Cour d'appel, 17 mai 1971, Dame P. et W. c/ Hoirs S.

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Abstract🔗

Notaires

Responsabilité - Obligations professionnelles - Vente d'immeuble - État des inscriptions hypothécaires - Grosses au porteur - Versement des fonds.

Résumé🔗

Le notaire, appelé à donner l'authenticité aux conclusions des parties, est tenu d'éclairer celles-ci sur les conséquences de ces conventions, d'attirer leur attention sur les dangers qui peuvent en résulter et de leur indiquer les moyens légaux d'y obvier. Il doit, même en l'absence de tout mandat, procéder à la vérification des faits et des conditions nécessaires pour assurer l'utilité et l'efficacité de ces actes.

Commet une faute d'une particulière gravité, le notaire qui néglige de faire porter dans l'acte de vente d'un immeuble, la totalité des inscriptions hypothécaires grevant le bien vendu et de s'être pleinement éclairé sur la situation juridique de celui-ci.

Commet également une faute engageant sa responsabilité, le notaire qui, tenu envers l'acheteur de faire usage du prix pour éteindre les sûretés grevant le bien vendu, tenu de la même obligation envers le vendeur et envers le porteur de grosses émises en paiement du prix de vente quand il reçoit de ce porteur et par anticipation partie dudit prix, n'a pas employé les fonds comme si le prix stipulé dans l'acte lui avait été directement remis par l'acquéreur, mais les a versés au vendeur, mettant ainsi l'acquéreur à la merci de ce dernier en ce qui concerne l'extinction des sûretés grevant le bien.


Motifs🔗

La Cour,

Statuant sur l'appel régulièrement interjeté en la forme par dame P. assistée de son mari, d'un jugement rendu le douze février mil neuf cent soixante-dix, par le Tribunal de Première Instance de Monaco, lequel a déclaré les époux P.-W. mal fondés en leurs prétentions à l'encontre des hoirs S., et les a condamnés à payer à leurs adversaires, la somme de mille cinq cents francs à titre de dommages-intérêts ;

Statuant également sur l'appel incident, régulier en la forme, introduit par les hoirs S., à l'égard de la même décision ;

Considérant que l'appelante principale fait grief au jugement entrepris de n'avoir pas retenu la responsabilité de feu le notaire S., à l'occasion d'agissements reprochés à cet officier ministériel et précisés dans ses conclusions d'appel du quatorze décembre mil neuf cent soixante-dix ; qu'elle réclame aux héritiers du notaire le paiement d'une somme de cent cinquante mille cent quarante six francs, quatre vingt-cinq centimes, et des intérêts de droit, à titre de réparation du préjudice par elle subi ;

Que l'hoirie S. sollicite la confirmation du jugement déféré et par voie d'appel incident, l'élévation à dix mille francs les dommages-intérêts qui leur ont été alloués par les premiers juges, en raison de la procédure abusive dont ils ont été l'objet ;

Considérant que le premier juin mil neuf cent soixante, la Société Civile Immobilière G. ayant pour gérante, la dame P., a acquis, par acte S., de la S.C.I. Les Flots Bleus, cinq cents mètres carrés de locaux formant une partie du 2e étage d'un immeuble en construction sis à Fontvieille, moyennant un prix de cent cinquante mille francs, payable en cinq ans et représenté par quinze grosses au porteur de dix mille francs chacune, créées à cet effet ; que la dame P., es-qualités, a obligé la Société G. à payer ce prix à la Société venderesse ou pour elle au porteur des grosses créées dont il a été expressément convenu que la simple remise opèrerait transmission de la créance résultant de l'acte et emporterait de plein droit subrogation au profit du porteur dans tous les droits, actions, privilèges et hypothèques attachés à ladite créance ; que de leur côté, les sieurs C. et B., co-gérants de la Société Les Flots Bleus, se sont engagés à rapporter la mainlevée dans le plus bref délai, de diverses inscriptions hypothécaires, dont une inscription d'office, visée dans l'origine de propriété, grevant l'immeuble dont s'agit ; qu'au nombre de ces inscriptions figurerait notamment celle consentie par la Société venderesse à un sieur D., en garantie d'une somme de cinq cent cinq mille francs, par elle empruntée à ce dernier et destinée au financement de la construction, en représentation de laquelle avaient été créées cinquante trois grosses fractionnelles au porteur ; qu'enfin en l'état de la transcription de l'acte intervenue le vingt-quatre juin mil neuf cent soixante et faute d'être réglés, les Sociétés Héraclès et A. porteurs de grosses D., ont poursuivi à l'encontre de la Société G., tiers détenteur, la saisie immobilière de leur gage hypothécaire comprenant la portion d'immeuble susvisée, de sorte que la Société précitée s'est trouvée évincée sans recours possible contre son vendeur déclaré ultérieurement en faillite ;

