il convient de retenir que c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'ils constituaient, à tout le moins, des promesses reconnues au sens de l'article 11 alinéa 1er de l'ordonnance du 21 mai 1909 ;

Qu'en effet, il y a promesse reconnue dès l'instant que la partie condamnée a reconnu l'existence matérielle de l'obligation invoquée contre elle et sa signature au bas de l'acte produit, ce qui est le cas en l'espèce ;

Considérant en conséquence, que c'est à bon droit que les premiers juges, faisant application de l'alinéa 1er de l'article 11 précité de l'Ordonnance du 21 mai 1909 ont, ainsi qu'ils y étaient tenus, ordonné l'exécution provisoire de leur décision ;

Qu'il échet en conséquence de débouter les sociétés de leur demande tendant à se voir accorder des défenses à ladite exécution provisoire ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Déboute de leur demande les Sociétés Palmerston Financial Corporation, Sulcis Shipping Corporation, Trevone Shipping Corporation et Yuma Shipping Corporation ;

Composition🔗

MM. Vialatte. prem. prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Karczag-Mencarelli, Lorenzi, av. déf.

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