Considérant que l'appelante impute au notaire S. les conséquences de la malheureuse opération dont la Société G. a été la victime ; qu'elle fait reproche à l'officier ministériel, d'une part, d'avoir introduit dans l'acte de vente une énonciation inexacte de la situation hypothécaire des biens vendus, d'autre part, d'avoir directement versé au vendeur les fonds recueillis à l'occasion de la cession des premières grosses au porteur, alors qu'il eut dû utiliser ces fonds à la radiation des inscriptions qui grevaient ces biens ; qu'elle fait état en outre de l'existence d'un mandat tacite dont aurait été investi le notaire en cette affaire ;

Considérant qu'un tel mandat résulte clairement en l'espèce :

d'abord du commencement de preuve écrite constitué par la clause de l'acte de vente stipulant que tous paiements en principal et intérêts auront lieu en l'étude dudit notaire ;

ensuite des circonstances suivantes où sont réunies des présomptions graves, précises et concordantes de l'existence et de l'acceptation par Maître S. dudit mandat ;

l'établissement par lui de grosses au porteur conservées dans l'étude et non pas remises au vendeur ;

la négociation par ses soins desdites grosses, établies plus spécialement par sa lettre à C. du quinze juin mil neuf cent soixante « J'ai examiné la possibilité de céder les grosses au porteur représentées par la vente par la Société Les Flots Bleus à la Société G., mais il est difficile de les céder en l'état actuel... Voulez-vous avoir l'obligeance d'examiner ce que votre société peut faire comme sacrifice pour arriver à la cession de ces grosses ? » ;

le versement par le même notaire à C. au mois de juin mil neuf cent soixante, d'une somme de cinquante mille francs en un chèque sur la B.N.C.I. n° 711.228, tiré par Maître S., représentant le montant du prix de cession de cinq des grosses dont il s'agit, et ceci sans égard à l'engagement unilatéral de C. et B. de rapporter dans le plus bref délai mainlevée de l'inscription hypothécaire, alors précisément que toute l'opération est fondée, après la passation de l'acte, sur les diligences du notaire ;

Considérant, en conséquence, qu'au delà de sa responsabilité propre de notaire, telle qu'elle s'induit à l'égard des parties des dispositions de l'ordonnance sur le notariat du quatorze mars 1886, notamment aux articles 16, 24, 25 et 92, Maître S. était tenu envers dame P. es-qualités et également envers C. et B., de toutes les obligations nées du mandat intervenu et en vertu duquel il était chargé, par les signataires, de l'accomplissement à bon escient des formalités consécutives à l'acte de vente par lui dressé ;

Sur les fautes imputées au notaire

I. - En ce qui concerne les énonciations portées dans l'acte de vente ;

Considérant que les notaires, tenus professionnellement d'éclairer les parties sur les conséquences des conventions, auxquelles ils sont appelés à donner l'authenticité, d'attirer leur attention sur les dangers qui peuvent résulter de ces actes et de leur indiquer les moyens légaux d'y obvier, doivent - même en l'absence de tout mandat - procéder à la vérification des faits et des conditions nécessaires pour assurer l'utilité et l'efficacité desdits actes ;

Qu'il appartenait dès lors à Maître S. de faire porter mention de la façon la plus apparente, dans l'acte de vente intervenu le premier juin 1960, entre les Sociétés Les Flots Bleus et G., de la totalité des inscriptions hypothécaires grevant le bien vendu ;

Que tout au contraire, ne figure dans l'acte sous la rubrique « origine de propriété » qu'une inscription d'office au profit du porteur des grosses établies lors de la précédente acquisition de l'immeuble par la Société Les Flots Bleus pour un montant de deux cent soixante cinq mille francs, constituant le solde du prix d'achat ;

Que sans doute in fine à la rubrique « état civil » le notaire fait déclarer par les vendeurs, C. et B., agissant pour l'auteur de la Société G. « que l'immeuble dont partie est présentement vendue est grevé de l'inscription d'office ci-dessus relatée dans l'origine de propriété et de diverses autres inscriptions dont MM. C. et B. s'engagent à rapporter la mainlevée dans les plus bref délais » ;

Que si le notaire S., comme il en avait le devoir, s'était procuré antérieurement à la vente l'état des inscriptions hypothécaires, il eût constaté que l'immeuble litigieux supportait en fait quatre inscriptions, toutes antérieures au 1er juin 1960, pour sûreté des créances dont le montant global s'élevait à deux millions cinq cent mille francs, en sorte que les « diverses autres inscriptions » présentées de façon anodine par les vendeurs, grevaient de plus de huit fois le bien vendu qu'il ne l'était par la seule inscription réellement apparente dans l'acte ;

Que le notaire ne saurait trouver une justification de sa négligence dans la connaissance qu'aurait eue l'acquéreur de la situation obérée du vendeur, alors qu'il n'est apporté aucune preuve de cette connaissance, que notamment un compromis intervenu un an avant entre les parties, en vue de l'acquisition d'une superficie plus importante du même immeuble, ne porte aucune mention du passif hypothécaire, et que de toutes façons, le notaire ne devait prêter son ministère à aucune entreprise équivoque ;

Que loin de le décharger, en raison du soupçon qu'elle pouvait faire naître chez l'acquéreur, la mention imprécise d'autres inscriptions eût dû l'inciter à ne pas instrumenter avant de s'être pleinement éclairé sur la situation juridique du bien vendu ;

Que la remise à l'acquéreur de l'état hypothécaire près de cinquante jours après l'authentification de la vente, en tant qu'elle était tardive, ne peut davantage relever Maître S. de la responsabilité encourue ;

Que la faute imputée à cet officier ministériel se trouve donc établie et emprunte en l'espèce une particulière gravité ;

II. - En ce qui concerne le versement au vendeur du prix de cession des grosses 1 à 5 ;

Considérant que, notamment quand il est le mandataire des parties pour mener à bon terme la vente intervenue, le notaire percevant tout ou fraction du prix d'achat doit se garder d'en faire remise au vendeur avant d'avoir fait procéder à la radiation des inscriptions grevant le bien vendu et ce quelles qu'aient été les promesses de ce vendeur ;

Qu'en l'espèce Maître S. n'a pas reçu ce prix de l'acheteur, mais qu'il a, dans les jours suivant la vente, négocié cinq grosses au porteur pour un montant total de cinquante mille francs, perçu les fonds correspondants et viré ces fonds au vendeur, mettant ainsi l'acquéreur à la merci de ce dernier en ce qui concerne l'extinction des sûretés grevant le bien ;

Considérant que le résultat de cette opération s'est donc révélé identique à celui qu'aurait engendré la remise par le notaire au vendeur du prix de l'acquisition ; que l'on ne peut prendre en considération le distinguo juridique opposé par l'hoirie S. entre le prix d'achat et le montant des grosses au porteur, puisque dans les deux cas, les agissements du notaire conduisaient à affaiblir singulièrement la position de l'acquéreur et en définitive à compromettre le cas échéant l'utilité et l'efficacité de l'acte de vente ;

Au surplus, que l'on doit considérer que dans une vente, quand le prix n'est pas versé en deniers, mais matérialisé par l'établissement des grosses au porteur, le notaire, mandataire du vendeur - si le porteur de grosse est, comme en l'espèce, subrogé dans tous les droits de ce vendeur quant à sa créance - l'est ipso facto du porteur, en sorte qu'obligé envers les parties à l'acte à mener à bon terme les opérations consécutives à la vente, il y est également obligé envers le porteur dont le droit de créance s'identifie à celui du vendeur ;

Que dans les mêmes circonstances, la dette du porteur de grosse, dont la libération a fait naître la créance de ce dernier, n'avait d'autre fondement juridique que le paiement effectué par anticipation de la dette de l'acheteur, contrepartie de la créance du vendeur ;

Qu'en conséquence, le notaire tenu envers l'acheteur de faire usage du prix pour éteindre les sûretés grevant le bien vendu, tenu de la même obligation envers le vendeur et envers le porteur de grosse, quand il reçoit de ce porteur et par anticipation portion du prix de vente, doit employer les fonds comme si le prix stipulé dans l'acte lui avait été directement remis par l'acquéreur ;

Que s'il était autrement jugé, l'établissement de grosses au porteur en place de ce prix d'achat, constituerait un moyen inadmissible de dispenser les notaires du respect, non seulement des règles de prudence qui sont la sauvegarde des acquéreurs, mais aussi des obligations nées pour eux du mandat reçu ;

Considérant enfin qu'à supposer que Maître S. se soit cru fondé à ne pas assimiler le prix de cession des grosses par lui encaissé à un prix de vente payé à l'étude, il lui appartenait alors, comme à tout notaire, vu, pour le moins l'inscription hypothécaire révélée par l'acte, de déconseiller à dame P. l'utilisation du procédé dit des grosses au porteur, en raison des dangers inhérents à l'opération ;

Que la faute relevée par l'appelante principale est donc également établie, quelles qu'aient été les tentatives ultérieures du notaire pour parvenir à la mainlevée qui n'avait pas été opérée ;

Sur le dommage subi par dame P. es-qualités, et la relation entre les fautes sus mentionnées et ce dommage.

Considérant que l'appelante principale fait état d'un préjudice s'élevant à cent cinquante mille cent quarante six francs, 80 centimes ainsi ventilé :

  • soixante mille francs, représentant le prix des grosses 1 à 6 ; quarante mille francs, celui des grosses 7 à 10 ;

  • vingt mille cent quarante six francs, quatre vingt centimes, montant des travaux de finition des parties de l'immeuble acheté ;

  • trente mille francs à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble grave subi du fait de l'éviction ;

Considérant qu'il n'est pas dénié par les hoirs S. que dame P. a effectivement racheté au porteur Se. les grosses I à 6, mais qu'il est établi par un reçu en date du 22 octobre 1961 qu'elle n'a versé que cinquante-huit mille quatre cents francs et non pas soixante mille francs ; qu'il n'est pas contesté qu'elle a engagé à concurrence de vingt mille cent quarante-six francs 80, des dépenses diverses afin d'achever la mise en état des lieux acquis ;

Que par contre est discuté le versement d'une somme de quarante mille francs afférente aux grosses sept à dix, les hoirs S. faisant valoir que le prix de vente primitif de cent cinquante mille francs a été ramené à cent dix mille francs par suite de la constatation d'une erreur sur la surface du bien vendu, en sorte que les grosses sept à dix ont été remises gratuitement à Dame P. en contrepartie de la diminution du prix ; que le motif invoqué résulte des pièces versées au débat et notamment de la lettre adressée par C. au notaire le dix-neuf juillet mil neuf cent soixante ;

Que cette dernière ne nie pas la remise à elle desdites grosses, mais prétend en avoir précédemment versé le montant au vendeur, en sorte que l'abandon en ses mains des titres ne l'aurait pas remplie de la somme indûment payée ;

Qu'il n'est toutefois apporté par l'appelante principale aucune justification précise de l'imputation du paiement fait par elle à la société « Les Flots Bleus » ; qu'en effet, si divers reçus sont produits ils se réfèrent à une seconde opération portant sur la vente envisagée entre la même partie de mille cinq cent mètres carrés du même immeuble ; qu'un seul reçu (en date du vingt-quatre mai mil neuf cent soixante) a trait à un acompte de dix mille francs à valoir sur l'achat des cinq cents mètres carrés litigieux, mais qu'il n'y est fait aucune référence aux grosses au porteur établies quelques jours plus tard et qu'au surplus le montant dudit acompte est très inférieur au prix global des quatre grosses litigieuses ;

Que la preuve n'est donc pas faite du préjudice concernant lesdites quatre grosses ;

Considérant, par ailleurs, qu'est contestée par les hoirs S., la relation de cause à effet entre les agissements reprochés au notaire et le préjudice subi par dame P., es-qualités, en ce qui concerne le remboursement des grosses un à six, et également le montant des travaux effectués dans les lieux vendus ;

Quant aux grosses un à six :

Considérant qu'ils font valoir que lorsqu'au mois d'octobre mil neuf cent soixante et un la dame P. a procédé à leur rachat, elle savait pertinemment depuis longtemps que leur montant n'avait pas été affecté à la radiation de l'inscription hypothécaire, mais avait été versé par le notaire à C. ; qu'une telle connaissance est révélée par l'interdiction faite par elle, le quatorze septembre mil neuf cent soixante par le Ministère d'huissier au notaire S. de se dessaisir des grosses onze à quinze, pour sûreté et garantie de la radiation d'hypothèque existante sur le local vendu dans l'immeuble « Les Flots Bleus », qui n'a pas été enlevée ainsi qu'il pourra en être justifié en cas de besoin de sorte que l'appelante principale aurait été, elle-même, à l'origine de son préjudice, lequel ne résulte que dudit rachat ;

Considérant toutefois que l'acquéreur du lieu, débiteur desdites grosses, d'une part par la faute du notaire, avait acheté un immeuble plus lourdement grevé qu'il le supposait, d'autre part, bien qu'il ait su quels risques il courait en raison du défaut de mainlevée, ne pouvait tout au plus qu'attendre l'expiration du délai de cinq ans qui lui était imparti dans l'acte de vente, pour procéder à ce rachat ; qu'en y procédant avant l'arrivée du terme, il n'aggravait pas sa situation, mais au contraire faisait cesser le versement d'intérêts onéreux ; qu'il pouvait aussi légitimement conserver à cette époque l'espoir de voir s'arranger l'affaire et souhaiter que les seules grosses négociables (les autres étant soit en sa possession, soit bloquées chez le notaire) ne puissent plus être cédées de main à main, alors qu'elles constituaient l'instrument d'une créance singulièrement en péril ; qu'en tout état de cause, le préjudice souffert n'est pas né du rachat anticipé des grosses, expressément autorisé dans l'acte de vente, mais des agissements antérieurs du notaire tels que précédemment exposés ;

Quant aux travaux effectués dans les lieux vendus :

Considérant qu'il importe peu que l'acte de vente ait mis à la charge de l'acquéreur lesdits travaux ; qu'ils ont été effectués par dame P. en considération de sa qualité, dont elle ne doutait pas, de propriétaire des locaux acquis et qu'elle était tenue d'y procéder puisque ces lieux lui étaient livrés à l'état brut de décoffrage ; que leur coût doit être inclus dans le préjudice direct résultant de l'éviction survenue ;

Considérant enfin que les agissements de feu Me S. ont causé à dame P., es-qualités, un trouble grave, puisqu'ils ont abouti après de longues et pénibles procédures à l'éviction de l'appelante principale des locaux qu'elle était en droit de considérer comme faisant désormais partie du patrimoine de la société G. ; qu'il échet, en réparation de ce trouble, de condamner l'hoirie S. à payer de ce chef à dame P. la somme de vingt mille francs, vu la gravité des fautes commises par le notaire et l'importance du préjudice qui en est résulté ;

Que le montant total des sommes dues par l'hoirie à dame P. s'élève donc à cinquante-huit mille quatre cents francs plus vingt mille cent quarante-six francs quatre-vingts centimes plus vingt mille francs, soit : quatre-vingt-dix-huit mille cinq cent quarante-six francs, quatre-vingts centimes, auxquels s'ajouteront les intérêts de droit depuis la date de l'assignation en première instance, sans qu'il y ait lieu, vu leur succombance, d'examiner l'appel incident des hoirs S. ;

Considérant qu'il n'est, par ailleurs, apporté aucun élément de preuve satisfaisant en ce qui concerne tous autres moyens ou arguments présentés par les parties ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS :

En la forme, reçoit dame P., es-qualités, en son appel principal et les dames M. et A. et P. S. en leur appel incident ;

Au fond, dit fondé l'appel principal, infondé l'appel incident ;

Infirmant le jugement déféré, condamne les hoirs S. à payer à dame P. la somme de quatre-vingt-dix-huit mille cinq cent quarante-six francs quatre-vingts centimes et les intérêts de droit ;

Composition🔗

MM. Cannat, prem. prés., François, prem. subst. proc. gén., MMe Marquilly, Sanita, av. déf., Magagli, av.

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